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Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, du 30 décembre 1994, 93BX01181, inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 4 octobre 1993 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, présentée par M. X... AHMED demeurant ... ; M. X... AHMED demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement en date du 30 juin 1993 du tribunal administratif de Poitiers en tant que ce jugement est relatif à sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité ; 2°) de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 décembre 1994 : - le rapport de M. de MALAFOSSE, conseiller ; - et les conclusions de M. CIPRIANI, commissaire du gouvernement ; Considérant que M. X... AHMED ne fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 30 juin 1993 qu'en tant que ce jugement est relatif à ses conclusions tendant à obtenir une pension militaire d'invalidité ; que le tribunal s'est borné, en ce qui concerne ces conclusions, à les renvoyer, en application de l'article R.82 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat afin qu'il règle la question de compétence ; qu'en tant qu'il prononce un tel renvoi, le jugement est insusceptible de recours ; que, dès lors, l'appel de M. X... AHMED est irrecevable et doit être rejeté ;Article 1ER : La requête de M. X... AHMED est rejetée.
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de MARSEILLE, 5ème chambre, 20/12/2024, 24MA02011, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner l'Etat à lui verser une somme totale de 30 000 euros en réparation des préjudices subis résultant de carences fautives de l'Etat dans la prise en charge de la prévention des risques liés à son exposition aux poussières d'amiante, assorties des intérêts et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1903345 du 20 juin 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2024, sous le n° 24MA02011, M. A..., représenté par la Selarl Teissonnière-Topaloff-Lafforgue-Andreu et Associés, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 juin 2024 ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral et de 15 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence, assorties des intérêts à compter de la date de la première demande d'indemnisation et de leur capitalisation ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la prescription quadriennale ne pouvait lui être valablement opposée dès lors que le ministre des armées n'établit pas la date à laquelle l'attestation d'exposition lui a été remise ; - le fait de considérer que le délai de prescription a commencé à courir au jour de l'établissement de l'attestation d'exposition porte une atteinte manifeste au principe du droit à un procès équitable en ce qu'il ne lui permettrait pas d'introduire un recours effectif ; - la responsabilité de l'Etat est engagée pour faute, en raison de son exposition aux poussières d'amiante durant sa carrière au sein de plusieurs navires de la marine nationale sans protection ; - il a subi un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence en lien avec son exposition à l'amiante. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2024, le ministre des armées et des anciens combattants conclut au rejet de la requête de M. A.... Il fait valoir que : - la créance est prescrite ; - les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Le mémoire complémentaire, présenté pour M. A..., représenté par la Selarl Teissonnière-Topaloff-Lafforgue-Andreu et Associés, enregistré le 22 novembre 2024 n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu, - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - le décret n° 2013-513 du 18 juin 2013 ; - l'avis du Conseil d'Etat n° 457560 du 19 avril 2022 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marchessaux, - les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public, - et les observations de Me Mesland-Althoffer, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... a été employé au sein de plusieurs navires de la marine nationale du 7 février 1972 au 1er février 1987. Par une réclamation préalable du 17 avril 2018 reçue le 19 avril 2018, il a demandé au ministre des armées de lui verser la somme totale de 30 000 euros en réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence en raison de son exposition à l'amiante lors de l'exercice de son activité professionnelle résultant des carences fautives de l'Etat dans la protection de ses agents contre l'exposition aux poussières d'amiante. Cette demande a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. M. A... relève appel du jugement du 20 juin 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme totale de 30 000 euros en réparation des préjudices subis résultant de carences fautives de l'Etat dans la prise en charge de la prévention des risques liés à son exposition aux poussières d'amiante. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes du premier alinéa de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'État, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : / (...) Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; / (...) Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ". Aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ". Aux termes de l'article 6 du même texte : " Les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ". Aux termes, enfin, du premier alinéa de son article 7 : " L'Administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond ". 3. Ainsi que l'a estimé le Conseil d'Etat dans son avis n° 457560 du 19 avril 2022, lorsque la responsabilité d'une personne publique est recherchée, les droits de créance invoqués en vue d'obtenir l'indemnisation des préjudices doivent être regardés comme acquis, au sens des dispositions citées au point 2, à la date à laquelle la réalité et l'étendue de ces préjudices ont été entièrement révélées, ces préjudices étant connus et pouvant être exactement mesurés. La créance indemnitaire relative à la réparation d'un préjudice présentant un caractère continu et évolutif doit être rattachée à chacune des années au cours desquelles ce préjudice a été subi. Dans ce cas, le délai de prescription de la créance relative à une année court, sous réserve des cas visés à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968, à compter du 1er janvier de l'année suivante, à la condition qu'à cette date le préjudice subi au cours de cette année puisse être mesuré. 4. Aux termes de l'article 1er du décret du 18 juin 2013 relatif à la surveillance médicale post professionnelle des militaires exposés à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction : " Tout militaire radié des cadres ou des contrôles, inactif, demandeur d'emploi ou retraité et non titulaire d'une pension d'invalidité au titre d'une des affections liées à des agents désignés ci-après, qui, du fait de ses fonctions au sein du ministère de la défense (...), a été exposé à des agents cancérogènes, au sens de l'article D. 461-25 du code de la sécurité sociale, ou à des agents mutagènes ou toxiques pour la reproduction, définis à l'article R. 4412-60 du code du travail, a droit, sur sa demande, à une surveillance médicale post professionnelle prise en charge par le dernier ministère employeur ". Selon l'article 2 de ce décret : " En cas d'exposition à l'un des agents mentionnés à l'article 1er, subie dans les conditions précisées à ce même article, l'organisme d'emploi du ministère de la défense (...) délivre une attestation d'exposition au militaire, dès la cessation de ses fonctions en son sein, établie avec le médecin de l'organisme d'emploi au vu de la fiche d'exposition définie par l'article R. 4412-41 du code du travail. Cette attestation doit comporter les informations caractérisant l'exposition recueillies dans les conditions précisées par arrêté pour chaque agent cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction. / Si l'attestation d'exposition n'a pu être établie dès la cessation des fonctions concernées, elle sera délivrée à la demande de l'ancien militaire, sur présentation de la fiche d'exposition mentionnée à l'alinéa précédent ou sur la base d'une attestation signée du médecin de l'organisme d'emploi dont l'ancien militaire dépendait au moment de son exposition ou de témoignages ou de tout autre élément démontrant la matérialité de l'exposition. En l'absence de ces fiche, certificat ou autre élément, l'attestation d'exposition pourra être fournie à l'intéressé après une enquête administrative conduite par les organismes d'emploi en liaison avec les médecins et les services de prévention concernés. (...) ". 5. Il résulte de ces dispositions que l'attestation d'exposition est délivrée au militaire en vue de l'obtention d'une surveillance médicale post professionnelle par l'organisme d'emploi du ministère des armées soit dès la cessation de ses fonctions en son sein et dans le cas contraire, à la demande du militaire. Au regard du contenu de cette attestation, dont les mentions énumèrent précisément les périodes d'affectation du militaire sur des bâtiments renfermant des matériaux contenant de l'amiante au cours de sa carrière dans la marine nationale, l'intéressé doit être regardé comme ayant eu connaissance de l'étendue du risque à l'origine du préjudice moral (anxiété) et des troubles dans les conditions de l'existence dont il demande la réparation, à compter de la date à laquelle il en a eu connaissance, qui fait partir le délai de la prescription mentionnée au point 2. 6. Il résulte de l'instruction, en particulier d'une attestation d'exposition du 3 février 2009 établie par la direction du personnel militaire de la marine à la demande de M. A... du 7 janvier 2009 comme le précise le courrier d'accompagnement transmettant cette attestation que " M. A..., maître principal honoraire, a été affecté ou mis pour emploi, au cours de sa carrière, dans les formations suivantes renfermant des matériaux à base d'amiante, notamment sous forme de calorifugeages : [navires concernés] du 7 février 1972 au 3 avril 1978, du 20 octobre 1978 au 1er juillet 1981 et du 18 novembre 1986 au 1er février 1987 ". Dès lors et eu égard à la date de l'attestation précitée et aux dates de début et de fin de l'exposition à l'amiante, cette attestation doit être regardée comme résultant nécessairement d'une demande de M. A.... Si ce dernier soutient que le ministre des armées n'établit pas la date de notification de cette attestation, aucun texte législatif ou réglementaire n'oblige le ministre des armées en sa qualité d'employeur à notifier en lettre recommandée ou par une remise contre récépissé ladite attestation compte tenu de sa finalité qui est de permettre au requérant de bénéficier d'une surveillance médicale post professionnelle. Ainsi, M. A... qui ne fait état d'aucune raison pour laquelle ce document, délivré à sa demande, ne lui serait parvenu pas dans le délai d'acheminement normal, doit être regardé comme ayant eu connaissance de l'étendue du risque à l'origine du préjudice moral et des troubles dans les conditions de l'existence dont il demande la réparation, dans lesquels est incorporé le préjudice d'anxiété, à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de l'attestation du 3 février 2009, qui est nécessairement intervenue au cours de l'année 2009. Par suite, le délai de prescription quadriennale de la créance de M. A... à l'encontre de l'Etat ayant débuté le 1er janvier 2010, cette créance était prescrite à la date du 19 avril 2018, à laquelle le ministre des armées a reçu sa réclamation préalable. 7. Aux termes de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...) ". Aux termes de l'article 13 de cette convention : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles ". 8. Les dispositions des articles 1er, 2 et 3 de la loi du 31 décembre 1968 mentionnées au point 2 ont été édictées dans un but d'intérêt général, en vue notamment de garantir la sécurité juridique de l'Etat en fixant un terme aux actions dirigées contre lui, sans préjudice des droits qu'il est loisible aux créanciers de faire valoir dans les conditions et les délais fixés par ces dispositions. Par suite, celles-ci ne peuvent être regardées comme portant atteinte au droit à un procès équitable, énoncé par les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lequel n'est pas absolu et peut se prêter à des limitations, notamment en ce qui concerne les délais dans lesquels les actions peuvent être engagées. Il en résulte que M. A... n'est pas fondé à soutenir que le fait de fixer le délai de prescription à la date à laquelle il a pris connaissance de l'attestation d'exposition méconnaitrait ces stipulations. 9. Dès lors que le délai de quatre ans, à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis, institué à peine de prescription par les dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1968, ne présente pas un caractère exagérément court, et n'a pas eu pour effet de priver M. A... de la possibilité de saisir un tribunal du litige l'opposant à l'Etat. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en fixant le délai de prescription à la date à laquelle il a pris connaissance de l'attestation d'exposition, il aurait été privé du droit à un recours effectif au sens de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être accueilli. 10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices subis résultant de carences fautives de l'Etat dans la prise en charge de la prévention des risques liés à son exposition aux poussières d'amiante. Sur les frais liés au litige : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. A... une somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées et des anciens combattants. Délibéré après l'audience du 6 décembre 2024, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - Mme Vincent, présidente assesseure, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 décembre 2024. 2 N° 24MA02011 fa
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 08/07/2025, 25MA00905, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat et l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre à lui verser une somme de 43 200 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa réclamation indemnitaire préalable du 11 juin 2024, en réparation du préjudice financier, correspondant aux salaires non versés, qu'il estime avoir subi au cours de la période de dix-huit mois, entre mars 1943 et septembre 1944, durant laquelle il a été contraint au travail forcé au camp 6, baraque 1023, au sein du complexe chimique d'IG Farben, à Ludwigshafen-am-Rhein, en Allemagne, dans le cadre du service de travail obligatoire (STO), et de mettre à leur charge une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2408643 du 18 mars 2025, le tribunal administratif de Marseille a, après avoir refusé d'admettre l'intervention de l'association Massaliotte culture et comédie, rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 26 mai 2025, M. B..., représenté par Me Pautot, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 mars 2025 ; 2°) à titre principal, de condamner l'Etat et l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre à lui verser cette somme de 43 200 euros, augmentée des intérêts de droit à compter de sa réclamation indemnitaire préalable du 11 juin 2024, en réparation de ce même préjudice financier ; 3°) à titre subsidiaire, de lui donner acte à ce que le ministre des armées lui a reconnu, à la page 4 de son mémoire en défense enregistré le 22 mai 2025, l'allocation d'une indemnité financière et, par voie de conséquence, de lui allouer celle-ci ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat et de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il est fondé à demander réparation dès lors qu'il rapporte la preuve qu'il a été victime d'un double crime contre l'humanité au sens des conventions internationales et du droit français : le transfert forcé en pays ennemi avec esclavage de groupe ; ces crimes sont imprescriptibles ; - durant sa déportation et sa mise en esclavage, il n'a reçu aucune rémunération ni de l'Etat, ni de l'Etat allemand ; - toute personne qui travaille doit être rémunérée équitablement : il s'agit de l'un des principes du droit du travail et de la protection sociale ; - sa situation a été mal analysée par le tribunal administratif de Marseille, lequel aurait dû estimer qu'il a bien été " déporté " au sens des textes en vigueur et qu'il a subi un esclavage de groupe ; la Cour devra lui reconnaître ces qualités ; - le jugement attaqué crée une distinction inopérante entre les crimes contre l'humanité ; - la loi du 14 mai 1951 sur laquelle se fonde le tribunal administratif de Marseille dans son jugement ne concerne pas l'indemnisation des heures de travail du STO ; - il rapporte la preuve qu'il a été un grand blessé de guerre ; - il n'a pas été payé, ce qui est contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, notamment fondée sur les articles 3 et 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - il a droit au versement de la somme de 43 200 euros, calculée sur la base d'un tarif horaire actualisé et porté à 10 euros de l'heure ; si sa période de déportation a été plus importante, soit du 13 mars 1943 au 15 avril 1945, sa demande de paiement des heures de travail du STO concerne une période de temps de dix-huit mois, soit de mars 1943 à septembre 1944 ; - à titre subsidiaire, le ministre des armées indiquant dans son mémoire qu'" à titre infiniment subsidiaire : la loi du 14 mai 1951 qui a créé le statut des personnes contraintes au travail a reconnu en son article 1er aux personnes astreintes au travail en pays ennemi un droit à réparation et a défini à leur profit un régime légal de réparation. Un décret n° 52-1000 du 17 août 1952 a été pris en application de cette même loi. Son article 11 a notamment institué une indemnité forfaitaire destinée à réparer les préjudices subis par les bénéficiaires du statut de personnes contraintes au travail dont le montant a été fixé par l'article 44 de la loi n° 53-1340 du 31 décembre 1953 ", il demande à la Cour d'en tirer les conséquences et de l'indemniser ; la prescription ne s'applique pas dès lors que, dans un cas similaire, une personne contrainte au travail forcé a fait l'objet d'une indemnité forfaitaire. