CAA de LYON, 5ème chambre, 16/05/2024, 22LY01429, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 30 septembre 2020 par laquelle le directeur des Hospices civils de Lyon a refusé de lui verser les indemnités réclamées au titre de la période pendant laquelle il a été placé en disponibilité d'office, d'enjoindre à cette autorité de procéder en conséquence à la reconstitution de sa carrière et de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser la somme totale de 52 370,64 euros ou, à titre subsidiaire, de 41 942,60 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait des fautes commises dans la gestion de sa situation administrative.
Par un jugement n° 2008540 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Lyon a condamné les Hospices civils de Lyon à verser à M. D... la somme de 4 900 euros, en réparation des préjudices subis (article 1er), ainsi que la somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 3).
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires enregistrés le 12 mai 2022, le 9 janvier 2023 et le 5 juin 2023, M. D..., représenté par Me Blanc, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 mars 2022, en ce qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande ;
2°) de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser l'intégralité des sommes demandées ;
3°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon, une somme de 4 000 euros, en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- le jugement attaqué est irrégulier, en ce que le tribunal a conduit un raisonnement erroné ;
- le tribunal a omis de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2020, par laquelle le directeur adjoint en charge du pôle développement social des Hospices civils de Lyon a refusé de lui accorder tout traitement et toute indemnité au titre de la période pendant laquelle il a été placé en disponibilité ;
- pendant la période du 30 avril 2018 au 7 novembre 2019, il n'était pas inapte pour toutes fonctions mais uniquement pour ses fonctions d'agent des services hospitaliers qualifié ; en s'abstenant de prendre des mesures nécessaires pour le reclasser, son employeur a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- le délai excessif mis par les Hospices civils de Lyon pour engager la procédure d'admission à la retraite est constitutif d'une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- pour la période du 30 avril 2018 au 7 novembre 2019, son préjudice financier s'élève à la somme de 27 576,96 euros correspondant à un plein traitement, ou, subsidiairement, à la somme de 19 978,92 euros correspondant à l'allocation de retour à l'emploi ;
- pour la période du 7 novembre 2019 au 10 juillet 2020, son préjudice financier s'élève à la somme de 11 793,68 euros au titre d'un congé de longue maladie, ou, subsidiairement, à la somme de 8 963,68 euros correspondant à la pension de retraite qu'il aurait dû percevoir ;
- le préjudice lié aux troubles dans ses conditions d'existence et son préjudice moral peuvent être évalués à 13 000 euros.
Par des mémoires enregistrés le 13 septembre 2022 et le 23 mai 2023, les Hospices civils de Lyon, représentés par Me Walgenwitz, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. D..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Par une lettre du 28 mars 2024, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de ce que M. D..., qui a été placé en position de disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans entre le 29 avril 2015 et le 29 avril 2018 ne pouvait justifier, à la date de son placement en disponibilité d'office, de la durée d'affiliation requise par les stipulations de l'article 3 du règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage et de ses textes associés.
Les observations présentées pour les Hospices civils de Lyon, en réponse à cette communication, enregistrées le 4 avril 2024, ont été communiquées ce même jour.
Les observations présentées pour M. D..., en réponse à cette communication, enregistrées le 5 avril 2024, ont été communiquées ce même jour.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 ;
- le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 ;
- l'arrêté du 4 mai 2017 portant agrément de la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage et de ses textes associés ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente,
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,
- les observations de Me Breysse, représentant M. D... et de Me Allala, représentant les Hospices civils de Lyon ;
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., agent des services hospitaliers qualifié employé par les Hospices civils de Lyon, a exercé ses fonctions au sein de l'hôpital Pierre Garraud à Lyon. Du 1er juillet 2012 au 29 avril 2015, il a bénéficié d'un congé parental et du 30 avril 2015 au 29 avril 2018, il était placé en disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans. En février 2018, il a sollicité sa réintégration à l'issue de sa disponibilité. Par décision du 11 septembre 2018, il a été placé en disponibilité d'office pour raison de santé à compter du 30 avril 2018. Par décision du 12 mars 2020, il a été maintenu en disponibilité d'office jusqu'à son admission à la retraite, à compter du 11 juillet 2020. Par un jugement du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Lyon a condamné les Hospices civils de Lyon à verser à M. D... la somme de 4 900 euros, en réparation des préjudices subis à raison du retard fautif pris dans l'instruction de l'admission à la retraite de l'intéressé. M. D... relève appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté sa demande indemnitaire au titre de l'absence de recherche de reclassement et de l'absence de versement de toute rémunération postérieurement au 30 avril 2018.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, M. D... soutient que le jugement attaqué est irrégulier, en ce que le tribunal a conduit un raisonnement erroné. Toutefois, un tel moyen, qui ne relève pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé, doit, dès lors, être écarté.
