CAA de VERSAILLES, 2ème chambre, 19/12/2019, 17VE01368, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision19 décembre 2019
Num17VE01368
JuridictionVersailles
Formation2ème chambre
PresidentM. BRUMEAUX
RapporteurMme Barbara AVENTINO-MARTIN
CommissaireM. BOUZAR
AvocatsROCHEFORT

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler la décision du 12 mai 2014 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande tendant à bénéficier d'une mise en disponibilité pour convenances personnelles ou d'un congé, la lettre et l'arrêté du 10 juillet 2014 par lesquels il a prononcé sa radiation des cadres, ainsi que la décision portant rejet de son recours indemnitaire préalable, ensemble les décisions implicites rejetant ses recours gracieux, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 200 000 euros, sous réserve des résultats de l'expertise à diligenter, en réparation de divers préjudices résultant notamment de l'illégalité fautive de ces dernières décisions.

Par un jugement n° 1409302 du 27 février 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 avril et 29 mai 2017, Mme A..., représentée par Me E..., avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° avant dire droit, d'ordonner une expertise aux fins d'évaluer les divers préjudices résultant de ses accidents de service survenus les 25 mai 2012 et 10 juin 2012 ;

3° de condamner l'Etat à lui verser une somme de 270 000 euros, sous réserve des résultats de l'expertise, cette somme portant intérêts à compter de sa demande préalable et capitalisation des intérêts ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :
- les premiers juges ont omis de statuer sur ses conclusions indemnitaires relatives à ses accidents de service et à son refus de titularisation ;
- les premiers juges ont omis de statuer sur ses conclusions indemnitaires relatives au retard commis par l'administration dans le traitement de son dossier pour lui permettre de bénéficier de revenus de remplacement ;
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- la décision prononçant son licenciement pour inaptitude professionnelle le 22 novembre 2012 est illégale et fautive dès lors que son stage n'a pas été prolongé compte tenu de ses congés de maladie et de ses accidents de services, qu'elle aurait dû être évaluée à l'issue de son stage alors qu'elle a été définitivement évaluée en juin 2012 et que, ce faisant, le refus de la titulariser s'assimile à un licenciement en cours de stage ;
- elle a été victime d'agissements répétés de harcèlement moral, dès sa prise de poste en septembre 2011, qui ont dégradé ses conditions de travail et sa santé ;
- elle est fondée à obtenir réparation intégrale des différents préjudices résultant de ses accidents de service survenus les 25 mai 2012 et 10 juin 2012.

...................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 ;
- le décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 ;
- le décret n° 2010-302 du 19 mars 2010 ;
- l'arrêté du 9 juillet 2004 relatif au dispositif d'accueil et de formation d'adaptation des secrétaires administratifs du ministère de la défense ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., substituant Me E..., pour Mme A....



Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., nommée secrétaire administrative de classe normale stagiaire du ministère de la défense par arrêté du 12 avril 2010, a débuté son stage au centre ministériel de gestion de Saint-Germain-en-Laye le 2 août 2010, où elle a été chargée des fonctions d'adjointe au chef du bureau " notation, avancement, décorations ". N'ayant pas été titularisée à l'issue de ce stage, lequel s'est achevé le 18 septembre 2011, Mme A... a débuté un second stage le 19 septembre 2011 à l'établissement du service d'infrastructure de la défense d'Ile-de-France, à Saint-Germain-en-Laye, où elle a exercé les fonctions de " traitant formation ". Par arrêté du 22 novembre 2012, le ministre de la défense a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle et sa radiation des cadres à compter du 1er janvier 2013. Par un jugement n° 1207844 du 30 décembre 2013, le Tribunal administratif de Versailles a fait droit à la demande de Mme A... tendant à l'annulation de cet arrêté du 22 novembre 2012 au motif que son stage ne s'était pas déroulé dans des conditions régulières et enjoint au ministre de la défense de la réintégrer dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement. Par décision du 21 février 2014, Mme A... a été réintégrée et affectée à l'antenne " défense mobilité " de l'Agence de reconversion de la défense à Versailles, sur l'emploi de chargée de relations entreprises, à partir du 1er avril 2014. Par une décision du 12 mai 2014, le ministre de la défense a rejeté la demande de Mme A... tendant à bénéficier d'une mise en disponibilité pour convenances personnelles, sollicitée par l'intéressée afin de poursuivre jusqu'à son terme, le 1er septembre 2014, l'exécution du contrat à durée déterminée qu'elle avait conclu avec la société Axa. Puis, par une décision du 10 juillet 2014, le ministre de la défense a prononcé la radiation des cadres de Mme A... pour abandon de poste à compter du 1er août 2014. Mme A... relève appel du jugement n° 14VE09302 du 27 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Versailles a, d'une part, prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions du 12 mai 2014 et du 10 juillet 2014 ainsi que sur ses conclusions à fin d'indemnisation des préjudices résultant de l'illégalité fautive de ces décisions, d'autre part, rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires tendant à réparer divers préjudices résultant des faits de harcèlement moral qu'elle estime avoir subis durant ses stages et de ses accidents de service survenus les 25 mai 2012 et 20 juin 2012.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Mme A... soutient que les premiers juges ont omis de statuer sur ses conclusions tendant à réparer intégralement les préjudices résultant de ses deux accidents de service survenus les 25 mai 2012 et 20 juin 2012 en faisant valoir que, contrairement à ce qu'a considéré le tribunal, elle a apporté de nombreux éléments pour établir ses préjudices, notamment des certificats médicaux, et avait demandé une expertise afin de chiffrer ses préjudices, sans que les premiers juges n'y répondent. Ce faisant, Mme A... conteste en réalité le bien-fondé du jugement et non sa régularité. De plus, il ressort du jugement contesté que les premiers juges ont examiné sa demande d'expertise en considérant au point 8 du jugement que, compte tenu des éléments au dossier, celle-ci n'apparaissait pas nécessaire. Le moyen manque donc en fait et doit, par suite, être écarté.

3. Mme A... soutient également que le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation en ce qui concerne le rejet de la responsabilité sans faute au titre de la réparation complémentaire au droit à pension. En précisant toutefois que " Mme A..., qui n'établit pas davantage les préjudices endurés au titre des accidents de trajet, n'est pas fondée à rechercher la responsabilité sans faute de l'administration ; (...) ", les premiers juges ont suffisamment motivé leur réponse à ce moyen.

4. Mme A... soutient ensuite que les premiers juges ont omis de statuer sur ses conclusions tendant à réparer ses préjudices résultant de l'illégalité fautive entachant l'arrêté du 22 novembre 2012 par lequel le ministre de la défense a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle. Il ressort de la requête enregistrée au tribunal administratif de Versailles le 24 décembre 2014 que Mme A... présentait des conclusions tendant à obtenir réparation des préjudices résultant de l'illégalité fautive de l'arrêté du 22 novembre 2012 par lequel le ministre de la défense a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle et l'a radiée des cadres à compter du 1er janvier 2013. Le jugement contesté ne s'est pas prononcé sur de telles conclusions, en statuant seulement, d'une part, sur les conclusions dirigées contre les décisions du 12 mai 2014 et du 10 juillet 2014 ainsi que sur ses conclusions à fin d'indemnisation des préjudices résultant de l'illégalité fautive de ces décisions, et, d'autre part, sur le surplus de ses conclusions indemnitaires tendant à réparer divers préjudices résultant des faits de harcèlement moral qu'elle estime avoir subis durant ses stages et de ses accidents de service survenus les 25 mai 2012 et 20 juin 2012. En outre, l'intervention de l'arrêt de la cour du 21 juillet 2015 n'a pas rendu sans objet de telles conclusions indemnitaires tendant à réparer les préjudices résultant de l'illégalité fautive de ce même arrêté du 22 novembre 2012.

5. Mme A... est également fondée à soutenir que le tribunal administratif a omis de statuer sur ses conclusions tendant à obtenir réparation de ses préjudices résultant du retard commis par l'administration dans le traitement de son dossier pour lui permettre de bénéficier de revenus de remplacement.