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2025, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - à titre principal, sur la déchéance de la créance en vertu de la loi du 29 janvier 1831 ou de la loi du 31 décembre 1945 : . le caractère imprescriptible des crimes contre l'humanité, posé par l'article 213-5 du code pénal, ne s'attache qu'à l'action pénale et à l'action civile engagée devant la juridiction répressive, et demeure, en l'absence de dispositions contraires, sans effet sur l'action en réparation dirigée par des particuliers contre l'Etat ; . tous les éléments relatifs à la créance de M. B... ayant été réalisés et révélés dès la date du 15 avril 1945, celle-ci se rattache à l'année 1945 et elle est donc atteinte par la déchéance quadriennale en vertu de la loi du 29 janvier 1831 ou de la loi du 31 décembre 1945 ; à défaut, et en tout état de cause, la loi n° 51-538 du 14 mai 1951 a institué le statut de personne contrainte au travail en pays ennemi en faveur des personnes assujetties au STO, en Allemagne ; sur le fondement de ces dispositions, M. B... a obtenu, le 22 octobre 1957, la reconnaissance de sa qualité de personne contrainte au travail en pays ennemi ; sa créance se rattache donc au plus tard à l'année 1951 ou à l'année 1957 ; - à titre subsidiaire, la créance est prescrite en vertu de la loi du 31 décembre 1968, le point de départ du délai de prescription ne pouvant être fixé postérieurement à l'année 2008, un arrêté du 16 octobre 2008 ayant complété la législation adoptée en 1951 en instituant la carte de personne contrainte au travail en pays ennemi et en fixant les caractéristiques ; - à titre infiniment subsidiaire, et en tout état de cause, la responsabilité de l'Etat relevant du régime de droit commun ne saurait être engagée dès lors qu'il existe un régime légal d'indemnisation des personnes pour les préjudices subis, résultant du STO, institué par la loi du 14 mai 1951 et exclusif de tout autre régime de réparation. La procédure a été communiquée à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre qui n'a pas produit de mémoire. Un courrier du 9 avril 2025, adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 12 juin 2025, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code pénal ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de procédure pénale ; - la loi du 29 janvier 1831, modifiée notamment par la loi n° 456-0195 du 31 décembre 1945 ; - la loi n° 51-538 du 14 mai 1951 ; - la loi n° 53-1340 du 31 décembre 1953 ; - la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 52-1000 du 17 août 1952 portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi n° 51-538 du 14 mai 1951 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Lombart, - les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique, - et les observations de Me Pautot, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... a principalement demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat et l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre à lui verser la somme de 43 200 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa réclamation indemnitaire préalable du 11 juin 2024, en réparation du préjudice financier, correspondant aux salaires non versés, qu'il estime avoir subi au cours de la période de dix-huit mois, entre mars 1943 et septembre 1944, durant laquelle il a été contraint au travail forcé au camp 6, baraque 1023, au sein du complexe chimique d'IG Farben, à Ludwigshafen-am-Rhein, en Allemagne, dans le cadre du service de travail obligatoire (STO), institué par l'autorité de fait, se disant " gouvernement de l'Etat français ", par un acte dit " loi du 16 février 1943 ". M. B... relève appel du jugement du 18 mars 2025 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande. Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle : 2. Aux termes de l'article 20 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente (...) ". Selon l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 susvisé pris pour l'application de cette loi : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence (...). / L'admission provisoire est accordée par la juridiction compétente (...) soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été statué. " 3. Il résulte de l'instruction que M. B..., né le 28 mai 1922, a déposé le 23 mai 2025 une demande d'aide juridictionnelle en vue d'engager la présente procédure sur laquelle il n'a pas encore été statué. Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 4. Aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 14 mai 1951 relative au statut des personnes contraintes au travail en pays ennemi, en territoire étranger occupé par l'ennemi ou en territoire français annexé par l'ennemi : " La République française, considérant les souffrances qu'ils ont subies, proclame et détermine, conformément aux dispositions de la présente loi, le droit à réparation : / a) Des Français (...) qui ont été contraints de quitter le territoire national et astreints au travail dans les pays ennemis ou occupés par l'ennemi (...) ". Selon l'article 2 de cette même loi : " Sont considérées comme ayant été " contraintes les personnes ayant fait l'objet d'une rafle ou encore d'une réquisition opérée en vertu des actes dits " loi du 4 septembre 1942 ", " décret du 19 septembre 1942 ", " loi du 16 février 1945 ", " loi du 1er février 1944 " relatifs au STO, actes dont la nullité a été expressément constatée. " Aux termes de l'article 3 de cette loi : " Le bénéfice de la présente loi est subordonné à une période de contrainte de trois mois au minimum en pays ennemi (...) / Aucune condition de durée n'est exigée en cas d'évasion, de rapatriement sanitaire ou de décès. " Aux termes de l'article 4 de cette loi : " Les maladies contractées ou aggravées et les blessures de toutes sortes subies pendant cette période de contrainte en pays ennemi, en territoire étranger occupé par l'ennemi ou en territoire français annexé par l'ennemi, sont réputées effets directs ou indirects de guerre ; les ayants droit et leurs ayants cause bénéficient, en conséquence, des dispositions incluses dans les lois régissant les pensions concédées aux victimes civiles de guerre. " Selon l'article 7 de cette loi : " Le temps passé dans les conditions prévues aux articles 1er, 2 et 3 ci-dessus est pris en considération dans le calcul de l'ancienneté de service exigée pour l'avancement et pour la retraite au même titre que le service militaire en temps de paix. Cette disposition ne pourra entraîner d'effet pécuniaire qu'à compter de la date de promulgation dudit statut. (...) ". Aux termes de l'article 8 de ladite loi : " Les bénéficiaires de la présente loi ont droit à la rééducation professionnelle et à leur admission aux emplois réservés dans les conditions établies par les textes législatifs ou réglementaires pris en la matière. " Selon l'article 9 de cette loi : " Une carte spéciale et un insigne distinctif sont créés pour les bénéficiaires du présent statut et seront attribués par, décision du ministre des anciens combattants et victimes de guerre. (...) ". Aux termes de l'article 10 de cette loi : " Les pertes de biens dûment justifiées, résultant d'un fait survenu au cours de la période de contrainte, seront indemnisées. Ces indemnités ne pourront se cumuler avec les sommes perçues pour le même objet au titre de la législation sur les dommages de guerre. ". Selon l'article 11 de ladite loi : " Une indemnité forfaitaire, dont le montant sera fixé par une loi spéciale, sera attribuée aux bénéficiaires du présent statut et, en cas de décès, à leurs ayants cause. " Enfin, aux termes de l'article 16 de cette loi : " Les bénéficiaires du présent statut ont droit, en qualité de victimes de la guerre, à tous les avantages d'ordre social mis à la disposition de ses ressortissants, combattants, prisonniers et déportés, par l'office national des anciens combattants et victimes de la guerre. " 5. En adoptant ces dispositions, dont une partie est aujourd'hui reprise dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, le législateur a entendu reconnaître un droit à réparation au titre des préjudices causés, durant la Seconde guerre mondiale, aux personnes contraintes au travail en pays ennemi, en territoire étranger occupé par l'ennemi ou en territoire français annexé par l'ennemi, et notamment à celles qui avaient fait l'objet d'une rafle ou d'une réquisition opérée en vertu de l'acte dit " loi du 16 février 1943 " portant institution du STO. A cet effet, cette loi a créé un statut leur reconnaissant la qualité de victimes de la guerre ainsi que des droits, et a prévu, par son article 11, l'attribution d'une indemnitaire forfaitaire. Après que le décret n° 52-1000 du 17 août 1952 portant règlement d'administration publique a fixé les modalités d'application de cette loi du 14 mai 1951, le montant de cette indemnité forfaitaire a été fixé à 11 000 francs par le deuxième alinéa de l'article 44 de la loi susvisée du 31 décembre 1953 portant règlement d'administration publique. 6. Prise dans son ensemble, cette loi doit ainsi être regardée comme ayant permis, autant qu'il a été possible, l'indemnisation des préjudices de toute nature causés aux victimes du STO, y compris, le cas échéant, de leur préjudice financier constitué par l'absence de versement d'un salaire en contrepartie du travail fourni. Ce régime particulier d'indemnisation fait obstacle, depuis son entrée en vigueur, à ce que la responsabilité de droit commun de l'Etat puisse être recherchée au titre des mêmes préjudices. 7. Au cas particulier, il résulte de l'instruction que M. B... a été contraint au travail forcé, dans le cadre du STO, au sein du complexe chimique d'IG Farben, à Ludwigshafen-am-Rhein, en Allemagne, du 13 mars 1943 au 15 avril 1945. Toutefois, ainsi qu'il vient d'être dit, le préjudice financier dont M. B... recherche la réparation pour la période comprise entre mars 1943 et septembre 1944 entre dans le champ couvert par le régime particulier d'indemnisation institué par la loi du 14 mai 1951 qui est ainsi exclusif de tout autre mode de réparation. Il s'ensuit que ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat et de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre au titre de ce préjudice financier doivent être rejetées. 8. En outre, aux termes de l'article 9 de la loi susvisée du 29 janvier 1831, dans sa rédaction issue de l'article 148 de la loi du 31 décembre 1945 portant fixation du budget général (services civils) pour l'exercice 1946, applicable à la créance : " Sont prescrites et définitivement éteintes au profit de l'Etat (...) sans préjudice des déchéances prononcées par des lois antérieures ou consenties par des marchés et conventions, toutes créances qui, n'ayant pas été acquittées avant la clôture de l'exercice auquel elles appartiennent, n'auraient pu être liquidées, ordonnancées et payées dans un délai de quatre années à partir de l'ouverture de l'exercice pour les créanciers domiciliés en Europe (...) ". Aux termes de l'article 10 de la même loi du 29 janvier 1831, dans sa rédaction issue du décret-loi du 30 octobre 1935, la prescription n'est pas applicable " aux créances dont l'ordonnancement et le paiement n'auraient pu être effectués dans les délais déterminés par le fait de l'administration ou par suite de recours devant une juridiction ". Il résulte de ces dispositions que l'article 9 de la loi du 29 janvier 1831 avait institué un régime de déchéance quadriennale dans le cadre duquel la prescription des créances détenues sur l'administration était acquise à l'issue d'un délai de quatre ans qui courait à compter de l'exercice auquel elles se rattachaient. En revanche, et en tout état de cause, aucune des dispositions de ce texte ne prévoyait que la prescription ne courrait pas contre le créancier qui pouvait être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement. 9. Dans les circonstances de l'espèce, alors que la loi du 14 mai 1951, qui a institué le régime particulier d'indemnisation susmentionné, a été publiée au Journal officiel de la République française le 16 mai 1951, la créance dont se prévaut M. B..., qui au demeurant est, d'après ses propres dires, revenu en France en 1945, doit être regardée comme rattachable, au plus tard, à l'exercice budgétaire correspondant à l'année 1951. Sans cause de suspension ou d'interruption établie, ni même alléguée avant l'expiration du délai de quatre années à partir de l'ouverture de cet exercice budgétaire, la déchéance quadriennale était ainsi acquise, par application de l'article 9 précité de la loi susvisée du 29 janvier 1831 alors applicable, depuis de très nombreuses années, lorsque M. B... a, le 11 juin 2024, adressé des réclamations indemnitaires préalables auprès des services du ministre des armées et de ceux de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Il suit de là que le ministre des armées est fondé à opposer à ses conclusions indemnitaires la déchéance quadriennale. 10. Le caractère imprescriptible des crimes contre l'humanité, résultant, dans l'ordre juridique interne, de la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964, de l'article 7 du code de procédure pénale et de l'article 133-2 du code pénal, ne s'attache qu'à l'action pénale et à l'action civile engagée devant la juridiction répressive. En revanche, l'action en réparation dirigée par des particuliers contre l'Etat est soumise, en l'absence de texte les écartant expressément, aux règles de prescription fixées par la loi susvisée du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics comme aux règles de déchéance, antérieurement applicables, prévues par les dispositions précitées de la loi du 29 janvier 1831. Par suite, M. B...(ano)X(/ano) ne peut utilement soutenir, pour faire échec à ces règles de déchéance ou de prescription, que les actes à l'origine du préjudice financier qu'il invoque seraient constitutifs de crimes contre l'humanité, à supposer que les conditions dans lesquelles il a été contraint au travail forcé, au titre du STO, puissent présenter la nature d'un tel crime. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par suite, et alors que le ministre des armées n'a reconnu être débiteur d'aucune créance à l'encontre de M. B... dans son mémoire en défense susvisé, sa requête d'appel doit être rejetée en son entier, y compris, et par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : M. B... est admis à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Article 2 : La requête de M. B... est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Pautot, au ministre des armées et à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Délibéré après l'audience du 24 juin 2025, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Lombart, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2025. 2 No 25MA00905
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 08/07/2025, 25MA00403
