CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 13/05/2025, 23MA02832, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision13 mai 2025
Num23MA02832
JuridictionMarseille
Formation4ème chambre
PresidentM. DUCHON-DORIS
RapporteurM. Michaël REVERT
CommissaireMme BALARESQUE
Avocats

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, qui a transmis sa demande au tribunal administratif de Marseille sur le fondement de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, d'une part, d'annuler la décision du 16 septembre 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation des infirmités " séquelles de maladie de Kienböck du poignet gauche chez un droitier " et " séquelles de fracture de la cheville gauche " et au titre de l'infirmité nouvelle " douleurs lombo-dorsales permanentes ", et d'autre part, d'enjoindre à la ministre des armées de fixer le taux d'invalidité de son infirmité " séquelles de maladie de Kienböck du poignet gauche chez un droitier " au taux de 50 % à compter 14 septembre 2020 et sur la période du 19 mars 2012 au 24 octobre 2016, de fixer le taux d'invalidité de son infirmité " séquelles de fracture de la cheville gauche " au taux de 40 % et celui de son infirmité " douleurs lombo-dorsales permanentes " au taux de 10 % à compter du 25 octobre 2016.

Par un jugement n° 2003849 du 27 septembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette décision, a jugé que M. A... a droit à une pension militaire d'invalidité, à compter du 25 octobre 2016, d'abord pour l'infirmité " séquelles de maladie de Kienböck du poignet gauche chez un droitier " au taux de 50 %, ensuite pour l'infirmité " séquelles de fracture de la cheville gauche " au taux de 40 % et enfin pour l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques. Pas de radiculalgie " au taux de 10 % et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, au bénéfice de Me Lê.



Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 27 novembre 2023 et 6 janvier 2025 et un mémoire enregistré le 27 février 2025, non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, le ministre des armées demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 27 septembre 2023 ;

2°) de rejeter la demande de M. A... en tant qu'elle porte sur les infirmités " séquelles de fracture de la cheville gauche " et " dorso-lombalgies chroniques ".

Le ministre soutient que :
- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé en droit et manque de base légale, dès lors, d'une part, qu'il se borne à viser l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et omet de se fonder sur l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, alors qu'il fait droit à une demande de révision de pension pour aggravation, et d'autre part, qu'il ne justifie pas de l'imputabilité au service de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques " ;
- s'agissant de l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques " :
- * à titre principal, c'est à tort que le tribunal a retenu un taux d'invalidité de 10 % pour l'infirmité " dorso-lombalgies chroniques ", dont l'évaluation par le médecin en charge des pensions est conforme au guide-barème et qui ne peut tenir compte de la limitation du périmètre de marche et de l'activité quotidienne déjà prise en compte pour l'appréciation de l'infirmité de sa cheville gauche ;
- * subsidiairement, cette infirmité n'est pas imputable au service ;
- *très subsidiairement, cette infirmité est constitutive d'une maladie, dont l'indemnisation est subordonnée à l'octroi d'un taux d'invalidité de 30 % ;
- s'agissant de l'infirmité " séquelles de fracture de la cheville gauche " :
*aucune aggravation significative ne peut être retenue au jour de la demande de pension, nonobstant la nécessité du port de chaussures orthopédiques et dès lors que le flexum du genou gauche ne peut être pris en compte faute d'avoir été l'objet de la demande de pension.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 septembre 2024 et 21 février 2025, M. A..., représenté par Me Lê, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en faisant valoir que les moyens d'appel ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 5 février 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 février 2025 à 12 heures, et par une ordonnance du 21 février 2025, a été reportée au 28 février 2025 à 12 heures.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille du 29 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.


Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Revert,
- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,
- et les observations de Me Lê, représentant M. A....


