Conseil d'Etat, 3 SS, du 22 novembre 1993, 128449, inédit au recueil Lebon
Vu, 1°) sous le n° 128 449, la requête, enregistrée le 6 août 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Albert X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement, en date du 9 juillet 1991, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, avant-dire droit sur sa demande dirigée contre le refus de lui reconnaître la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande, demandé à l'administration de produire tout document permettant d'établir qu'aucun des habitants de Vibersviller figurant sur la liste établie par les renseignements généraux ne s'est vu reconnaître la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande et à M. X... de produire tout document permettant d'établir qu'il n'a pas appartenu à la NSDAP ;
Vu, 2°) sous le n° 136 485, le recours du SECRETAIRE D'ETAT AUX ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 15 avril 1992 ; le SECRETAIRE D'ETAT AUX ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 13 février 1992 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de M. Albert X..., annulé la décision du directeur interdépartemental des anciens combattants de Metz refusant de lui reconnaître la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande ;
2°) rejette la demande présentée au tribunal administratif de Strasbourg par M. X... ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête de M. X... et le recours du SECRETAIRE D'ETAT AUX ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE concernent la situation de M. X... et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions de M. X... dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 9 juillet 1991 :
Considérant qu'à la suite de la demande de M. Albert X... dirigée contre la décision du directeur interdépartemental des anciens combattants et victimes de guerre de Metz lui refusant la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande, le tribunal administratif a, par le jugement attaqué, demandé, d'une part, à l'administration de produire tout document permettant d'établir qu'aucun des habitants de la commune de Vibersviller figurant sur une liste établie par les renseignements généraux ne s'était vu reconnaître la qualité d'incoporé de force dans l'armée allemande et, d'autre part, à M. X... de produire tout document permettant d'établir qu'il n'avait pas appartenu à la NSDAP ;
Considérant que le jugement attaqué se borne à prescrire une mesure d'instruction qui ne présente aucun caractère frustratoire ; que M. X... est, dès lors, sans intérêt à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions du SECRETAIRE D'ETAT AUX ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 13 février 1992 :
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de première instance de M. X... :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 10 mai 1954 modifié par l'arrêté du 2 mai 1984 : "Les Alsaciens et les Mosellans incorporés de force dans l'armée allemande, dans des conditions exclusives de tout acte de volonté caractérisé, peuvent se voir reconnaître cette qualité à compter de la date du présent arrêté, par décision du secrétaire d'Etat auprès du ministre de la défense chargé des anciens combattants, après avis du commissaire de la République intéressé (...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces produites par le ministre requérant devant le Conseil d'Etat que M. Albert X... a déposé une demande d'adhésion au N.S.D.A.P. le 19 janvier 1943 et que son admission à ce parti a été prononcée le 1er février 1943 sous le numéro 9 293 228 ; que, par suite, son incorporation dans la Wehrmacht le 27 juillet 1944 ne saurait être regardée comme intervenue dans des conditions exclusives de tout acte de volonté caractérisé de sa part ; que le SECRETAIRE D'ETAT AUX ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 12 décembre 1985 refusant à M. X... la qualité d'incorporé de force dans l'armée allemande ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 13 février 1992 est annulé.
Article 2 : La requête n° 128 449 de M. X... et la demande qu'il a présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre des anciens combattants et victimes de guerre.