CAA de MARSEILLE, 9ème chambre, 29/03/2022, 19MA03594, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision29 mars 2022
Num19MA03594
JuridictionMarseille
Formation9ème chambre
PresidentM. PORTAIL
RapporteurM. Raphaël MOURET
CommissaireM. ROUX
AvocatsCABINET SOLLIER & CARRETERO

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 15 juin 2017 par laquelle La Poste a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'événement survenu le 23 janvier 2017.

Par un jugement n° 1703865 du 5 juillet 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 juillet 2019, Mme A..., représentée par Me Sollier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler la décision du 15 juin 2017 ;

3°) d'enjoindre à La Poste de prendre en charge les arrêts de travail consécutifs à l'accident dont elle estime avoir été victime le 23 janvier 2017.
Elle soutient que :
- l'intégralité du rapport d'expertise du médecin agréé ne lui a pas été communiqué ;
- l'accident survenu sur son lieu de travail est directement imputable au service.
Par une ordonnance du 29 juillet 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 septembre 2020.


Le mémoire enregistré le 20 juillet 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction, présenté pour La Poste, représentée par la SELARL d'avocats Arcanthe, n'a pas été communiqué.


Vu les autres pièces du dossier.


Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 2011-619 du 31 mai 2011 ;
- le code de justice administrative.


Par une décision du 24 août 2021, la présidente de la cour a désigné M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.


Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mouret,
- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :


1. Mme A..., fonctionnaire de La Poste, a déclaré avoir été victime, le 23 janvier 2017, à la suite d'une altercation avec sa supérieure hiérarchique, d'un " malaise " caractérisé par des " tremblements " ainsi que des " vertiges ". Placée en arrêt de travail à la suite de cet événement, puis en disponibilité d'office au cours de l'année suivante, elle a été mise à la retraite pour invalidité à compter du 24 mars 2019. Par une décision du 15 juin 2017, La Poste a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'événement survenu le 23 janvier 2017. Mme A... relève appel du jugement du 5 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.


2. En premier lieu, l'article 32 du décret du 31 mai 2011 relatif à la santé et à la sécurité au travail à La Poste dispose que : " Le fonctionnement et les attributions des commissions de réforme de La Poste sont identiques à ceux des commissions de réforme prévues à l'article 12 du décret du 14 mars 1986 (...) ". Aux termes de l'article 13 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La commission de réforme est consultée notamment sur : / 1. L'application des dispositions du deuxième alinéa des 2° et 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée (...) ". Selon l'article 19 du même décret : " (...) / Le secrétariat de la commission de réforme informe le fonctionnaire : / - de la date à laquelle la commission de réforme examinera son dossier ; / - de ses droits concernant la communication de son dossier et la possibilité de se faire entendre par la commission de réforme, de même que de faire entendre le médecin et la personne de son choix (...) ".


3. Le dossier mentionné par les dispositions citées ci-dessus de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 doit contenir le rapport du médecin agréé qui a examiné le fonctionnaire. Si ces dispositions n'exigent pas que l'administration procède de sa propre initiative à la communication des pièces médicales du dossier d'un fonctionnaire avant la réunion de la commission de réforme, elles impliquent que ce dernier ait été informé de la possibilité d'obtenir la consultation de ces pièces.


4. Il ressort des pièces produites en première instance que Mme A... a été informée, par une lettre du 1er juin 2017 reçue le 3 juin suivant, de la possibilité d'obtenir la consultation des pièces médicales de son dossier préalablement à la séance de la commission de réforme de La Poste prévue le 15 juin 2017. Si la requérante soutient que le rapport d'expertise établi par un médecin spécialiste agréé ne lui a pas été communiqué, elle n'établit ni même n'allègue avoir présenté une demande auprès de son employeur en vue de consulter son dossier. Il suit de là que la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière.
5. En second lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom : " Les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui comportent des dispositions spécifiques dans les conditions prévues aux alinéas ci-après, ainsi qu'à l'article 29-1 (...) " L'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". Le droit, prévu par ces dispositions, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions.
6. Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions citées ci-dessus de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, un événement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.


7. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de son audition par les services de la gendarmerie nationale le 4 avril 2018, produit pour la première fois en appel, que Mme A... entretenait, antérieurement à l'événement litigieux du 23 janvier 2017, des relations conflictuelles avec sa supérieure hiérarchique. Le rapport d'expertise produit en première instance, établi à la demande de La Poste par un médecin spécialiste agréé, indique en particulier que l'intéressée a présenté un état dépressif ayant justifié un arrêt de travail au cours de la période de juin à septembre 2016 et qu'elle conservait des " manifestations en lien avec cet état " lorsqu'elle a repris ses fonctions à la suite de cet arrêt. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas de l'attestation peu circonstanciée établie le 16 juillet 2017 par l'une de ses collègues, que l'incident du 23 janvier 2017 relaté par Mme A..., dont les circonstances exactes ne sont au demeurant pas précisément établies, serait à l'origine de lésions ou d'affections physiques ou psychologiques apparues brutalement, alors qu'elle souffrait d'une pathologie psychologique avant l'altercation en cause. Dans ces conditions, compte tenu de l'objet de la demande de l'intéressée, tendant exclusivement à la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident, et en l'absence d'éléments probants de nature à établir l'existence d'un fait accidentel survenu le 23 janvier 2017, La Poste n'a pas commis d'erreur d'appréciation en rejetant cette demande.


8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à La Poste.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Carassic, première conseillère,
- M. Mouret, premier conseiller.


Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.


2
N° 19MA03594