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner l'Etat et l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre à lui verser une somme de 33 400 euros, augmentée des intérêts de droit à compter de sa réclamation indemnitaire préalable du 10 septembre 2024, en réparation du préjudice financier, correspondant aux salaires non versés, qu'il estime avoir subi en raison de la période de travail forcé à laquelle il a été contraint au sein de l'usine chimique Deutsche Metal, à Grafenberg, près de Düsseldorf, en Allemagne, du 17 mars 1944 au 8 mai 1945, dans le cadre du service de travail obligatoire (STO), et de mettre à leur charge une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement no 2406319 du 4 février 2025, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février et 10 avril 2025, M. A..., représenté par Me Pautot, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 4 février 2025 ; 2°) de condamner l'Etat et l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre à lui verser cette somme de 33 400 euros, augmentée des intérêts de droit à compter de sa réclamation indemnitaire préalable du 10 septembre 2024, en réparation de ce même préjudice financier ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat et de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la France est responsable de sa déportation en Allemagne où il a été contraint à travailler sans être rémunéré et, par conséquent, une réparation financière lui est due ; - c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a estimé que sa créance était prescrite en 1955 alors qu'il n'a pu obtenir la carte de personne contrainte au travail en pays ennemi, victime du travail forcé en Allemagne nazie, qu'en 2021 ; - le jugement attaqué crée une discrimination et une distinction entre les crimes contre l'humanité qui ne sont pas prescrits et celui qu'il a subi qui le serait ; - c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a retenu que sa créance était prescrite alors qu'il a été victime d'une déportation forcée et que les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité, dont la déportation, sont imprescriptibles tant au regard du droit français (article 212-1 du code pénal et loi du 26 septembre 1964) que des textes internationaux, comme le statut de Rome de 1998 portant création de la Cour pénale internationale ; - il n'a pas été payé, ce qui est contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, notamment fondée sur les articles 3 et 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la loi du 14 mai 1951 qui est invoquée dans le mémoire en défense du ministre des armées et sur laquelle se fonde le tribunal administratif de Nice dans son jugement ne concerne pas l'indemnisation des heures de travail au titre du STO ; - il a droit au versement de la somme de 31 200 euros, calculée, pour la période du 17 mars 1944 au 8 juin 1945, sur la base d'un tarif horaire actualisé et porté à 10 euros de l'heure. Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2025, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - à titre principal, sur la déchéance de la créance en vertu de la loi du 29 janvier 1831 ou de la loi du 31 décembre 1945 : . le caractère imprescriptible des crimes contre l'humanité, posé par l'article 213-5 du code pénal, ne s'attache qu'à l'action pénale et à l'action civile engagée devant la juridiction répressive, et demeure, en l'absence de dispositions contraires, sans effet sur l'action en réparation dirigée par des particuliers contre l'Etat ; . tous les éléments relatifs à la créance de M. A... ayant été réalisés et révélés dès la date du 8 juin 1945, celle-ci se rattache à l'année 1945 et elle est donc atteinte par la déchéance quadriennale en vertu de la loi du 29 janvier 1831 ou de la loi du 31 décembre 1945 ; à défaut, et en tout état de cause, la loi n° 51-538 du 14 mai 1951 a institué le statut de personne contrainte au travail en pays ennemi en faveur des personnes assujetties au STO, en Allemagne ; - à titre subsidiaire, la créance est prescrite en vertu de la loi du 31 décembre 1968, le point de départ du délai de prescription ne pouvant être fixé postérieurement à l'année 2008, un arrêté du 16 octobre 2008 ayant complété la législation adoptée en 1951 en instituant la carte de personne contrainte au travail en pays ennemi et en fixant les caractéristiques ; - à titre infiniment subsidiaire, et en tout état de cause, la responsabilité de l'Etat relevant du régime de droit commun ne saurait être engagée dès lors qu'il existe un régime légal d'indemnisation des personnes pour les préjudices subis, résultant du STO, institué par la loi du 14 mai 1951 et exclusif de tout autre régime de réparation. La procédure a été communiquée à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre qui n'a pas produit de mémoire. Un courrier du 9 avril 2025, adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 15 mai 2025, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code pénal ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de procédure pénale ; - la loi du 29 janvier 1831, modifiée notamment par la loi n° 456-0195 du 31 décembre 1945 ; - la loi n° 51-538 du 14 mai 1951 ; - la loi n° 53-1340 du 31 décembre 1953 ; - la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - le décret n° 52-1000 du 17 août 1952 portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi n° 51-538 du 14 mai 1951 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Lombart, - les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique, - et les observations de Me Pautot, représentant M. A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner l'Etat et l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre à lui verser une somme de 33 400 euros, augmentée des intérêts de droit à compter de sa réclamation préalable du 10 septembre 2024, en réparation du préjudice financier, correspondant aux salaires non versés, qu'il estime avoir subi en raison de la période de travail forcé à laquelle il a été contraint au sein de l'usine chimique Deutsche Metal, à Grafenberg, près de Düsseldorf, en Allemagne, du 17 mars 1944 au 8 mai 1945, dans le cadre du service de travail obligatoire (STO), institué par l'autorité de fait, se disant " gouvernement de l'Etat français ", par un acte dit " loi du 16 février 1943 ". M. A... relève appel du jugement du 4 février 2025 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande 2. Aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 14 mai 1951 relative au statut des personnes contraintes au travail en pays ennemi, en territoire étranger occupé par l'ennemi ou en territoire français annexé par l'ennemi : " La République française, considérant les souffrances qu'ils ont subies, proclame et détermine, conformément aux dispositions de la présente loi, le droit à réparation : / a) Des Français (...) qui ont été contraints de quitter le territoire national et astreints au travail dans les pays ennemis ou occupés par l'ennemi (...) ". Selon l'article 2 de cette même loi : " Sont considérées comme ayant été " contraintes les personnes ayant fait l'objet d'une rafle ou encore d'une réquisition opérée en vertu des actes dits " loi du 4 septembre 1942 ", " décret du 19 septembre 1942 ", " loi du 16 février 1945 ", " loi du 1er février 1944 " relatifs au STO, actes dont la nullité a été expressément constatée. " Aux termes de l'article 3 de cette loi : " Le bénéfice de la présente loi est subordonné à une période de contrainte de trois mois au minimum en pays ennemi (...) / Aucune condition de durée n'est exigée en cas d'évasion, de rapatriement sanitaire ou de décès. " Aux termes de l'article 4 de cette loi : " Les maladies contractées ou aggravées et les blessures de toutes sortes subies pendant cette période de contrainte en pays ennemi, en territoire étranger occupé par l'ennemi ou en territoire français annexé par l'ennemi, sont réputées effets directs ou indirects de guerre ; les ayants droit et leurs ayants cause bénéficient, en conséquence, des dispositions incluses dans les lois régissant les pensions concédées aux victimes civiles de guerre. " Selon l'article 7 de cette loi : " Le temps passé dans les conditions prévues aux articles 1er, 2 et 3 ci-dessus est pris en considération dans le calcul de l'ancienneté de service exigée pour l'avancement et pour la retraite au même titre que le service militaire en temps de paix. Cette disposition ne pourra entraîner d'effet pécuniaire qu'à compter de la date de promulgation dudit statut. (...) ". Aux termes de l'article 8 de ladite loi : " Les bénéficiaires de la présente loi ont droit à la rééducation professionnelle et à leur admission aux emplois réservés dans les conditions établies par les textes législatifs ou réglementaires pris en la matière. " Selon l'article 9 de cette loi : " Une carte spéciale et un insigne distinctif sont créés pour les bénéficiaires du présent statut et seront attribués par, décision du ministre des anciens combattants et victimes de guerre. (...) ". Aux termes de l'article 10 de cette loi : " Les pertes de biens dûment justifiées, résultant d'un fait survenu au cours de la période de contrainte, seront indemnisées. Ces indemnités ne pourront se cumuler avec les sommes perçues pour le même objet au titre de la législation sur les dommages de guerre. ". Selon l'article 11 de ladite loi : " Une indemnité forfaitaire, dont le montant sera fixé par une loi spéciale, sera attribuée aux bénéficiaires du présent statut et, en cas de décès, à leurs ayants cause. " Enfin, aux termes de l'article 16 de cette loi : " Les bénéficiaires du présent statut ont droit, en qualité de victimes de la guerre, à tous les avantages d'ordre social mis à la disposition de ses ressortissants, combattants, prisonniers et déportés, par l'office national des anciens combattants et victimes de la guerre. " 3. En adoptant ces dispositions, dont une partie est aujourd'hui reprise dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, le législateur a entendu reconnaître un droit à réparation au titre des préjudices causés, durant la Seconde guerre mondiale, aux personnes contraintes au travail en pays ennemi, en territoire étranger occupé par l'ennemi ou en territoire français annexé par l'ennemi, et notamment à celles qui avaient fait l'objet d'une rafle ou d'une réquisition opérée en vertu de l'acte dit " loi du 16 février 1943 " portant institution du STO. A cet effet, cette loi a créé un statut leur reconnaissant la qualité de victimes de la guerre ainsi que des droits, et a prévu, par son article 11, l'attribution d'une indemnitaire forfaitaire. Après que le décret n° 52-1000 du 17 août 1952 portant règlement d'administration publique a fixé les modalités d'application de cette loi du 14 mai 1951, le montant de cette indemnité forfaitaire a été fixé à 11 000 francs par le deuxième alinéa de l'article 44 de la loi susvisée du 31 décembre 1953 portant règlement d'administration publique. 4. Prise dans son ensemble, cette loi doit ainsi être regardée comme ayant permis, autant qu'il a été possible, l'indemnisation des préjudices de toute nature causés aux victimes du STO, y compris, le cas échéant, de leur préjudice financier constitué par l'absence de versement d'un salaire en contrepartie du travail fourni. Ce régime particulier d'indemnisation fait obstacle, depuis son entrée en vigueur, à ce que la responsabilité de droit commun de l'Etat puisse être recherchée au titre des mêmes préjudices. 5. Au cas particulier, il résulte de l'instruction que M. A... a été contraint au travail forcé, dans le cadre du STO, au sein de l'usine chimique Deutsche Metal, à Grafenberg, près de Düsseldorf, en Allemagne, du 17 mars 1944 au 8 mai 1945. Toutefois, ainsi qu'il vient d'être dit, le préjudice financier dont M. A... recherche la réparation entre dans le champ couvert par le régime particulier d'indemnisation institué par la loi du 14 mai 1951 qui est ainsi exclusif de tout autre mode de réparation. Il s'ensuit que ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat et de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre au titre de ce préjudice financier doivent être rejetées. 6. En outre, aux termes de l'article 9 de la loi susvisée du 29 janvier 1831, dans sa rédaction issue de l'article 148 de la loi du 31 décembre 1945 portant fixation du budget général (services civils) pour l'exercice 1946, applicable à la créance : " Sont prescrites et définitivement éteintes au profit de l'Etat (...) sans préjudice des déchéances prononcées par des lois antérieures ou consenties par des marchés et conventions, toutes créances qui, n'ayant pas été acquittées avant la clôture de l'exercice auquel elles appartiennent, n'auraient pu être liquidées, ordonnancées et payées dans un délai de quatre années à partir de l'ouverture de l'exercice pour les créanciers domiciliés en Europe (...) ". Aux termes de l'article 10 de la même loi du 29 janvier 1831, dans sa rédaction issue du décret-loi du 30 octobre 1935, la prescription n'est pas applicable " aux créances dont l'ordonnancement et le paiement n'auraient pu être effectués dans les délais déterminés par le fait de l'administration ou par suite de recours devant une juridiction ". Il résulte de ces dispositions que l'article 9 de la loi du 29 janvier 1831 avait institué un régime de déchéance quadriennale dans le cadre duquel la prescription des créances détenues sur l'administration était acquise à l'issue d'un délai de quatre ans qui courait à compter de l'exercice auquel elles se rattachaient. En revanche, et en tout état de cause, aucune des dispositions de ce texte ne prévoyait que la prescription ne courrait pas contre le créancier qui pouvait être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement. 7. Dans les circonstances de l'espèce, alors que la loi du 14 mai 1951, qui a institué le régime particulier d'indemnisation susmentionné, a été publiée au Journal officiel de la République française le 16 mai 1951, la créance dont se prévaut M. A..., qui au demeurant est, d'après ses propres dires, revenu en France en 1945, doit être regardée comme rattachable, au plus tard, à l'exercice budgétaire correspondant à l'année 1951. Sans cause de suspension ou d'interruption établie, ni même alléguée avant l'expiration du délai de quatre années à partir de l'ouverture de cet exercice budgétaire, la déchéance quadriennale était ainsi acquise, par application de l'article 9 précité de la loi susvisée du 29 janvier 1831 alors applicable, depuis de très nombreuses années, lorsque M. A... a, le 10 septembre 2024, adressé des réclamations indemnitaires préalables auprès des services du ministre des armées et de ceux de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Il suit de là que le ministre des armées est fondé à opposer à ses conclusions indemnitaires la déchéance quadriennale. 8. Le caractère imprescriptible des crimes contre l'humanité, résultant, dans l'ordre juridique interne, de la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964, de l'article 7 du code de procédure pénale et de l'article 133-2 du code pénal, ne s'attache qu'à l'action pénale et à l'action civile engagée devant la juridiction répressive. En revanche, l'action en réparation dirigée par des particuliers contre l'Etat est soumise, en l'absence de texte les écartant expressément, aux règles de prescription fixées par la loi susvisée du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics comme aux règles de déchéance, antérieurement applicables, prévues par les dispositions précitées de la loi du 29 janvier 1831. Par suite, M. A...(ano)X(/ano) ne peut utilement soutenir, pour faire échec à ces règles de déchéance ou de prescription, que les actes à l'origine du préjudice financier qu'il invoque seraient constitutifs de crimes contre l'humanité, à supposer que les conditions dans lesquelles il a été contraint au travail forcé, au titre du STO, puissent présenter la nature d'un tel crime. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Sa requête d'appel doit donc être rejetée en son entier, y compris, et par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre des armées et à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Délibéré après l'audience du 24 juin 2025, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Lombart, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2025. 2 No 25MA00403
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 08/07/2025, 24MA02712, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision du 2 septembre 2021 par laquelle la présidente du département des Bouches-du-Rhône a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont elle a été victime le 13 septembre 2018 ainsi que la décision du 22 novembre 2021 par laquelle son recours gracieux a été rejeté, et, d'autre part, de condamner le département des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 7 131 euros au titre de ses préjudices moral et financier. Par un jugement n° 2200298 du 25 septembre 2024, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme B.... Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 novembre 2024 et 14 février 2025, Mme B..., représentée par Me Lucchini, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2200298 du 25 septembre 2024 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler la décision du 2 septembre 2021 par laquelle la présidente du département des Bouches-du-Rhône a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont elle a été victime le 13 septembre 2018 ; 3°) d'enjoindre au département des Bouches-du-Rhône de prendre une nouvelle décision concernant l'imputabilité au service de l'accident dont elle a été victime dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de condamner le département des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de réparation de son préjudice moral et la somme de 5 131 euros en réparation de son préjudice financier ; 5°) de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - ses conclusions indemnitaires sont recevables ; - en rejetant l'intégralité de ses demandes, le tribunal administratif de Marseille a entaché sa décision d'une dénaturation des pièces du dossier et d'une erreur d'appréciation patente ; - la décision du 2 septembre 2021 méconnaît l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière dès lors qu'elle a reçu son dossier postérieurement à la séance de la commission de réforme et que ce dernier n'était composé d'aucune pièce médicale ; ce faisant, soit le dossier remis à la commission était incomplet, soit, n'ayant pas été destinataire de l'intégralité des pièces du dossier, elle n'a pas été mise en mesure de présenter des observations en réponse ou en complément avec le dossier présenté en commission de réforme ; dans ces deux cas, la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure qui l'a privée d'une garantie susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ; - la décision attaquée méconnaît l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 dès lors que, lors de la séance de la commission de réforme, aucun spécialiste n'était présent pour donner son avis éclairé sur sa pathologie, ce qui l'a privée d'une garantie ; - c'est à tort que le tribunal administratif a retenu l'existence d'une faute détachable du service ; le département a commis une erreur de droit en retenant l'existence d'une telle faute ; - le département a eu un comportement fautif dans la gestion de ce dossier dès lors qu'il a refusé l'imputabilité au service de l'accident intervenu le 13 septembre 2018, alors que le tribunal administratif de Marseille avait annulé un premier refus avant que soit prise la décision en litige ; l'illégalité de ces décisions ainsi que la résistance abusive de la collectivité sont constitutives de fautes de nature à engager sa responsabilité ; - ces fautes lui causent un préjudice moral et matériel important puisqu'elle est contrainte depuis plusieurs années de multiplier les procédures pour tout simplement faire valoir ses droits ; elle est fondée à demander la condamnation du département des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 5 131 euros en réparation de son préjudice financier et la somme de 2 000 euros au titre de son préjudice moral. