CAA de LYON, 7ème chambre, 18/11/2021, 19LY02993, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 12 mars 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier du Haut-Bugey a refusé de reconnaître imputable au service un accident qui lui serait survenu le 4 décembre 2017, ensemble le rejet de son recours gracieux, et d'enjoindre au directeur général des Hospices civils de Lyon de reconnaître cette imputabilité.
Par un jugement n° 1803058 du 26 juin 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 31 juillet 2019, et un mémoire complémentaire enregistré le 13 octobre 2020, M. A..., représenté en dernier lieu par Me Parisi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 juin 2019 ;
2°) d'annuler la décision du directeur du centre hospitalier du Haut-Bugey du 12 mars 2018 et de lui enjoindre de reprendre une nouvelle décision ;
3°) subsidiairement, d'ordonner une expertise avant-dire-droit ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier du Haut-Bugey une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision en litige a été prise par une autorité qui ne justifie pas de sa compétence ;
- la commission de réforme était irrégulièrement composée ;
- il justifie avoir subi un traumatisme soudain le 4 décembre 2017, établi par une IRM réalisée le 5 décembre, quoique son interprétation n'ait pu être réalisée que le 12, ayant eu pour conséquence la rupture du tendon d'Achille ;
- nonobstant son état antérieur, la survenance de la rupture de son tendon le 4 décembre alors qu'il était en service suffit à établir le lien avec ce dernier ; aucun élément médical n'établit que cet accident soit la conséquence exclusive de sa tendinopathie antérieure ;
- il remplit les conditions de la présomption d'imputabilité posée par l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, sans que le centre hospitalier du Haut-Bugey réfute cette dernière.
Par des mémoires enregistrés les 11 février 2020 et 13 novembre 2020, le centre hospitalier du Haut-Bugey, représenté par Me Brocheton, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- l'avis n° 450102 du Conseil d'État du 15 octobre 2021 ;
- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;
- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ;
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
- et les observations de Me Parisi, pour M. A..., ainsi que celles de Me Brocheton, pour le centre hospitalier du Haut-Bugey ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., alors ingénieur hospitalier au centre hospitalier du Haut-Bugey, a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service d'une rupture partielle du tendon d'Achille, qu'il soutient s'être produite le 4 décembre 2017 alors qu'il se rendait sur un chantier de construction dans le cadre de son service. M. A... demande l'annulation du jugement du 26 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 mars 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier du Haut-Bugey a refusé de reconnaître sa pathologie imputable au service.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, c'est à bon droit, par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, que les premiers juges ont écarté les moyens tirés du défaut de compétence du signataire de la décision en litige et de l'irrégularité de la composition de la commission de réforme.
3. En second lieu, les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, créé par l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique aux termes desquelles : " I. Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, (...) Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. (...) II. Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. " ne sont entrées en vigueur, selon l'avis du Conseil d'État susvisé, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique.
4. Si, par suite, ces dispositions ont vocation à s'appliquer aux situations en cours, sous réserve des exigences attachées au principe de non-rétroactivité, qui exclut que les nouvelles dispositions s'appliquent à des situations juridiquement constituées avant leur entrée en vigueur, les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée.
5. Dès lors, M. A..., qui invoque, pour fait générateur de l'accident dont il soutient qu'il est imputable au service, des circonstances de fait survenues le 4 décembre 2017, ne peut utilement se prévaloir de la présomption qu'instituent les dispositions de l'article 21 bis précité.
6. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. " Le droit, prévu par ces dispositions, pour le fonctionnaire de conserver l'intégralité de son traitement et de bénéficier la prise en charge de ses arrêts de maladie et de ses frais médicaux pendant ses congés de maladie est soumis à la condition que la maladie le mettant dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. "
7. M. A... fait valoir qu'il était en service et en déplacement pour les nécessités de ce dernier le 4 décembre 2017, alors que s'est manifestée, selon ses déclarations, une vive douleur à sa cheville gauche, qui lui a entraîné une forte claudication attestée par une collègue présente au rendez-vous de chantier auquel il se rendait. Il est établi par les pièces du dossier, notamment l'examen par imagerie médicale du lendemain, nonobstant la circonstance que le rapport n'ait été rédigé que le 12 décembre, que cette douleur était consécutive à une rupture partielle de son tendon d'Achille. M. A..., qui ne fait état que tardivement de l'état incommodément praticable de son parcours en raison de chutes de neige, se borne à attribuer cette pathologie à une " marche accélérée " après avoir quitté la voiture avec laquelle il s'était rendu à destination.
8. D'une part, en l'absence dans ces conditions, et notamment au regard des fonctions de l'intéressé, de toute contrainte physique particulière, le fait du service ne peut être regardé pour cause directe et immédiate de la pathologie diagnostiquée chez M. A....
9. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé l'expert dans son rapport du 8 janvier 2018 préalable à la commission de réforme, que, sans étiologie traumatique relevée, la rupture partielle du tendon d'Achille mise en évidence par l'imagerie médicale du 5 décembre 2017 constituait une aggravation d'un état antérieur de tendinopathie, également diagnostiqué par cette même imagerie. Il suit de là que, si la manifestation aiguë de la pathologie de M. A... est survenue, ainsi qu'il l'établit, alors qu'il effectuait son service, elle ne s'est pas produite à l'occasion d'un événement en lien, même partiel, avec ce dernier. Constitutive d'une évolution prévisible et trouvant son origine exclusivement dans la tendinopathie dont était affecté M. A..., la rupture partielle du tendon d'Achille de celui-ci ne peut dès lors être regardée comme un accident au sens des dispositions précitées au point 3.
10. C'est dès lors par une correcte application de ces dispositions et sans entacher d'erreur son appréciation que, par la décision en litige, le directeur du centre hospitalier du Haut-Bugey a refusé de reconnaître imputable au service l'événement survenu à M. A... le 4 décembre 2017.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier du Haut-Bugey, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier du Haut-Bugey.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier du Haut-Bugey en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au centre hospitalier du Haut-Bugey.
Délibéré après l'audience du 21 octobre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Josserand-Jaillet, président ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 novembre 2021.
N° 19LY02993