CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 16/01/2024, 22BX01811, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler, d'une part, l'arrêté du 14 janvier 2020 par lequel le maire du Château-d'Oléron a mis fin à son détachement dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services à compter du 20 janvier 2020 et, d'autre part, l'arrêté du 11 février 2020 par lequel le maire du Château-d'Oléron a retiré l'arrêté du 21 janvier 2020 la plaçant provisoirement en congé pour invalidité temporaire imputable au service, et a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie.
Par un jugement n° 2000696/2001870 du 3 mai 2022, le tribunal a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 4 juillet 2022, 25 novembre 2022, 15 septembre 2023 et 5 décembre 2023, Mme A... B..., représentée par la SCP KPL, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers n° 2000696/2001870 du 3 mai 2022 ;
2°) d'annuler les arrêtés en litiges des 14 janvier et 11 février 2020 ;
3°) d'enjoindre à la commune du Château-d'Oléron de reconnaître l'imputabilité au service de son état de santé, avec toutes les conséquences de droit sur sa rémunération et le remboursement des frais associés, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre à la commune du Château-d'Oléron de la réintégrer dans ses effectifs et de reconstituer sa carrière dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) d'ordonner, avant-dire droit, une expertise médicale ;
6°) de mettre à la charge de la commune du Château-d'Oléron une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
- le jugement ne comporte pas les signatures des magistrats membres de la formation de jugement et du greffier d'audience ;
- le jugement est insuffisamment motivé ;
En ce qui concerne la recevabilité de sa demande de première instance dirigée contre l'arrêté du 14 janvier 2020 mettant fin à son détachement :
- elle n'était pas tenue de soumettre sa contestation de l'arrêté à une médiation préalable dès lors que celle-ci ne concerne que les seules décisions énumérées à l'article 1er du décret n° 2018-101 du 16 février 2018, parmi lesquelles ne figure pas la décision attaquée ;
- sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2020 a été présentée dans le délai de recours contentieux ;
- sa demande d'annulation n'était pas insuffisamment motivée dès lors qu'elle comportait l'exposé de moyens de droit.
Au fond, en ce qui concerne la décision mettant fin à son détachement sur l'emploi de directeur général des services de la commune :
- cette décision est insuffisamment motivée car elle n'expose pas les raisons pour lesquelles elle a été prise ;
- contrairement ce qu'ont estimé les premiers juges, il existait une possibilité de la reclasser au sein de la commune ; l'obligation de reclassement, prévue par l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, a ainsi été méconnue ;
- la décision en litige, qui n'est aucunement justifiée par l'intérêt du service, constitue une sanction disciplinaire déguisée.
Au fond, en ce qui concerne la décision refusant de reconnaitre l'imputabilité au service de sa pathologie :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il existe bien un lien de causalité entre sa pathologie et ses conditions de travail, qui avait été reconnu par les médecins qui l'ont examinée et notamment par l'expert mandaté par la commune, et la commission de réforme ;
- la commune a commis une erreur d'appréciation en rejetant sa demande qu'elle n'a pas examinée avec toute l'attention requise, manifestant au contraire très tôt sa volonté de s'opposer à sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie ; l'enquête administrative diligentée n'est pas probante ; elle ne présente pas d'état antérieur expliquant sa pathologie dès lors que les certificats médicaux produits montrent que celle-ci n'a pas de rapport avec les affections qu'elle a connues dans le passé et qui sont guéries ; elle a été victime d'un épuisement professionnel dû à une surcharge de travail ; la commune n'a opposé aucun élément aux conclusions concordantes des médecins qui ont estimé que son état de santé était bien imputable à ses conditions de travail.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 septembre 2022, 12 décembre 2022 et 23 novembre 2023, la commune du Château-d'Oléron, représentée par la SELARL OMF Avocats, agissant par Me Maître-Faurie, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2020 sont irrecevables dès lors qu'elles ne reposent sur aucun exposé des moyens de droit, que Mme B... aurait dû soumettre son différend à une médiation avec la commune qui a signé une convention instituant une médiation préalable obligatoire, que le tribunal a été saisi après l'expiration du délai de recours contentieux ; au fond, elle soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ;
- le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Faïck,
- les conclusions de M. Anthony Duplan, rapporteur public,