3. En second lieu, M. D... avait sollicité, dans sa demande enregistrée au greffe du tribunal, le 27 novembre 2020, l'annulation de la décision du 30 septembre 2020, par laquelle le directeur adjoint en charge du pôle développement social des Hospices civils de Lyon a refusé de lui accorder tout traitement et toute indemnité au titre de la période pendant laquelle il a été placé en disponibilité. Or, le tribunal n'a pas statué sur ces conclusions. Ainsi, son jugement, qui est entaché d'une omission à statuer, doit être annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2020 du directeur adjoint en charge du pôle développement social des Hospices civils de Lyon. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces conclusions et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par M. D....
Sur les conclusions indemnitaires :
En ce qui concerne la responsabilité des Hospices civils de Lyon :
4. D'une part, aux termes de l'article 62 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son établissement, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite (...) ". Selon l'article 37 du décret du 13 octobre 1988 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires hospitaliers, à l'intégration et à certaines modalités de mise à disposition : " Deux mois au moins avant l'expiration de la période de disponibilité en cours, le fonctionnaire doit solliciter soit le renouvellement de sa disponibilité soit sa réintégration. Faute d'une telle demande, l'intéressé est rayé des cadres, à la date d'expiration de la période de disponibilité. Sous réserve des dispositions des troisième et quatrième alinéas ci-dessous, la réintégration est de droit à la première vacance lorsque la disponibilité n'a pas excédé trois ans (...) ".
5. D'autre part, selon le même article 37 du décret du 13 octobre 1988 : " (...) Le fonctionnaire qui, à l'issue de sa disponibilité ou avant cette date s'il sollicite sa réintégration anticipée, ne peut être réintégré pour cause d'inaptitude physique est soit reclassé dans les conditions prévues par la section 3 du chapitre V de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, soit placé en disponibilité d'office dans les conditions prévues aux deux derniers alinéas de l'article 29 du présent décret, soit en cas d'inaptitude définitive à l'exercice des fonctions, admis à la retraite ou, s'il n'a pas droit à pension, licencié (...) ". Selon l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986, auquel renvoient ces dispositions : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. ". Et selon l'article 72 de la même loi : " En vue de permettre ce reclassement, l'accès à des corps ou emplois d'un niveau supérieur, équivalent ou inférieur est ouvert aux intéressés, quelle que soit la position dans laquelle ils se trouvent, selon les modalités retenues par les statuts particuliers de ces corps ou emplois, en exécution des articles 29, 32 et 35 et nonobstant les limites d'âges supérieures, s'ils remplissent les conditions d'ancienneté fixées par ces statuts ". Enfin, aux termes de l'article 2 du décret du 8 juin 1989 pris pour l'application de cette loi et relatif au reclassement des fonctionnaires pour raisons de santé : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'intéressé peut présenter une demande de reclassement dans un emploi relevant d'un autre grade de son corps ou dans un emploi relevant d'un autre corps. / L'autorité investie du pouvoir de nomination recueille l'avis du comité médical départemental. ".
6. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que lorsqu'un fonctionnaire a été, lors d'une demande de réintégration, à l'issue d'une disponibilité, reconnu inapte à la reprise des fonctions qu'il occupait antérieurement et alors que le comité médical ne s'est pas prononcé sur sa capacité à occuper, par voie de réaffectation, de détachement ou de reclassement, un autre emploi, éventuellement dans un autre corps ou un autre grade, l'autorité hiérarchique ne peut placer cet agent en disponibilité d'office, sans l'avoir préalablement invité à présenter, s'il le souhaite, une demande de reclassement. La mise en disponibilité d'office peut ensuite être prononcée soit en l'absence d'une telle demande, soit si cette dernière ne peut être immédiatement satisfaite. Ces dispositions, en subordonnant le reclassement à la présentation d'une demande par l'intéressé, ont pour objet d'interdire à l'employeur d'imposer un tel reclassement, mais ne le dispensent pas d'inviter l'intéressé à formuler une telle demande.
