Conseil d'Etat, 9 SS, du 20 octobre 1999, 133548, inédit au recueil Lebon
Vu, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 3 mars 1992, l'ordonnance en date du 21 janvier 1992 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 75 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors en vigueur, la requête présentée par M. Georges MAZZONI, demeurant Bâtiment A2 "Fior di Toga", route du groupe scolaire à Bastia (20200) ;
Vu ladite requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 15 avril 1991, et tendant à l'annulation du jugement du 15 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de M. MAZZONI tendant à l'annulation des décisions des 8 août 1988 et 7 février 1989 par lesquelles le ministre des postes et télécommunications a refusé de lui allouer le bénéfice de la rente viagère d'invalidité et de l'allocation temporaire d'invalidité pour la période du 30 juillet 1981 au 2 septembre 1988 et à l'octroi de dommages-intérêts à raison du préjudice subi du fait de ces refus ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 ;
Vu le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hourdin, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. MAZZONI demande l'annulation du jugement du 15 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 8 août 1988 et 7 février 1989 par lesquelles le ministre des postes et télécommunications a refusé de lui allouer le bénéfice, d'une part, d'une allocation temporaire d'invalidité jusqu'à son départ à la retraite et, d'autre part, d'une rente viagère d'invalidité, à la suite de l'agression dont il a été victime le 29 juillet 1981, dans l'exercice de ses fonctions de receveur des postes à Campitello (Haute-Corse) ; qu'il soutient que cette agression, ainsi que l'absence de protection pour l'exercice de son activité, ont provoqué un traumatisme psychique qui l'a conduit à une retraite prématurée à l'âge de soixante-deux ans ; qu'ayant repris son service à la suite de l'agression et ayant bénéficié d'un changement d'affectation, suivi d'un congé de longue durée du 15 juillet 1987 au 3 août 1988, il fait grief à l'administration de ne pas lui avoir alloué, au titre de la période du 30 juillet 1981 au 2 septembre 1988, date de sa radiation des cadres, une allocation temporaire d'invalidité et de ne lui avoir accordé qu'une pension civile de retraite non assortie d'une rente viagère d'invalidité pour tenir compte des troubles mentaux dont il souffre ; qu'il sollicite également l'indemnisation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du refus opposé par l'administration à ses demandes ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite "le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être radié des cadres par anticipation, soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application de l'article 34 (2°) de la loi du 11 janvier 1984 relative au statut général des fonctionnaires ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application de l'article 34 (4°) de ladite loi" ; qu'aux termes de l'article L. 28 du même code : "Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services" et qu'aux termes de l'article R. 38 du même code "le bénéfice de la rente viagère d'invalidité prévue à l'article L. 28 est attribuable si la radiation des cadres ou le décès en activité surviennent avant la limite d'âge et sont imputables à des blessures ou des maladies résultant par origine ou par aggravation d'un fait précis et déterminé du service ou de l'une des autres circonstances énumérées à l'article L. 27" ;
Considérant que, pour critiquer, d'une part, l'arrêté du 8 août 1988 par lequel le ministre des postes et télécommunications lui a concédé, conformément à la demande qu'il avait lui-même formulée le 29 janvier 1988, une pension civile de retraite rémunérant trente-sept années et demie de services effectifs, en tant que cet arrêté n'assortit pas cette pension d'une rente viagère d'invalidité telle que prévue aux articles L. 27, L. 28 et R. 38 précités du code et, d'autre part, la décision du 7 février 1989 par laquelle le ministre a expressément refusé de lui allouer ladite rente viagère d'invalidité, M. MAZZONI soutient que l'agression dont il a été victime en service le 29 juillet 1981 et les conditions dans lesquelles il a servi ont été la cause des troubles mentaux dont il souffre et qui ont nécessité sa mise en congé de longue durée six ans après ces événements ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu des troubles dont avait souffert M. MAZZONI dès avant l'agression du 29 juillet 1981 et du délai qui s'est écoulé entre celle-ci et sa mise en congé de longue durée, qu'il existe un lien direct de causalité entre l'agression dont il a été victime et l'affection dont il est atteint ; que, par suite, les conditions d'application des articles L. 27, L. 28 et R. 38 précitées du code ne se trouvent pas remplies ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bastia qui, contrairement à ce qu'il soutient, a statué au vu d'un dossier complet et selon une procédure régulière, ne s'est pas mépris sur la dévolution de la charge de la preuve et n'a entaché son jugement d'aucune inexactitude matérielle, a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté ministériel du 8 août 1988 et de la décision du 7 février 1989 lui refusant le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 6 octobre 1960 : "L'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article 65 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est attribuée aux agents maintenus en activité qui justifient d'une invalidité permanente résultant soit d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux rémunérable au moins égal à 10 P. 100, soit de l'une des maladies d'origine professionnelle énumérées par les tableaux visés à l'article L. 496 du code de la sécurité sociale. Les agents qui sont atteints d'une de ces maladies ne peuvent bénéficier de cette allocation que dans la mesure où l'affection contractée serait susceptible, s'ils relevaient du régime général de la sécurité sociale, de leur ouvrir droit à une rente en application des dispositions du livre IV dudit code et de ses textes d'application" ;
Considérant que l'affection dont souffre M. MAZZONI ne figure pas parmi les maladies professionnelles énumérées aux tableaux annexés à l'ancien article L. 496 du code de la sécurité sociale ; que, si l'article 7 de la loi du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d'ordre social dispose que "peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime ...", il ne résulte pas de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus et en tout état de cause, que les circonstances dans lesquelles M. MAZZONI a exercé ses fonctions ont été la cause directe de sa maladie ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 7 février 1989 par laquelle le ministre des postes et télécommunications lui a refusé le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité entre le 30 juillet 1981 et le 2 septembre 1988 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. MAZZONI, qui n'avait saisi l'administration d'aucune demande préalable d'indemnité et dont les conclusions aux fins d'allocation de dommages et intérêts à raison du préjudice qu'il estime avoir subi sont, par suite irrecevables, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté l'intégralité des conclusions de sa demande ;
Article 1er : La requête de M. MAZZONI est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Georges MAZZONI, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au secrétaire d'Etat à l'industrie.