CAA de NANTES, 6ème chambre, 11/10/2022, 21NT00889, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 27 juin 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité, subsidiairement d'ordonner une expertise médicale.
Par un jugement n° 1905736 du 1er février 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 mars 2021 M. C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 1er février 2021 ;
2°) à titre principal, de réformer la décision du 27 juin 2017 en fixant son taux d'invalidité à 20% et en lui attribuant une pension militaire d'invalidité ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise pour indiquer si son infirmité est imputable au service et, le cas échéant, en fixer le taux ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Moumni d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision du 27 juin 2017 est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de fait, de droit et d'appréciation dès lors que les lombalgies dont il souffre sont imputables au service ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de la défense ;
- la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique,
- et les observations de Me Mougin, représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., premier maître fusilier-marin, victime d'un accident durant son service, a présenté, le 5 mai 2014, une demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " douleurs lombo-sacrées avec irradiation sciatique et déficit du releveur du pied gauche en relation avec des discopathies lombaires étagées ". Par décision du 27 juin 2017, le ministre de la défense a rejeté cette demande. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 25 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction alors applicable : " (...) Toute décision comportant rejet de pension doit être également motivée et faire ressortir qu'il n'est pas établi que l'infirmité provient de l'une des causes indiquées à l'article L. 2, ou, lorsque l'intéressé a droit à la présomption, les faits, documents ou raisons d'ordre médical dont résulte la preuve contraire détruisant cette présomption. (...). ".
3. La décision contestée vise les dispositions des articles L. 4 et L. 5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicables à la date de la demande, ainsi que le constat provisoire des droits, elle mentionne l'infirmité de M. C..., son évaluation au taux global de 20% résultant pour partie d'accidents sans lien avec le service et pour partie de l'accident de service du 20 janvier 2014 dont les séquelles entrainent un degré d'invalidité inférieur à 10 %, lequel est le minimum requis pour la prise en considération de l'infirmité. Le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée doit être écarté.
4. Aux termes de l'article L. 3 du même code, dans sa rédaction applicable : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; (...). / La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites, soit pendant le service accompli au cours de la guerre 1939-1945, soit au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, soit pendant le service accompli par les militaires pendant la durée légale, compte tenu des délais prévus aux précédents alinéas. (...). ". Aux termes de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions que la présomption d'imputabilité au service s'applique exclusivement aux constatations faites, dans certains délais, pendant le service accompli par les militaires intéressés dans l'une des situations définies par l'article L. 3 et par l'article L. 4123-4 du code de la défense. Ainsi, les constatations visées à l'article L. 3 doivent s'entendre de constatations contemporaines des faits et émanant de l'autorité militaire qui était, à l'époque de la constatation, compétente pour y procéder.
6. Le taux d'invalidité de M. C... a été évalué à 20% par l'administration pour des douleurs lombo-sacrées et seuls 5% de cette invalidité ont été attribués à l'accident de service dont M. C... a été victime, le 20 janvier 2014 à l'occasion de la " récupération de colis par LPA ". Si M. C... soutient que la présomption d'imputabilité aurait dû lui permettre de bénéficier d'un taux de validité de 20% exclusivement imputable à l'accident du 20 janvier 2014 ainsi que le retient l'avis médical du 11 avril 2017, il résulte cependant de l'instruction, et notamment du livret médical de M. C..., que celui-ci a connu de très nombreux épisodes de lombalgie depuis 1997 ; ces épisodes ne faisant mention d'aucun fait précis pouvant être rattaché à la survenue des douleurs dorsales de l'intéressé, à l'occasion du service, antérieurement à l'accident de service du 20 janvier 2014. Le compte-rendu de l'IRM pratiqué le 3 novembre 2011 mentionne également " une relative étroitesse congénitale " du canal lombaire. Il n'est enfin pas contesté que les douleurs résultant d'un accident de tondeuse sont sans lien avec le service. Dans ces conditions, alors que les affirmations de M. C... selon lesquelles l'accident de service de janvier 2014 serait seul à l'origine de son infirmité sont contredites par les éléments mentionnés dans son livret médical, c'est à juste titre, et sans que la charge de la preuve de l'imputabilité au service n'ait été inversée, au regard des conditions posées par l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, que le ministre de la défense a retenu que l'infirmité " douleurs lombo-sacrées avec irradiation sciatique et déficit du releveur du pied gauche en relation avec des discopathies lombaires étagées " résultait, d'une part, d'accidents sans lien avec le service et, d'autre part, pour 5%, de l'accident de service constaté le 20 janvier 2014.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à ce que la cour lui attribue une pension militaire d'invalidité doivent, par voie de conséquence, également être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au conseil de M. C... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 23 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Giraud, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 octobre 2022.
Le rapporteur,
T. A...Le président,
O. GASPON
La greffière,
I. PETTON
La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT00889