CAA de BORDEAUX, 6ème chambre - formation à 3, 01/04/2019, 17BX01171, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...G...a demandé devant le tribunal administratif de Bordeaux, d'annuler la décision du 6 novembre 2014 par laquelle la Poste a refusé de prolonger ses arrêts de travail au titre de l'accident de service du 18 janvier 2013 au-delà du 1er septembre 2014, et a retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 2 %.
Par un jugement n° 1405461 du 13 février 2017 le tribunal administratif de Bordeaux, a rejeté la demande de Mme G...en annulation de cette décision du 5 novembre 2014 et sa demande subsidiaire tendant à la désignation d'un expert.
Procédure devant la cour :
Par une requête du 10 avril 2017, Mme E...G..., représentée par MeI..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 février 2017;
2°) d'annuler la décision du 6 novembre 2014 du directeur de la branche service courrier colis de La Poste rejetant la prolongation de son arrêt de travail au-delà du 1er septembre 2014 au titre de l'accident de service du 18 janvier 2013 et fixant le taux d'invalidité à 2 % ;
3°) de dire et juger que le taux d'invalidité en rapport avec les séquelles de l'accident de service du 18 janvier 2013 est de 12 % ;
4°) d'enjoindre à la Poste de lui octroyer rétroactivement le bénéfice des congés de maladie avec maintien d'un traitement complet jusqu'à la consolidation et l'allocation temporaire d'invalidité à compter de la consolidation ;
5°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise à fins de détermination de la date de consolidation de son accident de service et d'évaluer le taux d'invalidité en rapport avec les séquelles de l'accident de service du 18 janvier 2013 ;
6°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 2 000 euros au titre des frais et dépens.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, son état n'était pas consolidé à la date du 1er septembre 2014, date à laquelle, elle était placée en arrêt de travail jusqu'en décembre 2015 ;
- la décision du 6 novembre 2014 refusant la prolongation de son arrêt de travail au-delà du 1er septembre 2014 au titre de l'accident de service du 18 janvier 2013 et fixant le taux d'invalidité à 2 % repose intégralement sur l'appréciation portée par le docteur D...le 23 septembre 2014, lequel a conclu au fait que son genou avait une mobilité normale et n'a retenu qu'un taux d'invalidité de 2 % pour des douleurs séquellaires ; son rhumatologue, M. F..., par un certificat du 30 octobre 2014, a estimé que le " genou restait douloureux et limité (sans être inflammé) et que des séquelles douloureuses sont possibles entrainant une gêne parfois importante " ; ces constatations rejoignent celles du docteurH..., médecin agréé, du 7 décembre 2014, lequel se prononce en faveur d'un taux d'invalidité d'au moins 10 % ;
- à titre subsidiaire si la cour refusait d'arrêter elle-même un taux d'invalidité supérieur à 10 %, compte tenu des éléments apportés dans la requête et notamment des constatations du docteurH..., une expertise, aux frais de la Poste, pourrait être ordonnée par la cour.
Par un mémoire en défense du 6 juillet 2018, la Poste, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête de Mme G...et à ce que soit mise à sa charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- si la requérante conteste la date de consolidation au 1er septembre 2014 qui a été retenue par la Poste et validée par le tribunal administratif, elle se borne à contester cette date de consolidation au motif qu'elle s'est trouvée en arrêt de maladie jusqu'en décembre 2015 ; toutefois, il n'est nullement établi que l'arrêt de maladie jusqu'en décembre 2015 soit en lien de causalité avec l'accident de service ; la commission de réforme, dans sa séance du 5 novembre 2014, a confirmé la consolidation de l'accident de service au 1er septembre 2014, avec un taux d'invalidité de 2 %, comme l'avait indiqué le docteurD..., qui l'a examinée le 23 septembre 2014, lequel a estimé que son état ne nécessitait pas de soins post-consolidation et qu'elle était apte à reprendre son travail ;
- Mme G...n'a pas cherché à reprendre son travail, y compris à temps partiel thérapeutique, et a produit des arrêts de maladie jusqu'en décembre 2015 ;
- en ce qui concerne le taux d'invalidité, la requérante ne présente pas de contestation sérieuse, dès lors que si elle affirme que le taux d'IPP est de 12 %, la commission de réforme, pour retenir un taux de 2 %, s'est fondée sur l'expertise du docteur D...ainsi que sur les certificats médicaux des docteurs J...etA... ;
- il est parfaitement douteux que le docteur H...ait pu, alors qu'il n'existait aucune lésion ligamentaire, Mme G...souffrant d'une entorse, détecter une " limitation de flexion du genou en dessous de 110 ° ", justifiant une IPP entre 5 et 15 % ;
- le tribunal administratif a constaté qu'en tout état de cause, le docteur H...avait retenu un taux d'invalidité de 5 %, soit inférieur au taux de 10 % permettant l'attribution d'une allocation temporaire d'invalidité ;
- la demande d'expertise n'est pas justifiée, dès lors qu'aucun élément ne permet de contester le bien-fondé du jugement et l'examen clinique effectué par le docteurD....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- et les observations MeC..., représentant La Poste.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G...a demandé devant le tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal d'annuler la décision du 6 novembre 2014 par laquelle la Poste a refusé de prolonger ses arrêts de travail au titre de l'accident de service du 18 janvier 2013 au-delà du 1er septembre 2014 et a retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 2 %, et subsidiairement à ce qu'il soit ordonné une expertise. Mme G...relève appel du jugement du 13 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux, a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article 34 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ". En vertu de l'article 65 de la même loi : " Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité. / Les conditions d'attribution ainsi que les modalités de concession, de liquidation, de paiement et de révision de l'allocation temporaire d'invalidité sont fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine également les maladies d'origine professionnelle. ". Selon l'article 1er du décret susvisé du 6 octobre 1960 : " L'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article 65 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est attribuée aux agents maintenus en activité qui justifient d'une invalidité permanente résultant : a) Soit d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux rémunérable au moins égal à 10 % (...) ".