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2025, le département des Bouches-du-Rhône, représenté par Me Walgenwitz, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - les conclusions indemnitaires sont irrecevables en l'absence de liaison du contentieux ; - les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Un courrier du 10 février 2025 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 5 mars 2025, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Martin, - les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique, - les observations de Me Lucchini, représentant Mme B..., - et les observations de Me Allala, substituant Me Walgenwitz, représentant le département des Bouches-du-Rhône. Considérant ce qui suit : 1. Titulaire du grade de rédactrice territoriale, Mme B... occupe des fonctions de juriste achat public au sein de la direction juridique du département des Bouches-du-Rhône. Le 13 septembre 2018, à la suite de deux altercations l'ayant opposée à l'une de ses collègues, elle a été placée en congé de maladie. Par décision du 14 février 2019, le département des Bouches-du-Rhône a refusé de reconnaître comme accident de service les évènements survenus le 13 septembre 2018. Cette décision ayant été annulée par un jugement rendu le 14 juin 2021 par le tribunal administratif de Marseille, le département a procédé à une nouvelle instruction de la demande de Mme B..., ainsi que le tribunal le lui avait enjoint. Par une décision du 2 septembre 2021, il a de nouveau rejeté la demande de Mme B..., décision qu'il a confirmée en rejetant le recours gracieux de l'intéressée par courrier du 22 novembre 2021. Par un jugement du 25 septembre 2024, dont Mme B... relève appel dans la présente instance, le tribunal administratif de Marseille, d'une part, a rejeté la demande tendant à ce que soit prononcée l'annulation des décisions des 2 septembre et 22 novembre 2021, et, d'autre part, a rejeté les conclusions indemnitaires de Mme B.... Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. La requérante ne peut donc utilement se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une dénaturation des pièces du dossier, qui constitue de surcroît un moyen de cassation et non d'appel quand il vise une décision juridictionnelle, et d'une erreur d'appréciation. Sur la légalité de la décision du 2 septembre 2021 : En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée : 3. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " (...) Cette commission comprend : 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". 4. Dans le cas où il est manifeste, eu égard aux éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée est nécessaire pour éclairer l'examen du cas du fonctionnaire, l'absence d'un tel spécialiste est susceptible de priver l'intéressé d'une garantie et d'entacher ainsi la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 5. Il ressort du procès-verbal de la séance de la commission de réforme du 17 janvier 2019 qu'aucun médecin spécialiste de la pathologie de Mme B... n'a siégé lorsque la commission s'est prononcée sur sa situation. Si Mme B... soutient qu'un psychiatre aurait dû siéger afin de permettre à la commission d'appréhender la réalité et l'étendue de ses pathologies, il ressort des pièces du dossier que les membres de la commission étaient en possession d'un certificat médical établi le 10 janvier 2019 par son psychiatre, aux termes duquel le praticien indique qu'elle souffre d'un état anxio-dépressif entrant dans le cadre d'un " burn-out " réactionnel à un conflit professionnel. Outre que Mme B... n'établit pas en quoi cette pathologie présente des spécificités telles que la présence d'un spécialiste aurait été indispensable lors de la séance de la commission, et que cette instance a émis un avis défavorable sur la demande de l'intéressée tendant à ce que soit reconnue l'existence d'un accident de service au constat d'un " évènement détachable du service ", la décision attaquée rejette cette demande sur la seule circonstance que Mme B... a commis une faute personnelle. Au regard de ce motif, indépendant de toute appréciation sur son état de santé, il n'est pas manifeste qu'eu égard aux éléments dont disposait la commission de réforme, la présence d'un médecin psychiatre aurait été nécessaire pour éclairer l'examen de la situation de l'appelante. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière doit être écarté. 6. En deuxième lieu, l'article 16 de l'arrêté précité du 4 août 2004 dispose que : " (...) Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux (...) ". 7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 2 janvier 2019, Mme B... a été informée de la réunion de la commission de réforme devant se tenir le 17 janvier 2019, et de ce qu'elle avait la possibilité de prendre connaissance de son dossier personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, d'apporter des observations écrites ou certificats médicaux, et de se faire entendre par la commission assistée par un médecin ou un conseiller de son choix. Il ressort également des pièces du dossier que, par courrier du 14 janvier 2019, le secrétariat de la commission de réforme a transmis à Mme B... son dossier, comportant le rapport hiérarchique et l'enquête administrative produits par le département ainsi que des témoignages. Outre que ce dossier a été reçu par l'intéressée avant la réunion de la commission de réforme contrairement à ce qu'elle affirme, dès lors qu'elle a été en mesure de transmettre au secrétariat de la commission ses observations sur les documents le composant, ainsi que des pièces complémentaires, notamment le certificat médical, cité au point 5, établi le 10 janvier 2019 par son psychiatre, Mme B... n'établit pas plus en cause d'appel qu'en première instance qu'elle aurait sollicité la communication de la partie médicale de son dossier. Elle n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'elle n'a pas été mise à même de consulter l'intégralité de son dossier avant la réunion de la commission de réforme. 8. D'autre part, outre que la commission de réforme disposait du certificat médical établi par le psychiatre de Mme B... le 10 janvier 2019, l'intéressée n'apporte aucune précision sur les éléments du dossier médical qui n'auraient pas été transmis à la commission et qui, s'ils avaient été portés à la connaissance de ses membres, auraient été de nature à modifier éventuellement le sens de l'avis rendu au terme de la séance du 17 janvier 2019. 9. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 doit, dans ses deux branches, être écarté. En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée : 10. Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a eu deux altercations avec une collègue de travail, alors qu'elle était en service, le 13 septembre 2018, et s'est rendue chez son médecin qui l'a placée en arrêt de travail. Par le certificat du 10 janvier 2019 précédemment cité, le psychiatre qui assure son suivi a attesté de ce qu'elle était victime d'un état anxiodépressif entrant dans le cadre d'un " burn-out " réactionnel à un conflit professionnel. Dans ces conditions, la situation de Mme B... doit être regardée comme entièrement régie par les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, et non celles énoncées aux II et IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, qui ne sont pas applicables aux situations constituées avant l'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale pris pour son application. 11. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dans sa version alors en vigueur : " (...) Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ". 12. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. 13. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'au cours d'une réunion qui s'est tenue le 13 septembre 2018 à l'initiative d'un syndicat, une altercation est survenue entre Mme B... et l'une de ses collègues, au sujet de l'organisation du service et des conditions de travail au sein de la direction. Si, selon les affirmations de l'appelante, elle aurait été victime d'une agression verbale violente et humiliante, remettant en cause son professionnalisme et ses compétences devant l'ensemble des agents du service, de surcroît sans réaction de sa hiérarchie, et qu'elle produit, pour en justifier, l'attestation d'une collègue ayant participé à la réunion, selon laquelle Mme B... aurait été interpellée de manière agressive sur sa manière de servir, il ressort toutefois de deux autres attestations d'agents également présents lors de la réunion que l'échange verbal entre Mme B... et sa collègue s'est révélé être vif mais sans insulte. L'absence d'insulte est également relevée par l'attestation de l'agent en conflit direct avec Mme B... au cours de la réunion. Outre que la teneur des propos tenus par cet agent à l'encontre de l'appelante, relatés par les déclarations concordantes tant de la chef de service dans son rapport du 9 novembre 2018 que par l'attestation précitée produite par Mme B..., ne permet pas de considérer que son comportement aurait constitué, à lui seul, un événement traumatisant, il ressort du rapport précité du 9 novembre 2018, corroboré par deux des attestations précédemment citées, que c'est une prise de parole sur un ton excédé et agressif de Mme B... elle-même qui est à l'origine de l'altercation, l'une des attestations évoquant le comportement " hystérique " de l'intéressée, devenue " inarrêtable ". Le rapport étayé de la supérieure hiérarchique précise que Mme B... s'est mise à crier et à tenir elle-même des propos mettant en cause l'ensemble de la direction en ces termes : " c'est le bordel, on fait n'importe quoi, et cette direction c'est du grand n'importe quoi ". Si Mme B... conteste le contenu de ce rapport, la seule attestation qu'elle produit ne permet pas de remettre en cause la matérialité des propos qu'elle a tenus, qui révèle un évident manque de maîtrise de soi constitutif d'une faute personnelle. 14. D'autre part, si Mme B... soutient que le second élément déclencheur de sa pathologie anxio-dépressive serait constitué par une nouvelle altercation avec la même collègue de travail, survenue à l'issue de la réunion citée au point précédent, elle ne produit aucun élément, en l'absence de témoin, permettant d'établir que cet évènement serait constitutif d'un accident de service. En outre, il ressort de l'attestation citée au point précédent, versée dans l'instance par Mme B..., que c'est elle-même, de plus en plus énervée, qui est ressortie précipitamment de son bureau pour aller à la rencontre de l'agent avec lequel la première altercation a eu lieu dans les conditions exposées au point précédent, et que, par conséquent, elle est à l'origine de cette altercation. 15. Enfin, selon les écritures mêmes de Mme B..., son " burn-out " réactionnel n'aurait pas été exclusivement causé par les évènements survenus le 13 septembre 2018, mais trouverait également son origine dans les difficultés qu'elle a rencontrées dans le service en raison de pressions, d'un manque de communication, et d'un effectif restreint, soit dans des évènements qui ne sont ni soudains, ni violents, et qui ne sauraient, dès lors, être regardés comme constitutifs d'un accident de service. 16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 2 septembre 2021 par laquelle la présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône a refusé de reconnaître comme accident de service les incidents survenus le 13 septembre 2018. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation et d'injonction doivent être rejetées. Sur les conclusions indemnitaires : 17. Mme B... entend engager la responsabilité du département des Bouches-du-Rhône en raison, d'une part, de l'illégalité fautive des décisions successives par lesquelles il a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de ses arrêts maladies, et, d'autre part, de la résistance abusive dont il aurait fait preuve en dépit d'un jugement du tribunal administratif de Marseille par lequel la première décision du 14 février 2019 rejetant sa demande a été annulée. 18. Toutefois, et d'une part, il résulte de ce qui vient d'être exposé que la décision du 2 septembre 2021 n'est pas entachée d'illégalité. De plus, et ce faisant, le département ne saurait être regardé comme ayant fait preuve d'une résistance abusive dans l'instruction de la demande de Mme B.... 19. D'autre part, il est certes exact que, par un jugement du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Marseille a annulé la première décision du 14 février 2019 portant rejet de la demande de reconnaissance d'imputabilité au service des arrêts maladie de Mme B..., en raison de l'erreur de droit entachant l'unique motif de cette décision. 20. Toutefois, lorsqu'une personne sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité d'une décision administrative, il appartient au juge administratif de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si la même décision aurait pu légalement intervenir. Dans le cas où il juge qu'une même décision aurait été prise légalement, le préjudice allégué ne peut alors être regardé comme la conséquence directe du vice qui entachait la décision administrative illégale. 21. Il résulte de ce qui a été exposé aux points 13 à 15 du présent arrêt que le département des Bouches-du-Rhône était fondé à rejeter la demande de Mme B... tendant à ce que les évènements survenus le 13 septembre 2018 soient reconnus comme constitutifs d'un accident imputable au service. Par suite, les préjudices dont elle demande la réparation ne peuvent être regardés comme la conséquence directe de l'illégalité de la décision du 14 février 2019. 22. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le département des Bouches-du-Rhône, les conclusions indemnitaires de Mme B... doivent être rejetées. Sur les frais liés au litige : 23. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chaque partie la charge des frais liés au litige en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par le département des Bouches-du-Rhône en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au département des Bouches-du-Rhône. Délibéré après l'audience du 24 juin 2025, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe, le 8 juillet 2025. N° 24MA02712 2
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de PARIS, 8ème chambre, 08/07/2025, 23PA03458
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. F... E... et Mme C... G... épouse E..., Mme A... E... et M. D... E... ont demandé au tribunal administratif de Paris, à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du tribunal judiciaire de Paris dans le litige les opposant à la société Biocal et à son assureur, la S.A. Gan Outre-mer Iard, et à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à verser à M. F... E... la somme globale de 892 830,65 euros en réparation des préjudices subis en raison du diagnostic tardif de sa maladie, à Mme C... E..., son épouse, les sommes de 20 435,46 euros au titre de ses pertes de revenus et de 40 000 euros au titre de son préjudice d'affection, à Mme A... E... et à M. D... E..., ses enfants, la somme de 40 000 euros chacun au titre de leur préjudice d'affection, assorties des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation en référé expertise du 1er septembre 2014 et de leur capitalisation. Par un jugement n° 2006582/6-2 du 13 juin 2023, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser, d'une part, à M. F... E... la somme de 86 461 euros, à Mme C... E..., la somme de 3 000 euros, à Mme A... E... et M. D... E..., la somme de 1 500 euros chacun, assorties des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2019 et de la capitalisation des intérêts échus à la date du 26 décembre 2019, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, et, d'autre part, à la caisse nationale militaire de sécurité sociale la somme de 77 426,24 euros au titre de ses débours, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2021 et de la capitalisation des intérêts échus à la date du 15 octobre 2022, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, ainsi que la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, et a mis à la charge de l'Etat les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 3 622,50 euros ainsi que la somme de 2 000 euros à verser aux consorts E... et la somme de 1 000 euros à verser à la caisse nationale militaire de sécurité sociale au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : I°/ Par une requête et des mémoires enregistrés sous le n° 23PA03458 le 30 juillet 2023, les 15 et 24 avril 2024 et les 29 et 30 avril et le 14 mai 2025, M. F... E... et Mme C... G... épouse E..., Mme A... E... et M. D... E..., représentés par Me Dausque, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures : 1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a pas fait droit à leur demande de sursis à statuer ; 2°) de surseoir à statuer dans l'attente du caractère définitif du jugement du 17 février 2025 du tribunal judiciaire de Paris rendu dans la procédure les opposant à la société Biocal et à son assureur, la S.A. Gan Outre-mer Iard ; 3°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Paris en ce qu'il ne fait pas droit à l'intégralité de leurs demandes indemnitaires ; 4°) de condamner l'Etat à verser à M. E... la somme globale de 937 402,74 euros en réparation des préjudices subis en raison du retard dans le diagnostic de sa maladie ou, à défaut, la somme de 892 930,65 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation en référé expertise du 1er septembre 2014 et de leur capitalisation ; 5°) de condamner l'Etat à verser à Mme C... E..., son épouse, les sommes de 20 435,46 euros au titre de ses pertes de revenus et de 40 000 euros au titre de son préjudice d'affection, assorties des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation en référé expertise du 1er septembre 2014 et de leur capitalisation ; 6°) de condamner l'Etat à verser à Mme A... E... et à M. D... E..., ses enfants, la somme de 40 000 euros chacun au titre de leur préjudice d'affection, assorties des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation