CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 31/05/2022, 19BX04015, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision31 mai 2022
Num19BX04015
JuridictionBordeaux
Formation2ème chambre
PresidentMme GIRAULT
RapporteurMme Anne MEYER
CommissaireMme GALLIER

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant dire droit du 9 octobre 2018, la cour régionale des pensions de Bordeaux a ordonné des expertises avant de se prononcer sur les demandes de M. A... relatives à la réformation de l'arrêté du 18 mars 2013 par lequel le ministre de la défense a porté à 95 % le taux de sa pension militaire d'invalidité pour de nombreuses infirmités, en tant qu'il a rejeté ses demandes relatives à des infirmités de séquelles de traumatisme cervico-lombo-sacré, de séquelles traumatiques du genou gauche, de séquelles traumatiques de l'épaule droite, de séquelles traumatiques du poignet droit et de la main droite, de baisse de l'acuité auditive droite et d'acouphènes de l'oreille droite.

Le docteur C... a été désigné comme expert par ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 1er juillet 2020.

Le professeur D... a été désigné comme expert par ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 18 septembre 2020.

Le rapport du docteur C..., expert spécialisé en chirurgie orthopédique, a été enregistré le 15 octobre 2020.

Le rapport du professeur D..., expert spécialisé en oto-rhino-laryngologie, a été enregistré le 26 novembre 2020.

Par des mémoires enregistrés les 18 décembre 2020, 22 décembre 2020, 2 février 2021, 18 mars 2021, 7 juin 2021 et 2 juillet 2021, M. A... demande à la cour :

1°) de ne pas tenir compte de l'expertise du docteur C... et d'homologuer les expertises antérieures qu'il a produites ;

2°) d'annuler l'expertise du professeur D... et d'homologuer celle du docteur F... du 10 avril 2015 ;

3°) de retenir un taux de 65 % en aggravation pour la surdité totale confirmée par quatre examens à partir de sa demande du 31 mai 2005, ou à titre subsidiaire d'ordonner une nouvelle expertise pour cette aggravation ;

4°) de retenir l'infirmité de " vertiges rotatoires avec nausées et vomissements de fréquence hebdomadaire " au taux de 30 %.

Il soutient que :
- le docteur C..., qui lui avait dispensé des soins à deux reprises, dont une fois
pour le genou gauche, a réalisé l'expertise en méconnaissance des dispositions de
l'article R. 4127-105 du code de la santé publique ;
En ce qui concerne le rachis et le bassin :
- l'expertise omet de mentionner les troubles génitaux en lien avec l'atteinte de la queue de cheval ;
- il n'existe ni une lombarthrose L3-L4, ni une coxarthrose droite, mais des séquelles de fracture de L3-L4 et de fracture du cotyle droit avec ostéophytose, et il n'y avait pas d'arthrose sur les clichés radiographiques interprétés le 5 mars 2005 ; le tribunal des pensions et la cour régionale des pensions ont d'ailleurs ordonné une expertise relative à l'atteinte rachidienne
du traumatisme cervico-dorso-lombaire, et non à une aggravation de l'infirmité de
lombarthrose L3-L4 ;
- l'expert n'a pas tenu compte du rétrolisthésis de C3 sur C4 avec instabilité cervicale et atrophie du trapèze gauche et n'a pas compris les modalités de fixation des taux selon le barème des pensions militaires d'invalidité ; il convient de retenir des taux de 35 à 70 % pour le rachis et de 100 % pour les troubles génito-sphinctériens, comme l'ont fait les autres experts qu'il a consultés ; en évaluant au plus bas l'ensemble de ses séquelles selon le barème des pensions militaires d'invalidité, on trouve un taux global de 195 % ;
En ce qui concerne le genou gauche :
- l'expert n'a pas examiné le genou gauche et conclut à l'absence d'aggravation en faisant état d'une gonarthrose alors qu'il existe des séquelles de fractures de la rotule partiellement soudées, ainsi qu'une fracture du plateau tibial, ce que l'expert avait d'ailleurs admis, lorsqu'il l'avait consulté à titre privé ;
- il sollicite un taux de 20 % aggravé au 26 juillet 2005 comme l'avait retenu une expertise du 12 décembre 2008 ; cinq experts avaient évalué l'infirmité à 15 % en se plaçant
au 9 août 1994 ;
En ce qui concerne l'épaule droite :
- contrairement à ce que retient l'expert, qui ne l'a pas examiné, il n'existe pas d'arthrose scapulo-humérale et acromio-claviculaire, puisqu'aucun des rhumatologues qu'il a consultés n'en fait état ;
- il sollicite un taux de 40 % aggravé au 21 septembre 2005 comme l'a retenu l'expertise réalisée le 26 février 2009 ;


