Conseil d'Etat, 10/ 7 SSR, du 18 juin 1993, 82653, inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 octobre 1986, présentée par M. Y... BERNARD, demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 25 juin 1986 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande dirigée contre la décision verbale du 13 avril 1983 par laquelle le directeur de la maison d'arrêt de Cayenne l'a exclu de son emploi pour inaptitude professionnelle ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité, notamment ses articles L.431 et R.434 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Simon-Michel, Auditeur,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des dispositions des articles L. 431 et R. 434 du code des pensions militaires d'invalidité que les titulaires d'un emploi réservé reconnus inaptes à cet emploi peuvent obtenir un nouvel emploi en formulant une demande en ce sens dans le délai de deux mois à partir de la constatation de l'inaptitude professionnelle et moyennant un nouvel examen professionnel ; que s'ils formulent une telle demande ils doivent être maintenus dans leurs fonctions antérieures jusqu'à leur nomination dans le nouvel emploi ; qu'à défaut d'une telle demande, ils sont licenciés à l'expiration du deuxième mois suivant la constatation ;
Considérant que par une note de service en date du 25 mars 1983, le directeur de l'administration pénitentiaire au ministère de la justice a fait connaître son intention de licencier pour insuffisance professionnelle M. Y... BERNARD, surveillant stagiaire à la maison d'arrêt de Cayenne, recruté au titre de la législation sur les emplois réservés, au terme d'un délai de deux mois si dans ce délai il ne demandait pas à passer un nouvel examen professionnel pour obtenir un autre emploi, conformément aux textes susanalysés ; que cette décision a été notifiée à l'intéressé le 13 avril 1983 au matin par le directeur de la maison d'arrêt de Cayenne ; que, toutefois, l'après-midi du même jour, le directeur de la maison d'arrêt lui a demandé de quitter les lieux et lui a fait savoir qu'il ne faisait plus partie du personnel ;
Considérant, d'autre part que, si la décision susmentionnée du directeur de la maison d'arrêt de Cayenne a fait l'objet d'une notification verbale, celle-ci, qui n'était pas complète et n'indiquait notamment pas l'auteur de la décision, n'était pas régulière et n'a pas fait courir le délai du recours pour excès de pouvoir ; que la requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Cayenne l 14 février 1986, qui n'était pas tardive, était dès lors recevable ;
Considérant qu'il ressort des dispositions législatives et réglementaires susanalysées que l'administration ne pouvait légalement prononcer le licenciement immédiat de M. X... ; que, dès lors, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande en ce sens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cayenne, en date du 25 juin 1986 et la décision verbale du directeur de la maison d'arrêt de Cayenne en date du 13 avril 1983 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M Y... BERNARD et au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice.