Conseil d'Etat, 3 / 5 SSR, du 20 juillet 1990, 94019, mentionné aux tables du recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision20 juillet 1990
Num94019
Juridiction
Formation3 / 5 SSR
PresidentM. Combarnous
RapporteurM. Goulard
CommissaireM. Pochard

Vu le recours et les observations complémentaires du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 5 janvier 1988 et le 25 janvier 1988 ; le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 22 octobre 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de M. X..., son arrêté en date du 19 février 1986 suspendant le droit à pension de l'intéressé,
2°) rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite et notamment son article L. 59 ;
Vu l'ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Goulard, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Jean-Jacques X...,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite : "Le droit à l'obtention ou à la jouissance de la pension et de la rente viagère d'invalidité est également suspendu à l'égard de tout bénéficiaire du présent code qui aura été révoqué ou mis à la retraite d'office : Pour avoir été reconnu coupable de détournement soit de deniers de l'Etat, des départements, des communes ou établissements publics, soit de dépôts de fonds particuliers versés à sa caisse ou de matières reçues et dont il doit compte ; .... - Dans tous les cas, l'organisme disciplinaire compétent est appelé à donner son avis sur l'existence et la qualification des faits" ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que M. X..., chef de contrôle de l'action sanitaire et sociale, reconnu coupable de détournements de fonds publics par un jugement du 18 novembre 1981, passé en force de la chose jugée, du tribunal de grande instance de Tulle, a été, après que le conseil de discipline eut émis son avis le 2 avril 1982, révoqué avec maintien de ses droits à pension par un arrêté en date du 30 avril 1982 du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE NATIONALE, puis suspendu, en application de l'article L. 59 précité, de ses droits à pension, par un arrêté en date du 20 février 1986 du même ministre ; que si le conseil de discipline n'a pas été à nouveau consulté avant l'intervention de l'arrêté du 20 février 1986, cette circonstance n'est pas de nature à entacher celui-ci d'irrégularité, dès lors qu'au cours de sa réunion du 2 avril 1982 ledit conseil de discipline avait été amené à se prononcer expressément sur l'existence et la qualification des aits qui ont donné lieu à la condamnation pénale susmentionnée ; que, par suite, le ministre des affaires sociales et de l'emploi est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur cette prétendue irrégularité pour annuler ledit arrêté ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant, en premier lieu, que le directeur de l'administration générale, du personnel et du budget du ministère des affaires sociales et de la solidarité nationale avait reçu une délégation de signature par arrêté du 19 décembre 1984, publiée au Journal officiel du 22 décembre 1984, et était, dès lors, compétent pour signer l'arrêté attaqué ;
Considérant, en second lieu, que les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué ne serait pas daté et ne comporterait pas de signature manquent en fait ;
Considérant, enfin, que l'arrêté du 30 avril 1982 par lequel M. X... a été révoqué de ses fonctions sans suspension de ses droits à pension n'a eu ni pour objet, ni pour effet d'ouvrir à son profit un droit à une pension de retraite ; que, dès lors, M. X... n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué viole les droits acquis à une pension de retraite qu'il prétend tenir de cet arrêté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 19 février 1986 ;
Article 1er : Le jugement en date du 22 octobre 1987 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.