En ce qui concerne le poignet droit et la main droite :
- l'expert n'a pas examiné les quatre derniers doigts et leurs métacarpiens, ne tient pas compte de ce qu'il s'agit d'une seule invalidité pour le poignet et la main comme pour le poignet et la main gauches, et le barème retenu n'est pas celui des pensions militaires d'invalidité ;
- à la date du 14 novembre 1995, les infirmités du poignet droit et de la main droite ont été évaluées à 10 % chacune ; il convient d'évaluer la totalité de la main droite et d'inclure la neuropathie canalaire retenue par le docteur G... le 26 février 2009 à un taux de 30 % ;
En ce qui concerne le pouce droit et le 1er rayon :
- il sollicite un taux de 20 % aggravé au 21 septembre 2005 comme l'a retenu l'expertise réalisée le 26 février 2009 ;
En ce qui concerne l'oreille droite :
- l'expertise ne respecte pas le guide-barème des pensions militaires d'invalidité, les schémas ne sont pas intelligibles et l'expert, qui rapporte des faits inexacts, ne démontre pas ce qu'il affirme ; en outre, le rapport n'est pas signé ; ainsi, il doit être annulé ;
- l'insufflation d'air comprimé le 1er février 2007 avait pour objet de masquer l'oreille droite pour pouvoir examiner l'oreille gauche, examen réalisé en 2007 ;
- l'expert n'aurait pas dû réaliser d'examen vestibulaire dès lors que la mission d'expertise ne le prévoyait pas, et il aurait dû réaliser les examens lui-même au lieu de les confier à des techniciennes ;
- selon le barème des pensions militaires d'invalidité, la perte de 50 à 59 décibels à droite associée à une cophose gauche correspond à un taux de 50 % et non de 30 % comme l'a retenu l'expert, et les acouphènes sévères doivent être cotés à 30 % et non à 10 % ;
- les examens réalisés les 23 février 2016, 7 février 2017, 17 avril 2018 et 5 mars 2019 ont constaté respectivement des pertes auditives à droite de 69, 65, 61 et 55 décibels, soit en moyenne 62,5 décibels, ce qui, associé à une cophose gauche, correspond à un taux global d'invalidité de 65 % ;
En ce qui concerne les vertiges :
- contrairement à ce qui est soutenu en défense, l'infirmité de vertiges, qualifiée à tort d'inexistante par le tribunal, a été reconnue dans l'arrêt de la cour régionale des pensions du 9 octobre 2018.

Par des mémoires en défense enregistrés les 5 février, 4 mai et 24 juin 2021, la ministre des armées admet le droit de M. A... à une pension militaire d'invalidité à compter du 27 décembre 2007 pour les infirmités nouvelles d'hypoacousie de l'oreille droite au taux de 30 % et d'acouphènes droits permanents et invalidants au taux de 10 % et conclut au rejet du surplus.

Elle fait valoir que :
En ce qui concerne le rachis et le bassin :
- l'infirmité n° 2512 de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " est pensionnée au taux de 20 % et non de 30 % comme indiqué par erreur dans les conclusions, alors que le taux de 20 % a bien été pris en compte au début de l'analyse ;
- en application de la règle de Balthazar prévue à l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, lorsque l'infirmité la plus grave entraîne une invalidité d'au moins 20 %, chaque infirmité supplémentaire est affectée d'une majoration " suffixe " de 5, 10, 15 ...% suivant le rang qu'elle occupe dans l'ordre croissant de gravité ; l'infirmité n° 2512 est pensionnée au taux de 20 % + 10 ; l'aggravation de 30 % retenue par l'expert correspond à un taux global de 50 % et non de 60 % comme indiqué par erreur ;
- l'expert, qui avait pour mission principale d'évaluer le taux d'invalidité de l'infirmité n° 2512, a retenu une aggravation de 30 % en incluant des séquelles déjà pensionnées au titre de l'infirmité n° 5060 " syndrome pluri-radiculaire avec incontinence fécale intermittente, incontinence urinaire incomplète et troubles généraux ne permettant pas de rapports sexuels " , et des séquelles de coxarthrose droite post-traumatique affectant la hanche droite, dont le taux d'invalidité ne peut être qu'inférieur à 10 % compte tenu de la modicité de la gêne fonctionnelle ; en l'absence d'élément nouveau, le taux d'invalidité acquis pour
l'infirmité n° 2512 doit être maintenu ;
En ce qui concerne le genou gauche :
- aucune aggravation n'a été constatée ;
En ce qui concerne l'épaule droite :
- aucune aggravation n'a été constatée ;
En ce qui concerne le poignet droit et la main droite :
- si l'expert retient 5 % d'aggravation pour chacune des deux infirmités pensionnées à la date du 21 septembre 2005, il n'évoque, s'agissant du pouce droit, aucun élément clinique nouveau à l'exception d'allégations douloureuses dues à l'instabilité du pouce par rapport au certificat médico-légal établi le 22 octobre 2002, date à laquelle la désaxation avec rotation externe était déjà responsable d'un déficit de l'extension du fait du non alignement articulaire ; s'agissant du poignet droit, l'examen clinique réalisé le 8 septembre 2020 n'objective aucune aggravation par rapport à celui du 22 octobre 2002 ; ainsi, les taux de 10 % déjà acquis doivent être maintenus ;
En ce qui concerne l'oreille droite :
- il est admis, conformément aux conclusions de l'expertise, que M. A... a droit à compter du 27 décembre 2007 à une pension militaire d'invalidité pour les infirmités nouvelles d'hypoacousie de l'oreille droite au taux de 30 % et d'acouphènes droits permanents et invalidants au taux de 10 %.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision
du 16 juillet 2020.

