Conseil d'Etat, 10 SS, du 14 février 1986, 65015, inédit au recueil Lebon
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 et 28 janvier 1985 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jacques X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le jugement du 5 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre des anciens combattants lui refusant le titre de déporté-résistant,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre notamment son article L. 272 dans la rédaction alors en vigueur ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Honorat, Auditeur,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de M. Jacques X...,
- les conclusions de M. Delon, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les documents enregistrés sous le n° 65 621 constituent en réalité des mémoires présentés pour M. Jacques X... au soutien de sa requête enregistrée sous le n° 65 015 ; que par suite ces documents doivent être rayés des registres du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat pour être joints à la requête n° 65 015 ;
Considérant que la requête de M. X... doit être regardée comme tendant à l'attribution du titre de "déporté-résistant" ; que "l'article L. 272 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée, dispose : "Le titre de déporté-résistant est attribué à toute personne qui, pour acte qualifié de résistance à l'ennemi, a été :
1° soit transférée par l'ennemi hors du territoire national, puis incarcérée ou internée dans une prison ou un camp de concentration ;
2° soit incarcérée ou internée par l'ennemi dans les camps et prisons du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
3° soit incarcérée ou internée par l'ennemi dans tous autres territoires exclusivement administrés par lui, notamment en Indochine et sous réserve que ladite incarcération ou ledit internement réponde aux conditions qui sont fixées aux articles R. 286 à R. 297" ; qu'aux termes de l'article R. 288 du même code : "Pour l'attribution du titre de déporté-résistant, la liste des prisons et des camps de concentration situés, d'une part, dans les territoires exclusivement administrés par l'ennemi, à l'exception de l'Indochine, et, d'autre part, dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, est fixée par un arrêté du ministre des anciens combattants et victimes de guerre, pris sur l'avis de la commission nationale prévue aux articles R. 306 à R. 308 et qui fait l'objet de l'article A. 160-2°. Si la déportation a eu lieu dans un camp ou une prison ne figurant pas sur ladite liste, le titre de déporté-résistant ne peut être attribué qu'après avis de la commissio nationale susvisée. Cet avis n'est toutefois pas exigé s'il s'agit de personnes décédées au cours de leur transfert par l'ennemi vers ces camps ou prisons" ;
Considérant que M. X..., interné au camp de Drancy le 21 octobre 1942 et embarqué le 11 novembre 1942 dans un train en direction du camp d'Auschwitz, s'est évadé de ce train le jour même entre Château-Thierry et Bar-Le-Duc ; qu'ainsi, M. X..., qui n'a été ni transféré par l'ennemi hors du territoire national ni incarcéré ou interné dans une prison ou camp de concentration, ni incarcéré ou interné par l'ennemi sur un territoire exclusivement administré par lui, ne remplit pas les conditions auxquelles les dispositions précitées de l'article L. 272 du code..... subordonnent l'attribution du titre de déporté-résistant ; qu'il ne saurait utilement se prévaloir ni d'une correspondance en date du 18 juin 1947 émanant du ministère des anciens combattants et victimes de guerre qui s'est bornée à indiquer qu'il avait été "déporté en direction de ...", ni des dispositions de l'article R. 288 précité, qui se bornent à prévoir que le titre de déporté-résistant peut être attribué, après avis d'une commission nationale, aux personnes qui ont été déportées dans un camp ou prison ne figurant pas sur une liste fixée par arrêté ministériel, et qui dispense de cet avis lorsqu'il s'agit de personnes décédées au cours de leur transfert par l'ennemi et qui ne lui sont pas applicables ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre refusant de lui attribuer le titre de déporté-résistant ;
Article 1er : Les productions enregistrées sous le n° 65 621 seront rayées des registres du greffe du Conseil d'Etat pour êtrejointes à la requête enregistrée sous le n° 65 015.
Article 2 : La requête de M. X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au secrétaire d'Etat auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants et victimes de guerre.