Conseil d'Etat, 9 / 8 SSR, du 3 mai 1995, 142307, mentionné aux tables du recueil Lebon
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 octobre 1992 et 6 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Louis X..., demeurant, ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 juin 1992 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejteté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 janvier 1990 par laquelle le secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants et des victimes de guerre lui a refusé l'attribution du titre de déporté résistant ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants et des victimes de guerre ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Verclytte, Auditeur,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 272 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, modifié par la loi n° 86-76 du 17 janvier 1986 : "Le titre de déporté résistant est attribué à toute personne qui, pour acte qualifié de résistance à l'ennemi, a été : 4° Soit emmenée par l'ennemi dans un convoi de déportés, vers une prison ou un camp de concentration visés aux 1°, 2° et 3° du présent article, puis, au cours de ce trajet, est décédée ou s'est évadée." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des témoignages et attestations, antérieurs à l'adoption de la loi du 17 janvier 1986, produits par M. X..., ainsi que des mentions figurant sur son état signalétique et des services, que l'intéressé, à l'époque médecin-lieutenant, a été arrêté par la "Gestapo" à Lyon le 24 août 1943 au domicile d'un résistant, organisateur d'une filière d'évasion qui mourut, par la suite en déportation ; qu'il fut incarcéré au Fort-Montluc du 24 août 1943 au 5 octobre 1943, date à laquelle il fut, en tant que prisonnier, et sous la surveillance de deux soldats allemands et de deux membres de la "Gestapo", emmené vers l'Allemagne par voie ferroviaire ; que, le 6 octobre 1943 au matin, M. X... s'est évadé, en sautant du train à hauteur de Méximieux-Pérouges ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments, l'intéressé doit être regardé comme remplissant les conditions posées par l'article L. 372 4°) précité ; que, par suite M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 janvier 1990 du secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants et des victimes de guerre refusant de transformer son titre d'interné résistant en celui de déporté résistant ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 16 juin 1992 et la décision du 20 janvier 1990 du secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants et des victimes de guerre, sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre des anciens combattants et victimes de guerre.