CAA de MARSEILLE, , 14/12/2023, 23MA02788, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision14 décembre 2023
Num23MA02788
JuridictionMarseille
AvocatsCABINET HASENFRATZ

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins d'évaluer les préjudices consécutifs à la lombosciatique qu'il a contractée en 1985, alors qu'il était en service, en qualité de capitaine de vaisseau, en Nouvelle-Calédonie.

Par une ordonnance n° 2302871 du 9 novembre 2023, il n'a pas été fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Hasenfratz, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 9 novembre 2023 ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge du ministre de la défense la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner le ministre de la défense aux entiers dépens.

Il soutient que l'élément déclencheur de son état était le choc lors d'une sortie en véhicule pendant sa mission en Nouvelle-Calédonie ; que, dès lors, la blessure, au sens du 1er alinéa de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, est directement rattachable au service ; que ce choc a entraîné une maladie professionnelle, au sens des 2ème et 3ème alinéas de cet article ; que le taux d'invalidité de 25 % retenu par l'expert désigné par l'administration puis par la commission de recours de l'invalidité à hauteur de 20 % est contestable ; qu'il a l'espoir que ce taux soit revu à la hausse à la hauteur de ses souffrances.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête (...) prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". En vertu de l'article L. 555-1 du même code, le président de la cour administrative d'appel est compétent pour statuer sur les appels formés contre les décisions rendues par le juge des référés.
2. A la suite de la décision du 11 mai 2023 de la commission de recours de l'invalidité rejetant sa demande tendant à la concession d'une pension militaire d'invalidité, M. B..., capitaine de vaisseau du 1er avril 1982 au 3 juin 1997, a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon de prescrire une expertise aux fins d'évaluer les préjudices consécutifs à la lombosciatique qu'il soutient avoir contractée en 1985, alors qu'il était en service en Nouvelle-Calédonie, et notamment de voir établi qu'il présente un taux d'invalidité au moins égal à 30 %, seuil fixé par le 2° de l'article L. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par l'ordonnance attaquée du 9 novembre 2023, le juge des référés a refusé de faire droit à sa demande, au motif que le prononcé d'une mesure d'expertise n'apparaît pas utile dès lors que le requérant " n'établit pas la vraisemblance d'une lésion soudaine (blessure) rattachable au service par présomption " et que son taux d'invalidité est " inférieur au minimum indemnisable de 30 % requis pour l'ouverture du droit à pension pour une maladie du temps de paix ".
3. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l'appui de prétentions qui sont irrecevables (cf. CE, 14.02.2017, n° 401514).
4. M. B... disposait, s'il entendait contester la légalité de la décision du 11 mai 2023 de la commission de recours de l'invalidité, d'un délai de deux mois à compter de sa date de notification, pour introduire un recours devant le tribunal administratif. Le requérant ne justifie pas avoir introduit un tel recours dans ce délai et il ne résulte pas de la consultation de l'application informatique du greffe du tribunal administratif de Toulon qu'un tel recours ait été enregistré. La demande qu'il a adressée le 7 septembre 2023 au juge des référés du tribunal administratif de Toulon aux fins que soit ordonnée une expertise n'a pas été de nature à interrompre ce délai du recours contentieux (cf. CE, 28.09.2020, n° 425630). Par suite, le prononcé d'une mesure d'expertise aux fins que soit déterminé le taux d'invalidité dont M. B... est atteint est dépourvu du caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative, dès lors qu'il ne peut plus, à ce jour, introduire, de façon recevable, un recours contre la décision du 11 mai 2023.
5. Si la mesure d'expertise que le requérant sollicite a également pour objet d'évaluer l'ensemble des préjudices consécutifs à la lombosciatique qu'il soutient avoir contractée en 1985, alors qu'il était en service, il est constant que l'imputabilité au service de cette pathologie n'a pas été reconnue par le ministre des armées. En conséquence, une éventuelle action en responsabilité à l'encontre de l'Etat en réparation des préjudices personnels voire patrimoniaux qui ne seraient pas réparés par l'attribution d'une pension militaire d'invalidité, est, en tout état de cause, à ce jour, dépourvue d'objet. Par suite, le prononcé de la mesure d'expertise ne présente pas davantage le caractère d'utilité requis par l'article R. 532-1 du code de justice administrative, sur les autres chefs de mission.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
O R D O N N E :



Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B....
Copie en sera adressée, pour information, au ministre des armées.
Fait à Marseille, le 14 décembre 2023



N° 23MA027882
LH