Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, du 7 mars 1996, 93NC00842, mentionné aux tables du recueil Lebon
VU l'ordonnance en date du 12 juillet 1993 enregistrée au greffe de la Cour le 30 août 1993, par laquelle le président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article R.80 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée pour M. Y... ;
VU la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 18 janvier et 18 mai 1993, présentés pour M. José-Christian Y..., demeurant ..., par Me X..., avocat aux Conseils ;
M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 novembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du 20 novembre 1990 par lesquelles le ministre de l'économie, des finances et du budget a suspendu les arrérages de sa pension militaire d'invalidité et au maientien de cette pension ;
2°) d'annuler lesdites décisions du 20 novembre 1990 ;
VU le jugement attaqué ;
VU le mémoire en défense enregistré le 30 novembre 1993 au greffe de la Cour, présenté au nom de l'Etat par le ministre du budget ; il conclut au rejet de la requête ;
VU le mémoire enregistré le 13 octobre 1994 présenté pour M. Y... ; il conclut aux mêmes fins que la requête ;
VU le mémoire enregistré le 8 novembre 1994 présenté par le ministre du budget ; il conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire ;
VU l'ordonnance portant clôture d'instruction au 21 avril 1995 ;
VU le code des pensions militaires d'invalidité ;
VU la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée par la loi n° 86-76 du 17 janvier 1986 ;
VU le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 février 1996 :
- le rapport de M. SAGE, Président,
- et les conclusions de M. PIETRI, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les allégations de M. Y... selon lesquelles le jugement attaqué serait entaché d'irrégularités par méconnaissance des droits de la défense, absence de réponse à tous les moyens invoqués et insuffisance de motivation ne sont assorties d'aucune précision permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ;
Au fond et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L.112 du code des pensions militaires d'invalidité : "Les pensions définitives ou temporaires, majorations et allocations concédées conformément aux dispositions du présent code demeurent soumises à toutes les règles relatives au cumul édictées pour les pensions militaires par les lois et règlement en vigueur ..." ; qu'aux termes de l'article R.102 du même code : "Les militaires, marins ou agents, victimes d'accidents de nature à ouvrir simultanément des droits tant à une pension militaire qu'à une rente ou indemnité non cumulable avec la pension, doivent en faire la déclaration dans leur demande de pension et indiquer en même temps la procédure qu'ils ont employée ou ont l'intention de poursuivre. A défaut de cette déclaration, le remboursement des sommes indûment touchées par suite du cumul est poursuivi par le Trésor et le paiement est effectué par imputation sur les arrérages à échoir. L'ayant droit des militaires, marins ou agents visés ci-dessus est également tenu de faire cette déclaration. Il appartient au ministère compétent de suivre, si les intéressés ne le font pas, les instances en vue de la réparation du dommage causé. Dans le cas prévu à l'alinéa premier du présent article, la pension militaire est liquidée, mais le paiement en est suspendu dans la limite des sommes que l'intéressé a reçues au titre de rentes non cumulables" ;
Considérant que les dispositions de l'article R.102 précité n'ont en elles-mêmes ni pour objet ni pour effet d'interdire le cumul d'une pension militaire d'invalidité avec le versemement au bénéficiaire de la pension d'une indemnité due par un tiers responsable d'un accident ; que l'administration ne s'est fondée, pour suspendre la pension de M. Y..., sur aucune autre loi ou règlement en vigueur ; qu'ainsi, M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 20 novembre 1990 par lesquelles le ministre chargé du budget a suspendu le paiement de sa pension militaire d'invalidité au motif qu'il avait perçu une indemnité de l'assureur du tiers responsable d'un accident de la circulation ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 17 novembre 1992 est annulé.
Article 2 : Les décisions du ministre de l'économie, des finances et du budget en date du 20 novembre 1990 sont annulées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au ministre de l'économie et des finances (service des pensions).