CAA de DOUAI, 2ème chambre, 16/02/2021, 19DA02439, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision16 février 2021
Num19DA02439
JuridictionDouai
Formation2ème chambre
PresidentMme Seulin
RapporteurMme Muriel Milard
CommissaireM. Baillard
AvocatsINGWER

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille l'annulation de la décision du 9 octobre 2017 du ministre de la défense en tant qu'après avoir porté de 85 % à 100 % le taux d'invalidité de son infirmité initiale en raison de son aggravation, il a rejeté sa demande de concession de pension militaire d'invalidité pour les infirmités nouvelles dont il estime être atteint.

Par un jugement n° 18/06 du 1er avril 2019, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 30 avril 2019, M. B... a demandé à la cour régionale des pensions militaires et d'invalidité de Douai d'annuler ce jugement.

Il soutient que la colostomie qu'il a subie le 20 avril 2016 ainsi que l'éventration qui en résulte présentent le caractère d'une nouvelle infirmité dont le taux d'invalidité doit être fixé à 100 %.

Procédure devant la cour :

Par un acte de transmission des dossiers, enregistré le 5 novembre 2019, et en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Douai est saisie de la requête de M. B..., enregistrée sous le n° 19DA02439.

Par un mémoire, enregistré le 13 mars 2020, M. B..., représenté par Me D... A..., conclut aux mêmes fins que sa requête et demande, en outre, à ce que soit désigné un autre expert, à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de déterminer un nouveau taux d'invalidité et à ce qu'il lui soit versée une pension sur la base de ce nouveau taux.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :

1. M. C... B..., né le 5 mars 1934, militaire de carrière incorporé le 2 septembre 1953 et rayé des cadres le 1er novembre 1979, a été blessé par balle dans la région fessière le 11 décembre 1957. Il s'est vu accorder le 13 septembre 2010 une pension militaire d'invalidité au taux de 75 % pour les séquelles de sa blessure. Ce taux a été porté à 85 % par un arrêté du 8 février 2016, puis à 100 % par un nouvel arrêté du 9 octobre 2017, après une demande de révision de pension présentée le 12 février 2018. M. B... relève appel du jugement du 1er avril 2019 par lequel le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille a rejeté sa demande de concession de pension pour des infirmités nouvelles.
2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, devenu l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 3 de ce code devenu l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. (...) La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites, soit pendant le service accompli au cours de la guerre 1939-1945, soit au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, soit pendant le service accompli par les militaires pendant la durée légale, compte tenu des délais prévus aux précédents alinéas. (...) ".
3. Il résulte par ailleurs de ces dispositions que, lorsqu'est demandée la révision d'une pension concédée pour prendre en compte une affection nouvelle que l'on entend rattacher à une infirmité déjà pensionnée, cette demande ne peut être accueillie si n'est pas rapportée la preuve d'une relation non seulement certaine et directe, mais déterminante, entre l'infirmité antécédente et l'origine de l'infirmité nouvelle.
4. M. B... s'est vu concéder une pension militaire d'invalidité pour l'indemniser d'une infirmité résultant notamment de " séquelles de blessure transfixiante fessière ". Celle-ci a été révisée le 9 octobre 2017 du fait de son aggravation par la prise en compte d'une colostomie iliaque gauche terminale et d'une éventration secondaire péri-stomiale. L'intéressé soutient que la colostomie iliaque gauche terminale constitue une nouvelle infirmité qui doit être prise en compte au taux de 100 % et que l'expert ne s'est pas prononcé sur l'éventration qui en résulte, qui peut également être considérée comme une nouvelle infirmité.
5. Il résulte de l'instruction et, en particulier, du rapport d'expertise judiciaire du 10 novembre 2018 du docteur Lamblin, spécialiste en chirurgie générale et digestive, que l'expert, après avoir pris en compte l'ensemble des éléments médicaux relatifs à la pathologie de M. B..., dont ceux produits par l'intéressé lui-même, a estimé que la colostomie iliaque gauche terminale pratiquée en 2016 était la conséquence directe et certaine de la blessure transfixiante de la région fessière survenue des suites de l'accident du 11 décembre 1957 et qu'elle avait permis d'améliorer la symptomatologie périnéale de M. B... par rapport à celle existant antérieurement, très invalidante. L'expert a souligné que cette colostomie n'était pas en rapport avec une aggravation de la pathologie initiale mais avait nécessité en 2016 une réévaluation de l'infirmité dont l'intéressé était atteint en application du guide barème des invalidités. Il a également constaté que, si cette colostomie était en partie responsable de l'apparition chez M. B... d'une éventration péri-stomiale du fait d'une fragilité pariétale, cette éventration résultait aussi de la prise de poids de dix kilogrammes de l'intéressé en raison de son meilleur état général depuis l'amélioration de sa symptomatologie périnéale. L'expert a ainsi estimé que l'infirmité prise dans son ensemble dont souffre M. B..., avait été correctement requalifiée en portant le taux d'invalidité de cette infirmité à 100 % en application du guide barème des invalidités.

6. Il résulte de ce qui vient d'être dit que l'expert s'est bien prononcé sur l'éventration dont souffre M. B... et qu'en l'absence d'éléments médicaux de nature à infirmer ses conclusions, tant la mise en place de la colostomie en fosse iliaque gauche décidée en 2016, qui a permis d'améliorer la symptomatologie périnéale de M. B..., que l'éventration qui en est en partie résultée, ne sauraient être regardées comme constituant de nouvelles infirmités s'ajoutant à l'infirmité initiale existante. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il souffrirait de nouvelles infirmités de nature à lui ouvrir droit à une concession de pension.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille a rejeté sa demande de concession de pension. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la ministre des armées.
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N°19DA02439