CAA de NANCY, 1ère chambre, 24/10/2019, 18NC00341, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision24 octobre 2019
Num18NC00341
JuridictionNancy
Formation1ère chambre
PresidentM. KOLBERT
RapporteurM. Jérôme DIETENHOEFFER
CommissaireMme KOHLER
AvocatsCABINET CASSEL (SELAFA)

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 9 décembre 2014 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Est a fixé à 5 % le taux d'invalidité résultant de l'accident dont elle a été victime le 17 décembre 2013 et la date de consolidation de son état de santé au 15 octobre 2014, d'autre part, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa situation, sous astreinte ;

Par un jugement no 1500792 du 24 janvier 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 février 2018, le 20 juillet 2018 et le 26 septembre 2019, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :



1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 janvier 2018 ;


2°) d'annuler la décision du 9 décembre 2014 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Est a fixé à 5 % le taux d'invalidité résultant de l'accident dont elle a été victime le 17 décembre 2013 et la date de consolidation de son état de santé au 15 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa situation sans délai à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en tant qu'il a considéré que la décision contestée ne faisait pas grief et a déclaré la demande irrecevable ;
- cette décision est entachée d'incompétence ;
- elle est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, faute de saisine de la commission de réforme ;
- elle n'est pas motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, son taux d'incapacité étant supérieur à celui qui a été fixé.


Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :
- le jugement est régulier, la demande étant irrecevable ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.


La clôture de l'instruction est intervenue le 27 septembre 2019.


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.




Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dietenhoeffer, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., secrétaire administrative employée par le ministère de l'intérieur, a été victime, le 17 décembre 2013, d'un accident de service. Par un courrier du 9 décembre 2014, le préfet de la zone de défense et de sécurité Est lui a communiqué le taux d'invalidité et la date de consolidation qui seraient retenus dans le cadre de la détermination de ses droits à l'allocation temporaire d'invalidité. Par un jugement du 24 janvier 2018, dont Mme A... fait appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la requête de Mme A... aux fins d'annulation de ce courrier.

2. D'une part, aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " (...) le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions ". L'allocation temporaire d'invalidité est soumise en matière contentieuse aux règles applicables aux pensions, y compris s'agissant des règles relatives aux voies de recours. En application des dispositions précitées du code de justice administrative, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort sur les recours relatifs à cette allocation. Il en résulte que les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a statué sur sa demande d'annulation du courrier par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité Est lui a communiqué son taux d'invalidité et sa date de consolidation ressortissent en principe à la seule compétence du Conseil d'Etat.

3. D'autre part, toutefois, aux termes de l'article R. 351-4 du code de justice administrative : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance ".

4. Aux termes de l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 : " L'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article 65 de la loi n° 84-16 (...) est attribuée aux agents maintenus en activité qui justifient d'une invalidité permanente résultant : a) Soit d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux rémunérable au moins égal à 10 % ; (...) La demande d'allocation doit, à peine de déchéance, être présentée dans le délai d'un an à partir du jour où le fonctionnaire a repris ses fonctions après la consolidation de la blessure ou de son état de santé. Toutefois, lorsque le fonctionnaire n'a pas interrompu son activité ou qu'il a repris son service avant consolidation (...) la demande d'allocation est présentée dans l'année qui suit la date de constatation officielle de la consolidation de la blessure ou de son état de santé. Cette date est fixée par le comité médical (...) ou, à défaut, par un médecin assermenté ". Aux termes de l'article 3 du même texte : " La réalité des infirmités invoquées par le fonctionnaire, leur imputabilité au service, la reconnaissance du caractère professionnel des maladies, les conséquences ainsi que le taux d'invalidité qu'elles entraînent sont appréciés par la commission de réforme prévue à l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas au ministre dont relève l'agent et au ministre chargé du budget. (...) Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas au ministre dont relève l'agent et au ministre chargé du budget ". Aux termes de l'article 13 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 : " La commission de réforme est consultée notamment sur : (...) 4. La reconnaissance et la détermination du taux de l'invalidité temporaire ouvrant droit au bénéfice de l'allocation d'invalidité temporaire prévue à l'article 8 bis du décret du 26 octobre 1947 modifié susvisé (...) ".

5. Par courrier du 9 décembre 2014, le préfet de la zone de défense et de sécurité Est s'est borné à informer Mme A... du taux d'invalidité et de la date de consolidation déterminés par le médecin inspecteur régional adjoint de la police nationale, à la convier à se mettre en rapport avec ce dernier en vue de réaliser une expertise, ainsi que, le cas échéant, à contester ces conclusions. Il l'a enfin invitée à présenter une demande d'allocation temporaire d'invalidité dans un délai d'un an. Eu égard à son contenu, ce courrier ne fait donc pas obstacle à ce que la demande d'allocation temporaire d'invalidité soit instruite et que cette allocation soit, le cas échéant, liquidée et accordée par les ministres compétents au vu d'un taux différent de celui proposé par le médecin inspecteur, compte tenu notamment de l'avis de la commission de réforme. Un tel courrier ne fait donc pas, par lui-même, grief à Mme A... à qui il appartiendra de faire valoir ses droits en contestant la décision qui statuera sur sa demande. Il en résulte que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est irrégulièrement que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions comme irrecevables. Une telle irrecevabilité étant manifeste, il y a lieu, pour la cour, de rejeter la requête sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 351-4 du code de justice administrative.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais liés au litige.



DECIDE :


Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.




N° 18NC00341 2