Cour administrative d'appel de Nancy, Plénière, du 14 juin 2001, 96NC01387, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision14 juin 2001
Num96NC01387
JuridictionNancy
FormationPLENIERE
RapporteurM. QUENCEZ
CommissaireM. ADRIEN

(Formation Plénière)
Vu, enregistrée le 30 avril 1996, la requête présentée pour M. Daniel X..., demeurant ... à Ancy-sur-Moselle (Moselle), par la société civile professionnelle Petit et Boh-Petit, avocats ;
M. X... demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement n 93880 du 29 décembre 1995 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à ce que le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de l'agglomération messine soit déclaré responsable de l'accident professionnel dont il a été victime le 16 janvier 1983 et qu'il soit condamné à lui verser une indemnité d'un montant de 385 731,78 francs ;
2 / de condamner le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de l'agglomération messine à lui verser une indemnité d'un montant de 385 731,78 francs en réparation du préjudice subi ;
3 / de condamner le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) à lui payer une somme de 5 000 francs sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance du président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Nancy déclarant l'instruction close le 13 mars 2000 à 16 heures ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2001 :
- le rapport de M. QUENCEZ, Président,
- les observations de Me MARX, avocat de M. X... et de Me COSSALTER, avocat du SYNDICAT INTERCOMMUNAL A VOCATION MULTIPLE DE L'AGGLOMERATION MESSINE,
- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 16 janvier 1983, M. X..., employé à l'usine d'incinération du syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Metz , a, pour rechercher les causes du mauvais fonctionnement de la chaîne d'entraînement des vis sans fin de l'usine, été obligé de marcher sur une plaque de tôle surmontant cette vis, laquelle, contrairement aux prescriptions imposées par le constructeur, n'était pas boulonnée sur le carter la contenant ; que la plaque a alors glissé et le pied de M. X... a été entraîné par la vis sans fin ; qu'il a subi un écrasement du membre inférieur droit qui a nécessité une amputation d'une partie de ce membre ; que M. X... conteste un jugement du Tribunal administratif de Strasbourg qui lui a opposé la règle selon laquelle un fonctionnaire, victime d'un accident de service, ne saurait bénéficier d'autres droits que ceux qui découlent du code des pensions civiles et militaires de retraite et demande à la cour de condamner son employeur, le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Metz, à réparer divers préjudices qui, selon lui, ne sont pas indemnisés par la pension qui lui est accordée ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si M. X... conteste le jugement attaqué au motif qu'il n'a pas eu connaissance préalablement à l'audience du Tribunal administratif des conclusions du commissaire du Gouvernement et qu'ainsi la procédure n'a pas été contradictoire, un tel moyen fondé sur une cause juridique distincte de celle de la faute du syndicat intercommunal, seule invoquée dans le délai de recours contentieux, constitue une demande nouvelle qui n'est pas recevable ;
Sur le bien-fondé de la requête de M. X... :

Considérant qu'aux termes de l'article L.417-8 du code des communes maintenu en vigueur par l'article 119-III de la loi du 26 janvier 1984 : "Les communes et les établissements publics communuaux et intercommunaux sont tenus d'allouer aux agents qui ont été atteints d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une invalidité permanente au moins égale à un taux minimum déterminé par l'autorité supérieure ou d'une maladie professionnelle, une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec le traitement, dans les mêmes conditions que pour les fonctionnaires de l'Etat" ; qu'aux termes de l'article R.417-7 du même code : "L'allocation temporaire d'invalidité n'est susceptible d'être accordée qu'aux agents qui sont maintenus en activité et justifient d'une invalidité permanente résultant soit d'un accident de service d'un taux rémunérable au moins égal à 10 % soit de l'une des maladies d'origine professionnelle énumérées par les tableaux prévus à l'article L. 496 du code de la sécurité sociale, quelle que soit la date à laquelle l'accident est survenu ou la maladie a été constatée" ; que la circonstance qu'en application des dispositions précitées, M. X..., victime d'un accident de service, a pu bénéficier d'une allocation temporaire d'invalidité, ne fait pas obstacle à ce que l'intéressé, s'il estime que la responsabilité de la collectivité qui l'emploie est susceptible d'être engagée en raison d'une faute lourde commise par son employeur dans l'application des règles de sécurité, exerce à l'encontre de cette collectivité une action tendant au versement d'une indemnité complémentaire assurant la réparation intégrale du préjudice qu'il a subi ;
Considérant que l'action engagée devant la juridiction administrative par M. X... tendait à la condamnation du syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Metz à réparer l'ensemble des conséquences dommageables de la faute lourde qui aurait été commise par son employeur et qui présentait le caractère d'un accident de service ; qu'en rejetant cette demande au motif que le caractère forfaitaire de l'allocation instituée par les dispositions précitées dont l'intéressé avait bénéficié lui interdisait d'exercer une action en responsabilité contre son employeur au titre de ce chef de préjudice dans les conditions de droit commun, le Tribunal administratif de Strasbourg a commis une erreur de droit ; que, par suite, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a rejeté, pour ce motif, sa demande ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés devant le Tribunal administratif de Strasbourg et devant la Cour ;

Considérant que le fait pour le syndicat intercommunal d'avoir permis à M. X... de travailler sur le carter de la vis sans fin, sans avoir préalablement prescrit la vérification du boulonnage de la plaque d'accès à cette vis très dangereuse, constitue dans les circonstances de l'espèce, une faute lourde susceptible d'engager la responsabilité dudit syndicat ; que M.PRUCHNOWSKI peut dès lors obtenir une indemnisation complémentaire à l'allocation temporaire d'invalidité qui lui a été concédée, dans la mesure où son préjudice corporel serait d'un montant supérieur à la valeur de cette pension ;
Considérant toutefois que la Cour ne trouve pas au dossier les éléments lui permettant de fixer le montant du préjudice global subi par M. X... à raison de cet accident ; qu'il y a donc lieu de prescrire un supplément d'instruction aux fins pour le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Metz d'apporter tous éléments d'information sur les sommes versées à X... à raison de cet accident et notamment le montant du capital représentatif de l'allocation qui lui est versée et le montant des frais pharmaceutiques et d'hospitalisation que cette collectivité a supportés conformément aux dispositions de l'article 57-2 de la loi du 26 janvier 1984 ;
Article 1er : Il est prescrit, avant de statuer sur la demande d'indemnité de M. X..., un supplément d'instruction aux fins pour le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Metz d'apporter à la Cour les éléments d'information sur les sommes versées à M. X... à raison de l'accident du 16 janvier 1983, notamment le montant du capital représentatif de l'allocation temporaire d'invalidité qui lui est versée et le montant des frais pharmaceutiques et d'hospitalisation que le syndicat a supportés.
Article 2 : Les conclusions tendant au versement d'une somme sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont réservées pour y être statué en fin d'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Metz.