Les frais et honoraires de l'expertise du docteur C..., liquidés et taxés à la somme
de 840 euros, ont été mis à la charge de l'Etat par une ordonnance de la présidente de la cour
du 21 octobre 2020.

Les frais et honoraires de l'expertise du professeur D..., liquidés et taxés à la somme de 300 euros, ont été mis à la charge de l'Etat par une ordonnance de la présidente de la cour du 1er décembre 2020.

Par ordonnance du 5 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 7 juillet 2021.

Par lettre du 4 janvier 2022, les parties ont été informées, en application de
l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office suivant : " Le premier jugement du tribunal est définitif en ce qu'il a reconnu à M. A... des droits à pension pour sept nouvelles infirmités, qui ont pour effet de porter le taux de la pension de 95 % dont il bénéficiait à 100 %, comme l'a admis la ministre en liquidant ses droits à ce taux pour jouissance dès le 29 janvier 1998 par arrêté
du 15 avril 2019. Alors qu'aucune infirmité déjà reconnue ou alléguée ne représente à elle-seule un taux de 100 % permettant de dépasser en vertu de l'article L. 125-10 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre le maximum de 100 % de la pension, il n'y a pas lieu de se prononcer sur les autres contestations de M. A..., dont aucune ne pourrait aboutir à une majoration de ses droits à pension. "

Des observations en réponse à ce moyen d'ordre public ont été présentées par la ministre des armées les 24 janvier et 10 février 2022, et par M. A... les 24 et 25 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ;
- le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique,
- et les observations de M. A....


Considérant ce qui suit :

1. Après un grave accident survenu en service le 4 juillet 1986, M. A..., engagé dans l'armée en 1965, a été radié des contrôles le 8 novembre 1986 au grade de caporal-chef, à la fin de son contrat. Il a obtenu à compter de 1992 une pension militaire d'invalidité, puis a sollicité à huit reprises la révision de cette pension pour différentes aggravations ou nouvelles infirmités. Certaines ont été admises par l'administration, qui a porté le taux de la pension à 95 % pour sept infirmités, avec jouissance à compter du 29 mars 1998, tandis que d'autres ont été rejetées par l'arrêté du 18 mars 2013 que M. A... a contesté devant le tribunal des pensions de Bordeaux. Le tribunal, après avoir admis plusieurs infirmités en révision de la pension et ordonné onze expertises, a constaté que celles-ci n'avaient pu être réalisées et qu'il n'était pas en mesure de statuer sur le surplus. Saisie en appel par M. A..., la cour régionale des pensions de Bordeaux a porté de 10 à 50 % le taux de l'infirmité de " séquelle de hernie inguino-scrotale gauche " retenu par le tribunal, a rejeté certaines prétentions et, par un arrêt avant dire droit du 9 octobre 2018, a ordonné des expertises avant de statuer sur les demandes de révision de la pension militaire d'invalidité de M. A... relatives aux séquelles d'un traumatisme cervico-dorso-lombo-sacré subi lors de la chute du 4 juillet 1986, à l'aggravation des séquelles d'un traumatisme du genou gauche subi le 24 mars 1983, d'un traumatisme de l'épaule droite subi le 23 décembre 1968, de traumatismes de la main droite et du poignet droit subis le 20 décembre 1982 et le 24 mars 1983, et à l'infirmité nouvelle de baisse de l'acuité auditive et d'acouphènes de l'oreille droite. La procédure a été transmise, en application de la loi du 13 juillet 2018 susvisée, à la cour administrative d'appel de Bordeaux, qui a nommé de nouveaux experts pour suppléer la défaillance de ceux précédemment désignés.


