Conseil d'Etat, 3 / 5 SSR, du 21 septembre 1992, 92655, mentionné aux tables du recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 17 novembre 1987, présentée par Mme Christiane X..., demeurant "les Anémones IV" ... ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 11 septembre 1987 en tant que, par ledit jugement, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 30 septembre 1983 du ministre de l'urbanisme, du logement et des transports l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er octobre 1983, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité correspondant à 9 mois de traitement pour la période du 1er janvier au 30 septembre 1983 ;
2°) annule pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 septembre 1983 du ministre de l'urbanisme, du logement et des transports l'admettant à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er octobre 1983 ;
3°) condamne l'Etat à lui verser une indemnité correspondant à 9 mois de traitement pour la période du 1er janvier au 30 septembre 1983 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Marc Guillaume, Auditeur,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de l'arrêté du 30 septembre 1983 :
Considérant que par un arrêté en date du 30 septembre 1983, le ministre de l'urbanisme, du logement et des transports a d'une part admis Mme Christiane X... à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er octobre 1983 et d'autre part placé l'intéressée en position de congé post-natal pour les mois de juillet, août et septembre 1983 ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 29-2, alors en vigueur, du décret du 14 février 1959 modifié relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires et à certaines modalités de cessation définitive des fonctions : "En cas d'adoption d'un enfant âgé de moins de trois ans au premier jour du congé pour adoption prévu au 4°) de l'article 36 de l'ordonnance du 4 février 1959, la femme fonctionnaire est placée sur sa demande dans la position de congé postnatal. Ce congé est accordé de droit par le ministre dont relève l'intéressée à compter du jour qui suit l'expiration du congé pour adoption" ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... n'a jamais demandé à être placée dans la position de congé postnatal ; que, par suite, Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen n'a pas annulé l'arrêté du 30 septembre 1983 du ministre de l'urbanisme, du logement et des transports en tant que cet arrêté l'a placée en position de cogé postnatal pour les mois de juillet, août et septembre 1983 ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 24-I du code des pensions civiles et militaires de retraite : "La jouissance de la pension civile est immédiate : ... 3°) pour les femmes fonctionnaires : a) soit lorsqu'elles sont mères de trois enfants vivants ou décédés par faits de guerre ou d'un enfant vivant âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité grave ou supérieure à 80 % ..." ; que pour l'application de cet article la femme fonctionnaire adoptant un enfant doit voir la nouvelle filiation de celui-ci pleinement substituée à la filiation d'origine ; que, si Mme X... avait accueilli le 27 juillet 1982 un troisième enfant adoptif dans son foyer, cette adoption n'est devenue pleinière qu'après le jugement du tribunal de grande instance de Rouen en date du 15 juin 1983 ; que Mme X... a fourni à l'administration une fiche d'état civil rendant compte de ce jugement au mois d'août 1983 ; que cette adoption a pris effet, en vertu de l'article 355 du code civil, au 6 avril 1983, date du dépôt de la requête auprès du tribunal de grande instance de Rouen ; qu'à cette date Mme X... avait donc droit à jouissance immédiate de sa pension civile en application de l'article L. 24-I précité du code des pensions civiles et militaires ; que, par suite, Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen n'a pas annulé l'arrêté du 30 septembre 1983 du ministre de l'urbanisme, du logement et des transports en tant que cet arrêté l'a admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter, non pas du 6 avril 1983, mais du 1er octobre 1983 ;
Sur les conclusions à fin d'indemnité :
Considérant que, si Mme X... demande l'indemnisation du préjudice qu'elle aurait subi du fait du retard apporté à la reconnaissance de ses droits à pension, elle n'apporte aucun justificatif, ni ne chiffre ses prétentions ; que par suite Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions à fin d'indemnité ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 11 septembre 1987 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme X... tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 septembre 1983 en tant que par cet arrêté le ministre de l'urbanisme du logement et des transports l'a placée en position de congé postnatal pour les mois de juillet, août et septembre 1983 et l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite au 1er octobre 1983 etnon pas au 6 avril 1983. La décision du ministre de l'urbanisme, du logement et des transports en date du 30 septembre 1983 est annulée en tant qu'elle a placé Mme X... en position de congé post-natal pour les mois de juillet, août et septembre 1983 et l'a admise à faire valoir ses droits à la retraite au 1er octobre 1983 et non pas au 6 avril 1983.
Article 2 : Mme X... est renvoyée devant le ministre de l'équipement, du logement et des transports pour la liquidation de sapension.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme X... et au ministre de l'équipement, du logement et des transports.