en référé expertise du 1er septembre 2014 et de leur capitalisation ; 7°) de rejeter les conclusions d'appel incident présentées par l'Etat ; 8°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Ils soutiennent, dans le dernier état de leurs écritures, que : - leurs conclusions indemnitaires sont recevables quand bien même elles excédent le montant sollicité en première instance ; - il convient de sursoir à statuer dans l'attente du caractère définitif du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 17 février 2025 condamnant solidairement la SELAS Biocal et la société Gan Outre-mer Iard à réparer les préjudices qu'ils ont subis en raison du retard de diagnostic de la pathologie de M. F... E... ; - c'est à tort que les premiers juges n'ont pas sursis à statuer dans l'attente du jugement du tribunal judiciaire de Paris ; - la responsabilité de l'Etat est engagée en raison du diagnostic tardif de la pathologie de M. F... E... ; - ils sont fondés à solliciter la réparation intégrale de leurs préjudices ; il n'y a pas lieu d'appliquer un taux de perte de chance ; en tout état de cause, le taux de perte de chance ne pourra être inférieur à 90 % ; - il n'y a pas lieu d'appliquer un partage de responsabilité entre l'Etat et la société Biocal qui sont solidairement responsables des préjudices subis par les consorts E... ; - en qualité de victime directe, M. F... E... est fondé à solliciter le versement des sommes suivantes, en réparation des préjudices subis : * S'agissant des préjudices patrimoniaux temporaires : o 141 756,78 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels ; o 4 108,01 euros au titre des frais de déplacement ; o 586,40 euros au titre des frais de déplacement aux opérations d'expertise ; o 5 100 euros au titre de ses frais de médecin conseil ; o 27 146 euros au titre de ses frais de formation et de reconversion ; o 57 865,50 euros au titre de l'assistance temporaire par une tierce personne ou, en tout état de cause, 46 200 euros, le taux horaire à retenir ne pouvant être inférieur à 20 euros ; * S'agissant des préjudices patrimoniaux permanents : o 337 398,65 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs ; o 231 661,40 euros au titre de l'incidence professionnelle ; * S'agissant des préjudices extra patrimoniaux temporaires : o 18 780 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, incluant le préjudice sexuel temporaire et le préjudice d'agrément ; o 60 000 euros au titre des souffrances endurées, eu égard à la lourdeur du traitement et à l'angoisse de son éventuel décès, ses chances de survie étant faibles ; o 8 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ; * S'agissant des préjudices extra patrimoniaux permanents : o 5 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ; o 40 000 euros au titre du préjudice moral d'impréparation lié à la découverte tardive de sa pathologie et de ce que son pronostic vital était engagé ; - Mme C... E..., épouse de M. F... E... est fondée à solliciter le versement des sommes suivantes, en réparation des préjudices subis : * 20 435,46 euros au titre de la perte de revenus dès lors que du fait de la maladie de son mari, elle n'a pas pu rechercher immédiatement un emploi à leur retour de Nouvelle-Calédonie ; * 40 000 euros au titre du préjudice d'affection ; - A... et D... E..., les enfants de M. E..., âgés respectivement de 11 et 13 ans au moment des faits, sont fondés à solliciter le versement d'une somme de 40 000 euros chacun, au titre de leur préjudice d'affection. Par des mémoires enregistrés le 12 mars 2024 et le 25 février 2025, la caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS), représentée par Me Fertier, demande à la cour : 1°) de confirmer le jugement en ce qu'il fait droit à sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui rembourser ses débours et à lui verser la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; 2°) de réformer ce jugement et de porter à 110 776,24 euros la somme mise à la charge de l'Etat au titre de ses débours et à 1 212 euros la somme au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Elle soutient qu'elle est fondée à solliciter, en remboursement des frais exposés pour le compte de son assuré, la somme de 108 295,76 euros au titre des dépenses de santé ainsi que la somme de 2 480,48 euros au titre des frais de transport. Par des mémoires en défense enregistrés le 11 avril 2024 et le 11 avril 2025, le ministre des armées demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 13 juin 2023 et d'ordonner une nouvelle expertise médicale aux fins pour l'expert de préciser si l'erreur de diagnostic commise par le médecin du service de santé des armées est à l'origine d'une simple perte de chance d'échapper pour M. E... à l'aggravation de son état de santé et le cas échéant de déterminer le taux de cette perte de chance ; 2°) à titre subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions le montant des indemnités allouées par le tribunal aux consorts E... et, en tout état de cause, d'appliquer un taux de perte de chance sur les sommes mises à sa charge en réparation des préjudices des consorts E... et au titre des débours de la CNMSS et de retenir un partage de responsabilité avec la société Biocal ; 3°) de déduire du montant de l'indemnisation mise à sa charge le montant des indemnités allouées aux consorts E... et à la CNMSS par le jugement du 17 février 2025 du tribunal judiciaire de Paris, lesquels ont été doublement indemnisés ; Il soutient que : - les conclusions indemnitaires des consorts E... présentées en appel sont irrecevables en tant que leur montant excède celui réclamé en première instance ; - à supposer même que la lecture des résultats par le médecin des armées ait correctement été effectuée et des examens complémentaires prescrits, il n'est pas établi, compte tenu des connaissances scientifiques actuelles, que le diagnostic de lymphome non hodgkinien aurait pu être posé dès novembre 2012 ni qu'un diagnostic plus précoce aurait permis d'éviter une évolution de la maladie vers le stade IV ; le lien de causalité entre la faute commise et les préjudices liés à l'aggravation au stade IV de la maladie n'est pas certain ; - en tout état de cause, la faute commise par le médecin des armées n'a fait perdre à M. E... qu'une chance d'échapper à l'aggravation de son état de santé ; - un complément d'expertise devra être ordonné, à titre principal, aux fins pour l'expert de préciser si l'erreur de diagnostic commise par le médecin du service de santé des armées est à l'origine d'une simple perte de chance pour M. E... d'échapper à l'aggravation de son état de santé et le cas échéant de déterminer le taux de cette perte de chance ; - en outre, la société Biocal ayant contribué pour moitié à la réalisation du dommage, il ne peut être condamné à réparer les préjudices subis par les consorts E... qu'à hauteur de 50 % ; - à titre subsidiaire, sur l'évaluation des préjudices : En ce qui concerne M. E... : S'agissant de la perte de gains professionnels actuels : - M. E... aurait été placé en arrêt maladie même en l'absence du retard fautif de diagnostic et n'aurait pas ainsi bénéficié de l'indemnité du personnel naviguant ; dans ces conditions, la perte du bénéfice de cette indemnité ne doit pas être indemnisée ; - il n'a pas subi de pertes de revenus imputables au retard fautif de diagnostic et ses revenus ont, en tout état de cause, été garantis par la CNMSS ; - il a fait une demande de placement en congé du personnel navigant le 26 mars 2012, transmise le 26 juillet 2012, soit antérieurement au retard de diagnostic ; la faute commise a seulement eu pour effet d'avancer la réalisation de ce projet ; dans ces conditions, l'indemnisation au titre du manque à gagner de l'intéressé du fait de son placement en congé du personnel naviguant doit être rejetée ; - en l'état des connaissances scientifiques, le lien de causalité entre le retard de diagnostic et le retard au retour à l'emploi de M. E... n'est pas établi ; du fait de son arrêt maladie, il aurait été empêché, en tout état de cause, d'occuper le poste de commandant de bord au sein de la compagnie Eastern Airways ; l'indemnisation sollicitée au titre de la période pendant laquelle il n'a pas été en mesure d'intégrer son nouveau poste doit être rejetée ; S'agissant des frais de déplacements hospitaliers : - eu égard au taux de perte de chance et au partage de responsabilité, l'indemnité de 4 100 euros allouée par le tribunal sera ramenée à de plus justes proportions ; S'agissant des frais de déplacements hospitaliers : - eu égard au taux de perte de chance et au partage de responsabilité, l'indemnité de 369 euros allouée par le tribunal sera ramenée à de plus justes proportions ; S'agissant du remboursement des frais du médecin conseil : - le compte-rendu de consultation du docteur B... n'apportant aucun élément nouveau au regard des rapports d'expertise, c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge les frais de médecin conseil d'un montant de 5 100 euros ; S'agissant des frais de formation et de reconversion : - en l'absence de lien de causalité direct et certain entre le retard de diagnostic et les frais engagés par M. E... dans le cadre de sa reconversion professionnelle envisagée avant la faute commise par le médecin des armées, il n'y a pas lieu de mettre à sa charge le remboursement de ces frais ; S'agissant de l'assistance par tierce personne : - les périodes du 15 novembre au 13 décembre 2013 et du 10 avril au 22 mai 2014 correspondant à des périodes d'hospitalisation, c'est à tort que les premiers juges ont retenu pour ces périodes un besoin en assistance par tierce personne ; l'intéressé a eu recours à une assistance par tierce personne non spécialisée seulement pendant onze jours, ce qui correspond sur la base d'un taux horaire de 13 euros à une indemnité de 1 001 euros, avant application du taux de perte de chance et du partage de responsabilité avec la société Biocal ; il conviendra de déduire les crédits d'impôt sur le revenu perçus par M. E... du fait du recours à des services à la personne et le cas échéant, les aides dont il a pu bénéficier ; S'agissant de la perte de gains professionnels futurs : - l'absence de reprise d'activité professionnelle de pilote à compter de mai 2016 n'est pas imputable au retard de diagnostic ; en tout état de cause, à supposer cette perte de gains professionnels futurs établie, elle résulterait de la reconversion professionnelle souhaitée par l'intéressé ; S'agissant de l'incidence professionnelle : -M. E... a été en mesure d'exercer un emploi de pilote dans l'aviation civile une fois son état de santé consolidé ; le préjudice au titre de l'incidence professionnelle n'est pas établi ; S'agissant du déficit fonctionnel temporaire : - seules les périodes du 15 novembre au 13 décembre 2013 et du 10 avril au 6 mai 2014 sont imputables au retard de diagnostic ; la période de chimiothérapie à hautes doses avec greffe s'est terminée le 6 mai 2014 et non le 6 juin 2014 comme retenu par erreur par les premiers juges ; le taux horaire à retenir est de 16,70 euros ; l'indemnité allouée à M. E... doit être ramenée à 935,20 euros, avant application du taux de perte de chance et du partage de responsabilité avec la société Biocal ; S'agissant des souffrances endurées : - l'expert a pris en compte l'ensemble des souffrances endurées du fait du traitement du lymphome malin non hodgkinien à un stade IV et non les seules souffrances en lien avec le retard de diagnostic fautif ; cette part des souffrances endurées imputable de façon directe et certaine avec le retard de diagnostic n'est pas connue ; l'indemnité allouée à M. E... doit être ramenée à 13 000 euros, avant application du taux de perte de chance et du partage de responsabilité avec la société Biocal ; S'agissant du préjudice esthétique temporaire : - seul l'amaigrissement important de M. E... à la suite du traitement par autogreffe de cellules souches hématopoïétiques est en lien avec le retard de diagnostic fautif ; la part du préjudice esthétique temporaire imputable de façon directe et certaine avec le retard de diagnostic n'est pas connue ; il ressort de la jurisprudence qu'un tel préjudice peut être évalué à 1 500 euros ; la somme allouée par le tribunal devra être ramenée à de plus justes proportions, avant application du taux de perte de chance et du partage de responsabilité avec la société Biocal ; S'agissant du préjudice esthétique permanent : - aucun préjudice esthétique permanent n'est en lien avec le retard de diagnostic ; c'est à tort que les premiers juges ont alloué la somme de 1 500 euros en réparation de ce chef de préjudice ; S'agissant du préjudice moral d'impréparation : - les souffrances psychiques sont réparées au titre des souffrances endurées et du déficit fonctionnel permanent ; M. E... ne remplit pas les conditions posées par la jurisprudence du Conseil d'Etat pour obtenir une indemnisation au titre du préjudice moral d'impréparation ; c'est à tort que les premiers juges ont indemnisé ce préjudice ; En ce qui concerne Mme E... : - Mme E... qui n'établit pas avoir exercé un emploi avant l'hospitalisation de son mari, ni ne pas avoir pu rechercher un emploi immédiatement après son retour de Nouvelle-Calédonie, n'établit pas avoir subi une perte de revenus ; -la somme allouée par le tribunal devra être ramenée à de plus justes proportions, avant application du taux de perte de chance et du partage de responsabilité avec la société Biocal ; En ce qui concerne les enfants de M. E... : - la somme allouée par le tribunal devra être ramenée à 200 euros, avant application du taux de perte de chance et du partage de responsabilité avec la société Biocal ; - les consorts E... ont été doublement indemnisés de leurs préjudices à la suite du jugement attaqué du tribunal administratif de Paris ainsi que du jugement du tribunal judiciaire de Paris du 17 février 2025 ; la somme de 110 033,33 euros leur a déjà été versée en exécution du jugement du tribunal administratif de Paris ; il y a lieu de déduire les sommes qui leur ont été allouées par le tribunal judiciaire de Paris ; En ce qui concerne la CNMSS : - la CNMSS demande le remboursement des dépenses de santé et des frais de transports exposés pour le compte de son assuré résultant du traitement du lymphome malin non hodgkinien à un stade IV et non les dépenses en lien avec le retard de diagnostic fautif ; la somme allouée par le tribunal devra être ramenée à de plus justes proportions, avant application du taux de perte de chance et du partage de responsabilité avec la société Biocal ; - la CNMSS a été doublement indemnisée de ses préjudices à la suite du jugement attaqué du tribunal administratif de Paris ainsi que du jugement du tribunal judiciaire de Paris du 17 février 2025 ; la somme de 82 193,71 euros a déjà été versée à la CNMSS en exécution du jugement du tribunal administratif de Paris ; il y a lieu de déduire la somme allouée par le tribunal judiciaire de Paris à la CNMSS. Par un courrier enregistré le 7 mars 2025, les consorts E... ont produit, à la demande de la cour, le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 17 février 2025. Les consorts E... ont produit un mémoire enregistré le 16 mai 2025, soit après la clôture d'instruction fixée, par une ordonnance du 30 avril 2025, au 14 mai 2025 à 12 heures. Par un courrier du 26 mai 2025, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office des moyens d'ordre public tirés de ce que : - M. E... n'ayant pas exercé devant la commission des recours des militaires instituée par le code de la défense le recours préalable obligatoire contre la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa demande indemnitaire préalable, prévu par l'article R. 4125-1 du code de la défense, les conclusions qu'il a présentées devant le tribunal étaient irrecevables ; - en application du principe selon lequel une personne publique ne peut être condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas (CE Mergui, 19 mai 1971), la cour est susceptible de soulever d'office le moyen tiré de ce que le point de départ de la capitalisation des intérêts demandée par les consorts E... fixé au 26 décembre 2019 par le jugement attaqué est erroné dès lors qu'à cette date, une année entière d'intérêt n'était pas encore due. Les consorts E... ont présenté des observations, à la suite de cette communication, enregistrées le 28 mai 2025. Le ministre des armées a présenté des observations à la suite de cette communication, enregistrées le 2 juin 2025. II°/ Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés sous le n° 23PA03654 le 10 août 2023 et le 12 juin 2024, le ministre des armées demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) à titre principal, l'annulation du jugement n° 2006582/6-2 du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Paris et à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise médicale ; 2°) à titre subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions le montant des indemnités allouées par le tribunal aux consorts E... et à la CNMSS, en tout état de cause, d'appliquer un taux de perte de chance sur les sommes mises à sa charge en réparation des préjudices des consorts E... et de retenir un partage de responsabilité avec la société Biocal. Il reprend les mêmes moyens que ceux soulevés dans l'instance n° 23PA03458. Par des mémoires en défense enregistrés les 27 novembre 2023 et 24 avril 2024, M. F... E... et Mme C... G... épouse E..., Mme A... E... et M. D... E..., représentés par Me Dausque, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures : 1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a pas fait droit à leur demande de sursis à statuer ; 2°) de surseoir à statuer dans l'attente du jugement du tribunal judiciaire de Paris dans la procédure les opposant à la société Biocal et à son assureur, la S.A. Gan Outre-mer Iard ; 