Sur l'étendue du litige :

2. Contrairement à ce que soutient M. A..., la cour régionale des pensions de Bordeaux a rejeté, au troisième paragraphe du dispositif de son arrêt du 9 octobre 2018, la demande relative à l'infirmité nouvelle de " vertiges d'origine ORL à type de troubles de l'équilibre et d'instabilité " qualifiés par le requérant de " vertiges rotatoires avec nausées et vomissements de fréquence hebdomadaire ". Ainsi, le litige dont la cour administrative d'appel est saisie n'inclut pas cette infirmité.

3. Par une décision du 14 février 2020, la ministre des armées, en exécution du jugement du tribunal des pensions de Bordeaux du 23 novembre 2016 et de l'arrêt de la cour régionale des pensions de Bordeaux du 9 octobre 2018, a retenu à compter du 29 janvier 1998 les infirmités de cophose de l'oreille gauche au taux de 15 %, de séquelles de rupture du ligament latéral externe et de fracture ostéochondrale de la malléole externe du pied gauche au taux de 15 %, d'acouphènes permanents gauches au taux de 10 %, à compter du 8 février 2001 l'infirmité de séquelles traumatiques par compression plâtrée brachio-palmaire gauche du nerf cubital avec retentissement moteur important au taux de 10 %, à compter du 30 octobre 2001 les infirmités de séquelles d'entorse de la cheville droite avec hyperlaxité par atteinte du ligament talo-fibulaire et rupture du ligament tibial antérieur responsable d'instabilité avec discrète claudication au taux de 15 %, d'arthrose métatarso-phalangienne de l'avant-pied droit
avec douleur à l'appui et mauvais déroulement du pied au taux de 10 %, et à compter
du 24 octobre 2003 l'infirmité de séquelles de hernie inguino-scrotale opérée, compliquée
d'une éventration cicatricielle douloureuse et récurrence herniaire gauche non réductible
avec hydrocèle scrotale gauche au taux de 50 %. Cette décision concède un droit à pension
de 100 % à compter du 29 janvier 1998. Toutefois, aux termes de l'article L. 115, devenu
l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " L'Etat doit gratuitement aux titulaires d'une pension d'invalidité attribuée au titre du présent code les prestations médicales, paramédicales, chirurgicales et pharmaceutiques nécessitées par les infirmités qui donnent lieu à pension, en ce qui concerne exclusivement les accidents et complications résultant de la blessure ou de la maladie qui ouvre droit à pension. " Il résulte de ces dispositions que le litige conserve un objet en ce qui concerne les infirmités qui n'ont pas été reconnues pensionnables par l'administration.


Sur les conclusions à fin d'annulation de l'expertise du professeur D... et d'homologation d'expertises non judiciaires :

4. Une expertise a pour objet d'apporter au juge les éléments d'information nécessaires à la solution du litige dont il est saisi. Elle ne constitue pas une décision et ne lie pas le juge, auquel il appartient d'en retenir ou non les conclusions compte tenu de l'ensemble des pièces du dossier, y compris d'autres expertises, même non judiciaires, produites par les parties. Par suite, les conclusions à fin d'annulation de l'expertise du professeur D... et " d'homologation " d'expertises produites par M. A... ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables.


Sur la régularité des expertises :

5. Aux termes de l'article R. 4127-105 du code de la santé publique : " Nul ne peut être à la fois médecin expert et médecin traitant d'un même malade. / Un médecin ne doit pas accepter une mission d'expertise dans laquelle sont en jeu ses propres intérêts, ceux d'un de ses patients, d'un de ses proches, d'un de ses amis ou d'un groupement qui fait habituellement appel à ses services. " En se bornant à produire une brève observation du docteur C... du 17 octobre 2018 constatant une bonne évolution d'une " contusion avec fracture du plateau tibial genou gauche " sans indication chirurgicale, M. A..., dont le dossier fait état de la consultation de nombreux autres chirurgiens orthopédistes, ne démontre pas l'existence d'une relation de médecin traitant à patient de nature à entacher l'expertise d'irrégularité.

6. Les divers reproches dirigés contre les experts, relatifs à la restitution d'un dossier médical incomplet, à des erreurs de fait ou de diagnostic, à l'absence d'examen clinique ou au contraire à la réalisation d'examens non nécessaires, et à des évaluations non conformes au guide-barème des pensions militaires d'invalidité, ne mettent pas en cause la régularité des expertises.