Considérant ce qui suit :


1. M. A..., ancien major des commandos de la marine nationale, radié des contrôles le 19 avril 2011, titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux fixé en dernier lieu à 55 %, au titre des infirmités dites " séquelles de la maladie de Kienbock du poignet gauche chez un droitier " et " séquelles de fracture de la cheville gauche ", en a demandé la révision le 27 octobre 2016, pour aggravation de ces infirmités et pour une infirmité nouvelle liée à des douleurs lombo-dorsales permanentes. Par une décision du 16 septembre 2019, le ministre des armées a rejeté sa demande. Mais par un jugement du 27 septembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette décision rejetant la demande de révision de pension militaire d'invalidité de
M. A... au titre de ces trois infirmités, et a fixé à 50 % le taux d'invalidité attribuée à la première d'entre elles, à 40 % celui attribué à la deuxième infirmité et à 10 % le taux correspondant à la dernière infirmité. Compte tenu de l'argumentation qu'il développe à l'appui de sa requête, le ministre des armées doit être regardé comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il a fait droit à la demande de M. A... portant sur ces deux dernières infirmités.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la révision de pension pour aggravation des séquelles de fracture de la cheville gauche :

2. Aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable au jour de la demande de révision de pension de M. A... : " La pension prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen,
à son initiative, par une commission de réforme (...). L'entrée en jouissance est fixée à la date
du dépôt de la demande ". L'article L. 29 du même code, applicable à cette même date, dispose que : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. (...) ". Il résulte de ces premières dispositions que c'est à la date du dépôt de la demande de révision de pension qu'il faut se placer pour évaluer le taux des infirmités à raison desquelles la révision est demandée. Les secondes dispositions, qui exigent une aggravation réelle des blessures ou maladies susceptible d'être retenue au regard des exigences de l'article L. 29, ne permettant pas de remettre en cause, en l'absence d'aggravation effective, les bases de la liquidation initiale ni en ce qui concerne le libellé ou le caractère des infirmités pensionnées ni en ce qui concerne l'application qui a été faite des barèmes lors de cette liquidation.

3. Il résulte de l'instruction que, le 11 septembre 2007, M. A..., alors en service commandé, a été victime, au cours d'une séance d'aérocordage, d'une fracture de la malléole externe et d'une fracture articulaire antérieure du pilon tibial de la cheville gauche, qui ont justifié le 17 septembre 2007 une ostéosynthèse du pilon par deux vis permettant une réduction de la surface articulaire et par une greffe de l'os sous-chondral. Pour lui octroyer, au titre des séquelles de cette fracture de la cheville gauche, une pension militaire d'invalidité fixée en dernier lieu au taux de 30 %, le ministre des armées s'est fondé sur les rapports d'expertise médicale des 21 octobre 2010 et 10 septembre 2012 qui faisaient apparaître les gênes fonctionnelles consistant en une station debout unipodale gauche difficile à maintenir, une marche avec nette boiterie, limitée à un périmètre de 200 mètres, une rotation externe du pied gauche d'une vingtaine de degrés, une cheville globuleuse, un déficit d'une vingtaine de degrés par rapport à l'autre membre des mouvements de flexion-extension de la cheville gauche, une persistance d'un équin d'une dizaine de degrés, en l'impossibilité de l'inversion du pied gauche, l'éversion possible de seulement quelques degrés, ainsi qu'en une instabilité antéro-postérieure traduite par un net tiroir antérieur de la cheville. La comparaison de ces éléments médicaux, contemporains de la dernière décision d'octroi de la pension, avec le rapport du médecin expert désigné par l'administration des pensions pour statuer sur la demande de révision de M. A..., établi le 14 juin 2018, montre que celui-ci présente désormais, outre les limitations fonctionnelles précitées, une limitation de la marche à un périmètre de 100 mètres et un flexum du genou gauche à la marche, et que l'intéressé doit porter un appareillage sur mesure consistant soit en une botte anti-équin soit en des chaussures thérapeutiques avec aides techniques.

4. Or, en premier lieu, il résulte des termes mêmes du rapport du médecin expert du 14 juin 2018 que pour proposer un taux d'invalidité supplémentaire de 10 % correspondant à cette aggravation des séquelles de la fracture de la cheville gauche, liée notamment à la nécessité d'un appareillage, ce médecin s'est fondé sur des prescriptions médicales du 17 octobre 2017 d'une botte anti-équin et d'orthèses plantaires, postérieures à la demande de révision de pension. Il ne résulte ni de ce rapport ni d'aucune autre pièce de l'instruction, pas même le certificat médical du 13 juin 2016 produit par M. A... à l'appui de sa demande, que l'aggravation de son infirmité justifiant un tel appareillage était apparue avant la présentation de sa demande de révision de pension. Par conséquent, conformément à la règle énoncée au point 2 et ainsi que le soutient le ministre des armées, ni le médecin expert ni le tribunal ne pouvaient tenir compte d'une telle gêne fonctionnelle pour apprécier l'aggravation de l'infirmité de M. A....

