Conseil d'État, 8ème chambre, 13/02/2020, 421929, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision13 février 2020
Num421929
Juridiction
Formation8ème chambre
RapporteurM. Charles-Emmanuel Airy
CommissaireMme Karin Ciavaldini

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal des pensions de Saint-Denis de La Réunion, de juger qu'il a droit au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité déterminée sur l'indice 1216,40, comprenant l'indice de base de 460,40, l'indice de l'article L. 31 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre de 256 et l'indice d'allocation supplémentaire de l'article L. 38 de ce même code de 500. Par jugement n° 12/00004 du 13 décembre 2016, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17/00107 du 25 avril 2018, la cour régionale des pensions de Saint-Denis de La Réunion a, sur appel de M. B..., annulé ce jugement, jugé qu'il était fondé à réclamer le bénéfice de l'allocation à l'indice 500 prévue par les articles L. 8 bis, L. 37 et L. 38 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et rejeté le surplus de ses demandes.

Par un pourvoi, enregistré le 3 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre des armées demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. B....


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, notamment ses articles L. 36 à L. 38 ;
- la loi n° 55-1074 du 6 août 1955 ;
- le code de justice administrative.


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Charles-Emmanuel Airy, auditeur,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;




Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par un arrêté du 5 avril 1988, M. A... B... a été admis au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux global de 100 % à raison notamment d'une hypoacousie bilatérale, correspondant à un taux d'invalidité de 70%, et d'acouphènes importants, correspondant à un taux d'invalidité de 10%. M. B... a demandé au tribunal des pensions de Saint-Denis de La Réunion de rehausser l'indice sur la base duquel est calculé sa pension, en y ajoutant l'indice d'allocation supplémentaire prévu à l'article L. 38 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et fixé à 500 pour les pensionnés au taux de 100%. La ministre des armées se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 avril 2018 par lequel la cour régionale des pensions de Saint-Denis de La Réunion, après avoir annulé le jugement du 13 décembre 2016 du tribunal des pensions de Saint-Denis de La Réunion rejetant la demande de M. B..., a jugé que celui-ci était fondé à obtenir le bénéfice de l'allocation à l'indice 500 qu'il sollicitait.

2. Aux termes de l'article L. 36 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version applicable au litige : " Sont, au regard des dispositions du présent chapitre, qualifiés grands mutilés de guerre, les pensionnés titulaires de la carte du combattant qui, par suite de blessures de guerre ou de blessures en service commandé, sont amputés, aveugles, paraplégiques, blessés crâniens avec épilepsie, équivalents épileptiques ou aliénation mentale ou qui, par blessures de guerre ou blessures en service commandé, sont atteints : / Soit d'une infirmité entraînant à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 85 % ; / Soit d'infirmités multiples dont les deux premières entraînent globalement un degré d'invalidité d'au moins 85 %, mais dont l'une détermine à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 60 % ; / Soit d'infirmités multiples dont les trois premières entraînent globalement un degré d'invalidité d'au moins 90 %, mais dont l'une détermine à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 60 % ; / Soit d'infirmités multiples dont les quatre premières entraînent globalement un degré d'invalidité d'au moins 95 %, mais dont l'une détermine à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 60 % ; / Soit d'infirmités multiples dont les cinq premières entraînent globalement un degré d'invalidité de 100 %, mais dont l'une détermine à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 60 % ". Aux termes de l'article L. 37 du même code, dans sa version applicable au litige : " Sont admis au bénéfice des majorations de pensions et des allocations spéciales prévues par les articles L. 17 et L. 38, les grands invalides : (...) b) Titulaires de la carte du combattant, pensionnés pour une infirmité entraînant à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 85 % ou pour infirmités multiples entraînant globalement un degré d'invalidité égal ou supérieur à 85 % calculé dans les conditions ci-dessus définies par l'article L. 36 et résultant ou bien de blessures reçues par le fait ou à l'occasion du service, ou bien de maladie contractée par le fait ou à l'occasion du service, à charge par les intéressés de rapporter la preuve que celle-ci a été contractée dans une unité combattante (...) ". Aux termes de l'article L. 38 du même code, dans sa version applicable au litige : " Il est attribué aux grands mutilés de guerre définis par l'article L. 36 et aux grands invalides définis par l'article L. 37 des allocations en sus de la pension et des majorations et allocations qu'ils perçoivent en vertu des dispositions du titre premier et du chapitre premier du présent titre, à l'exclusion des allocations 4 bis et 7 prévues aux articles L. 33 et L. 34, et de l'indemnité temporaire prévue à l'article L. 41. / Ces allocations ne se cumulent pas entre elles. / Le montant en est fixé par référence à la nature de l'infirmité ou au degré d'invalidité. Les intéressés bénéficient, dans chaque cas particulier, du système le plus favorable. / Le taux de ces allocations est fixé comme suit : (...) NUMERO 20 / DIAGNOSTIC OU POURCENTAGE : 100 % / INDICE (Art. L. 8 bis) : 500 (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions, qui ont pour objet d'attribuer des avantages supplémentaires aux pensionnés remplissant certaines conditions relatives tant à l'imputabilité de leurs infirmités qu'au degré d'invalidité en résultant, qu'elles ne sauraient s'appliquer à des infirmités qui ont une origine étrangère au service et qui ont été aggravées par une blessure ou une maladie imputable à celui-ci.

4. Il résulte de ce qui précède qu'en se fondant, pour juger que l'hypoacousie bilatérale et les acouphènes devaient être pris en compte pour l'application des dispositions du b) de l'article L. 37 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, sur la seule circonstance que ces infirmités avaient été aggravées par des blessures reçues par le fait du service le 9 août 1982, sans rechercher si elles trouvaient elles-mêmes leur origine dans ce même service, la cour régionale des pensions de Saint-Denis de La Réunion a commis une erreur de droit. Par suite, la ministre des armées est fondée à demander l'annulation des articles 1er et 2 de son arrêt.



D E C I D E :
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Article 1er : Les articles 1er et 2 de l'arrêt de la cour régionale des pensions de Saint-Denis de La Réunion du 25 avril 2018 sont annulés.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre des armées et à M. A... B....

ECLI:FR:CECHS:2020:421929.20200213