Sur les droits à pension de M. A... :

7. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre applicable aux dates des demandes de pension : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / (...). " Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % (...) ". Aux termes de l'article L. 29 de ce code : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. "

En ce qui concerne les séquelles de traumatisme cervico-dorso-lombo-sacré :

8. Le 4 juillet 1986, alors qu'il participait à des manœuvres militaires à Mayotte, M. A... a fait une chute de haute énergie dans les rochers, d'une hauteur de 15 mètres, à l'origine d'un grave traumatisme cervico-dorso-lombo-sacré. La pension définitive dont il était titulaire antérieurement à l'arrêté contesté incluait seulement, en lien avec cette blessure, l'infirmité de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " au taux définitif de 20 % à compter du 4 juin 1992. L'arrêté du 18 mars 2013 a retenu, en lien avec le même traumatisme, un droit à pension au taux de 25 % à compter du 29 janvier 1998 pour un " syndrome pluri-radiculaire avec incontinence fécale intermittente, incontinence urinaire incomplète et troubles généraux ne permettant pas de rapports sexuels ".

9. La cour régionale des pensions a ordonné une expertise relative à " l'atteinte rachidienne conséquence du traumatisme cervico-dorso-lombo-sacré ", incluant nécessairement l'infirmité de syndrome pluri-radiculaire dont M. A... avait contesté le taux devant le tribunal des pensions. Elle a demandé à l'expert de se prononcer sur l'existence d'aggravations de l'infirmité de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " aux dates des 29 janvier 1998, 28 janvier 2003 et 12 mai 2005, de décrire et de chiffrer les infirmités du bassin et du dos en se plaçant au 29 janvier 1998 et de dire si elles sont imputables à l'accident du 4 juillet 1986, et enfin de dire, au vu du guide-barème, si ces différentes infirmités sont susceptibles de constituer une seule et même infirmité, et dans cette hypothèse, d'en fixer le taux.

10. L'expert a retenu comme imputables à la chute du 4 juillet 1986, au niveau cervical, une attitude antalgique avec aspect de torticolis, une raideur du rachis avec limitation de l'amplitude des mouvements, une amyotrophie sévère du muscle trapèze gauche ainsi que des cervico-scapulo-brachialgies bilatérales, au niveau lombaire une cyphose à rayon court entraînant un bloc fonctionnel post-fracturaire responsable d'une cypho-scoliose thoraco-lombaire par compensation, une amyotrophie des fessiers et une atteinte polyradiculaire
en L3-L4-L5 et S1, une coxarthrose droite post-traumatique après fracture du cotyle droit avec bascule du bassin, et enfin une incontinence anale et vésicale par atteinte de la queue de cheval. Il a précisé que la pathologie rachidienne s'était progressivement détériorée tant sur le plan mécanique (aggravation de la cypho-scoliose, canal lombaire étroit post-traumatique) que neurologique (poly-radiculalgies des quatre membres, syndrome de la queue de cheval). Toutefois, son évaluation de l'invalidité à un taux global de 60 % ne peut être retenue dès lors que les infirmités distinctes constatées ne se rattachent pas à une pathologie unique figurant au guide-barème des pensions militaires d'invalidité. Par suite, il y a lieu d'évaluer distinctement les infirmités correspondant aux séquelles cervicales, lombaires, du bassin et neurologiques.

S'agissant des séquelles cervicales :

11. Il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise ainsi que de témoignages des supérieurs hiérarchiques de M. A... au moment de l'accident et d'attestations de médecins qui l'ont examiné de 1986 au 20 janvier 1988, cités dans une expertise du docteur G...
du 30 mars 2009 produite par le requérant, que la chute du 4 juillet 1986 a causé une entorse cervicale grave avec rétrolisthésis de C3 sur C4 et instabilité segmentaire post-traumatique, à l'origine de cervicalgies chroniques et d'une attitude antalgique avec aspect de torticolis nécessitant le port d'un collier cervical en particulier la nuit, puis secondairement une amyotrophie sévère du muscle trapèze gauche. Ces séquelles sont établies à la date
du 29 janvier 1998, contrairement à la discarthrose secondaire étagée de C3 à T1 et prédominant en C3-C4, mentionnée par un certificat médical d'aggravation du 1er décembre 2014, laquelle ne peut être retenue dans le cadre du présent litige. Par suite, il y a lieu de retenir, à la date
du 29 janvier 1998, une infirmité de " séquelles d'entorse cervicale avec rétrolisthésis de C3 sur C4, instabilité segmentaire post-traumatique et cervicalgies " dont le taux d'invalidité doit être fixé à 20 % au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité.