- et les observations de Mme B... et de Me Maître-Faurie pour la commune du Château-d'Oléron.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., attachée territoriale principale hors classe, a été détachée dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services de la commune du Château-d'Oléron à compter du 1er février 2013. En juin 2018, elle a été placée en congé de longue maladie en raison d'un " burn-out " professionnel avec épuisement et état dépressif. Le 22 mai 2019, Mme B... a adressé au maire du Château d'Oléron une demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie. Par un arrêté du 21 janvier 2020, le maire du Château d'Oléron a placé provisoirement Mme B... en congé pour invalidité temporaire imputable au service. En dépit de l'avis de la commission de réforme du 31 janvier 2020 favorable à la demande de Mme B..., le maire du Château d'Oléron a pris un nouvel arrêté du 11 février 2020 retirant son précédent arrêté du 21 janvier 2020 et refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de l'intéressée. Enfin, le maire du Château-d'Oléron a mis fin au détachement de Mme B... dans l'emploi de directrice générale des services de la commune par un arrêté du 14 janvier 2020. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler les arrêtés des 14 janvier et 11 février 2020. Elle relève appel du jugement rendu le 3 mai 2022 par lequel le tribunal a rejeté ses demandes.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les (...) les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué figurant au dossier de première instance et communiqué aux parties a été signée conformément aux dispositions précitées. La circonstance que l'ampliation du jugement, qui a été notifiée à l'appelante, ne comporte pas de signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.
3. En second lieu, au point 8 de son jugement, le tribunal a, s'agissant de la décision du 11 févier 2020, exposé de manière circonstanciée les motifs pour lesquels il a estimé que la maladie de Mme B... n'était pas imputable au service. S'agissant de la décision du 14 janvier 2020, le tribunal a, au point 17 de sa décision, répondu d'une manière suffisamment motivée au moyen tiré de la méconnaissance de l'obligation de reclassement prévue par l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans le cas où l'autorité territoriale met fin au détachement d'un agent occupant un emploi fonctionnel.
4. Il résulte de ce qui précède que le jugement du tribunal administratif de Poitiers n'est pas entaché des irrégularités alléguées.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité de la décision du 14 janvier 2020 mettant fin au détachement de Mme B... :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 4° (...) abrogent une décision créatrice de droits (...) ". L'arrêté en litige, qui vise l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, fait état de l'indisponibilité physique pour maladie de Mme B... en rappelant que celle-ci exerçait les fonctions de directrice générale des services de la commune, et met fin à son détachement sur cet emploi en invoquant l'intérêt du service. Cet arrêté satisfait à l'obligation de motivation prévue par les dispositions précitées.
6. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire occupant un emploi fonctionnel mentionné aux alinéas ci-dessous et que la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, celui-ci peut demander à la collectivité ou l'établissement dans lequel il occupait l'emploi fonctionnel soit à être reclassé dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis, soit à bénéficier, de droit, du congé spécial mentionné à l'article 99, soit à percevoir une indemnité de licenciement dans les conditions prévues à l'article 98. Ces dispositions s'appliquent aux emplois : - de directeur général des services (...) ".
7. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire territorial sur un emploi fonctionnel mentionné à l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, à l'initiative de la collectivité au sein de laquelle il est détaché sur un tel emploi, que cette fin de fonctions intervienne avant le terme normal du détachement ou résulte du non-renouvellement de celui-ci, ce fonctionnaire est en principe réintégré dans son corps ou cadre d'emplois et réaffecté à la première vacance ou création d'emploi dans un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d'origine en application de l'article 67 de la même loi. Si sa collectivité ou son établissement d'origine n'est pas en mesure, à la date à laquelle la fin du détachement prend effet, de le réaffecter sur un tel emploi, le fonctionnaire est en droit, dans les conditions prévues par l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, de demander à la collectivité ou à l'établissement dans lequel il occupait l'emploi fonctionnel de bénéficier d'un reclassement, d'un congé spécial ou d'une indemnité de licenciement.