3°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Paris en ce qu'il ne fait pas droit à l'intégralité de leurs demandes indemnitaires ; 4°) de condamner l'Etat à verser à M. E... la somme globale de 937 402,74 euros en réparation des préjudices subis en raison du retard dans le diagnostic de sa maladie ou, à défaut, la somme de 892 930,65 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation en référé expertise du 1er septembre 2014 et de leur capitalisation ; 5°) de condamner l'Etat à verser à Mme C... E..., son épouse, les sommes de 20 435,46 euros au titre de ses pertes de revenus et de 40 000 euros au titre de son préjudice d'affection, assorties des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation en référé expertise du 1er septembre 2014 et de leur capitalisation ; 6°) de condamner l'Etat à verser à Mme A... E... et à M. D... E..., ses enfants, la somme de 40 000 euros chacun au titre de leur préjudice d'affection, assorties des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation en référé expertise du 1er septembre 2014 et de leur capitalisation ; 7°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Ils soutiennent qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une nouvelle expertise médicale, qui n'a pas été demandée en première instance, et reprennent les mêmes moyens que ceux soulevés dans l'instance n° 23PA03458. Par un mémoire enregistré le 12 mars 2024, la caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS), représentée par Me Fertier, conclut au rejet de la requête et demande à la cour, par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement du tribunal administratif de Paris en ce qu'il a limité l'indemnisation de sa créance à 77 426,24 euros et de porter à 110 776,24 euros la somme mise à la charge de l'Etat au titre de ses débours, et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Par ordonnance du 26 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 4 juin 2024 à 12 heures. Par un courrier du 26 mai 2025, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office des moyens d'ordre public tirés de ce que : - M. E... n'ayant pas exercé devant la commission des recours des militaires instituée par le code de la défense le recours préalable obligatoire contre la décision implicite du ministre de la défense rejetant sa demande indemnitaire préalable, prévu par l'article R. 4125-1 du code de la défense, les conclusions qu'il a présentées devant le tribunal étaient irrecevables ; - en application du principe selon lequel une personne publique ne peut être condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas (CE Mergui, 19 mai 1971), la cour est susceptible de soulever d'office le moyen tiré de ce que le point de départ de la capitalisation des intérêts demandée par les consorts E... fixé au 26 décembre 2019 par le jugement attaqué est erroné dès lors qu'à cette date, une année entière d'intérêt n'était pas encore due. Le ministre des armées a présenté des observations à la suite de cette communication, le 2 juin 2025. Vu les autres pièces des dossiers ; Vu : - le code de la défense ; - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le décret n° 2008-967 du 16 septembre 2008 fixant les règles de déontologie propres aux praticiens des armées ; - l'arrêté du 20 décembre 2012 relatif à la détermination et au contrôle de l'aptitude médicale à servir du personnel militaire ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Larsonnier, - les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique, - et les observations de Me Dausque, avocate des consorts E.... Considérant ce qui suit : 1. M. F... E..., capitaine de corvette sous contrat rattaché au corps des officiers spécialisés de la Marine, de spécialité " pilote d'aéronautique ", a été affecté au détachement de la flottille 25F à Tontouta en Nouvelle-Calédonie. Le 20 novembre 2012, dans le cadre d'une visite médicale périodique du personnel navigant, M. E... a été reçu par le médecin du service des armées qui lui a prescrit des analyses biologiques, qui ont été effectuées le 28 novembre 2012 auprès du laboratoire Calédobio de Païta. Le 17 mai 2013, M. E... a de nouveau été reçu par le médecin du service des armées et a été déclaré apte au vol. Dans le cadre d'un congé du personnel navigant à fin de se reconvertir comme pilote de ligne, autorisé à compter du 1er octobre 2013, M. E... est rentré en métropole. Après avoir constaté une dégradation de son état général, marquée notamment par une perte d'appétit, une perte de poids, une fatigue intense, des nausées et des douleurs hépatiques en octobre 2013, M. E... a consulté son médecin traitant qui, le 13 novembre 2013, lui a prescrit un bilan biologique qui a révélé une hyperlymphocytose, une hypercalcémie ainsi qu'une insuffisance rénale sévère. A compter du 15 novembre 2013, il a été pris en charge en urgence dans le service d'hématologie du centre hospitalier de Lorient. Après de nombreux examens, le diagnostic de lymphome malin non hodgkinien diffus à grandes cellules de type B riche en T de stade IV avec hypercalcémie secondaire à une atteinte osseuse diffuse liée à la maladie a été posé. De décembre 2013 à avril 2014, M. E... a subi six cycles de chimiothérapie. Une autogreffe de cellules souches hématopoïétiques a également été effectuée le 22 avril 2014. En septembre 2014, il a été constaté une réponse complète de la maladie. 2. Le 1er septembre 2014, les consorts E... ont saisi le tribunal de grande instance de Paris d'une demande tendant à la condamnation de la société Biocal et de son assureur, la S.A. Gan Outre-mer Iard, à les indemniser des préjudices subis du fait de la faute commise par le laboratoire Calédobio. Par une ordonnance du 31 octobre 2014, la juge des référés près le tribunal de grande instance de Paris a prescrit une expertise médicale et a désigné les docteurs Rouget et Jadot, qui ont remis leur rapport le 9 novembre 2015, précisant que l'état de santé de M. E... n'étant pas consolidé, une nouvelle expertise médicale devrait être effectuée dans cinq ans. Par une ordonnance du 15 juin 2020, le juge des référés près le tribunal administratif de Paris a, à la demande des consorts E..., prescrit une nouvelle expertise médicale et a désigné les docteurs Paule et Briont, qui ont remis leur rapport le 4 janvier 2021. 3. Par un courrier du 26 décembre 2019, les consorts E... ont formé auprès du ministre de la défense une demande indemnitaire préalable au titre des préjudices qu'ils estiment avoir subis en raison du retard dans le diagnostic de la maladie de M. F... E... par le médecin du service des armées. Cette demande ayant été implicitement rejetée, les consorts E... ont saisi, le 21 avril 2020, le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant, à titre principal, à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal judiciaire de Paris et, à titre subsidiaire, à la condamnation de l'Etat à leur verser une indemnité totale de 1 063 266,11 euros en réparation de ces préjudices. Par un jugement du 13 juin 2023, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser, d'une part, à M. F... E... la somme de 86 461 euros, à Mme C... E..., la somme de 3 000 euros, à Mme A... E... et M. D... E..., la somme de 1 500 euros chacun, en réparation des préjudices subis du fait du retard de diagnostic de la maladie de M. F... E..., assorties des intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2019 et de la capitalisation des intérêts échus à la date du 26 décembre 2019, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, et, d'autre part, à la caisse nationale militaire de sécurité sociale la somme de 77 426,24 euros au titre de ses débours, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2021 et de la capitalisation des intérêts échus à la date du 15 octobre 2022 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, ainsi que la somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, a mis à la charge de l'Etat les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 3 622,50 euros ainsi que la somme de 2 000 euros à verser aux consorts E... et la somme de 1 000 euros à verser à la caisse nationale militaire de sécurité sociale au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, a rejeté le surplus des conclusions des parties. Les consorts E... relèvent appel de ce jugement, à titre principal, en tant qu'il n'a pas fait droit à leur demande de sursis à statuer, et, à titre subsidiaire, en tant qu'il n'a pas fait pas droit à l'intégralité de leurs demandes indemnitaires. L'Etat fait appel de ce jugement en tant qu'il a été condamné à indemniser les consorts E... et demande à la cour, à titre principal, d'ordonner une nouvelle expertise et, à titre subsidiaire, de réduire le montant des indemnités allouées par le tribunal aux consorts E... et à la CNMSS. La CNMSS demande à la cour, par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande. Sur la jonction : 4. Les requêtes n° 23PA03458 et 23PA03654 étant dirigées contre le même jugement et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt. Sur la régularité du jugement : 5. Il ne résulte d'aucune disposition légale ou réglementaire que le juge administratif serait tenu de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision définitive rendue par le juge judiciaire dans le cadre d'une procédure introduite parallèlement devant lui. Par ailleurs, lorsqu'un dommage trouve sa cause dans plusieurs fautes qui, commises par des personnes différentes ayant agi de façon indépendante, portaient chacune en elle normalement ce dommage au moment où elles se sont produites, la victime peut rechercher la réparation de son préjudice en demandant la condamnation de l'une de ces personnes ou de celles-ci conjointement, sans préjudice des actions récursoires que les coauteurs du dommage pourraient former entre eux. Enfin, la nature et l'étendue des réparations incombant à une autorité administrative en raison d'un dommage dont la responsabilité lui est imputée ne dépendent pas de l'évaluation du dommage faite par l'autorité judiciaire dans un litige où elle n'a pas été partie et n'aurait pu l'être mais doivent être déterminées par le juge administratif, compte tenu des règles afférentes à la responsabilité des personnes morales de droit public. Dans ces conditions, les premiers juges pouvaient, sans entacher d'irrégularité leur jugement, rejeter les conclusions des consorts E... tendant à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du jugement définitif du tribunal judiciaire de Paris dans l'affaire les opposant à la SELAS Biocal et à son assureur, la SA Gan Outre-Mer Iard. Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires présentées par M. E... devant le tribunal administratif : 6. L'article L. 4132-1 du code de la défense dispose : Nul ne peut être militaire : (...) / 3° S'il ne présente les aptitudes exigées pour l'exercice de la fonction ; / (...) ". Le contrôle de l'aptitude médicale à servir du personnel militaire repose sur des visites médicales périodiques d'aptitude qui ont vocation à déterminer l'absence, à un instant donné, de cause médicale d'inaptitude cliniquement décelable à une activité, une fonction ou une spécialité précisée. 7. Aux termes de l'article L. 4125-1 du code de la défense : " Les recours contentieux formés par les militaires mentionnés à l'article L. 4111-2 à l'encontre d'actes relatifs à leur situation personnelle sont précédés d'un recours administratif préalable, sous réserve des exceptions tenant à l'objet du litige déterminées par décret en Conseil d'Etat. Ce décret fixe les conditions dans lesquelles le recours est exercé ". Aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " Le présent livre s'applique aux militaires de carrière, aux militaires servant en vertu d'un contrat, aux militaires réservistes qui exercent une activité au titre d'un engagement à servir dans la réserve opérationnelle ou au titre de la disponibilité et aux fonctionnaires en détachement qui exercent, en qualité de militaires, certaines fonctions spécifiques nécessaires aux forces armées. (...) ". Aux termes de l'article R. 4125-1 du même code : " I. - Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. / (...) / III. - Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux recours contentieux formés à l'encontre d'actes ou de décisions : / 1° Concernant le recrutement du militaire, l'exercice du pouvoir disciplinaire, ou pris en application de l'article L. 4139-15-1 ; / 2° Pris en application du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et du code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi que ceux qui relèvent de la procédure organisée par les articles 112 à 124 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ". 8. Il résulte des dispositions citées au point 7 qu'à l'exception des matières qu'elles ont entendu écarter expressément de la procédure du recours préalable obligatoire, la saisine de la commission des recours des militaires s'impose à peine d'irrecevabilité d'un recours contentieux, formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle, que ce recours tende à l'annulation d'une décision ou à l'octroi d'une indemnité à la suite d'une décision préalable ayant lié le contentieux. 9. Il résulte de l'instruction que M. E... a adressé au ministre de la défense une demande indemnitaire préalable en date du 26 décembre 2019 par laquelle il sollicitait la réparation des préjudices consécutifs à la faute commise par le médecin du service de santé des armées en ne l'informant pas des anomalies importantes que comportaient les résultats du bilan biologique que celui-ci lui avait prescrit, le 20 novembre 2012, dans le cadre d'une visite obligatoire d'aptitude médicale du personnel naviguant, alors qu'il était capitaine de corvette sous contrat rattaché au corps des officiers spécialisés de la Marine, faute qui, selon lui, a causé un retard d'un an dans le diagnostic du lymphome malin non hodgkinien diffus à grandes cellules B dont il était atteint. Le ministre de la défense a implicitement rejeté cette demande. Eu égard au lien étroit entre la faute invoquée par M. E... et ses obligations statutaires, lui imposant un contrôle périodique de son aptitude, le rejet de sa réclamation préalable tendant à la réparation de préjudices qu'il impute aux défaillances de la médecine préventive au contrôle de laquelle il était statutairement soumis est au nombre des actes relatifs à sa situation personnelle et porte directement sur des droits liés à son ancienne qualité de militaire. Dans ces conditions, et alors même qu'il a été radié des cadres le 6 avril 2016 à l'issue de sa reconversion professionnelle, M. E... devait, préalablement à son recours contentieux, saisir la commission des recours des militaires placée auprès du ministre de la défense, prévue par l'article R. 4125-1 du code de la défense, d'un recours contre la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande indemnitaire. M. E... n'ayant pas formé de recours administratif préalable obligatoire devant la commission des recours des militaires avant de saisir le tribunal administratif de Paris, ses conclusions indemnitaires présentées devant le tribunal étaient irrecevables. C'est donc à tort que le tribunal y a fait droit au lieu de les rejeter. Par suite, et sans qu'il soit besoin de répondre à la fin de non-recevoir opposée par le ministre des armées, le jugement doit être annulé dans cette mesure. Sur les conclusions aux fins de sursis à statuer en tant qu'elles portent sur les conclusions indemnitaires présentées par Mme C... E..., Mme A... E... et M. D... E... : 10. Il résulte de l'instruction que, par un jugement du 17 février 2025, le tribunal judiciaire de Paris a condamné solidairement la SELAS Biocal (laboratoire Calédobio) ainsi que son assureur, la société Gan Outre-Mer Iard, à indemniser les consorts E... en raison des préjudices subis du fait du retard dans le diagnostic de la pathologie de M. F... E.... La société Biocal a fait appel de ce jugement. Toutefois, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la cour d'appel de Paris. En outre, les victimes sont en droit de rechercher la réparation de leurs préjudices contre l'une ou l'autre des personnes responsables, sans préjudice des actions récursoires que ces personnes pourraient former entre elles. Dans les circonstances de l'espèce, l'appréciation des constatations de fait, nécessaires à la cour pour se prononcer sur les conclusions indemnitaires présentées par Mme E..., Mme A... et M. D... E..., ne justifie pas en l'espèce qu'il soit sursis à statuer sur ces conclusions. Par suite, les conclusions des consorts E... tendant à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du caractère définitif du jugement du tribunal judiciaire de Paris du 17 février 2015 dans l'affaire les opposant à la société Biocal et à son assureur doivent être rejetées. Sur la responsabilité de l'Etat : 11. Aux termes de l'article 3 du décret du 16 septembre 2008 fixant les règles de déontologie propres aux praticiens des armées : " Conformément aux dispositions des articles L. 4121-4 du code de la défense, L. 4112-6 et L. 4222-7 du code de la santé publique et L. 242-1 du code rural, le praticien des armées n'est, en position d'activité, inscrit au tableau d'aucun ordre professionnel. / Néanmoins, sa qualité d'interne, de médecin, de pharmacien, de vétérinaire ou de chirurgien-dentiste lui impose d'adopter une conduite conforme aux principes généraux gouvernant l'exercice de sa profession. / Le praticien exerçant en qualité de praticien des armées au titre d'un engagement à servir dans la réserve opérationnelle ou au titre de la disponibilité reste inscrit au tableau de son ordre professionnel mais n'est plus soumis à sa juridiction pour les actes commis du fait ou à l'occasion de cette activité ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Le praticien des armées doit à celui ou celle qu'il examine, qu'il soigne ou qu'il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu'il lui propose. (...) ". Aux termes de l'article 13 du même décret : " Chaque praticien des armées est responsable, dans les conditions fixées par la loi, de ses décisions et des actes qu'il accomplit, notamment en matière de prévention, de diagnostic, de soins, d'expertise, d'aptitude et de contrôle. Il doit rechercher en permanence, en fonction des situations rencontrées, les meilleures conditions possibles d'exercice de sa profession, afin de garantir la qualité de ses actes ". 