Conseil d'Etat, 3 SS, du 15 novembre 1996, 153775, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision15 novembre 1996
Num153775
Juridiction
Formation3 SS
RapporteurM. Courson
CommissaireM. Stahl

Vu le recours du MINISTRE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE enregistré le 23 novembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 30 septembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision en date du 30 juillet 1990 par laquelle le directeur départemental des anciens combattants et victimes de guerre de Metz a refusé à M. Robert Z... la reconnaissance de la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Z... devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'arrêté du 10 mai 1954 modifié par l'arrêté du 2 mai 1984 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Courson, Auditeur,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'appel du MINISTRE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 10 mai 1954 modifié par l'arrêté du 2 mai 1984 : "1. Les Alsaciens et les Mosellans incorporés de force dans l'armée allemande, dans des conditions exclusives de tout acte de volonté caractérisé, peuvent se voir reconnaître cette qualité ( ...) Un certificat ( ...) sera délivré par le directeur interdépartemental territorialement compétent ( ...) 2. Ce certificat pourra être également être délivré, sur leur demande, aux Alsaciens et Mosellans qui ont été affectés dans des formations paramilitaires allemandes, dont la liste est fixée conformément aux articles A. 166 et A. 167 du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de la guerre, et qui ont été engagés sous commandement militaire dans des combats" ;
Considérant que pour annuler, par le jugement attaqué, en date du 30 septembre 1993, la décision du directeur interdépartemental des anciens combattants et victimes de guerre du 30 juillet 1990 refusant de reconnaître à M. Z..., qui a été affecté dans le RAD le 10 juillet 1944, la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande sur le fondement des dispositions précitées, le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur un témoignage de M. X... en date du 2 septembre 1993 dont il ressort que les membres de l'unité du RAD à laquelle il appartenait ainsi que M. Z... auraient été versés dans l'armée allemande le 1er septembre 1944 avant de déserter le lendemain ; que ce témoignage, qui n'est corroboré par aucun document officiel ni par aucune autre pièce du dossier et qui diffère d'un précédent témoignage établi par M. X... le 11 septembre 1990 qui ne faisait pas état d'une incorporation dans l'armée allemande et indiquait, tout comme le témoignage de la soeur d'un troisième compagnon d'évasion, M. Y..., qu'ils s'étaient évadés d'un camp du RAD le 1er septembre 1944, n'établit pas de façon certaine, alors même que M. X... se serait vu reconnaître, en raison des mêmes faits, la qualité d'incorporé de force, que M. Z..., qui d'ailleurs n'a fait état pour la première fois de cette circonstance que le 7 septembre 1993, date de l'audience devant le tribunal administratif, aurait été versé dans l'armée allemande le 1er septembre 1944 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE est fondé à soutenir que M. Z..., dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait été engagé dans des combats sous commandement militaire en sa qualité de membre du RAD, ne remplit pas les conditions fixées par les dispositions précitées et que c'est, par suite, à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal aannulé la décision du 30 juillet 1990 ;
Sur les conclusions à fin d'indemnité de M. Z... :

Considérant que M. Z... demande de condamner l'Etat à lui payer la somme de 50 000 F en raison du préjudice que lui aurait causé le comportement fautif de l'administration ; que ces conclusions, présentées pour la première fois devant le Conseil d'Etat, constituent une demande nouvelle qui n'est, en tout état de cause, pas recevable ;
Sur les conclusions de M. Z... tendant à l'application des dispositions de l'article R. 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les conclusions susmentionnées doivent être regardées comme tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ; que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante soit condamné à payer à M. Z... la somme qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 30 septembre 1993 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Z... devant le tribunal administratif de Strasbourg ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre et à M. Robert Z....