7. Il résulte de l'instruction que si, à la suite de la demande de réintégration présentée par M. D..., au sein des effectifs des Hospices civils de Lyon, à l'issue de sa disponibilité, le docteur C..., chargé de la visite de reprise, a conclu, le 13 avril 2018, que l'intéressé était inapte " à toutes fonctions, même en reclassement ", lors de sa séance du 7 juin 2018, le comité médical départemental a conclu à l'inaptitude permanente et définitive de l'intéressé à exercer ses fonctions, mais a ordonné une expertise spécialisée afin de préciser l'inaptitude à toutes fonctions. Répondant à cette demande, le 22 juin 2018, le docteur B... a conclu que M. D... était inapte à ses fonctions d'agent des services hospitaliers qualifié mais non inapte à toutes fonctions. Ces conclusions ont été reprises par le comité médical départemental, à l'issue de sa séance du 5 juillet 2018, qui a retenu que l'intéressé était inapte à l'exercice de ses fonctions d'agent des services hospitaliers qualifié " mais non inapte à toutes fonctions ". Si les Hospices civils de Lyon font valoir qu'ils ont saisi le docteur C... afin d'apporter des précisions médicales sur l'inaptitude de l'intéressé, il ressort de la réponse datée du 31 juillet 2018, que le docteur C... a simplement précisé qu'il n'avait aucun élément nouveau à apporter au rapport qu'il avait rendu le 13 avril 2018, sans indiquer même implicitement, que l'état de santé de l'intéressé n'avait pas évolué depuis sa visite de reprise. Contrairement à ce que soutiennent les Hospices civils de Lyon, qui ne sauraient utilement se prévaloir des conclusions rendues par le docteur C..., le 20 septembre 2019, soit postérieurement à la décision en litige du 11 septembre 2018, plaçant l'intéressé, en disponibilité d'office pour raison de santé, ils ne pouvaient, compte tenu de ces éléments, estimer, à la date de cette dernière décision, que l'intéressé était inapte à l'exercice de toute fonction. Dans ces conditions, les Hospices civils de Lyon ne pouvaient placer M. D... en position de disponibilité d'office sans l'avoir invité au préalable à présenter une demande de reclassement. Si les Hospices civils de Lyon soutiennent qu'ils n'avaient, en l'espèce, aucune obligation de procéder à des recherches en vue du reclassement de M. D... dès lors qu'il n'avait formulé aucune demande en ce sens, ce dernier soutient, cependant, sans être utilement contesté, n'avoir jamais reçu de courrier l'invitant à présenter une telle demande. Par ailleurs, il est constant qu'à la suite de la demande de reclassement spontanément présentée par M. D..., par courrier du 15 novembre 2018, les Hospices civils de Lyon se sont abstenus de procéder à toute recherche de poste. Dès lors, faute d'avoir invité M. D... à formuler une demande de reclassement et d'avoir refusé de procéder à toute recherche de poste de reclassement en dépit de la demande présentée en ce sens par l'intéressé, les Hospices civils de Lyon ont méconnu les dispositions législatives et réglementaires sus-rappelées. Par suite, M. D... est fondé à soutenir que les Hospices civils de Lyon ont commis une faute de nature à engager leur responsabilité.
En ce qui concerne les préjudices :
8. En premier lieu, lorsque l'administration n'a procédé à aucune recherche de reclassement avant de placer d'office l'agent en situation de disponibilité, il convient pour le juge de rechercher si cette carence de l'administration a été de nature à faire perdre à l'intéressé une chance sérieuse de reclassement dans un autre emploi.
9. M. D... soutient qu'entre le 30 avril 2018 et le 7 novembre 2019, il a été privé des revenus qu'il aurait dû percevoir s'il avait bénéficié d'un reclassement. Toutefois, alors qu'il résulte de l'instruction que, le 7 novembre 2019, le comité médical départemental a estimé que M. D... était inapte de façon permanente et définitive à exercer ses fonctions ou à toutes fonctions même en reclassement, la seule référence aux avis rendus par le docteur B..., le 22 juin 2018 et par le comité médical départemental ne suffit pas à établir que l'état de santé de l'intéressé qui souffrait de lombosciatique invalidante lui aurait permis d'être réintégré. En outre, en se bornant à faire valoir que les Hospices civils de Lyon " recrutent sans cesse ", le requérant n'établit pas que cet établissement aurait été à même de lui proposer un poste en vue de son reclassement au cours de la période du 30 avril 2018 au 7 novembre 2019. Par suite, le préjudice financier dont le requérant se prévaut au titre de cette période ne présente pas un caractère certain et ne saurait, dès lors, ouvrir droit à réparation.