5. En deuxième lieu, si M. A... affirme, en invoquant ses doléances retranscrites dans le rapport d'expertise médicale du 10 septembre 2012, que le flexum du genou gauche est une conséquence directe de la fracture de la cheville gauche, ni ce rapport ni du reste celui du
14 juin 2018 n'établissent de filiation médicale entre ces deux affections, ni ne justifient que la première, qui n'a pas été l'objet de la demande de révision, ne constituerait pas une infirmité distincte de la seconde. Le médecin expert ne pouvait donc, pas davantage que l'appareillage orthopédique, tenir compte de cette affection pour proposer un taux supplémentaire d'invalidité de 10 %.

6. En troisième lieu, s'il est exact que la dernière décision d'octroi de la pension de
M. A... au titre des séquelles de la fracture de la cheville gauche mentionne un varus équin de 5°, alors que le médecin expert constatait le 10 septembre 2012 un varus équin d'une " dizaine de degrés ", l'intéressé ne peut utilement remettre en cause le libellé et le caractère de cet aspect de son infirmité ainsi mentionnés dans cette décision, comme il a été dit au point 2. Pour prétendre que ce varus équin se serait aggravé depuis cette décision, M. A..., qui ne produit à ce titre aucune pièce médicale contemporaine de sa demande de révision mais verse au dossier des certificats et prescriptions des 4 novembre 2019, 28 avril 2020, et 23 mai 2023 ne se rapportant pas à un état médical antérieur, ne peut se borner à relever que le médecin expert a omis de mesurer ce varus et de reporter ces mesures dans son rapport du 14 juin 2018. La seule circonstance que cette affection se soit aggravée entre le 21 octobre 2010 et le 10 septembre 2012 ne peut suffire à établir une aggravation effective et significative de celle-ci au jour de la demande de révision de pension.

7. En quatrième lieu, pour les mêmes raisons que celles énoncées à la première phrase du point précédent, M. A... ne peut utilement prétendre qu'aucune des décisions ayant statué sur ses précédentes demandes n'aurait pris en compte " la présence d'une fracture discrètement déplacée intéressant la partie antérieure et inférieure du tibia s'étendant jusqu'à la malléole médiale ", observée sur la radiographie réalisée une demi-heure après l'accident du
11 septembre 2007.

8. Ainsi, dès lors que deux des affections prises en compte par le médecin expert pour proposer un taux supplémentaire d'invalidité de 10 % en lien avec l'aggravation des séquelles de la fracture de la cheville gauche sont sans incidence sur ses droits à révision de pension à ce titre, et que M. A... n'apporte aucun élément médical, se rapportant à son état de santé au jour du dépôt de sa demande, de nature à justifier l'attribution d'un taux égal ou supérieur à 10 % au titre de cette aggravation, le ministre des armées est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille, même en ne tenant compte qu'une des deux affections précitées, a fait droit à cette demande de révision de pension suivant un taux d'incapacité supplémentaire de 10 %.

9. Il est néanmoins loisible à M. A..., s'il s'y croit fondé, de présenter une nouvelle demande de révision pour tenir compte des éléments médicaux postérieurs à sa demande du 27 octobre 2016.

En ce qui concerne la révision de pension au titre des douleurs dorso-lombaires permanentes :

10. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la demande de révision de pension de M. A... : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'évènements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". L'article L. 3 du même code dispose que : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : [...] 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée ". L'article L. 4 de ce code ajoute que : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 p. cent. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 p. cent ; (...) / 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse (...) 30 % en cas d'infirmité unique (...) ".

11. Il résulte des dispositions des articles L. 2 et L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre citées précédemment, que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle.

12. En outre, pour l'application de ces dispositions ainsi que celles de l'article L. 4 de ce code, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine, consécutive à un fait précis de service. En l'absence de tout fait précis de service ayant causé un traumatisme qui serait à l'origine de l'infirmité litigieuse, celle-ci doit être qualifiée de maladie.

13. Au soutien de sa demande de révision de pension pour douleurs dorso-lombaires,
M. A... a rattaché cette infirmité, décrite par le certificat médical du 13 juin 2016 également joint à sa demande, comme un handicap lombaire contribuant à limiter son périmètre de marche à 100 mètres, à six accidents de service, survenus le 24 août 1972 à Lorient, les 21 avril et
12 mai 1980 à Toulon, le 10 juillet 1987 à Saint-Mandrier et les 6 septembre 1994 et
6 décembre 2005.