6. Dès lors, Mme A... est fondée à soutenir que le Tribunal administratif de Versailles a entaché son jugement d'irrégularité. Par suite, l'article 2 du jugement attaqué doit être annulé. Il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation partielle sur les conclusions de Mme A... exposées aux points 4 et 5 du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant à obtenir réparation des préjudices résultant du retard commis par l'administration dans le traitement de son dossier pour lui permettre de bénéficier de revenus de remplacement :

7. Mme A..., qui a été licenciée à compter du 1er janvier 2013, se borne à soutenir qu'elle a dû attendre le mois de mai 2013 pour percevoir un revenu de remplacement. Ainsi elle n'établit pas la faute qu'elle impute à l'Etat. Par suite, ses conclusions ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à obtenir réparation des préjudices résultant de l'illégalité fautive entachant l'arrêté du 22 novembre 2012 par lequel le ministre de la défense a prononcé le licenciement de Mme A... pour insuffisance professionnelle et l'a radiée des cadres à compter du 1er janvier 2013 :

8. Sous réserve d'un licenciement intervenant en cours de stage et motivé par ses insuffisances ou manquement professionnels, tout fonctionnaire stagiaire a le droit d'accomplir son stage dans des conditions lui permettant d'acquérir une expérience professionnelle et de faire la preuve de ses capacités pour les fonctions auxquelles il est destiné.

9. Aux termes de l'article 5 décret du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics : " La durée normale du stage et les conditions dans lesquelles elle peut éventuellement être prorogée sont fixées par le statut particulier du corps dans lequel le fonctionnaire stagiaire a vocation à être titularisé. / (...) ". Aux termes de l'article 7 du même décret : " Le fonctionnaire stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. / La décision de licenciement est prise après avis de la commission administrative paritaire prévue à l'article 29 du présent décret, sauf dans le cas où l'aptitude professionnelle doit être appréciée par un jury ". Aux termes, par ailleurs, du I de l'article 11 du décret du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'Etat, applicable au corps des secrétaires administratifs de la défense : " Les candidats reçus [notamment au concours externe] sont nommés fonctionnaires stagiaires du corps concerné et accomplissent un stage d'une durée d'une année. (...) ". Aux termes du III du même article 11 du décret du 11 novembre 2009 : " L'organisation du stage (...) est fixée par arrêté du ministre dont relève le corps de fonctionnaires concerné, (...). Pendant le stage, les intéressés sont soumis aux dispositions du décret du 7 octobre 1994 [fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics, mentionné plus haut] ". Aux termes des deuxième et troisième alinéa du V du même article 11 du décret du 11 novembre 2009 : " Les stagiaires qui n'ont pas été titularisés à l'issue du stage peuvent être autorisés à accomplir un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. / Les stagiaires (...) dont le stage complémentaire n'a pas donné satisfaction sont soit licenciés s'ils n'avaient pas préalablement la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur corps ou cadre d'emplois d'origine ". Enfin, sur la base des dispositions précitées du III de l'article 11 du décret du 11 novembre 2009, le ministre de la défense a adopté un arrêté en date du 9 juillet 2004 relatif au dispositif d'accueil et de formation d'adaptation des secrétaires administratifs du ministère de la défense.

10. Aucune disposition des textes précités ne prévoit l'obligation pour l'administration de procéder à une évaluation intermédiaire des fonctionnaires stagiaires. Dès lors, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 22 novembre 2012 prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle est entaché d'un vice de procédure au motif qu'elle aurait uniquement fait l'objet d'une évaluation finale et qu'elle n'a pas, bénéficié d'une évaluation intermédiaire. En tout état de cause, il résulte de l'instruction et en particulier du rapport d'évaluation du 6 juin 2012 que l'intéressée a bénéficié de plusieurs entretiens les 21 décembre 2011, 2 février 2012, 15 mars 2012 et 26 avril 2012 afin de lui assigner des objectifs et d'en assurer régulièrement le suivi. Si par ailleurs, Mme A... fait également valoir qu'elle n'a pas reçu communication de l'avis de la commission administrative paritaire, requis en application de l'article 7 précité du décret du 7 octobre 1994 avant toute décision de licenciement d'un fonctionnaire stagiaire, aucune disposition n'impose que cet avis, dont il n'est pas contesté qu'il a été en l'espèce régulièrement sollicité et obtenu, soit spontanément communiqué à l'agent intéressé. Pour tous ces motifs, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 22 novembre 2012 serait entachée d'un vice de procédure.

