Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, du 17 juin 1999, 98NC01778, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision17 juin 1999
Num98NC01778
JuridictionNancy
Formation3E CHAMBRE
RapporteurM. LION
CommissaireM. VINCENT

(Troisième Chambre)
Vu, enregistrés les 12 août 1998 et 26 janvier 1999, la requête et le mémoire présentés par le MINISTRE de l'ECONOMIE, des FINANCES et de l'INDUSTRIE et le secrétaire d'Etat au budget qui demandent à la Cour :
- d'une part, d'annuler le jugement du 9 juillet 1998 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision ministérielle du 8 avril 1996, suspendant à compter du 1er mars 1993, le paiement des arrérages de la pension civile de retraite n B 94-016.323 K, à hauteur des 34/84èmes, du montant des arrérages d'une pension de vieillesse servie également à M. X... par la caisse régionale d'assurance vieillesse d'Alsace-Moselle ;
- d'autre part, de rejeter la requête de première instance ;
- et enfin, de prononcer le sursis à l'exécution dudit jugement ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n 95-125 du 8 février 1995 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 1999 :
- le rapport de M. LION, Premier Conseiller ;
- et les conclusions de M. VINCENT, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE de l'ECONOMIE, des FINANCES et de l'INDUSTRIE et le secrétaire d'Etat au budget forment régulièrement appel du jugement du 9 juillet 1998 du tribunal administratif de Strasbourg qui a annulé la décision du 8 avril 1996, suspendant le paiement des arrérages de la pension civile de retraite n B 94-016.323 K à hauteur des 34/84èmes du montant des arrérages d'une pension de vieillesse servie également à M. X... ;
Sur la fin de non-recevoir opposée à l'appel :
Considérant que si les droits et obligations de feu M. X... sont dévolus à la masse successorale à la suite du décès de leur auteur, cette circonstance ne peut utilement être opposée à l'appel du ministre qui est, en l'espèce, recevable ;
Au fond :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.84 du code des pensions civiles et militaires de retraite, applicable aux retraités régis par la législation locale en vigueur dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, de la Moselle, et relatif au cumul des pensions, avec des rémunérations d'activité ou d'autres pensions : "Les dispositions du présent titre sont applicables aux personnels civils et militaires des collectivités suivantes : 1 Administrations de l'Etat, des départements et des communes ,( ...) des offices et établissements publics de ces collectivités à caractère administratif ; que, d'autre part, l'article L.87 du même code prévoit qu': "En aucun cas, le temps décompté dans la liquidation d'une pension acquise au titre du présent code ou de l'un des régimes de retraite visés à l'article L.84 ( ...) ne peut intervenir dans la liquidation d'une autre pension rémunérant des services accomplis à l'Etat. Le cumul de deux ou plusieurs pensions acquises dans des emplois successifs est autorisé" ; qu'enfin, l'article L.5212-1 du code général des collectivités territoriales, qui a repris sur ce point les dispositions antérieures de l'article L.163-1 du code des communes dispose : "Le syndicat de communes est un établissement public de coopération intercommunale associant des communes en vue d'oeuvres ou de services d'intérêt intercommunal" ;
Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L.5212-1 et L.163-1 des codes précités, un syndicat des eaux comme un syndicat intercommunal à vocations multiples sont au nombre des collectivités visées par l'article L.84 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que, par suite, les autorités ministérielles appelantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que le jugement du 9 juillet 1998 du tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 8 avril 1996 au motif qu'il n'était pas justifié que le S.I.V.O.M. du secteur de Sundhouse (section eau) faisait partie des collectivités visées par l'article L.84 susmentionné ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

Considérant, en premier lieu, que si l'article L.87 précité autorise le seul cumul de pensions acquises dans des emplois successifs, il ressort cependant des pièces du dossier de première instance que M. X... a, en sus de son activité d'ouvrier professionnel principal de l'éducation nationale, occupé accessoirement un emploi de fontainier à temps partiel durant la période allant du 1er janvier 1969 au 31 décembre 1984, et été successivement employé à ce titre par le syndicat des eaux de Sundhouse-Wittisheim, puis par le S.I.V.O.M. du secteur de Sundhouse (section eau) ; que, par suite, et alors même qu'étaient différents les horaires de chacun de ces emplois cumulés, les droits à pension y afférents se rapportaient à des emplois simultanés et n'étaient donc pas cumulables en application de l'article L.87 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Considérant, en second lieu, que si les consorts X... soutiennent, contrairement aux termes du même article L.87, que l'interdiction de cumul des pensions ne s'appliquerait qu'aux services accomplis à l'Etat, le moyen, manquant en droit, ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en dernier lieu, que si les consorts X... font valoir que l'interdiction de cumul des pensions ne saurait trouver application lorsque celles-ci sont liquidées, l'une au titre du régime général et l'autre, au titre d'un régime spécial de sécurité sociale, il résulte des dispositions de l'article L.87 précité que le temps décompté dans la liquidation d'une pension publique ne peut en aucun cas intervenir dans la liquidation d'une autre pension rémunérant des services accomplis auprès d'un établissement public administratif d'une des collectivités locales visées à l'article L.84 du code précité ; qu'il résulte de l'instruction que sont entrées en jouissance au même 1er mars 1993 la pension civile de retraite n B 94-016.323 K et les autres pensions de vieillesse du régime général de la sécurité sociale servies à M. X..., dont l'une, versée par la caisse régionale d'assurance vieillesse d'Alsace-Moselle rémunère 84 trimestres salariés, dont 34 accomplis durant la période litigieuse, allant du 1er janvier 1969 au 31 décembre 1984 et prise en compte dans la liquidation de ces pensions ; que, dès lors que la caisse régionale d'assurance vieillesse d'Alsace-Moselle n'a pas estimé opportun de satisfaire la demande de M. X... en usant de la procédure de rachat prévue à l'article D.171-4 du code de la sécurité sociale aux fins de rendre les deux pensions litigieuses entièrement cumulables à la date du rachat, celle-ci est devenue définitive ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le ministre a appliqué au cas particulier les dispositions de l'article L.87 du code susmentionné et prescrit la suspension de la pension civile de retraite n B 94-016.323 K à hauteur des 34/84èmes, du montant corrélatif des arrérages de la pension de vieillesse versée à M. X... par la caisse régionale d'assurance vieillesse d'Alsace-Moselle ; que, par suite, le dernier moyen susévoqué et la requête de première instance ne peuvent qu'être rejetés ;
Article 1er : Le jugement n 96-1513 du 9 juillet 1998 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : La requête de première instance de feu M. Henri X... est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions du MINISTRE de l'ECONOMIE, des FINANCES et de l'INDUSTRIE et du secrétaire d'Etat au budget est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE de l'ECONOMIE, des FINANCES et de l'INDUSTRIE et aux consorts X....