Conseil d'Etat, 10/ 5 SSR, du 15 février 1991, 72769, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision15 février 1991
Num72769
Juridiction
Formation10/ 5 SSR
RapporteurRonteix
CommissaireMme Denis-Linton

Vu 1°, sous le n° 72 769, la requête enregistrée le 8 octobre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. J.J. X..., demeurant ..., et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 2 août 1985 portant abrogation des décrets des 5 janvier 1928 et 26 janvier 1930 modifiés ;
Vu 2°, sous le n° 72 775, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 8 octobre 1985 et 7 février 1986, présentés pour M. G. Y..., demeurant ... (79000), et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir le décret n° 85-837 du 2 août 1985 portant abrogation des décrets des 5 janvier 1928 et 26 janvier 1930 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Ronteix, Maître des requêtes,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de M. Jean-Jacques X... et de Me Garaud, avocat de M. Gilbert Y...,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées de MM. X... et Y... sont dirigées contre un même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la requête de M. X... :
Considérant, en premier lieu, que si l'article 22 de la Constitution dispose que "les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution", il ressort de l'examen du décret attaqué que celui-ci a été contresigné par le ministre de la défense, par le ministre de l'économie, des finances et du budget et par le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget et de la consommation ; que les ministres susmentionnés sont ceux qui sont chargés de leur exécution au sens de la disposition précitée de la Constitution ; que dès lors le moyen de la requête tiré du défaut de contreseing du secrétaire d'Etat à la fonction publique et du secrétaire d'Etat aux anciens combattants et victimes de guerre ne saurait être accueilli ;
Considérant, en second lieu, que les dispositions abrogées par le décret attaqué ne concernent pas le droit à pension des fonctionnaires qui est au nombre des garanties fondamentales des fonctionnaires de l'Etat visées par l'article 34 de la Constitution mais les conditions d'application des bénéfices de campagnes, qui font l'objet des articles R.14 à R.19 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 34 de la Constitution doit être écarté ;

Considérant, enfin, qu'aucun principe général ne fait obstacle à la réduction pour l'avenir d'avantages antérieurement consentis par des dispositions réglementaires ; que le décret attaqué ne s'applique pas aux pensions définitivement concédées ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à prétendre qu'il porterait illégalement atteinte aux droits qu'il tenait des décrets des 5 janvier 1926 et 26 janvier 1930 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation du décret du 2 août 1985 ;
Sur la requête de M. Y... :
Considérant qu'aux termes de l'article L.55 du code des pensions civiles et militaires des anciens combattants et victimes de guerre : "La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : à tout moment en cas d'erreur matérielle, dans un délai d'un an à compter de la notification de concession initiale, en cas d'erreur de droit." ; qu'ainsi la pension de M. Y... qui lui a été concédée en 1962 doit être considérée comme définitivement acquise ; que, dès lors, la requête de M. Y..., qui n'a de ce fait aucun intérêt à agir contre le décret attaqué, est irrecevable ;
Article 1er : Les requêtes de MM. X... et Y... sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. X..., Y..., au Premier ministre, au ministre de la défense et au ministredélégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.