Conseil d'Etat, 10 SS, du 16 janvier 1987, 77096, inédit au recueil Lebon
Vu le recours enregistré le 20 mars 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le jugement du 14 février 1986 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a condamné l'Etat à verser à M. et Mme Louis X... la somme de 60 000 F en réparation du préjudice normal qu'ils ont subi du fait du décès accidentel de leur fils alors que ce dernier accomplissait son service national ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, notamment son article 139 ;
Vu la loi du 8 juillet 1983 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Todorov, Auditeur,
- les conclusions de M. Van Ruymbeke, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Franck X... accomplissait ses obligations militaires, en tant qu'appelé du contingent au 61ème régiment d'artillerie à Morhange, lorsqu'il a été victime le 23 avril 1982 d'un accident mortel au cours de manoeuvres effectuées par son régiment au camp de Mailly Aube ;
Considérant que les obligations dont l'Etat est tenu en ce qui concerne les droits ouverts aux militaires victimes d'accidents survenus en service pendant la durée de leur présence sous les drapeaux, sont définies par les dispositions de l'article L.139 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; qu'il résulte des dispositions de l'ensemble de ce code, que le législateur a entendu limiter les obligations de l'Etat à la concession d'une pension dans les conditions déterminées par lesdites dispositions à l'exclusion de toute indemnité pour faute du service public, quelle que soit la gravité de la faute imputée à l'administration ;
Considérant que la loi n° 83-605 du 8 juillet 1983 modifiant le code du service national, en prévoyant une réparation complémentaire destinée à assurer l'indemnisation intégrale du dommage subi, n'a pas de caractère interprétatif ou rétroactif ; qu'ainsi elle ne saurait s'appliquer à un dommage survenu antérieurement à son entrée en vigueur ;
Considérant que les ascendants d'un militaire victime d'un accident de service ne peuvent avoir d'autre droit à l'encontre de l'Etat que ceux qui découlent de la législation sur les pensions militaires ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a condamné l'Etat à verser des sommes de 60 000 F à M. et Mme X... en réparation du préjudice moral qu'ils ont subi du fait du décès accidentel de leur fils Franck X... ;
Article ler : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne en date du 14 janvier 1986 est annulé.
Article 2 : La demande présenté par M. et Mme X... devant letribunal administratif de Châlons-sur-Marne est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Y... et au ministre de la défense.