Conseil d'État, 6ème chambre, 09/05/2018, 404837, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision09 mai 2018
Num404837
Juridiction
Formation6ème chambre
RapporteurMme Laurence Franceschini
CommissaireM. Louis Dutheillet de Lamothe
AvocatsSCP ROUSSEAU, TAPIE

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal départemental des pensions militaires de Besançon d'annuler pour excès de pouvoir la décision du ministre de la défense du 26 juin 2012 rejetant sa demande d'octroi de pension militaire d'invalidité. Par un jugement du 10 novembre 2015, le tribunal départemental des pensions militaires de Besançon a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 16/00039 du 13 septembre 2016, la cour régionale des pensions militaires de Besançon a rejeté l'appel formé par M. A...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 novembre 2016 et 3 février 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) d'enjoindre au ministre de la défense de lui allouer une pension prenant en compte un taux d'invalidité de 30% ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.




Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Laurence Franceschini, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M.A....




Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...a été militaire de carrière du 1er juillet 1969 au 31 mai 1977 et a exercé son service dans l'artillerie jusqu'en 1975. Par une décision du 26 juin 2012, le ministre de la défense a rejeté sa demande d'octroi de pension militaire d'invalidité pour une surdité évolutive des deux oreilles, affection faisant l'objet d'un suivi médical depuis 1980. Par l'arrêt du 13 septembre 2016 contre lequel M. A... se pourvoit en cassation, la cour régionale des pensions de Besançon, confirmant le jugement du 10 novembre 2015 du tribunal départemental des pensions de Besançon, a rejeté sa requête tendant à l'annulation de ce jugement.

2. D'une part, aux termes l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. / (...) ". Pour l'application de ces dispositions, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine, consécutive à un fait précis de service. Dans le cas contraire, elle doit être regardée comme résultant d'une maladie.

3. Il résulte de ces dispositions que, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité prévue à l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre précité, le demandeur de la pension doit apporter la preuve de l'existence d'une relation certaine et directe de cause à effet entre les troubles qu'il invoque et des circonstances particulières du service à l'origine de l'affection. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle, ni des conditions générales de service partagées par l'ensemble des militaires servant dans la même unité.

4. Pour dénier à M. A...un droit à pension pour l'hypoacousie bilatérale invoquée, la cour régionale des pensions de Besançon a relevé que l'infirmité en cause ne pouvait être rattachée à une circonstance précise de service, les séances de tir d'artillerie auxquelles M. A...a participé dans le cadre des conditions générales de service auxquelles il était exposé au sein de son unité, ne pouvant être retenues à ce titre, en l'absence de circonstances particulières permettant de leur imputer l'affection invoquée. La cour a ainsi, sans commettre d'erreur de droit, porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine qui n'est pas entachée de dénaturation. Par suite, M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.

5. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.




D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. A...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre de la défense.

ECLI:FR:CECHS:2018:404837.20180509