Conseil d'Etat, 9 / 10 SSR, du 3 juillet 2002, 217299, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision03 juillet 2002
Num217299
Juridiction
Formation9 / 10 SSR
RapporteurMme Guilhemsans
CommissaireM. Courtial

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 février et 9 juin 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Olivier X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 25 novembre 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a décliné sa compétence au profit de la juridiction des pensions pour connaître de sa demande tendant à la réparation des dommages corporels dont il a été victime au cours d'une intervention chirurgicale pratiquée le 1er juillet 1992 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes ;
- les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Marseille a jugé que les conséquences dommageables résultant pour M. X..., officier de carrière, des fautes qui auraient été commises lors d'une intervention chirurgicale qu'il a subie le 1er juillet 1992 à l'hôpital d'instruction des armées Sainte-Anne de Toulon, ne pouvaient être réparées que dans les conditions prévues par le code des pensions d'invalidité et des victimes de la guerre et transmis le dossier du requérant au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en application de l'article R. 82 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors en vigueur ; qu'elle a ainsi, implicitement mais nécessairement, rejeté les conclusions de l'intéressé tendant à l'obtention d'une indemnisation selon les règles du droit commun ; que M. X... est recevable à demander, dans cette mesure, l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : "Ouvrent droit à pension : 1° les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° l'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service" ; que la circonstance que les conséquences dommageables des soins dispensés à un militaire dans un hôpital militaire ouvrent droit, en tant qu'elles résultent d'un accident subi par le fait du service, à la pension d'invalidité prévue par les dispositions précitées ne fait pas obstacle à ce que l'intéressé, s'il estime que les soins ont été dispensés dans des conditions de nature à engager, selon les règles du droit commun, la responsabilité de l'administration, exerce à l'encontre de l'Etat une action tendant au versement d'une indemnité complémentaire assurant la réparation intégrale de ce chef de préjudice ; qu'en jugeant que le préjudice subi par M. X... ne pouvait être réparé que par la pension d'invalidité prévue par les dispositions précitées du code des pensions militaires d'invalidité, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'obtention d'une indemnité assurant, selon les règles du droit commun, la réparation intégrale de son préjudice ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Lyon ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X... une somme de 2 300 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille, en date du 25 novembre 1999 est annulé, en tant qu'il rejette les conclusions de M. X... tendant à l'obtention d'une indemnité assurant, selon les règles du droit commun, la réparation intégrale du préjudice subi par l'intéressé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : L'Etat paiera à M. X... la somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Olivier X..., au ministre de la défense et au président de la cour administrative d'appel de Lyon.