CAA de DOUAI, 3ème chambre, 08/04/2021, 19DA02328, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision08 avril 2021
Num19DA02328
JuridictionDouai
Formation3ème chambre
PresidentMme Borot
RapporteurM. Marc Lavail Dellaporta
CommissaireM. Cassara
AvocatsSTIENNE-DUWEZ

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat au versement de la somme de 70 000 euros au titre des salaires impayés pour la période du 31 mai 1996 au 18 août 1999 et du manque à gagner sur le montant de sa retraite, assortie des intérêts légaux à compter du 13 février 2015, date de réception de sa demande indemnitaire préalable, avec capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle à compter du 13 février 2016 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1609993 du 20 juin 2019 le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes.


Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 octobre 2019, les 19 janvier et 18 février 2021, Mme A... B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 70 000 euros au titre des salaires impayés pour la période du 31 mai 1996 au 18 août 1999 et du manque à gagner sur le montant de sa retraite, assortie des intérêts légaux à compter du 13 février 2015, date de réception de sa demande indemnitaire préalable, et capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle à compter du 13 février 2016 ;

3°) de mettre à la charge l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., agent administratif de 2ème classe employée au centre territorial d'administration et de comptabilité de Lille, a été mise en disponibilité d'office pour raisons de santé à compter du 25 avril 1993, puis radiée des cadres et admise à la retraite pour invalidité le 25 avril 1996. Par un jugement du 19 août 1999, le tribunal administratif de Lille a annulé, d'une part, les décisions des 17 février 1994, 15 juin 1994 et 16 mars 1995 par lesquelles le commandant de la circonscription militaire de défense de Lille avait renouvelé la mise en disponibilité d'office pour raisons de santé de Mme B... du 25 décembre 1993 au 24 juin 1995, d'autre part, la décision du 31 mai 1996 admettant Mme B... à la retraite pour invalidité. Par un autre jugement du 8 décembre 2005, le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à verser à Mme B... une somme de 16 403,51 euros en réparation du préjudice financier subi à raison de l'illégalité de ces mêmes décisions ainsi que de celle entachant la décision du 6 octobre 1993 la plaçant en disponibilité d'office à compter du 25 avril 1993. La cour administrative de Douai, par un arrêt du 13 juin 2007, a réformé le jugement du 8 décembre 2005 précité, et a accordé à Mme B... une indemnité complémentaire 10 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'illégalité de la décision du 31 mai 1996 l'admettant à la retraite d'office pour invalidité à compter du 25 avril 1996. Par jugement du 20 juin 2019 le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de Mme B... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 70 000 euros correspondant aux salaires qui ne lui ont pas été versés entre le 31 mai 1996 et le 18 août 1999 et du manque à gagner sur le montant de sa pension de retraite. Mme B... relève appel de ce jugement.
Sur le préjudice résultant de l'absence de traitements :

2. Un agent public irrégulièrement évincé a droit, non pas au versement du traitement dont il a été privé, mais à la réparation du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre.

3. Comme il a été dit au point 2, Mme B... n'a pas droit au versement du traitement dont elle a été privée, mais à la réparation du préjudice qu'elle a effectivement subi. Or, comme cela a été indiqué au point 1, par un jugement du 8 décembre 2005, le tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à verser à Mme B... une somme de 16 403,51 euros en réparation du préjudice financier subi à raison de l'illégalité des décisions de mise en disponibilité puis de mise à la retraite pour invalidité. La cour administrative de Douai, par un arrêt du 13 juin 2007, a réformé ce jugement et a accordé à Mme B... une indemnité complémentaire de 10 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'illégalité de la décision du 31 mai 1996 l'admettant à la retraite d'office pour invalidité à compter du 25 avril 1996. Mme B... a donc déjà obtenu réparation du préjudice résultant de de la perte de traitement pour la période du 31 mai 1996 et le 18 août 1999, par cet arrêt précité du 13 juin 2007 qui est revêtu de l'autorité relative de la chose jugée et dont se prévaut la ministre des armées.

4. Ainsi, Mme B... ne saurait se prévaloir du préjudice invoqué. Par suite, les conclusions précitées doivent être rejetées.

Sur la liquidation de la pension de retraite :
5. Mme B... fait valoir qu'à la date à laquelle sa retraite a été liquidée l'administration n'avait pas reconstitué sa carrière, de sorte que sa pension de retraite a été liquidée sur le fondement de l'échelon 8 du grade d'agent administratif deuxième classe, échelle 2, et non sur l'échelon 9. Elle affirme perdre ainsi quinze points d'indice. Par une décision du 22 août 2002, soit postérieure à la date à laquelle elle a été admise à la retraite, le commandant de la région Terre Nord-Est des forces françaises et de l'élément civil a classé Mme B... au 9ème échelon de son grade. Mais la ministre des armées souligne que lors de son départ à la retraite, Mme B... a bénéficié, compte tenu de la durée de dix-huit ans, six mois et vingt-deux jours de ses services effectifs, des dispositions de l'article L17 du code des pensions civiles et militaires de retraite prévoyant un montant minimum garanti de retraite plus favorable, qui lui a permis d'obtenir un montant de retraite plus favorable que ce à quoi le classement au 9ème échelon à sa date de départ en retraite lui aurait permis de prétendre. L'appelante qui n'a pas contesté ce point, ne justifie d'aucun préjudice financier pour la liquidation de sa retraite et ses conclusions à fin d'indemnisation présentées sur ce fondement doivent être rejetées.
Sur la faute pour défaut d'exécution de l'arrêt de la cour du 1er avril 2010
6. Mme B... soutient que malgré l'arrêt du 1er avril 2010 de la cour administrative d'appel de Douai qui a enjoint au ministre de la défense de prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme aux reversements prélevés sur sa pension de retraite et de lui rembourser le montant des reversements déjà effectués, l'administration a commis une faute en ne lui restituant pas les sommes prélevées sur sa pension civile de retraite au titre du trop-perçu. Toutefois, par arrêt n° 09DA00929 du 1er avril 2010 la cour a jugé que le ministre de la défense et des anciens combattants a justifié avoir exécuté complètement l'arrêt du 1er avril 2010. L'Etat n'a donc commis aucune faute sur ce point. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la ministre de la défense, ces conclusions doivent être rejetées.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Doivent par voie de conséquence être également rejetées ses conclusions présentées sur le fondement de de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me C... pour Mme A... B... et à la ministre des armées.


4
N° 19DA02328