Conseil d'Etat, 10 / 7 SSR, du 12 juin 1998, 171497, inédit au recueil Lebon
Vu le recours du MINISTRE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE enregistré le 2 août 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 7 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé la décision en date du 21 décembre 1993 refusant l'attribution à M. X... du titre de prisonnier du Viet-Minh ;
2°) rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Nice ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu la loi n° 89-1013 du 31 décembre 1989 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lévy, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Daussun, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1989 portant création du statut de prisonnier du Viet-Minh : "Le statut de prisonnier du Viet-Minh s'applique aux militaires de l'armée française et aux Français ou ressortissants français qui, capturés par l'organisation dite "Viet-Minh" entre le 16 août 1945 et le 20 juillet 1954, sont décédés en détention ou sont restés détenus pendant au moins trois mois./ Toutefois, aucune durée minimum de détention n'est exigée des personnes qui se sont évadées ou qui présentent, du fait d'une blessure ou d'une maladie, une infirmité dont l'origine est reconnue imputable à la captivité par preuve dans les conditions fixées à l'article L. 2 ou au premier alinéa de l'article L. 213 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre" ; qu'en vertu de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : "Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service" ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le statut de prisonnier du Viet-Minh peut bénéficier aux prisonniers qui ont été détenus pendant moins de trois mois par cette organisation s'ils apportent la preuve de l'imputabilité des infirmités qu'ils invoquent à un fait précis de leur captivité ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de quatre attestations produites par M. X..., que l'intéressé, alors lieutenant, a été à la suite de sa capture par le Viet-Minh le 27 juin 1954, conduit au camp de prisonniers n° 1 où il est arrivé après une marche exténuante de 20 jours dans un état d'épuisement général et où il a, par suite des mauvais traitements et des privations subies, contracté diverses affections qui doivent être regardées comme imputables à sa captivité ; que les conditions dans lesquelles lui a été attribuée une pension d'invalidité sont par elles-mêmes sans incidence sur l'appréciation de ses droits au titre de prisonnier du Viet-Minh ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé sa décision en date du 21 décembre 1993 refusant à M. X... le titre de prisonnier du Viet-Minh ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DES ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée aux ayants-droit de M. Pierre X... et ausecrétaire d'Etat aux anciens combattants.