Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 16/04/2013, 11PA03961, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision16 avril 2013
Num11PA03961
JuridictionParis
Formation4ème chambre
PresidentM. PERRIER
RapporteurM. Jean-Claude PRIVESSE
CommissaireM. ROUSSET
AvocatsMAZETIER

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les 29 août 2011 et 13 juillet 2012, présentés pour M. A...B..., demeurant..., en Algérie, par Me D...; M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0920822/6-1 du 15 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 novembre 2009 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a rejeté sa demande tendant à obtenir la reconnaissance de la qualité de combattant ;

2°) d'annuler la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de lui délivrer la carte du combattant dans le délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010 publiée au journal officiel de la République française le 24 juillet 2010 ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG) ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2013 :

- le rapport de M. Privesse, rapporteur,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., a présenté le 23 septembre 2006 une demande tendant à la délivrance de la carte du combattant au titre de ses activités militaires, laquelle a été rejetée par une décision du 6 novembre 2009 du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris ; que M. rqt B...fait appel du jugement du 15 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cette décision préfectorale ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le requérant fait valoir que les premiers juges ont estimé que la décision litigieuse du 6 novembre 2009 ne se fondait pas sur les dispositions de l'article L. 253 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG), alors que ces dispositions étaient expressément visées dans la décision en question ; qu'il résulte cependant de l'examen du jugement attaqué que celui-ci a seulement écarté les dispositions du troisième alinéa de ce texte, relatives aux membres des forces supplétives françaises, eu égard à la qualité d'appelé du contingent de M.B..., ces mêmes dispositions ayant en outre été partiellement invalidées par la décision n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010 du Conseil constitutionnel ; qu'ainsi le jugement attaqué a été rendu régulièrement ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement attaqué :

3. Considérant en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...n'a invoqué devant les premiers juges que des moyens se rapportant à la légalité interne de la décision contestée du 6 novembre 2009 ; que dès lors, il n'est pas recevable à faire valoir pour la première fois en appel des moyens se rapportant à la légalité externe de cette décision ; que par suite, les moyens tirés notamment de l'insuffisance de motivation de celle-ci, de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et de l'absence d'avis du conseil départemental pour les anciens combattants et victimes de guerre, qui ne sont pas d'ordre public, ne peuvent qu'être rejetés ;

4. Considérant en deuxième lieu et au fond, qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 " ; que l'article L. 253 bis du même code dispose que : " Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 : / Les militaires des armées françaises,/ Les membres des forces supplétives françaises possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domiciliés en France à la même date,/ Les personnes civiles possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. / (...) Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa " ; qu'aux termes de l'article R. 223 du même code : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229 " ; qu'aux termes de l'article R. 224 de ce code : " Sont considérés comme combattants : (...) C - Pour les opérations effectuées après le 2 septembre 1939 : I. - Militaires Les militaires des armées de terre, de mer et de l'air : 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, aux unités énumérées aux listes établies par le ministre de la défense nationale et, s'il y a lieu, par le ministre chargé de la France d'outre-mer ; ( ...) D'autre part, sont accordées des bonifications afférentes soit à des opérations de combat limitativement désignées ou effectuées dans des conditions exceptionnellement dangereuses, soit à des situations personnelles, résultant du contrat d'engagement ou d'une action d'éclat homologuée par citation collective au titre d'une unité ou d'une fraction d'unité constituée. Ces bonifications ne devront pas excéder le coefficient six pour celles afférentes aux combats, ou la durée de dix jours pour celles afférentes aux situations personnelles. Leurs modalités d'application sont fixées par arrêtés des ministres intéressés (...) ; que le D du même article dispose que : " Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus (...) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954 (...) Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises : 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ; 2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; 3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat (...) ; "

5. Considérant qu'en vertu des dispositions précédentes des articles L. 253, L. 253 bis, R. 223 et R. 224 D du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, ont notamment vocation à obtenir la qualité de combattant les militaires des armées françaises qui, entre les 31 octobre 1954 et 2 juillet 1962, ont accompli en Algérie des services d'une durée d'au moins quatre mois, soit 120 jours, qui ont servi en unité combattante pendant 90 jours, qui ont pris part à neuf actions de feu ou de combat collectives, ou à cinq actions de feu ou de combat individuelles, ou qui, sans condition de durée, ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en unité combattante ou qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre ;