S'agissant des séquelles lombaires :

12. Il résulte de l'instruction, notamment des interprétations d'imageries citées par l'expertise du docteur G... du 30 mars 2009 et de l'expertise judiciaire que la " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " pensionnée au taux de 20 % à compter du 4 juin 1992 correspond à des séquelles de fractures de L3 et L4 associées à un affaissement du disque L3-L4 avec ostéophytose, présentes sur des clichés réalisés le 18 novembre 1991, en lien avec la chute du 4 juillet 1986. Ces lésions ont évolué avec l'affaissement total du disque L3-L4, constituant un bloc fonctionnel responsable d'une cyphose du segment lombaire centrée sur L3-L4 et d'un rétrécissement canalaire acquis. Il en résulte une attitude cypho-scoliotique du segment dorsal post-traumatique par compensation, rendant notamment la station debout pénible. La comparaison des différentes imageries décrites au dossier fait apparaître que cette aggravation était constituée au 29 janvier 1998. Par suite, il y a lieu de modifier l'intitulé de l'infirmité de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 " en " séquelles de fractures de L3 et L4 avec cyphose et rétrécissement canalaire acquis ", et de fixer le taux d'invalidité à la date du 29 janvier 1998 à 30 % au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité.

S'agissant des séquelles du bassin :

13. Il résulte de l'instruction, notamment des certificats médicaux cités par l'expertise réalisée le 17 février 2015 par le docteur F... à la demande de M. A..., que la chute
du 4 juillet 1986 a causé une fracture du cotyle droit, ayant pour conséquence une rotation-bascule du bassin vers la gauche avec atrophie musculaire de toute la région de la hanche gauche. Ces séquelles, identifiées sur des clichés réalisés le 4 octobre 2000, étaient constituées à la date du 29 janvier 1998, comme l'a retenu l'expert missionné par la cour. Elles ont pour conséquences fonctionnelles, décrites par le docteur F..., une réduction des mouvements de rotation pelvienne, de flexion et d'extension avec une distance main-sol limitée à 34 cm, ainsi que d'abduction et d'adduction des membres inférieurs, ces mouvements étant en outre douloureux, de même que le repos en décubitus latéral gauche et la position assise. L'expert judiciaire mentionne également une coxarthrose. Le taux de 75 % calculé par le docteur F... en additionnant des séquelles qui ne correspondent pas à des infirmités identifiables dans le guide-barème ne peut être admis. Eu égard aux douleurs et à la gêne dans la marche et les efforts, il y a lieu de retenir, à la date du 29 janvier 1998, une infirmité de " séquelles de fracture du cotyle droit avec rotation-bascule du bassin vers la gauche, atrophie musculaire de la région de la hanche gauche et coxarthrose " au taux de 20 %.

S'agissant des séquelles neurologiques :

14. L'arrêté du 18 mars 2013 a accordé un droit à pension au taux de 25 % à compter
du 29 janvier 1998 au titre de l'infirmité de " syndrome pluri-radiculaire avec incontinence fécale intermittente, incontinence urinaire incomplète et troubles génitaux ne permettant pas de rapports sexuels ". Aucun des constats médicaux auxquels le dossier fait référence ne permet d'identifier une aggravation de cette infirmité entre la demande du 29 janvier 1998 et celle
du 28 janvier 2003. Eu égard aux troubles modérés décrits par les pièces du dossier, le taux
de 25 % n'apparaît pas sous-évalué au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité.

En ce qui concerne les séquelles de traumatisme du genou gauche :

15. L'arrêté du 18 mars 2013 a rejeté la demande présentée le 26 juillet 2005 par M. A... au titre de l'aggravation de l'infirmité, pensionnée au taux de 10 % à compter
du 14 novembre 1995, de " séquelles de traumatisme du genou gauche " résultant d'une blessure reçue à l'occasion du service le 24 mars 1983 lors d'un match de volley-ball. Le traumatisme, tel que décrit par les documents médicaux cités par l'expertise réalisée le 12 décembre 2008 par le docteur G... à la demande de M. A..., était une luxation rotulienne ayant pour séquelles, au 9 août 1994, " un syndrome fémoro-patellaire avec un très net rabot rotulien associé à d'importants craquements douloureux limitant l'utilisation du genou gauche ". La cour régionale des pensions a ordonné une expertise afin d'évaluer l'aggravation éventuelle de cette infirmité à la date du 26 juillet 2005. L'expert a conclu à l'absence d'aggravation du retentissement fonctionnel modéré pris en compte par le taux d'invalidité de 10 % retenu en 1995, ce taux, désormais définitif, ne pouvant être utilement contesté dans le cadre du présent litige. Si l'expertise du docteur G..., citant un autre expert, avait retenu une aggravation de 10 % au 26 juillet 2005 pour " latéralité, laxité du tendon biceps-fémoral et instabilité de la rotule du genou gauche ", elle ne décrit pas de retentissements fonctionnels susceptibles de caractériser une aggravation d'au moins 10 %. Par suite, l'existence de l'aggravation invoquée ne peut être regardée comme établie.