11. Si Mme A... soutient qu'elle n'a bénéficié d'aucune des formations prévues par l'arrêté du ministre de la défense du 9 juillet 2004 relatif au dispositif d'accueil et de formation d'adaptation des secrétaires administratifs du ministère de la défense et, notamment, qu'elle n'a pas bénéficié de la période d'observation de deux semaines prévue par l'article 6 de ce même arrêté, il résulte cependant de l'instruction et, en particulier de l'arrêt n° 14VE00770 du 21 juillet 2015, produit devant les premiers juges par la ministre des armées que, d'une part, Mme A... avait reconnu dans d'autres écritures avoir bénéficié de la période d'observations de deux semaines prévue par l'article 6 de l'arrêté du 9 juillet 2004 et, d'autre part, qu'elle a suivi diverses formations dont un stage d'information pour la période du 11 au 15 avril, du 2 au 6 mai puis du 9 au 13 mai 2011 et des formations d'apprentissage du métier, plus précisément, au logiciel de gestion des formations " Alliance " en octobre 2010 et janvier 2012, une formation " management et animation d'équipe " en juin 2011 et une formation " formateurs relais à l'entretien professionnel " en janvier 2012. De plus, il ne résulte pas de l'instruction que les formations suivies auraient été insuffisantes pour lui permettre d'accomplir son stage dans des conditions lui permettant d'acquérir une expérience professionnelle et de faire la preuve de ses capacités pour les fonctions auxquelles elle était destinée. Par conséquent, ce moyen doit être écarté.

12. Si Mme A... soutient qu'elle a toujours fait preuve d'assiduité et de sérieux dans son travail, que les manquements qui lui sont reprochés ne sont pas précis ou ne sont pas justifiés, qu'il avait été décidé de la licencier dès le début de son stage, il résulte cependant de l'instruction que Mme A... a été évaluée par deux supérieurs hiérarchiques différents lors de son second stage et que ces deux évaluations ont révélé plusieurs insuffisances professionnelles, précisément identifiées. Par suite, Mme A..., qui n'établit pas les erreurs de fait qu'elle allègue, n'est pas fondée à soutenir que l'administration a entaché sa décision de prononcer son licenciement pour insuffisance professionnelle d'une erreur manifeste d'appréciation.

13. Enfin, ainsi qu'il a été exposé au point 9 du présent arrêt, en vertu des I et V de l'article 11 du décret du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'Etat, les stagiaires accomplissent un stage d'une durée d'une année et peuvent être autorisés à accomplir un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. De plus, aux termes du second alinéa de l'article 27 du décret du 7 octobre 1994 fixant les dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics, " Si l'interruption [du stage, du fait des congés successifs de toute nature, autres que le congé annuel] a duré moins de trois ans, l'intéressé ne peut être titularisé avant d'avoir accompli la période complémentaire de stage qui est nécessaire pour atteindre la durée normale du stage prévu par le statut particulier en vigueur ". Il en résulte que, lorsqu'un agent stagiaire a été placé en congé de maladie pendant la période de son stage, celui-ci doit être prolongé d'une durée équivalente à la durée totale des congés de maladie.

14. Mme A... fait valoir devant le juge d'appel, d'une part, que son stage n'a pas été prolongé compte tenu de ses congés de maladie et son travail à mi-temps thérapeutique et, d'autre part, qu'elle n'a bénéficié que d'une seule évaluation en juin 2012, pour soutenir que son licenciement en fin de stage doit être qualifié de licenciement survenu en cours de stage. A supposer cependant que son licenciement doive recevoir une telle qualification, cette circonstance n'est pas à elle seule de nature à entacher d'illégalité l'arrêté du 22 novembre 2012 prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle.

15. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par Mme A... et fondées sur l'illégalité fautive de l'arrêté du 22 novembre 2012 doivent être rejetées.

Sur le bien-fondé du jugement contesté pour ce qui concerne le surplus des conclusions :

Sur le harcèlement moral :

16. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ". Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

17. Mme A... soutient qu'elle a été victime d'agissements répétés de harcèlement moral dès sa prise de poste en septembre 2011, qui ont dégradé ses conditions de travail et sa santé, l'objectif étant de ne pas la titulariser et de l'évincer du service. Si Mme A... allègue notamment que son chef de service, Mme C..., aurait refusé de l'accueillir lors de son premier jour de stage, qu'elle lui aurait signifié que sa présence lui avait été imposée, qu'elle n'était " bonne à rien " et ne lui communiquait aucune information ou encore que son ancien chef de bureau a organisé une réunion de bureau l'excluant délibérément, l'ensemble des éléments de fait dont elle fait état ne font pas présumer l'existence d'un harcèlement moral. Par conséquent, les conclusions indemnitaires présentées par Mme A... en réparation des préjudices résultants des faits de harcèlement moral qu'elle prétend avoir subis doivent être rejetées.

