CAA de PARIS, 6ème chambre, 24/05/2022, 21PA00792, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... D... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à titre principal à l'annulation de la décision du 17 octobre 2018 par laquelle la E... a plaçé cette dernière à la retraite d'office pour invalidité.
Par un jugement n° 1822908/5-2 du 17 décembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 février 2021, et un mémoire, enregistré le
26 octobre 2021, Mme D..., représentée par Me Annoot, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 décembre 2020 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) à titre principal, d'annuler la décision mentionnée ci-dessus du 17 octobre 2018 ;
3°) à titre subsidiaire, de diligenter avant-dire droit une expertise médicale ;
4°) de mettre à la charge de la E... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision est entachée de vice de procédure du fait de l'insuffisance de motivation de l'avis de la commission de réforme ;
- elle est entachée d'insuffisance de motivation ;
- elle est entachée d'erreur de droit car la E... s'est crue liée par l'avis de la commission de réforme ;
- elle repose sur des faits matériellement inexacts et elle est entachée d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2021, la E..., représentée par Mes Guillaume et Perche, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... sont infondés.
Par une ordonnance du 4 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au
29 octobre 2021 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... ;
- les conclusions de Mme Mach, rapporteure publique,
- les observations de Me Annoot pour Mme D... ;
- et les observations de Me Perche pour la E....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., fonctionnaire de l'Etat affectée au sein de la E..., a bénéficié de plusieurs congés de maladie ordinaire, congés de longue maladie et congés de longue durée pour un trouble anxio-dépressif à compter de l'année 1997. La E... a, en 2014, saisi le comité médical d'une demande d'avis portant sur la situation de Mme D... et sur son aptitude à reprendre ses fonctions. Par une décision du 20 novembre 2014, la E... a constaté son inaptitude totale et définitive à l'exercice de toutes fonctions. Puis, à la suite d'un avis du 21 mai 2015 de la commission de réforme, la E... a, par une décision du 9 juillet 2015, placé Mme D... à la retraite d'office, compte tenu de son inaptitude définitive à l'exercice de toutes fonctions. Cette décision a été annulée, pour vice de procédure, par un arrêt du 4 juillet 2018 de la Cour administrative d'appel de Paris. En exécution de cet arrêt, la E... a saisi à nouveau la commission de réforme, réunie le 6 septembre 2018, et a décidé de placer Mme D... à la retraite d'office, pour le même motif, par une décision du 17 octobre 2018. Mme D... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette dernière décision. Elle relève appel du jugement du 17 décembre 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office ; dans ce dernier cas, la radiation des cadres est prononcée sans délai si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement (...) ".
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat ". En outre, l'article 19 du décret du 14 mars 1986 prévoit que " L'avis formulé en application du premier alinéa de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite doit être accompagné de ses motifs ". En l'espèce, l'avis du
6 septembre 2018 de la commission de réforme mentionne l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi que la pathologie de l'intéressée et répond positivement à la question portant sur l'incapacité permanente de l'agent à continuer ses fonctions. Enfin, l'avis indique que " la commission de réforme confirme l'avis prononcé par la même instance le
21 mai 2015 pour la mise à la retraite d'office pour invalidité ", compte tenu de l'inaptitude totale et définitive à toutes fonctions de Mme D... et retient un taux d'incapacité permanente partielle de 20%. Par suite, l'avis comporte, de manière suffisante, les motifs qui le fondent et le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
4. En deuxième lieu, les moyens tirés de l'insuffisance de la motivation de la décision litigieuse et de l'erreur de droit doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges respectivement aux points 9 et 12 du jugement attaqué.
5. En dernier lieu, Mme D... soutient que, contrairement à ce que retient la décision attaquée, elle ne souffre d'aucun trouble psychiatrique qui la rendrait inapte à l'exercice de toute fonction. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et en particulier des rapports d'expertise réalisés sur demande de la E..., concordants sur ce point, à l'exception de celui daté du 26 octobre 2012, que la requérante souffre d'une pathologie psychiatrique. Si la requérante fait valoir que certains des rapports comportent des mentions contradictoires, les conclusions des rapports, basées sur les constatations médicales réalisées par les experts, sont toutefois très claires sur l'existence de ces troubles. En outre, les premiers experts saisis ont préconisé, en relevant une inaptitude temporaire, la mise en disponibilité de la requérante et son renouvellement. A compter du rapport d'expertise d'une psychiatre du 1er septembre 2014, confirmé par celui du 31 décembre 2016, il est retenu que la pathologie de Mme D... entraîne une inaptitude totale et définitive à l'exercice de toutes fonctions. Or, les documents médicaux versés par Mme D... en première instance, émanant de son neurologue-psychiatre, ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation portée sur l'inaptitude de l'intéressée, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges. Et le rapport du docteur B..., psychiatre, produit en appel, en date du 16 octobre 2021, très postérieur donc à la décision litigieuse, n'est en tout état de cause pas plus de nature à infirmer les expertises précédentes et l'avis de la commission de réforme quant à l'inaptitude totale et définitive de l'intéressée à toutes fonctions. Dans ces conditions, la E... n'a commis ni erreur de fait, ni erreur d'appréciation.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale par un arrêt avant dire-droit, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
7. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par la E....
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et à la E....
Délibéré après l'audience du 10 mai 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mai 2022.
Le rapporteur,
D. PAGES
Le président,
T. CELERIER
La greffière,
K. PETIT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA00792