Conseil d'Etat, 3 / 5 SSR, du 18 novembre 1991, 101151, inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision18 novembre 1991
Num101151
Juridiction
Formation3 / 5 SSR
RapporteurGoulard
CommissairePochard

Vu la requête, enregistrée le 18 août 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Charles X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 22 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 août 1986 par laquelle le secrétaire d'Etat aux anciens combattants a refusé le titre de déporté résistant au titre de l' Indochine ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Goulard, Auditeur,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance qu'à la suite de la suppression par le décret du 27 juin 1963 de la commission d'outre-mer prévue à l'article R. 324 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, aucune commission comprenant une majorité de membres représentant les résistants d'Indochine ne soit appelée à se prononcer sur les demandes du titre d'interné ou de déporté résistant formées par des personnes se prévalant d'une activité de résistance en Indochine ne constitue pas une méconnaissance des dispositions de l'article L. 285 du même code aux termes desquelles : "Les commissions ou jurys appelés à statuer sur le cas des déportés ou internés résistants ... doivent obligatoirement comprendre plus de la moitié de membres choisis parmi les déportés et internés résistants" ;
Considérant, en second lieu, que la circonstance que le directeur des statuts et de l'information historique du ministère des anciens combattants, président de la commission nationale qui a examiné la demande de M. X..., aurait été, sur le fondement d'une délégation de signature que lui avait consentie le ministre, le signataire de la décision attaquée n'entache pas par elle-même d'illégalité cette décision ;
Considérant, enfin, que la décision attaquée est suffisamment motivée ;
Sur la légalité interne de la décision attaquée :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 293 et R. 294 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que les prisonniers de guerre des Japonais qui ont été transférés dans l'un des camps ou prisons figurant sur la liste prévue à l'article A 160 (3°) de ce code pour acte qualifié de résistance à l'ennemi peuvent, après avis de la commission nationale des déportés et internés résistants, obtenir le titre de déporté résistant si, en plus des cnditions générales prévues pour l'attribution de ce titre, ils justifient avoir subi leur détention jusqu'à la libération du camp ou de la prison ou s'être évadés auparavant ; qu'en vertu de l'article R. 287, 5° du même code sont qualifiés d'actes de résistances à l'ennemi en particulier les "actes qui, accomplis par toute personne s'associant à la résistance, ont été, par leur importance ou leur répercussion, de nature à porter une sérieuse atteinte au potentiel de guerre de l'ennemi et avaient cet objet pour mobile" ;

Considérant que la participation de M. X... à la résistance opposée les armes à la main à l'action des Japonais lors de leur coup de force du 9 mars 1945 ne saurait, alors même qu'elle aurait été à l'origine de son arrestation puis de son transfert au camp d'Hoa-Binh, être regardée comme un acte de résistance à l'ennemi au sens de l'article R. 287 du code, dès lors que l'intéressé était, au moment des faits, militaire en activité de service et combattait au sein d'une unité régulière de l'armée française attaquée par les Japonais ;
Considérant que M. X... n'allègue, à l'appui de sa demande, aucune action particulière qui constituerait, au sens de l'article R. 287-5° un acte de résistance à l'ennemi ; que la seule circonstance qu'il a été incarcéré au camp d'Hoa-Binh, qui figure sur la liste des lieux de déportation prévue par l'article A. 160 du code, n'est pas de nature à constituer un tel acte de résistance ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le secrétaire d'Etat aux anciens combattants lui a refusé l'attribution du titre de déporté résistant ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au secrétaire d'Etat aux anciens combattants.