Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, du 12 décembre 1996, 94NC01025, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision12 décembre 1996
Num94NC01025
JuridictionNancy
Formation3E CHAMBRE
RapporteurM. LEDUCQ
CommissaireM. PIETRI

(Troisième chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 juillet 1994, présentée au nom de l'Etat, par le ministre du budget, porte-parole du gouvernement ;
Le ministre demande que la Cour :
1 ) annule le jugement en date du 10 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de Mme PARJOIE, un arrêté en date du 26 mars 1992 du ministre délégué au budget supprimant l'allocation temporaire d'invalidité concédée à ladite Mme PARJOIE ;
2 ) rejette la demande présentée par Mme PARJOIE devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
VU le jugement attaqué ;
VU le mémoire en défense, enregistré le 5 octobre 1994, présenté par Mme PARJOIE ; celle-ci conclut au rejet de la requête et sollicite une nouvelle expertise ;
VU le mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 1996, présenté par le garde des sceaux, ministre de la justice ; le garde des sceaux déclare partager les conclusions du ministre du budget ;
VU la décision en date du 12 septembre 1996 par laquelle le président de chambre de la cour administrative d'appel de Nancy a fixé au 3 octobre 1996 la date de la clôture de l'instruction de la présente affaire ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
VU la loi n 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
VU le décret n 60-1089 du 6 octobre 1960 portant règlement d'administration publique pour l'application des dispositions de l'article 23bis de l'ordonnance n 59-244 du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ;
VU le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 1996 :
- le rapport de M. LEDUCQ, Président ;
- et les conclusions de M. PIETRI , Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article R.153-1 ajouté au code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel par le décret n 92-77 du 22 janvier 1992 : "Sauf dans les cas mentionnés au premier alinéa de l'article L.9 et à l'article R.149, lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent présenter leurs observations" ;
Considérant que, pour annuler la décision en date du 26 mars 1992 par laquelle le ministre délégué au budget a supprimé l'allocation temporaire d'invalidité qui avait été octroyée à Mme PARJOIE, les premiers juges se sont fondés sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte qu'ils ont relevé d'office sans en avoir préalablement informé les parties ; que le jugement attaqué, intervenu au terme d'une procédure irrégulière, doit en conséquence être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la requête présentée par Mme PARJOIE devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
Considérant qu'aux termes de l'article 65 du la loi susvisée du 11 janvier 1984 : "Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ... peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité ... " et que selon les dispositions de l'article 5 du décret susvisé du 6 octobre 1960 : "L'allocation temporaire d'invalidité est accordée pour une période de cinq ans. A l'expiration de cette période les droits du fonctionnaire font l'objet d'un nouvel examen dans les conditions fixées à l'article 3 ci-dessus et l'allocation est attribuée sans limitation de durée ... ou, le cas échéant, supprimée ..." ; qu'enfin l'article 3 susmentionné du décret du 6 octobre 1960 dispose que : "La réalité des infirmités invoquées par le fonctionnaire, leur imputabilité au service, les conséquences ainsi que le taux d'invalidité qu'elles entraînent sont appréciées par la commission de réforme prévue à l'article L.31 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas au ministre dont relève l'agent et au ministre de l'économie et des finances" ;
Considérant que, pour supprimer, sur proposition du garde de sceaux, ministre de la justice, à l'expiration de la période de cinq ans, l'allocation temporaire d'invalidité qui avait été concédée à Mme PARJOIE avec jouissance à compter du 22 octobre 1985, le ministre délégué au budget s'est fondé sur le nouveau taux d'invalidité de l'intéressée, résultant des séquelles de l'accident de service dont elle avait été victime, devenu inférieur à 10 % ; que ce taux a été fixé conformément à l'appréciation de la commission de réforme instituée par l'article L.31 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa séance du 17 octobre 1991, et aux conclusions convergentes de trois experts successifs ; que Mme PARJOIE n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles ledit taux résulterait d'une évaluation minorée de son invalidité ; qu'en particulier il ne ressort pas des pièces du dossier que les experts qui ont examiné la requérante auraient manqué à leur devoir d'impartialité ;

Considérant que la circonstance que les salariés de droit privé bénéficieraient d'une situation plus avantageuse au regard de l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité que celle des agents publics est sans effet sur la régularité de la décision litigieuse ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise sollicitée, la requête présentée par Mme PARJOIE devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne doit être rejetée ;
Article 1 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 10 mai 1994 est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne par Mme PARJOIE est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêté sera notifié au ministre de l'économie et des finances, au garde des sceaux, ministre de la justice et à Mme PARJOIE.