6. Considérant qu'il ressort des vérifications des états de services de M. B..., effectuées les 8 octobre 2008 et 24 octobre 2012, confirmés le 24 octobre 2012, qu'il a été affecté en qualité d'appelé du contingent, depuis son incorporation le 20 juin 1955 au 13e régiment de tirailleurs algériens (RTA), d'abord au centre de rassemblement de Guelma jusqu'au 29 juillet 1955, puis a pris la mer pour débarquer à Marseille le 31 juillet 1955, d'où il a gagné son affectation en République fédérale d'Allemagne pour la durée de son service militaire ; qu'il a été de retour en Algérie le 16 septembre 1957, et a alors été placé en permission libérable jusqu'au 23 novembre 1957 ; qu'enfin, il a été radié de son corps d'armée le 24 novembre 1957 ; que seuls les services effectifs accomplis en Algérie doivent être pris en compte, le temps de son affectation en République Fédérale d'Allemagne durant la période concernée et des voyages en mer, ne pouvant lui ouvrir droit à la qualité de combattant ;

7. Considérant, d'une part, qu'il est constant que le centre de rassemblement de Guelma, où M. B...a été affecté durant 40 jours, ne figure pas sur la liste des unités combattantes établie par l'autorité militaire ; que par ailleurs, s'il a été à nouveau présent en Algérie du 16 septembre au 23 novembre 1957, il résulte des différents documents produits au dossier que M. B...était alors placé en " permission libérable ", en attente de sa radiation, et non dans une unité combattante ou une formation assimilée ; qu'il s'ensuit que, contrairement à ce qu'il soutient, M. B...n'a appartenu à aucune unité figurant sur la liste des unités qui ont été reconnues unités combattantes, au sens des dispositions précitées du 1° de l'article R. 224-C-I dudit code, et n'établit pas ni même n'allègue qu'il aurait pris part en Algérie à une action de combat, qu'il y aurait été blessé durant son service ou qu'il y aurait été détenu par l'ennemi ; qu'il n'a pas davantage été crédité de bonifications au titre de services effectués en Algérie ; qu'ainsi, il ne remplit ni la condition de 90 jours de service en unité combattante, ni celle de 4 mois de service en Algérie, ne totalisant que 109 jours de présence sur place, pendant la période de référence prévue par les dispositions précitées du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

8. Considérant, d'autre part, que M. B...se prévaut également, au vu de son livret militaire produit en copie maintenant difficilement lisible, de son affectation en Algérie durant d'autres périodes que celles figurant sur les états de services précédemment mentionnés et versés par l'autorité militaire ; que notamment, s'il a été appelé à l'activité le 15 juin 1955, il n'a été effectivement incorporé que le 20 juin suivant, la différence de cinq jours n'étant pas de nature en tout état de cause à modifier sa situation au regard des dispositions ci-dessus rappelées ; que, devant alors effectuer 18 mois de service militaire, si M. B...allègue avoir été relevé de ses obligations légales d'activité le 15 décembre 1956, en application de l'article 2 de la loi n° 50- 1478 du 30 novembre 1950, après avoir été classé comme soutien de famille le 6 avril 1956, et qu'il aurait repris son activité à compter du 15 mai 1957, il ressort de l'analyse des textes auxquels il est fait référence, et particulièrement du décret d'application n° 56-373 du 12 avril 1956 de la loi du 31 mars 1928 relative au recrutement de l'armée, qu'il entrait dans le champ défini par ce décret, des militaires " dont les obligations d'activités se terminent entre les 31 juillet 1956 et 30 janvier 1957 ", et que dès lors il devait être maintenu sous les drapeaux à l'expiration de son service actif, le 15 décembre 1956, selon certaines conditions, ce qui fut le cas jusqu'au 16 septembre 1957 au moins ; qu'au demeurant, sa qualité de militaire sous les drapeaux classé en tant que soutien indispensable de famille ne lui conférait que le bénéfice d'allocations supplémentaires ; qu'enfin, il n'est pas établi que sa mutation à la 4ème compagnie à compter du 14 mai 1957 par décision du chef de corps du 20 mai courant, se soit traduite par un retour prématuré en Algérie, lequel, d'après toutes les pièces présentes au dossier, ne s'est effectué qu'en septembre 1957, en s'achevant par la traversée en mer du 14 au 15 septembre, à partir de Marseille ; que de son côté, M. B...ne produit aucune pièce et n'avance aucun argumentaire sérieux pour établir sa présence en Algérie durant d'autres périodes que celles figurant sur ses états de services ; que par suite, il ne remplit aucune des conditions prévues à l'article R. 224 précité pour l'attribution de la carte du combattant au titre des opérations effectuées en Afrique du Nord ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 6 novembre 2009 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, lui a refusé la qualité de combattant ;




Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions d'annulation présentées par M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet de lui attribuer le bénéfice de la carte du combattant, dans un délai de trois mois, doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en tout état de cause, obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une quelconque somme au bénéfice du conseil de M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
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