En ce qui concerne les séquelles de traumatisme de l'épaule droite :

16. L'arrêté du 18 mars 2013 a rejeté la demande présentée le 21 septembre 2005 par M. A... au titre de l'aggravation de l'infirmité, pensionnée au taux de 25 % à compter
du 14 novembre 1995, de " séquelles de traumatisme de l'épaule droite " résultant d'une blessure survenue en service le 23 décembre 1968 lors d'un parcours du combattant. Selon l'interprétation de clichés du 29 juillet 1992 citée par le docteur G... dans une expertise réalisée le 26 février 2009 à la demande de M. A..., ce traumatisme avait laissé des séquelles de luxation compliquée acromio-claviculaire avec disjonction très nette et fracture-arrachement du versant latéral de la clavicule, témoignant d'instabilité résiduelle, ainsi que des séquelles de luxation scapulo-humérale avec décoaptation en élévation de 1 cm de la tête humérale. Ces lésions étaient à l'origine d'une importante limitation fonctionnelle douloureuse de l'épaule droite pour laquelle le taux de 25 % a été retenu. La cour régionale des pensions a ordonné une expertise afin d'évaluer l'aggravation éventuelle de cette infirmité à la date
du 21 septembre 2005. L'expert a conclu à l'absence d'aggravation des lésions, stables et déjà prises en compte dans l'évaluation de 1995, ce que M. A... ne conteste pas utilement en se bornant à réfuter la qualification d'arthrose scapulo-humérale et acromio-claviculaire retenue par l'expert et à se prévaloir de l'expertise du docteur G..., lequel a retenu une aggravation
de 15 % au 21 septembre 2005 en se fondant sur le commentaire purement descriptif des lésions montrées par un arthroscanner du 13 septembre 2005, sans aucune précision sur les retentissements fonctionnels des évolutions constatées par rapport aux imageries antérieures. Par suite, l'existence de l'aggravation invoquée ne peut être regardée comme établie.

En ce qui concerne les séquelles de traumatisme du poignet droit et de la main droite :

17. L'arrêté du 18 mars 2013 a rejeté les demandes présentées le 21 septembre 2005 par M. A... au titre de l'aggravation des infirmités, pensionnées chacune au taux de 10 % à compter du 14 novembre 1995, de " séquelles de traumatisme du poignet droit " résultant d'une blessure reçue à l'occasion du service le 24 mars 1983 lors d'un match de volley-ball et de " séquelles de traumatisme du pouce droit " résultant d'une blessure en service le 20 décembre 1982 lors de la réparation d'une roue de camion. La cour régionale des pensions a ordonné une expertise afin d'évaluer l'aggravation éventuelle de ces infirmités à la date du 21 septembre 2005.

18. Aux termes de l'article L. 26 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Toute décision administrative ou judiciaire relative à l'évaluation de l'invalidité doit être motivée par des raisons médicales et comporter, avec le diagnostic de l'infirmité, une description complète faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte de l'état général qui justifient le pourcentage attribué. " Il résulte de l'instruction, notamment des pièces anciennes du dossier médical citées par le docteur G... dans des expertises réalisées les 13 janvier et 26 février 2009 à la demande de M. A..., que la blessure au pouce droit du 20 décembre 1982 était une luxation métacarpo-phalangienne avec entorse de l'inter-phalangienne et éclatement de la pulpe, et que la blessure du 24 mars 1983 était une entorse du poignet droit avec luxations et fractures des quatre derniers rayons de la main. Les taux de 10 % retenus à compter du 14 novembre 1995 correspondent, pour le pouce et le premier rayon de la main, à une hypoesthésie, une laxité avec torsion de la phalange distale et une instabilité métacarpo-phalangienne limitant la préhension et l'opposition du pouce, et pour le poignet et la main, à une raideur franche et douloureuse du poignet et de la main, associée à une très nette diminution de la force de préhension. L'expert, conformément à la mission qui lui a été confiée, a évalué des aggravations distinctes au 21 septembre 2005 pour le pouce d'une part, et pour le poignet et la main d'autre part. L'aggravation de 5 % qu'il a retenue pour chacune de ces infirmités est inférieure au minimum de 10 % ouvrant droit à une révision de la pension. Toutefois, les aggravations constatées, caractérisées par l'évolution de l'instabilité de toutes les articulations par atteinte des tendons et par un syndrome du canal carpien, résultent d'un cumul des séquelles des deux blessures. Elles ont pour conséquence une majoration de l'infirmité affectant la main droite du fait de l'aggravation de la perte de capacité de préhension et des douleurs. Par suite, il y a lieu de fusionner les infirmités de " séquelles de traumatisme du pouce droit " et de " séquelles de traumatisme du poignet droit " en une seule infirmité de " séquelles de traumatismes du pouce droit et du poignet droit avec perte de préhension de la main droite et syndrome du canal carpien " avec un droit à pension à compter du 21 septembre 2005, et d'en fixer le taux à 30 % au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité.