12. Il résulte de ces dispositions, que lorsqu'à l'occasion d'une visite médicale périodique, qui a pour objet le contrôle de l'aptitude médicale générale du militaire au service, à l'emploi tenu et à toute mission opérationnelle, le médecin des armées exerçant les fonctions de médecin de prévention constate, à l'issue de l'examen clinique du militaire ou au vu de résultats d'examens médicaux qu'il a prescrits, des anomalies, il est tenu d'en informer l'intéressé de manière loyale, claire et appropriée, et de l'orienter vers son médecin traitant ou vers un spécialiste à même de prendre en charge ces anomalies. 13. Pour la période postérieure au 20 décembre 2012, ces obligations trouvent également leur fondement dans l'article 14 de l'arrêté du 20 décembre 2012 relatif à la détermination et au contrôle de l'aptitude médicale à servir du personnel militaire, en vigueur à la date de la visite médicale de M. E... du 17 mai 2013, aux termes duquel : " La visite médicale périodique est un bilan médical qui repose sur : / ' un entretien médical individuel, basé notamment sur l'exploitation d'un questionnaire médico-biographique signé par l'intéressé et de la fiche prérenseignée par son commandement ; / ' l'analyse de tout document apporté par le patient ; / ' l'étude du dossier médical ; / ' l'examen clinique ; /' des examens complémentaires systématiques, dont la liste est fixée par instruction, sous timbre du service de santé des armées. / Le médecin détermine, si nécessaire, les éventuels actes médicaux, examens complémentaires et consultations spécialisées : /' indispensables à la détermination de l'aptitude médicale ; ou /' justifiés par l'investigation d'anomalies découvertes lors de l'examen médical ; ou /' conseillés dans le cadre d'actions de santé publique. /Dans ces deux derniers cas, le financement des actes est à la charge des organismes de protection sociale. Le médecin examinateur respecte le principe du libre choix du patient en matière de soins. (...) " 14. Ainsi qu'il a déjà été dit, il résulte de l'instruction que le 20 novembre 2012, dans le cadre d'une visite médicale semestrielle du personnel navigant, le médecin des armées a prescrit à M. E... des analyses de biologie médicale, lesquelles ont été réalisées le 28 novembre 2012 au laboratoire Calédobio de Païta. Le 2 décembre 2012, les résultats de ces analyses biologiques ont été transmises, par un réseau informatique, par le laboratoire de Païta au seul médecin des armées. Il ressort du rapport d'expertise du 9 novembre 2015 des docteurs Rouget et Jadot que ces résultats mentionnaient une anomalie importante de la formule leucocytaire de M. E..., une augmentation de lymphocytes à 6 930/m3 et des leucocytes à 10 500 alors que les références se situent entre 4 000 et 10 000. Toutefois, le médecin des armées n'a pas informé M. E... de ces anomalies lors de la réception de ces résultats, ni même lors de la visite médicale semestrielle suivante qui a eu lieu le 17 mai 2013. Il a ainsi méconnu son obligation d'informer le militaire, de manière loyale, claire et appropriée à son état de santé, des anomalies révélées par les examens médicaux qu'il avait pourtant prescrits, privant ainsi M. E... de la possibilité de consulter, dès la fin de l'année 2012, un médecin généraliste ou un spécialiste qui aurait pu prescrire des examens complémentaires permettant de découvrir à un stade précoce la pathologie dont il était atteint. Par suite, le médecin des armées a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard des consorts E.... Sur le partage de responsabilité demandé par l'Etat : 15. Il résulte de l'instruction que, par un jugement du 17 février 2025, le tribunal judiciaire de Paris, saisi par les consorts E..., a, ainsi qu'il a déjà été dit, jugé qu'au vu des dispositions du guide de bonne exécution des analyses de biologie médicale publié au Journal officiel de la République française du 11 décembre 1999 et précisé dans l'arrêté du 26 novembre 1999, le laboratoire d'analyses médicales Calédobio de la société Biocal avait méconnu son obligation de résultat de joindre le médecin des armées afin de l'informer des résultats d'analyses biologiques préoccupants de M. E... ou de transmettre au médecin des armées ces résultats, et, a condamné la société Biocal et son assureur, la société Gan Outre-Mer Iard, à réparer entièrement les préjudices des consorts E.... Toutefois, la circonstance que le laboratoire d'analyses médicales, personne privée, agissant de façon indépendante, a commis une autre faute que celle commise par le médecin des armées, et qui portait aussi normalement en elle le dommage au moment où elle s'est produite, ne s'oppose pas à ce que la réparation intégrale des préjudices de Mme E..., de ses enfants et de l'organisme social soit, dans le cadre de la présente instance, mise à la charge de l'Etat, à charge pour lui, s'il se croit fondé à le faire, d'engager une action récursoire contre la société Biocal et la société Gan Outre-Mer Iard. Par suite, il n'y a pas lieu de procéder au partage de responsabilité sollicité par le ministre des armées, ni même, alors que la société Biocal a fait appel de ce jugement devant la cour d'appel de Paris, de déduire des indemnités allouées à Mme E... et à ses enfants par le présent arrêt celles déjà allouées par le tribunal judiciaire de Paris. Sur le montant de la réparation : 16. Il ressort du rapport d'expertise du 9 novembre 2015 des docteurs Rouget et Jadot que le processus réactionnel étant rare chez l'adulte contrairement à l'enfant, la découverte d'une hyper lymphocytose chez un adulte doit conduire à envisager d'emblée la possibilité d'un syndrome lymphoprolifératif, en particulier dans le cas d'une persistance de l'hyperlymphocytose pendant plusieurs semaines. Il résulte de l'instruction que la faute commise par le médecin des armées en n'informant pas M. E... de l'anomalie importante de la formule leucocytaire apparaissant dans les résultats de ses analyses biologiques du 28 novembre 2012 lui a fait perdre une chance sérieuse de consulter son médecin traitant et de se voir prescrire des examens complémentaires qui auraient permis de poser, quelques semaines après les résultats des analyses biologiques du 28 novembre 2012, le diagnostic de lymphome malin non hodgkinien diffus à grandes cellules de type B présenté par M. E... et de bénéficier d'une prise en charge médicale adaptée dès le début de l'année 2013. Il s'ensuit que l'Etat doit être condamné à réparer l'intégralité des préjudices de M. E... résultant de cette perte de chance sérieuse. 17. Il ressort par ailleurs du rapport d'expertise du 9 novembre 2015 que si la prise en charge médicale adaptée à l'état de santé de M. E... avait été mise en œuvre dès le début de l'année 2013, elle aurait vraisemblablement permis d'éviter à l'intéressé d'atteindre le stade IV de la maladie. Dans ces conditions, la faute commise par le médecin des armées a compromis les chances de M. E... d'éviter la détérioration de son état de santé. Eu égard à l'importance du délai qui s'est écoulé entre la faute et le diagnostic de lymphome malin non hodgkinien diffus à grandes cellules de type B posé en novembre 2013, le taux de perte de chance d'éviter pour M. E... les préjudices résultant du traitement d'un lymphome de stade IV doit être fixé à 100 %. Sur les débours de la caisse nationale militaire de sécurité sociale : 18. Il résulte du point précédent que la caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) a droit au remboursement des dépenses de santé prises en charge pour le compte de M. E... résultant des seuls traitements rendus nécessaires par l'avancée au stade IV de la maladie de l'intéressé. Il ressort de la notification définitive des débours du 1er février 2021 produite par la CNMSS, que celle-ci a exposé, à ce titre, 30 497,67 euros au titre des frais d'hospitalisation rendue nécessaire pour la prise en charge du lymphome au stade avancé IV, du 15 novembre 2013 au 13 décembre 2013, 29 250 euros au titre des frais d'hospitalisation et d'intervention pour la réalisation de l'autogreffe, du 10 avril 2014 au 6 mai 2014, et 15 198,09 euros de frais médicaux, de pharmacie et d'appareillage relatifs au suivi de l'autogreffe, du 9 mai 2014 au 22 mai 2014, ainsi qu'une somme de 2 480,48 euros au titre des frais de transports exposés entre le 10 février 2014 et le 23 juin 2014, qui correspond à la période de prise en charge de l'autogreffe de M. E.... La CNMSS n'établit pas devant la cour qu'elle aurait supporté des frais supplémentaires du fait de l'avancée au stade IV du lymphome dont M. E... était atteint. Eu égard au taux de perte de chance d'éviter pour M. E... les préjudices résultant du traitement d'un lymphome de stade IV fixé à 100 %, il y a lieu de condamner l'Etat à verser la somme totale de 77 426,24 euros à la CNMSS au titre des dépenses de santé actuelles et de confirmer ainsi le jugement du tribunal administratif de Paris. Sur les préjudices de Mme E... : En ce qui concerne la perte de revenus : 19. Il résulte de l'instruction que Mme E..., infirmière de profession, de retour en métropole en août 2013, n'exerçait pas d'emploi à la date de l'hospitalisation de son mari, le 15 novembre 2013. Elle n'établit pas avoir engagé des démarches de recherche d'emploi susceptibles d'aboutir à la date de l'annonce du diagnostic de lymphome de stade IV. Si Mme E... soutient qu'elle n'a pu exercer une activité à temps partiel qu'à compter du mois de juin 2014 avant d'être employée en contrat à durée indéterminée à temps plein à compter du mois de mars 2016, il résulte de l'instruction qu'à compter de juin 2014, M. E... avait subi les traitements les plus lourds contre le lymphome, notamment l'autogreffe. Dans ces conditions, le lien de causalité entre l'activité à temps partiel de Mme E... et la faute commise par le médecin des armées n'est pas établi. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges n'ont pas fait droit à la demande présentée par Mme E... au titre de la perte de gains professionnels actuels. En ce qui concerne le préjudice d'affection : 20. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, qu'en novembre 2013, lors de la découverte du stade très avancé de la maladie de M. E..., les médecins lui ont annoncé que son pronostic vital était engagé. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à l'angoisse subie par Mme E..., qui a appréhendé pendant plusieurs mois le décès de son mari, en raison de la faute commise par le médecin des armées, il sera fait une juste appréciation de son préjudice d'affection en lui allouant à ce titre, après application du taux de perte chance fixé à 100 %, la somme de 3 000 euros, correspondant à celle allouée par les premiers juges. Sur les préjudices de Mme A... E... et de M. D... E..., enfants de M. E... : 21. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 20, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'affection des enfants de M. E..., âgés de 11 et 13 ans à la date de l'annonce de l'état d'avancement de la maladie de leur père, en leur allouant à ce titre, après application du taux de perte chance fixé à 100 %, la somme de 1 500 euros chacun, qui correspond à celle retenue par le tribunal. 22. Il résulte de l'instruction que la société Biocal a fait appel, ainsi qu'il a déjà été dit au point 15, du jugement du 17 février 2025 du tribunal judiciaire de Paris condamnant la société Biocal et la société Gan Outre-Mer Iard à indemniser les consorts E.... Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de déduire des indemnités à verser à Mme E... et à ses enfants mises à la charge de l'Etat par le présent arrêt celles déjà allouées aux intéressés par le tribunal judiciaire de Paris. Il appartiendra à l'Etat, s'il se croit fondé à le faire, d'engager une action récursoire contre la société Biocal et la société Gan Outre-Mer Iard. Sur les intérêts légaux et leur capitalisation : 23. D'une part lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1231-6 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. D'autre part, la capitalisation des intérêts prévue par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. En ce qui concerne Mme E... et ses enfants : 24. Mme E... et ses enfants demandent à ce que les sommes mises à la charge de l'Etat soient assorties des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation en référé expertise du 1er septembre 2014. Toutefois, si cette dernière a été adressée au ministre de la défense, elle n'avait pas pour objet de solliciter le paiement d'indemnités en réparation des préjudices subis du fait de la faute commise par le médecin des armées. En outre, seul M. E... a donné assignation au ministre de la défense. Dans ces conditions, le point de départ des intérêts est le 26 décembre 2019, date à laquelle Mme E... et ses enfants ont présenté une demande indemnitaire préalable au ministre des armées. Mme E..., Mme A... E... et M. D... E... ont ainsi droit aux intérêts des sommes respectivement de 3 000 euros, 1 500 euros et 1 500 euros à compter du 26 décembre 2019. 25. Il y a également lieu de faire droit à leur demande de capitalisation des intérêts à compter de la date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date, c'est-à-dire à compter du 26 décembre 2020 et non, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, dont le jugement doit être réformé sur ce point, à la date du 26 décembre 2019. En ce qui concerne la caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) : 26. La CNMSS a droit aux intérêts de la somme de 77 426,24 euros à compter de la date de sa demande, soit le 15 octobre 2021. Il y a également lieu de faire droit à sa demande de capitalisation des intérêts à compter de la date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date, c'est-à-dire à compter du 15 octobre 2022. Par conséquent, il n'y a, dès lors, pas lieu de réformer le jugement sur ce point. Sur l'indemnité forfaitaire de gestion : 27. Il résulte des dispositions du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale que le montant de l'indemnité forfaitaire qu'elles instituent est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un plafond dont le montant est révisé chaque année par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. Le jugement attaqué, qui a fixé à 74 945,76 euros le montant des indemnités dues à la CNMSS au titre des prestations versées pour le compte de M. E..., a accordé à la caisse, au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, une somme de 1 162 euros correspondant au plafond fixé par l'arrêté du 15 décembre 2022 alors en vigueur. Si le plafond a été réévalué par la suite, la caisse ne peut prétendre à une augmentation du montant de l'indemnité forfaitaire de gestion dès lors que ses conclusions tendant à la majoration des sommes qui lui sont dues au titre des prestations versées sont rejetées. Sur les frais liés aux instances : 28. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme E..., Mme A... E... et M. D... E... la somme globale de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par la CNMSS au titre des frais liés aux instances. D É C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement n° 2006582/6-2 du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Paris est annulé. Article 2 : Les conclusions indemnitaires présentées par M. E... devant le tribunal administratif de Paris sont rejetées. Article 3 : La capitalisation des intérêts demandée par Mme E..., Mme A... E... et M. D... E... Mme est due à compter du 26 décembre 2020. Le paiement des sommes dues emporte la subrogation de l'Etat, par les consorts E..., jusqu'à concurrence de ces sommes, aux droits qui résulteraient pour eux des condamnations qui seraient définitivement prononcées à leur profit, contre la société Biocal et la société Gan Outre-mer Iard, par l'autorité judiciaire. Article 4 : Les articles 2 et 3 du jugement du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Paris sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt. Article 5 : L'Etat versera à Mme E..., Mme A... E... et M. D... E... la somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à MM. F... et Matthieu E..., à Mmes C... et A... E..., à la caisse nationale militaire de sécurité sociale et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 10 juin 2025, à laquelle siégeaient : - Mme Menasseyre, présidente de chambre, - Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure, - Mme Larsonnier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2025. La rapporteure, V. Larsonnier La présidente, A. Menasseyre La greffière, N. Couty La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Nos 23PA03458, 23PA03654 2