8. Mme B... n'a jamais été titularisée dans les effectifs de la commune du Chateau d'Oléron au sein desquels elle a travaillé comme agent détaché jusqu'au 14 janvier 2020, date de l'arrêté en litige mettant fin à ce détachement. Il ressort des pièces du dossier que, avant d'être détachée sur l'emploi de directrice générale des services de cette commune, Mme B... était employée par le conseil départemental de la Charente-Maritime. Aucun élément au dossier ne permet d'estimer que le département de la Charente-Maritime, la collectivité d'origine de Mme B..., n'était pas en mesure de proposer à cette dernière un poste équivalent à son grade lorsqu'il a été mis fin au détachement. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le maire du Château-d'Oléron ne pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, prendre l'arrêté en litige du 14 janvier 2020 sans lui proposer un reclassement. Le moyen ainsi soulevé doit être écarté.
9. En troisième et dernier lieu, il peut être mis fin au détachement des agents occupant les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 pour des motifs tirés de l'intérêt du service. Eu égard à l'importance du rôle des titulaires de ces emplois et à la nature particulière des responsabilités qui leur incombent, le fait pour le directeur général des services d'une commune de s'être trouvé placé dans une situation ne lui permettant plus de disposer de la part de l'autorité territoriale de la confiance nécessaire au bon accomplissement de ses missions peut légalement justifier qu'il soit, pour ce motif, déchargé de ses fonctions. Il en est de même lorsque l'état de santé de l'agent n'est plus compatible avec l'exercice normal de ses fonctions de directeur général des services.
10. Il est constant qu'au 14 janvier 2020, date de l'arrêté en litige, Mme B... n'avait toujours pas repris ses fonctions au sein de la commune du Château-d'Oléron depuis son placement en congé de longue maladie le 14 juin 2018. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du courrier que le maire lui a adressé le 22 mai 2019, que Mme B... n'a pas donné suite aux propositions d'entretien formulées pour évoquer sa situation professionnelle ainsi que les difficultés rencontrées par les services de la commune du fait de son absence prolongée. Ces difficultés avaient en outre été accentuées par les problèmes de santé rencontrés par l'adjoint de Mme B... et par la fin, prévue en septembre 2019, de l'intérim assuré en son absence par un autre collaborateur. Dans ces conditions, en estimant que l'indisponibilité pour raisons de santé de Mme B... n'était plus compatible avec l'exercice normal de ses fonctions et que l'intérêt du service justifiait qu'il soit mis fin à son détachement dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services, le maire du Château-d'Oléron n'a entaché sa décision ni d'inexactitude matérielle des faits, ni d'une erreur manifeste d'appréciation et n'a aucunement entendu sanctionner l'intéressée de manière déguisée.
11. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2020.
En ce qui concerne la décision du 11 février 2020 portant refus de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de Mme B... :
12. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a institué un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " en insérant dans la loi du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, un article 21 bis aux termes duquel : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive (...) à une maladie contractée en service (...). Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. (...) / IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. (...) Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. (...) VI. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires. (...) ". Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 sont applicables, s'agissant des agents relevant du statut de la fonction publique territoriale, depuis le 13 avril 2019, date d'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique.
13. Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. Il ressort des pièces du dossier que le syndrome de " burn-out " professionnel avec épuisement et état dépressif de Mme B... a été diagnostiqué en 2018, et qu'un congé de longue maladie a été octroyé à cette dernière à compter du 14 juin 2018. Ainsi, à la date à laquelle la maladie de Mme B... a été diagnostiquée, les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 n'étaient pas encore applicables. Par suite, en rejetant la demande de Mme B... au motif qu'elle ne remplissait pas les conditions énoncées à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, le maire du Château-d'Oléron a commis une erreur de droit.
