Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 04/10/2013, 352126, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision04 octobre 2013
Num352126
Juridiction
Formation 9ème sous-section jugeant seule
RapporteurM. Olivier Japiot
CommissaireMme Claire Legras
AvocatsSCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 août et 23 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme B...A..., demeurant... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0804676 du 21 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation de la décision de la caisse des dépôts et consignations du 18 février 2008 et la décision confirmative du 11 août 2008, prise sur recours gracieux, refusant de lui accorder le bénéfice d'une retraite anticipée avec jouissance immédiate de pension en sa qualité de mère de trois enfants, et, d'autre part, à enjoindre à la caisse des dépôts et consignations de procéder au réexamen de sa demande sous astreinte de 200 euros passé le délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;

Vu le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Japiot, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de Mme A...;



1. Considérant que le I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, rendu applicable aux fonctionnaires territoriaux par l'article 40 de la loi du 21 août 2003 et auquel renvoie l'article 25 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite de ces fonctionnaires, dispose dans sa rédaction applicable à la situation de Mme A... : que " La liquidation de la pension intervient : (...) 3° Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d'un enfant vivant, âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu'il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. (...). " ; que, selon les dispositions, alors en vigueur, du I de l'article R. 37 du même code, pris pour l'application du 3° du I de l'article L. 24 et rendus applicables aux fonctionnaires territoriaux par l'article 25 du décret du 26 décembre 2003 : " L'interruption d'activité prévue au premier alinéa du 3° du I (...) de l'article L. 24 doit avoir eu une durée continue au moins égale à deux mois et être intervenue alors que le fonctionnaire ou le militaire était affilié à un régime de retraite obligatoire. / Cette interruption d'activité doit avoir eu lieu pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l'adoption et le dernier jour du trente-sixième mois suivant la naissance ou l'adoption. " ; qu'en vertu du dernier alinéa du I de l'article R. 37, pour certains enfants énumérés au II de l'article L. 18 du même code, dont ceux du conjoint issus d'un mariage précédent, que l'intéressé a élevés dans les conditions prévues au III de cet article, l'interruption ou la réduction d'activité doit intervenir " soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 à R. 512-3 du code de la sécurité sociale. " ;

2. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions, d'une part, que le fait d'interrompre son activité, pendant au moins deux mois afin de s'occuper de l'enfant de son conjoint issu d'un précédent mariage de ce dernier, ouvre droit au bénéfice des dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 24, et, d'autre part, que l'excédent d'au moins deux mois, au-delà de deux mois, d'une période d'interruption d'activité prise au titre d'un enfant peut être pris en compte au titre d'un autre enfant du foyer ;

3. Considérant, qu'il résulte de ce qui précède qu'après avoir relevé que Mme A... avait élevé l'enfant issu du précédent mariage de son conjoint, qu'elle a bénéficié, à la naissance de son premier enfant qu'elle a eu avec celui-ci, d'un congé maternité de deux mois qui a fait l'objet d'une prolongation de deux mois, et qu'elle a interrompu son activité pendant deux mois à l'occasion de la naissance de son second enfant, le tribunal administratif de Grenoble a commis une erreur de droit en jugeant qu'elle ne pouvait prétendre à la mise à la retraite avec jouissance immédiate de ses droits à pension, au motif qu'elle n'établissait pas avoir interrompu son activité pendant une période de deux mois pour l'enfant de son conjoint ; que, pour ce motif et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, Mme A... est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations le versement à Mme A...de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



D E C I D E :
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Article 1er : le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 juin 2011 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Grenoble.

Article 3 : La caisse des dépôts et consignations versera à Mme A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée et à la Caisse des dépôts et consignations.

ECLI:FR:CESJS:2013:352126.20131004