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de LYON, 7ème chambre, 03/07/2025, 24LY00519, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du recteur de l'académie de Lyon des 4 octobre et 14 décembre 2021. Par un jugement n° 2201098 du 29 décembre 2023, le tribunal a rejeté cette demande. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 février et 2 décembre 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Azoulay, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler les décisions des 4 octobre et 14 décembre 2021 ; 3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué, qui a retenu qu'il n'aurait fourni ni explication ni justificatif, est entaché d'une " erreur de fait ", dès lors que jusqu'au 31 août 2021, il a toujours répondu aux sollicitations lui ayant été adressées et qu'il justifie de raisons ne lui ayant pas permis de répondre aux convocations des 7 et 13 septembre 2021 ; - le jugement attaqué, en ce qu'il est fondé sur la circonstance qu'il ne justifiait pas de la qualité de travailleur handicapé, est entaché d'une " erreur de droit " au regard des dispositions des articles 27 (II) de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, 7-2 et 8 du décret n° 95-979 du 25 août 1995, compte tenu des stipulations de l'article 7 de son contrat, l'autorité administrative ne pouvant faire application, compte tenu de sa situation, que des dispositions de l'article 7-2 et pas de l'article 8 de ce décret ; - le jugement attaqué, en ce qu'il est fondé sur ce même motif, est également entaché d'une " erreur de droit ", au regard des dispositions des articles 27 (II) de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, et 7-2 et 8 du décret n° 95-979 du 25 août 1995, compte tenu des stipulations de l'article 7 de son contrat, ne pouvant être fondé sur la circonstance qu'il ne bénéficiait plus de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ; - le jugement attaqué a procédé illégalement à une substitution des motifs des décisions contestées, en estimant qu'elles pouvaient être légalement fondées sur la circonstance qu'il ne bénéficiait plus de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ; - les décisions contestées ont été signées par une autorité ne justifiant pas d'une délégation pour ce faire ; - les décisions contestées ne sont pas motivées en droit au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; - les décisions contestées, qui ont été prises pour un motif d'abandon de poste, sont entachées d'illégalité, la mise en demeure préalable du 13 septembre 2021 ne précisant pas qu'il risquait de voir son contrat rompu en cas de non-respect du délai de convocation, lequel était insuffisant compte tenu de sa situation ; - les décisions contestées ne pouvaient être légalement prises, au regard des dispositions des articles 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et 7-2 du décret n° 95-979 du 25 août 1995, le recteur étant tenu de poursuivre la relation contractuelle, son contrat de travail initial devant être prolongé suite à un arrêt de travail et à la visite médiale d'aptitude, sans qu'un terme puisse être mis à ce contrat ; - la décision du 4 octobre 2021, qui a été prise dans le cadre d'une procédure d'abandon de poste, en ayant retenu qu'il avait l'intention de quitter ses fonctions, est entachée d'une " erreur de droit " et d'une " erreur manifeste d'appréciation ", compte tenu de la particularité de sa situation, du fait de sa qualité de travailleurs handicapé et de la dégradation de son état de santé dont il a fait part à l'administration ; - les décisions contestées méconnaissent le principe d'égalité garanti par les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, impliquant que les individus dans des situations différentes, comme les personnes handicapées, soient traitées différemment afin de corriger les inégalités de fait ; - l'administration n'a pas respecté la procédure applicable en cas de substitution de base légale ; - les décisions contestées ont été prises au détriment de l'intérêt du service. Par un mémoire enregistré le 15 octobre 2024, le recteur de l'académie de Lyon conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 15 octobre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 décembre 2024. En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées par un courrier du 11 juin 2025, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de ce que le recteur de l'académie de Lyon se trouvait dans une situation de compétence liée pour mettre fin à l'engagement de M. A... par la décision contestée du 4 octobre 2021, et rejeter le recours gracieux formé par l'intéressé contre cette décision par la décision également contestée du 14 décembre 2021, dès lors qu'il ne satisfaisait alors plus aux exigences de l'article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et de l'article 1er du décret n° 95-979 du 25 août 1995, faute de justifier de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé et ainsi de l'obligation d'emploi alors prévue par les dispositions des articles 33 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et des articles L. 5212-2 et L. 5212-13 du code du travail. Par un mémoire enregistré le 16 juin 2025, qui a été communiqué, M. A... a répondu à ce moyen relevé d'office. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de l'action sociale et des familles ; - le code du travail ; - l'ordonnance n° 2020-312 du 25 mars 2020 relative à la prolongation de droits sociaux ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 ; - le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 ; - le décret n° 95-979 du 25 août 1995 ; - le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Chassagne, premier conseiller ; - les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ; - et les observations de Me Caron, substituant Me Azoulay, pour M. A... ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 juin 2025, présentée pour M. A... ; Considérant ce qui suit : 1. M. B... A..., qui bénéficiait alors de la qualité de travailleur handicapé, a été recruté, sur ce fondement, par un contrat à durée déterminée d'une durée d'un an, renouvelable, à compter du 1er septembre 2017 pour une quotité de service hebdomadaire de dix-huit heures afin d'exercer des fonctions de professeur en documentation. N'ayant pu être évalué par un jury de titularisation à l'issue de son premier contrat, ni par la suite prendre ses fonctions, en raison de problèmes de santé, son contrat initial a été reconduit à plusieurs reprises pour des durées d'un an, et en dernier lieu, par un contrat du 21 août 2020 ayant pour terme le 31 août 2021. Durant l'été 2021, et en réponse à une demande en ce sens des services du rectorat, M. A... les a informés qu'il était en mesure de reprendre ses fonctions et des échanges ont donc eu lieu en vue d'une éventuelle poursuite de son dernier contrat. L'intéressé ayant été déclaré apte à ses fonctions par un médecin le 12 août 2021, les services du rectorat, par des courriels des 18 et 24 août 2021, et afin de préparer un nouveau document contractuel, l'ont invité à justifier qu'il bénéficiait toujours de sa qualité de travailleur handicapé. Par un courriel du 31 août 2021, M. A... les a informés qu'il ne pouvait pas obtenir l'accusé de réception de sa demande de renouvellement de la reconnaissance de travailleur handicapé avant le 6 septembre 2021 au plus tôt. Le 7 septembre 2021, le recteur de l'académie de Lyon a convoqué M. A... le 13 septembre 2021 à un entretien, que ce dernier n'a pas honoré, qui était destiné à faire le point sur sa situation professionnelle et évoquer sa prise de fonction pour l'année scolaire 2021-2022. Par un nouveau courrier du 13 septembre 2021, notifié le 18 septembre suivant, le recteur a vainement mis en demeure M. A... de se présenter au rectorat, dans un délai de trois jours, afin de prendre son poste. Et le 4 octobre 2021, le recteur, après avoir rappelé à l'intéressé qu'il n'avait pas répondu à la mise en demeure dont il avait fait l'objet, lui a indiqué que cette situation perturbait gravement le bon fonctionnement de son établissement d'affectation et constituait un manquement au respect des obligations s'imposant à lui pour en conclure qu'il prenait acte de sa " volonté de rompre tout lien avec l'administration " et qu'il était ainsi considéré comme " démissionnaire ", si bien qu'il était mis fin à son contrat à compter du 22 septembre 2021. M. A..., par un courrier du 3 décembre 2021, reçu le 6 décembre suivant, a demandé à l'autorité administrative de reconsidérer sa décision. Le 14 décembre 2021, le recteur lui a rappelé ses différentes relances et précisé qu'en l'absence de toute relation contractuelle, son contrat ayant pris fin le 31 août 2021, il lui incombait désormais de prendre l'attache de Pôle Emploi. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande d'annulation des décisions des 4 octobre et 14 décembre 2021. 2. En premier lieu, et d'une part, aux termes de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, alors applicables : " (...) / II. - Les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail peuvent être recrutées en qualité d'agent contractuel dans les emplois de catégories A, B et C pendant une période correspondant à la durée de stage prévue par le statut particulier du corps dans lequel elles ont vocation à être titularisées. Le contrat est renouvelable, pour une durée qui ne peut excéder la durée initiale du contrat. A l'issue de cette période, les intéressés sont titularisés sous réserve qu'ils remplissent les conditions d'aptitude pour l'exercice de la fonction. / (...). ". Aux termes de l'article 1er du décret du 25 août 1995 d'application de l'article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée relative à certaines modalités de recrutement des handicapés dans la fonction publique de l'État, dans sa rédaction applicable : " I. - Les bénéficiaires de l'obligation d'emploi (...) peuvent, en application de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, être recrutés en qualité d'agent contractuel lorsque leur handicap a été jugé compatible avec l'emploi postulé (...). ". Aux termes de l'article L. 5212-2 du code du travail : " Tout employeur emploie des bénéficiaires de l'obligation d'emploi mentionnés à l'article L. 5212-13 (...). ". Aux termes de l'article L. 5212-13 du même code : " Bénéficient de l'obligation d'emploi instituée par l'article L. 5212-2 : / 1° Les travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles ; / 2° Les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ayant entraîné une incapacité permanente au moins égale à 10 % et titulaires d'une rente attribuée au titre du régime général de sécurité sociale ou de tout autre régime de protection sociale obligatoire ; / 3° Les titulaires d'une pension d'invalidité attribuée au titre du régime général de sécurité sociale, de tout autre régime de protection sociale obligatoire ou au titre des dispositions régissant les agents publics à condition que l'invalidité des intéressés réduise au moins des deux tiers leur capacité de travail ou de gain ; / 4° Les bénéficiaires mentionnés à l'article L. 241-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; / (...) / 9° Les titulaires d'une allocation ou d'une rente d'invalidité attribuée dans les conditions définies par la loi n° 91-1389 du 31 décembre 1991 relative à la protection sociale des sapeurs-pompiers volontaires en cas d'accident survenu ou de maladie contractée en service ; / 10° Les titulaires de la carte " mobilité inclusion " portant la mention " invalidité " définie à l'article L. 241-3 du code de l'action sociale et des familles ; / 11° Les titulaires de l'allocation aux adultes handicapés. ". Aux termes de l'article 33 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " I. - L'État est assujetti à l'obligation d'emploi prévue à l'article L. 5212-2 du code du travail (...). ". 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles dans leur rédaction applicable : " I. - La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées est compétente pour : / (...) / 4° Reconnaître, s'il y a lieu, la qualité de travailleur handicapé aux personnes répondant aux conditions définies par définies par l'article L. 323-10 du code du travail ; / (...) / II. - Les décisions de la commission sont, dans tous les cas, motivées et font l'objet d'une révision périodique. (...) / (...). " Aux termes de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prolongation de droits sociaux : " I. - 1° Par dérogation aux dispositions des articles (...) L. 241-6 (...) du code de l'action sociale et des familles, les bénéficiaires des droits et prestations énumérés au 2° du présent I dont l'accord sur ces droits et prestations expire entre le 12 mars et le 31 juillet 2020 (...), bénéficient d'une prolongation de la durée de cet accord d'une durée de six mois à compter de la date d'expiration de cet accord (...), renouvelable une fois par décret, sans nouvelle décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées prévue à l'article L. 146-9 du code (...) ; / 2° Les dispositions du 1° du présent I sont applicables aux bénéficiaires des droits et prestations suivants : / (...) / -tous les autres droits ou prestations mentionnés à l'article L. 241-6 du même code relevant de la compétence de la commission mentionnée à l'article L. 146-9. / (...). ". Aux termes de l'article R. 5213-1-1 du code du travail : " Toute demande de renouvellement de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, formée auprès de la maison départementale des personnes handicapées, proroge les effets du bénéfice de la reconnaissance de cette qualité délivrée au titre de la précédente décision par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées jusqu'à ce qu'il soit statué à nouveau sur son renouvellement avant l'expiration du délai mentionné à l'article R. 241-33 du code de l'action sociale et des familles, dès lors qu'elle a été déposée avant l'échéance du droit en cours par tout moyen permettant de conférer date certaine à la réception de cette demande. Le bénéfice de cette prorogation demeure acquis indépendamment du sort de la demande en cours d'instruction. ". 4. Il ressort des pièces du dossier que le contrat initial que M. A... a signé le 21 août 2017 pour l'année scolaire 2017-2018 a été conclu sur le fondement des dispositions précitées de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984. Une décision du 15 juin 2015, valable jusqu'au 30 juin 2020, qui reconnaissait sa qualité de travailleur handicapé, et sur laquelle ce contrat était fondé, le faisait bénéficier, pour ce motif, de l'obligation d'emploi. Le 31 août 2021, au terme du contrat signé le 21 août 2020, la validité de cette reconnaissance, qui avait été prorogée jusqu'au 30 décembre 2020 par l'effet des dispositions précitées de l'article 2 de l'ordonnance du 25 mars 2020, avait cessé. Quelle que soit la nature exacte de la relation contractuelle existant alors, cette cessation était intervenue à la date d'intervention de la décision contestée le 4 octobre 2021. A cet égard, faute de demande de renouvellement déposée avant le 30 décembre 2020, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait été dans l'impossibilité absolue de formuler une telle demande, la validité de cette reconnaissance n'a pu être prorogée par l'effet des dispositions ci-dessus de l'article R. 5213-1-1 du code du travail. Par suite, M. A... qui, à la date du 4 octobre 2021, ne bénéficiait plus de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, fondement à son recrutement, et ainsi de l'obligation d'emploi alors prévue par les dispositions précitées de l'article 33 de la loi du 13 juillet 1983 et des articles L. 5212-2 et L. 5212-13 du code du travail, ne satisfaisait plus aux exigences des articles 27 de la loi du 11 janvier 1984 et 1er du décret du 25 août 1995. Par suite, et alors qu'il n'apparaît pas qu'il aurait pu bénéficier de l'obligation d'emploi pour l'un des autres cas mentionnés à ces mêmes articles 27 de la loi du 11 janvier 1984 et L. 5212-13 du code du travail, le recteur était tenu de mettre fin à l'engagement de M. A.... De ce fait, aucun des autres moyens invoqués, tels qu'ils sont visés plus haut, dont aucun ne met précisément en cause la situation de compétence liée dans laquelle se trouvait le recteur, n'est opérant. 6. Il en résulte que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Lyon. Délibéré après l'audience du 19 juin 2025 à laquelle siégeaient : M. Picard, président de chambre ; Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ; M. Chassagne, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juillet 2025. Le rapporteur, J. Chassagne Le président, V-M. Picard La greffière, A. Le Colleter La République mande et ordonne à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 24LY00519 kc
Cours administrative d'appel
Lyon
Conseil d'Etat, 1ère sous-section jugeant seule, du 28 janvier 2004, 245886, inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 23 février 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X... X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 29 octobre 1999 de la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence qui a confirmé le jugement du tribunal départemental des pensions de Marseille en date du 9 janvier 1997 rejetant sa demande de pension ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme de Salins, Maître des Requêtes, - les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ; Considérant, en premier lieu, qu'en se prévalant des dispositions de l'article L. 8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, M. X ne critique pas utilement l'arrêt de la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence qu'il attaque, dès lors que les juges du fond ne se sont pas fondés sur ces dispositions pour rejeter ses conclusions tendant à ce que le point de départ de la pension de 30 % pour troubles gastriques soit modifié ; Considérant, en second lieu, que M. X se borne, pour le surplus, à invoquer des éléments de pur fait sans critiquer par des moyens de cassation les motifs retenus par la cour ; qu'une telle contestation, qui tend à remettre en cause le pouvoir souverain d'appréciation des faits par les juges du fond, ne peut être utilement soumise au juge de cassation ; que, par suite, la requête de M. X ne peut qu'être rejetée ; D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. X est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... X et au ministre de la défense.
Conseil d'Etat