Conseil d'État, 2ème / 7ème SSR, 21/01/2015, 385343, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision21 janvier 2015
Num385343
Juridiction
Formation2ème / 7ème SSR
RapporteurMme Bénédicte Vassallo-Pasquet
CommissaireM. Xavier Domino

Vu le jugement n° 13/00092 du 23 octobre 2014, enregistré le 27 octobre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel le tribunal des pensions de Marseille, avant de statuer sur la demande de M. A...B...relative aux arrérages de sa pension militaire d'invalidité, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu le mémoire, présenté le 5 septembre 2014 devant le tribunal des pensions de Marseille par M. A...B..., demeurant..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; M. B... soutient que la règle de prescription fixée par l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre méconnaît le principe d'égalité énoncé par l'article 2 de la Constitution et les articles 1er et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, notamment son article L. 108 ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Vassallo-Pasquet, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public ;





1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement de circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la troisième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages, afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux trois années antérieures. " ; que M. B...soutient que ces dispositions, en ce qu'elles prévoient un délai de prescription des arrérages plus court que celui prévu par l'article L. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou celui prévu par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, sont contraires au principe constitutionnel d'égalité ;

3. Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; que les dispositions de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ont pour objet de régir des situations différentes de celles régies par les dispositions invoquées du code des pensions civiles et militaires de retraite ou de la loi du 31 décembre 1968 ; que, dès lors, les règles de prescription prévues par l'article L. 108 peuvent, sans méconnaître le principe d'égalité, être différentes de celles prévues, pour des situations différentes, par les dispositions invoquées ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;



D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité à la Constitution de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de la défense.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au tribunal des pensions de Marseille.


ECLI:FR:CESSR:2015:385343.20150121