3. En premier lieu, MmeG..., pour soutenir que son état n'était pas consolidé au 1er septembre 2014, et que dès lors en vertu des dispositions précitées de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, elle devait conserver l'intégralité de son traitement pour la période courant jusqu'en décembre 2015, pour laquelle elle avait présenté des arrêts de travail pour maladie, se borne à se prévaloir de son placement en congé de maladie alors qu'en tout état de cause, le docteurD..., rhumatologue, qui l'a examinée le 23 septembre 2014, a estimé qu'elle était consolidée au 1er septembre 2014, ce que n'infirme pas le certificat du docteur H...dont se prévaut MmeG..., et aucune pièce du dossier n'indique que Mme G...n'aurait pas été consolidée à la date du 1er septembre 2014.
4. En second lieu, le rapport du docteur D...médecin expert, rhumatologue, qui a examiné Mme G...le 23 septembre 2014, estime que cette dernière était au 1er septembre 2014, consolidée de l'accident de service subi le 18 janvier 2013, ayant entrainé une entorse du genou gauche puis une algodystrophie, ce rapport indiquant que son état ne nécessitait pas de soins post-consolidation, qu'elle était apte à reprendre son travail, et qu'elle restait atteinte d'un taux d'incapacité permanente partielle de 2 %. Mme G...se prévaut du certificat établi le 8 décembre 2014 par le docteur H...qui ne conteste pas la consolidation au 1er septembre 2014, mais selon lequel " (...) la limitation de la flexion du genou en dessous de 110 ° s'évalue entre 5 et 15 % (...) ", " (...) la persistance d'une laxité sans retentissement sur la marche justifie également au moins 5 % (...) ", ce certificat indiquant in fine que " (...) les 2% proposés par le docteur D...sont tout à fait sous-estimés (...) ". Toutefois, ce certificat établi par le docteurH..., qui n'a pas la qualité de rhumatologue, n'indique pas le taux d'invalidité global présenté par MmeG..., et ne peut donc être regardé comme concluant à un taux d'invalidité de plus de 10 %, sans que Mme G... puisse utilement se prévaloir du courrier, postérieur au jugement, du 17 mars 2017 du docteurH..., indiquant que le certificat qu'il avait établi le 8 décembre 2014 devait être regardé comme indiquant un taux d'IPP d'au moins 10 %. Si la requérante se prévaut également du certificat établi le 30 octobre 2014 par le docteurF..., rhumatologue, ce certificat, en concluant au fait que " des séquelles douloureuses sont possibles entrainant une gêne parfois importante " ne peut être regardé comme emportant la reconnaissance d'une invalidité de plus de 10 %.
5. Il résulte de ce qui précède, sans que la demande d'expertise sollicitée par Mme G... ne soit utile, que cette dernière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 13 février 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en annulation de la décision du 5 novembre 2014 par laquelle la Poste a refusé de prolonger ses arrêts de travail au titre de l'accident de service du 18 janvier 2013 au-delà du 1er septembre 2014, et a retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 2 %.
Sur les conclusions en injonction et les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Compte tenu du rejet des conclusions en annulation, les conclusions en injonction et les conclusions présentées Mme G...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par la Poste.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme G...est rejetée
Article 2 : Les conclusions présentées par la Poste sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...G...et à la Poste.
Délibéré après l'audience du 18 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er avril 2019.
Le rapporteur,
Pierre Bentolila
Le président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
5
N° 17BX01171