En ce qui concerne les infirmités de l'oreille droite :

19. Le 1er février 2007, lors d'une expertise organisée par l'administration dans le cadre de l'instruction de la demande de pension militaire d'invalidité pour des vertiges d'origine ORL mentionnée au point 2, la réalisation d'un examen vestibulaire a donné lieu à une violente insufflation d'air comprimé sur le tympan droit, laquelle a provoqué un traumatisme sonore et un barotraumatisme. L'arrêté du 18 mars 2013 a rejeté les demandes de pension pour des infirmités d'" acouphènes droits " et de " baisse de l'acuité auditive droite " en lien avec cette blessure. La cour régionale des pensions a ordonné une expertise afin de décrire ces infirmités, de se prononcer sur leur lien avec l'examen réalisé le 1er février 2007, et d'évaluer les taux d'invalidité correspondants. L'expert a conclu à des taux d'incapacité permanente en relation directe, certaine et déterminante avec cet examen, de 30 % pour la perte auditive et de 10 % pour les acouphènes. La contestation par M. A... des taux retenus par l'expert ne relève pas du présent litige en tant qu'elle se rapporte à une aggravation des infirmités postérieurement à sa demande. Contrairement à ce que soutient le requérant, le taux de 30 % fixé pour la perte auditive de 50 % de l'oreille droite tient compte de l'aggravation de l'état auditif antérieur caractérisé par une cophose de l'oreille gauche pensionnée au taux de 15 % à compter du 29 janvier 1998, et n'apparaît pas sous-évalué au regard du guide-barème des pensions militaires d'invalidité. Ces infirmités, distinctes selon le guide-barème, n'ont pas à être fusionnées. Il y a lieu de retenir un droit à pension définitif à compter du 27 décembre 2007 et de fixer les taux d'invalidité à 10 % pour les " acouphènes permanents droits " et à 30 % pour une " hypoacousie droite ", ainsi que l'admet au demeurant la ministre des armées.

20. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêté du 13 mars 2013 doit être annulé en tant qu'il a rejeté les demandes de M. A... relatives aux infirmités de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur du corps de L4 ", de " séquelles de traumatisme du pouce droit ", de " séquelles de traumatisme du poignet droit ", d'" acouphènes droits " et de " baisse de l'acuité auditive droite ", et que les droits à pension de M. A... doivent être retenus ainsi qu'il est exposé aux points 11, 12, 13, 18 et 19.

21. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " Eu égard à ce qui a été dit aux points 11, 12, 13, 18 et 19, il y a lieu d'enjoindre au ministre des armées de procéder aux nouveaux calculs de liquidation des droits à pension correspondants dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais d'expertise :
22. Aux termes de l'article 116 du décret du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Les rémunérations afférentes aux constatations, consultations, expertises et médiations (...) et, en général, tous les frais dus à des tiers en application de l'article 40 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, sont avancés par l'Etat. / (...) / Les frais, à l'exception des sommes revenant aux avocats, sont liquidés et ordonnancés par l'ordonnateur compétent ou son délégataire au vu, selon le cas, d'une attestation du greffier ou du secrétaire de la juridiction, d'une décision de taxe ou de la justification par l'auxiliaire de justice de l'exécution de sa mission et sont payés par le comptable de la direction générale des finances publiques. / (...). " M. A... étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, les frais et honoraires de l'expertise du docteur C..., liquidés et taxés à la somme de 840 euros par ordonnance de la présidente de la cour du 21 octobre 2020, et ceux de l'expertise du professeur D..., liquidés et taxés à la somme de 300 euros par ordonnance de la présidente de la cour
du 1er décembre 2020, doivent être mis à la charge définitive de l'Etat.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du 13 mars 2013 est annulé en tant qu'il a rejeté les demandes de M. A... relatives aux infirmités de " lombarthrose L3-L4 et discret tassement cunéiforme antérieur
du corps de L4 ", de " séquelles de traumatisme du pouce droit ", de " séquelles de traumatisme du poignet droit ", d'" acouphènes droits " et de " baisse de l'acuité auditive droite ".
Article 2 : Il est enjoint au ministre des armées de procéder aux nouveaux calculs des droits à pension de M. A... conformément à ce qui est indiqué aux points 11, 12, 13, 18 et 19, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Les frais et honoraires des expertises du docteur C... et du professeur D..., liquidés et taxés aux sommes respectives de 840 euros et de 300 euros, sont mis à la charge définitive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions d'appel de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre des armées. Des copies en seront transmises pour information au docteur C... et au professeur D..., experts.
Délibéré après l'audience du 3 mai 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2022.

La rapporteure,
Anne B...
La présidente,
Catherine GiraultLa greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX04015