Cour administrative d'appel de Bordeaux, du 27 juillet 1990, 89BX00795, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision27 juillet 1990
Num89BX00795
JuridictionBordeaux
RapporteurVINCENT
CommissaireLaborde

Vu le recours, enregistré le 31 janvier 1989 au greffe de la cour, présenté pour le MINISTRE DES POSTES, DES TELECOMMUNICATIONS ET DE L'ESPACE et tendant à ce que la cour :
- annule le jugement du 8 novembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamné à verser aux consorts Y... une indemnité de 176.579,44 F au titre de la prise en charge par l'Etat, en cas d'insolvabilité des agresseurs d'un fonctionnaire, des dommages-intérêts accordés par décision de justice ;
- rejette la demande des consorts Y... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance N° 59-244 du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ;
Vu le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 1990 :
- le rapport de M. VINCENT, conseiller ; - les observations de M. X..., pour le MINISTRE DES POSTES, DES TELECOMMUNICATIONS ET DE L'ESPACE ; - et les conclusions de M. LABORDE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DES POSTES, DES TELECOMMUNICATIONS et DE L'ESPACE demande l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser aux consorts Y... une indemnité de 176.579,44 F que les agresseurs de Mme Agnès Y..., receveuse de bureau de poste, décédée le 15 novembre 1985 d'une cause étrangère à l'agression dont elle a été victime, ont été condamnés à lui verser par arrêt de la cour d'assises du département de la Manche en date du 25 septembre 1985 ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen soulevé par le MINISTRE DES POSTES, DES TELECOMMUNICATIONS ET DE L'ESPACE :
Considérant que les réparations auxquelles peut être tenu l'Etat à l'égard de ses agents victimes d'agressions dans l'exercice ou à l'occasion de leurs fonctions sont fixées non par les règles de droit commun de la responsabilité administrative, mais par les dispositions régissant leur statut et la législation sur les pensions ; qu'il est constant que Mme Y... pouvait bénéficier de l'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article 23 bis de l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires alors applicable ; que si, aux termes de l'article 12, alinéa 2, de l'ordonnance précitée :"L'Etat ... est tenu de protéger les fonctionnaires contre les menaces, attaques, de quelque nature que ce soit, dont ils peuvent être l'objet à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté", cette disposition n'a eu ni pour objet ni pour effet de faire disparaître le caractère forfaitaire de la réparation, au titre de l'allocation susvisée, des préjudices corporels subis par le fait ou à l'occasion du service ; que, par suite, la circonstance que l'administration des postes et télécommunications ait accordé à l'intéressée le bénéfice des dispositions susmentionnées n'est pas de nature à ouvrir à celle-ci, à l'encontre de l'Etat, d'autres droits que ceux résultant de l'attribution de ladite allocation ; que le fait que Mme Y... n'ait pu, compte tenu des dispositions du décret du 6 octobre 1960 modifié portant règlement d'administration publique pour l'application de l'article 23 bis précité de l'ordonnance du 4 février 1959, entrer en jouissance de cette allocation à défaut d'avoir repris ses fonctions jusqu'à son admission à la retraite est sans incidence sur la faculté pour l'administration d'opposer en l'espèce la règle du forfait de la pension ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DES POSTES, DES TELECOMMUNICATIONS ET DE L'ESPACE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser la somme de 176.579,44 F aux consorts Y... ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 8 novembre 1988 est annulé. Article 2 : La demande présentée par les consorts Y... devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.