10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 5422-1 du code du travail : " Ont droit à l'allocation d'assurance les travailleurs involontairement privés d'emploi (...), aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure ". Aux termes de l'article L. 5424-1 du même code : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : (...) 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires ;(...) ". Aux termes de l'article L. 5424-2 de ce code : " Les employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1 assurent la charge et la gestion de l'allocation d'assurance. Ceux-ci peuvent, par convention conclue avec Pôle emploi, pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, lui confier cette gestion (...). ". Aux termes de l'article L. 5422-2 de ce code : " L'allocation d'assurance est accordée pour des durées limitées qui tiennent compte de l'âge des intéressés et de leurs conditions d'activité professionnelle antérieure. (...) ". Aux termes de l'article L. 5422-20 de ce code : " Les mesures d'application des dispositions du présent chapitre, à l'exception des articles de la présente section, du 5° de l'article L. 5422-9, des articles L. 5422-10, L. 5422-14 à L. 5422-16 et de l'article L. 5422-25, font l'objet d'accords conclus entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. ".
11. L'allocation d'assurance prévue par ces textes est régie en l'espèce par la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage et le règlement général qui y est annexé, dès lors que M. D... a été placé en disponibilité d'office postérieurement au 1er octobre 2017.
12. Aux termes de l'article 3 du règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage et de ses textes associés, alors applicable : " § 1er - Les salariés privés d'emploi doivent justifier d'une durée d'affiliation correspondant à des périodes d'emploi accomplies dans une ou plusieurs entreprises entrant dans le champ d'application du régime d'assurance chômage. (...) la durée d'affiliation (...) doit être au moins égale à 88 jours travaillés ou 610 heures travaillées : au cours des 28 mois qui précèdent la fin du contrat de travail (terme du préavis) pour les salariés âgés de moins de 53 ans à la date de la fin de leur contrat de travail ; au cours des 36 mois qui précèdent la fin du contrat de travail (terme du préavis) pour les salariés âgés de 53 ans et plus à la date de la fin de leur contrat de travail. (...) § 3 - Les périodes de suspension du contrat de travail sont retenues au titre de la durée d'affiliation selon les modalités de décompte des jours du paragraphe précédent. (...) Toutefois, ne sont notamment pas prises en compte dans la durée d'affiliation : (...) les périodes de disponibilité dans les conditions prévues par les dispositions statutaires des trois fonctions publiques. En effet, ces périodes n'ayant été ni rémunérées ni indemnisées, elles ne peuvent être assimilées à des périodes d'emploi ".
13. Il résulte des dispositions combinées des articles précités, d'une part, que les agents titulaires de la fonction publique hospitalière ont droit aux allocations d'assurance chômage dès lors qu'aptes au travail, ils peuvent être regardés comme ayant été involontairement privés d'emploi et à la recherche d'un emploi, d'autre part, que pour les agents publics titulaires, les périodes de disponibilité, notamment en cas de disponibilité, ne sont pas comptabilisées au titre de la durée d'affiliation.
14. Il résulte de ce qui a été dit précédemment, qu'au titre de la période du 30 avril 2018 au 7 novembre 2019, M. D... justifiait de la condition d'aptitude au travail requise par les dispositions de l'article L. 5422-1 du code du travail. Toutefois, il résulte de l'instruction que M. D... a été placé en position de disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans entre le 29 avril 2015 et le 29 avril 2018. Dès lors, il ne pouvait justifier, à la date de son placement en disponibilité d'office, d'une durée d'affiliation de 88 jours ou 610 heures sur les 36 derniers mois. Par suite, alors même qu'il peut être regardé comme ayant été privé involontairement d'emploi à compter du 30 avril 2018, M. D... n'est pas fondé à soutenir qu'il remplissait, à cette date, l'ensemble des conditions requises pour bénéficier de cette allocation.
