Cour administrative d'appel de Marseille, 2e chambre, du 15 mai 2001, 98MA00726, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision15 mai 2001
Num98MA00726
JuridictionMarseille
Formation2E CHAMBRE
RapporteurM. GONZALES
CommissaireM. BOCQUET

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 6 mai 1998 sous le n° 98MA00726, présentée pour M. Paul X..., demeurant 4, immeuble Greco, rue des Glycines à Ajaccio (20000), par Me Y..., avocat ;
M. X... demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement, en date du 22 janvier 1998, par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du MINISTRE DU BUDGET du 11 octobre 1993 portant concession à son profit d'une pension de retraite sans l'assortir d'une rente viagère d'invalidité ;
2°/ d'annuler l'arrêté susmentionné du MINISTRE DU BUDGET, en date du 11 octobre 1993 ;
3°/ de condamner l'Etat à lui payer 4.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2001 :
- le rapport de M. GONZALES, premier conseiller ;
- les observations de Me Y... pour M. X... ;
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : "Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées ...en service ...peut être radié des cadres" ; qu'aux termes de l'article L.128 du même code : "Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L.27 a droit à une rente viagère cumulable avec la pension rémunérant les services" ;
Considérant que M. X..., radié des cadres de la POSTE pour invalidité, le 8 juin 1993, a, en application des dispositions précitées, sollicité le bénéfice d'une pension de retraite assortie d'une rente viagère d'invalidité ; que, toutefois, par décision du 20 octobre 1993, le MINISTRE DU BUDGET a informé l'intéressé de l'intervention d'un arrêté de concession d'une pension de retraite sans bénéfice d'une rente viagère d'invalidité ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs : "Doivent être motivées les décisions qui ... refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir" ;
Considérant que la décision susmentionnée du MINISTRE DU BUDGET vaut rejet de la demande de M. X... tendant au bénéfice d'une rente viagère d'invalidité ; qu'elle ne comporte aucune motivation bien qu'elle entre dans le champ d'application de la disposition précitée de la loi du 11 juillet 1979, et se trouve, de ce fait, entachée d'illégalité ; que M. X..., qui avait contesté devant les premiers juges la légalité externe de la décision du ministre est recevable et fondé à se prévaloir devant la Cour de ce moyen qui met également en cause la légalité externe de cette décision ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'accident vasculaire cérébral qui a frappé M. X... le 5 février 1992, s'est produit alors que celui-ci effectuait la tournée de distribution postale particulièrement longue et pénible qui lui était assignée quotidiennement ; que, par ailleurs, le dossier médical de l'intéressé ne fait état d'aucun antécédent symptomatique le prédisposant à subir un tel accident à l'âge de 50 ans ; que, dès lors, l'origine de cette affection doit être directement imputée aux conditions anormales de travail de l'intéressé, sur lesquelles l'attention de l'administration avait été attirée à plusieurs reprises, et auxquelles elle n'a porté remède qu'immédiatement après cet accident, en répartissant la charge de la tournée entre plusieurs préposés ; que cet événement est, également, directement à l'origine de l'aggravation du syndrome dépressif que présentait antérieurement l'intéressé ; qu'ainsi, contrairement aux énonciations du jugement attaqué, M. X... est en droit de prétendre au bénéfice d'une rente viagère d'invalidité à raison des maladies qui ont occasionné sa mise à la retraite ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'allouer à M. X... la somme de 4.000 F à la charge de l'Etat, au titre de l'application de cet article ;
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Bastia, en date du 22 janvier 1998 est annulé.
Article 2 : La décision, en date du 20 octobre 1993, par laquelle le MINISTRE DU BUDGET a refusé à M. X... le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité est annulée.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 4.000 F à M. X... au titre de l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. X..., au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et au DIRECTEUR DU SERVICE DES PENSIONS DE LA POSTE ET DE FRANCE TELECOM.