14. Toutefois, dans ses écritures devant la Cour, Mme B... a elle-même fait valoir que sa situation était régie par le droit antérieur à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, à savoir l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
15. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite (...) / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est apprécié par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".
16. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.
17. Il ressort des pièces du dossier que, dans son rapport d'expertise du 3 décembre 2019, le médecin-expert mandaté par la commune pour examiner Mme B... a estimé que cette dernière souffrait d'un syndrome dépressif majeur qui s'est déclenché à la suite d'une " altercation violente " avec un collègue de travail. Toutefois, ni ce rapport ni les autres éléments du dossier ne précisent les circonstances exactes dans lesquelles se serait déroulée l'altercation évoquée et le rapport qu'elle entretiendrait avec le syndrome d'épuisement dont est atteint Mme B.... Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B..., dont la manière de servir a fait l'objet d'appréciations élogieuses de la part de sa hiérarchie, ainsi qu'en attestent ses comptes-rendus d'entretiens professionnels, aurait fait part de difficultés particulières dans l'accomplissement de ses missions liées à une surcharge de travail ou des difficultés d'ordre relationnel, notamment avec le maire. Elle n'a, en particulier, consigné aucune remarque de ce type dans la rubrique " observations éventuelles de l'agent " figurant sur ses fiches d'évaluation entre 2013 et 2017. Si le médecin de prévention a indiqué, dans son rapport du 30 juillet 2019, que Mme B... lui avait, depuis son placement en congé de longue maladie, signalé sa surcharge de travail, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette dernière aurait demandé à consulter ce médecin pour ce motif lorsqu'elle exerçait ses fonctions au sein de la commune entre 2013 et 2018. A cet égard, et comme l'ont relevé les premiers juges, Mme B..., qui accomplissait d'ailleurs ses activités à temps partiel depuis mai 2015, pouvait s'appuyer sur une équipe de dix agents comprenant notamment un directeur général adjoint des services, un agent chargé de la gestion des ressources humaines et un agent s'occupant des marchés publics et du suivi des chantiers. Quant aux attestations d'employés de la commune versées au dossier, elles soulignent l'engagement professionnel de Mme B... mais ne permettent pas, eu égard à leur teneur, de retenir l'existence d'une surcharge de travail ou de relations professionnelles dégradées qui auraient été à l'origine de la maladie contractée par l'intéressée. Si l'auteur du rapport d'expertise médicale du 3 décembre 2019 s'est déclaré favorable à la demande de Mme B..., il a néanmoins été établi sur la base des déclarations de cette dernière. Quant à l'avis de la commission de réforme du 30 janvier 2020, également favorable à la demande de Mme B..., il présentait un simple caractère consultatif qui ne liait pas le maire. Dans ces circonstances, et quand bien même il n'existe pas de lien entre la maladie de Mme B... et ses pathologies antérieures déclarées guéries par les médecins, le maire du Château-d'Oléron n'a pas, en rejetant la demande dont il était saisi, méconnu les dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984.
18. Enfin, la décision attaquée du 11 février 2020 trouve son fondement légal dans les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 qui peuvent être substituées à celles de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 dès lors que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver Mme B... d'aucune garantie et que le maire du Château-d'Oléron dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions.
19. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise ni de se prononcer sur l'exception de prescription opposée par la commune à la demande de Mme B..., que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est entaché d'aucune contradiction de motifs, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 11 février 2020.
20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
21. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais d'instance :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions présentées par Mme B... tendant à ce que la commune du Château-d'Oléron, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, lui verse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces mêmes dispositions en mettant à la charge de l'appelante la somme demandée par l'intimée au titre de ces mêmes frais.
DECIDE
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune du Château-d'Oléron au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune du Château-d'Oléron.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Ghislaine Markarian, présidente,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
M. Julien Dufour, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2024.
Le rapporteur,
Frédéric Faïck
La présidente,
Ghislaine Markarian
La greffière,
Catherine Jussy
La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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