15. En troisième lieu, M. D... soutient qu'il avait droit au versement d'un demi-traitement jusqu'à la date de son admission à la retraite pour invalidité. Toutefois, les dispositions dont il se prévaut, issues de l'article 47 du décret n° 86-442du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, concernent le fonctionnaire, qui à l'issue d'un congé de longue maladie ne peut reprendre ses fonctions, et ne sont pas applicables à la situation de l'intéressé.
16. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que le 7 novembre 2019, le comité médical départemental a estimé que l'état de santé de M. D... le rendait définitivement inapte à toutes fonctions, que le 28 novembre 2019, la directrice générale des Hospices civils de Lyon a prononcé le licenciement de l'intéressé avec effet au 8 novembre 2019, que le 28 janvier 2020, M. D... a demandé le retrait de cette décision du 28 novembre 2019, qu'il a été fait droit à cette demande, le 12 mars 2020, et que la commission de réforme saisie en avril 2020 a rendu son avis favorable à l'admission de l'intéressé à la retraite pour invalidité, le 9 juillet 2020. Le retard ainsi pris dans l'instruction de l'admission de M. D... à la retraite constitue une faute de nature à engager la responsabilité des Hospices civils de Lyon, et qui est directement à l'origine d'une perte de revenus correspondant à la pension de retraite que l'intéressé aurait pu percevoir au cours de cette période. Toutefois, compte tenu des délais liés à la nécessité d'obtenir préalablement à la décision de mise à la retraite, les avis de la commission de réforme et de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, l'intéressé n'établit pas en appel qu'en retenant le montant de la somme de 4 500 euros au lieu, de celui de 8 963,68 euros demandé, les premiers juges n'auraient pas fait une juste appréciation de ce préjudice. Enfin, M. D..., dont l'état de santé le rendait, ainsi qu'il a été dit, définitivement inapte à l'exercice de toute fonction, à compter du 7 novembre 2019, ne saurait se prévaloir de ce que, à compter de cette même date, il aurait pu être reclassé et bénéficier d'un placement en congé de longue maladie à plein traitement jusqu'à son admission à la retraite.
17. En dernier lieu, M. D... est fondé à demander l'indemnisation du préjudice moral résultant tant de l'absence de proposition de reclassement, que de la gestion défaillante de sa situation administrative, dont il en sera fait une juste appréciation en lui allouant à ce titre une somme de 3 000 euros.
Sur la légalité de la décision du 30 septembre 2020 :
18. Pour contester la légalité de la décision du 30 septembre 2020 par laquelle le directeur adjoint en charge du pôle développement social des Hospices civils de Lyon a refusé de lui accorder tout traitement et toute indemnité au titre de la période pendant laquelle il a été placé en disponibilité d'office, M. D... soutient que ce placement en disponibilité d'office ainsi que son maintien dans cette position sont illégaux, en se référant aux moyens développés à l'appui de ses conclusions indemnitaires. Toutefois, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés aux points précédents, le requérant n'établit pas qu'il aurait pu effectivement bénéficier d'une réintégration ainsi que d'une mesure de reclassement au sein des effectifs des Hospices civils de Lyon, de nature à lui permettre de bénéficier des traitements indemnités dont il sollicite le versement. Par suite, ses conclusions aux fins d'annulation de la décision en litige ne peuvent qu'être rejetées.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... est seulement fondé à demander que la somme que le tribunal lui a allouée en réparation de ses préjudices soit portée à 7 500 euros.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de M. D..., qui n'est pas partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon le versement à M. D... d'une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2008540 du 18 mars 2022 du tribunal administratif de Lyon est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions de la demande de M. D... tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2020, par laquelle le directeur adjoint en charge du pôle développement social des Hospices civils de Lyon a refusé de lui accorder tout traitement et toute indemnité au titre de la période pendant laquelle il a été placé en disponibilité.
Article 2 : L'indemnité que les Hospices civils de Lyon ont été condamnés à verser à M. D... est portée à 7 500 euros.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 mars 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. D... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et aux Hospices civils de Lyon.
Délibéré après l'audience du 25 avril 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Dèche, présidente,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 mai 2024.
La rapporteure,
P. DècheL'assesseur le plus ancien,
H. Stillmunkes
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne à la préfète du Rhône, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 22LY01429
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