CAA de LYON, 7ème chambre, 10/11/2022, 21LY01598, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision10 novembre 2022
Num21LY01598
JuridictionLyon
Formation7ème chambre
PresidentM. PICARD
RapporteurMme Christine DJEBIRI
CommissaireM. RIVIERE
AvocatsLE BIGOT

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 21 juin 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de revalorisation de sa pension militaire d'invalidité par octroi d'une majoration tierce personne et de l'indemniser des préjudices dont il se prévaut, non réparés par la pension militaire d'invalidité.

Par un jugement n° 1903223 du 9 mars 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 19 mai 2021, M. A..., représenté par Me Le Bigot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et la décision contestée ;
2°) de l'indemniser à hauteur de 10 000 euros des préjudices dont il se prévaut et non réparés par la pension militaire d'invalidité ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) à titre subsidiaire d'ordonner une expertise avant dire droit.

Il soutient que :
- il peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 18 du code des pension militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dès lors que son infirmité nécessite l'assistance d'une tierce personne six heures par semaine, son épouse lui servant de chauffeur et l'assistant pour ses soins et pour les actes de la vie quotidienne ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit faute pour le ministre d'avoir recherché s'il était dans l'une des situations lui permettant de bénéficier de la majoration tierce personne ;
- il doit être indemnisé des souffrances endurées, de son préjudice esthétique, du surcoût induit par l'aménagement d'un véhicule adapté, de son préjudice d'agrément et de son préjudice sexuel.
Par un mémoire enregistré le 3 décembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que la demande indemnitaire que M. B... A... a présentée pour les préjudices non réparés par la pension militaire d'invalidité est irrecevable et qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ;
- le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ;
- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Djebiri, rapporteur ;
- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :


1 M. A..., né en 1956, engagé dans la gendarmerie nationale, a été victime le 14 juin 2001 d'un accident de service. Une première pension militaire d'invalidité au taux de 10 % lui a été accordée à compter du 2 novembre 2008, suivie d'une nouvelle pension au taux de 95 %, avec effet au 11 décembre 2012. Les 26 janvier et 30 mai 2017, il a demandé à la ministre des armées une majoration de sa pension pour recours à tierce personne et l'indemnisation de divers préjudices non réparés par cette pension. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Dijon du 9 mars 2021 qui a rejeté sa demande d'annulation du refus que lui a opposé la ministre des armées le 21 juin 2019.

Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires devant la cour :

2. Le tribunal, après avoir vainement invité M. A... à chiffrer ses conclusions indemnitaires, sous 15 jours, par un courrier du 14 décembre 2020, reçu le lendemain, les a rejetées comme irrecevables. Par suite, et comme le soutient en défense la ministre, la demande indemnitaire de M. A..., chiffrée pour la première fois devant la cour, ne peut qu'être rejetée.



Sur le fond du litige :

3. Aux termes des dispositions désormais codifiées à l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels de la vie et qui, vivant chez eux, sont obligés de recourir d'une manière constante aux soins d'une tierce personne, ont droit, à titre d'allocation spéciale, à une majoration égale au quart de la pension ". Cette disposition ne peut être interprétée comme exigeant que l'aide d'un tiers soit nécessaire à l'accomplissement de la totalité des actes nécessaires à la vie. Elle impose toutefois que l'aide d'une tierce personne soit indispensable ou bien pour l'accomplissement d'actes nombreux se répartissant tout au long de la journée, ou bien pour faire face à des manifestations imprévisibles des infirmités dont le pensionné est atteint, soit à des soins dont l'accomplissement ne peut être subordonné à un horaire préétabli, et dont l'absence mettrait sérieusement en danger l'intégrité physique ou la vie de l'intéressé.

4. M. A... soutient que son infirmité nécessite l'assistance d'une tierce personne non médicale ou spécialisée sur la base de six heures hebdomadaires et qu'il peut se mouvoir à l'aide d'une prothèse qui continue à le faire souffrir, en dépit d'aménagements successifs, et qu'il a engagé des frais importants en vue d'aménager son véhicule et le rendre propre à sa conduite. Toutefois, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise du 15 juin 2018 que si M. A... nécessite l'aide d'une tierce personne pour se vêtir et se dévêtir, pour faire sa toilette et pour les déplacements extérieurs, ce dernier peut quitter son lit ou se coucher seul, satisfaire ses besoins naturels, boire et manger seul, se déplacer seul sur de courtes distances. Ainsi la fréquence et la périodicité de l'assistance dont l'intéressé a besoin, peuvent être subordonnées à un horaire préétabli et cette assistance n'est pas nécessaire pour l'accomplissement d'actes nombreux se répartissant tout au long de la journée. Par suite, et comme s'en est assurée la ministre des armées, il n'apparaît pas se trouver dans une situation qui justifierait une majoration de sa pension militaire d'invalidité. Aucune violation des dispositions précitées de l'article L. 133-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ne saurait donc être retenue.
5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Il suit de là que sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.
DÉCIDE :


Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 20 octobre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 novembre 2022.


La rapporteure,




C. Djebiri
Le président,




V.-M. Picard
La greffière,
S. Lassalle

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,
La greffière,
N°21LY01598 2
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