Sur les conclusions en réparation des préjudices résultant des deux accidents de trajet, survenus les 25 mai 2012 et 20 juin 2012, qui ont été reconnus imputables au service :

18. Si les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions, elles ne font cependant obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci.

19. A la suite d'un accident survenu le 25 mai 2012 dans un bus la conduisant à son lieu de travail, Mme A... a souffert d'un traumatisme de l'épaule droite qui a nécessité en décembre 2013 une intervention chirurgicale (suture de la coiffe des rotateurs du sus épineux) et d'un traumatisme du genou droit désormais guéri et sans séquelle. En conséquence, par une décision du 11 juin 2015 le ministre de la défense, après avoir reconnu que cet accident de trajet était imputable au service et que Mme A... présentait une date de consolidation fixée au 15 octobre 2014, a attribué à Mme A... un taux d'invalidité de 10 %. Il résulte par ailleurs de l'instruction et notamment du rapport d'expertise remis au Tribunal de grande instance de Versailles par le docteur Benoit Klein qu'il évalue le déficit fonctionnel permanent à 8 %. Avant la date de consolidation, ce rapport évalue le déficit fonctionnel temporaire à un jour, à 100 %, celui de l'opération, à une période comprise entre le 7 août 2012 et le 14 septembre 2012 et entre le 17 décembre 2013 et le 16 mars 2014 à 50 %, à une période comprise entre le 15 septembre 2012 au 2 janvier 2013 et le 17 mars 2014 au 17 juin 2014, pour un taux à 25 % et à une période comprise entre le 3 janvier 2013 et 15 décembre 2013 pour un taux à 10 %. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mme A... en lui allouant la somme de 3 500 euros au titre du déficit fonctionnel permanent. Il sera procédé à une juste évaluation du préjudice subi en allouant à Mme A... une somme de 500 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire. Si le rapport d'expertise fait état d'une aide humaine, Mme A... ne justifie pas avoir eu recours à une telle aide pour la période considérée. Enfin, en ce qui concerne les souffrances endurées qualifiées de modérées à moyenne soit 3,5/7 par le rapport d'expertise, les préjudices esthétiques, sexuels, d'agrément et troubles dans les conditions d'existence, qualifiés de très légers, il sera fait une juste appréciation en allouant à Mme A... une somme de 500 euros à ce titre.
20. A la suite d'un second accident de trajet survenu le 20 juin 2012 dans un bus, Mme A... a souffert d'un traumatisme de la cheville droite et a vu son état se consolider le 31 août 2012. Il sera procédé à une juste évaluation des préjudices subis par Mme A... en lui allouant la somme de 150 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire évalué à 25 % jusqu'au 29 juillet 2012 puis à 10 % jusqu'au 31 août 2012, la somme de 250 euros au titre des souffrances endurées, évaluées à 1/7 ainsi que la somme de 100 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, évalué à 0,5/7 pendant un mois. En revanche, Mme A... n'établit pas le bien-fondé de sa demande d'indemnisation des préjudices matériel, professionnel et sexuel qu'elle prétend avoir subis.

21. Sans qu'il soit besoin de recourir à une expertise, il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à obtenir la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices résultant des deux accidents de service survenus les 25 mai 2012 et 20 juin 2012 à hauteur de 5 000 euros.

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

22. Mme A... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 5 000 euros à compter du 5 janvier 2015, date de réception de sa demande indemnitaire par le ministère de la défense, ainsi qu'à la capitalisation des intérêts demandée le 28 avril 2017, date à laquelle il était dû au moins une année d'intérêts.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens.


DÉCIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1409302 du 27 février 2017 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme A... la somme de 5 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 5 janvier 2015. Les intérêts échus à la date du 5 janvier 2016 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
7
N° 17VE01368