14. Mais, d'une part, il ne résulte d'aucune des pièces relatives à la carrière de
M. A..., notamment son livret militaire et son livret médical lequel mentionne au 24 août 1972 une entorse à la cheville gauche, que celui-ci aurait été victime, à cette date ou au 10 juillet 1987, d'un fait précis de service à l'origine de douleurs dorso-lombaires. Si au titre des " autres constatations faites au cours du service actif ", le livret médical de l'intéressé mentionne
le 21 avril 1980 des "douleurs post-traumatiques niveau L2-L3 ", et le 12 mai 1980 un " trauma au niveau du coccyx " et une " fracture du coccyx ", et précise le 24 avril 1980 qu'une imagerie médicale a permis d'identifier un début d'arthrose lombaire " avec aspect cunéiforme de L4, lipping antérieur de L4-L5 ", il ne résulte ni de ce document, ni du rapport du médecin expert du 14 juin 2018, qui ne se prononce pas sur l'origine des douleurs dorso-lombaires, ni d'aucune pièce du dossier d'instance, que ces faits de service, dont la nature précise demeure indéterminée, seraient malgré leur ancienneté, à l'origine de ces douleurs dont M. A... demande l'indemnisation le 27 octobre 2016. Il en est de même des faits précis de service dont il a été victime les 6 septembre 1994 et 6 décembre 2005, établis par rapports circonstanciés, à la suite desquels ni le livret médical ni aucune autre pièce ne démontrent l'apparition de douleurs dorso-lombaires permanentes. A cet égard, le livret médical de M. A... indique que le 12 mai 2006 le médecin notait " bonne évolution " concernant les suites du traumatisme du 6 décembre 2005, que, lors de la visite médicale du 25 mars 2010, le rachis a été considéré comme souple, sans trouble statique et que ce n'est qu'à l'occasion de sa radiation des cadres, le 28 avril 2011, que
M. A... s'est plaint de douleurs dorso-lombaires. Si l'intéressé invoque l'existence d'une filiation médicale directe entre ces faits précis de service et ses douleurs dorso-lombaires en affirmant s'être soigné à l'infirmerie de service en y prenant des médicaments antalgiques et, après sa radiation, s'être fait prescrire de tels médicaments, les prescriptions médicales produites à ce titre, postérieures à sa radiation, ne sont pas de nature à justifier d'un tel lien.

15. D'autre part, en se prévalant non seulement de l'ensemble des faits invoqués à l'appui de sa demande de révision, mais encore des chutes, fractures, sauts en parachute, contraintes de portage répétitives de sacs et d'armes très lourds, d'appareils de plongée portés au niveau de la nuque et des lombaires, qui sont autant de conditions générales de service auxquelles sont exposés tous les militaires servant dans la même unité, M. A... ne rapporte pas la preuve, qui pourtant lui incombe, faute de pouvoir prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, compte tenu des périodes des faits de service, que l'infirmité en cause trouverait son origine dans un tel fait, et serait constitutive d'une blessure, et non d'une maladie.

16. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué, que le ministre des armées est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande de révision de pension militaire d'invalidité de M. A... en ce qui concerne les séquelles de fracture de la cheville gauche et les douleurs dorso-lombaires permanentes. Il y a donc lieu d'annuler ce jugement dans cette mesure et de rejeter la demande de révision de pension de M. A... au titre de ces deux infirmités.



Sur les frais liés au litige :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Les conclusions présentées sur ce fondement par M. A... ne peuvent donc qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2003849 rendu le 27 septembre 2023 par le tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il a fait droit à la demande de révision de pension militaire d'invalidité de M. A... pour aggravation des séquelles de la fracture de la cheville gauche et pour douleurs dorso-lombaires permanentes.
Article 2 : Les conclusions de M. A... tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité au titre de l'aggravation des séquelles de la fracture de la cheville gauche et pour douleurs dorso-lombaires permanentes, ainsi que ses prétentions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées, à M. B... A... et à Me Lê.

Délibéré après l'audience du 29 avril 2025, où siégeaient :
- M. Duchon-Doris, président de la Cour,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 mai 2025.
N° 23MA028322