Cour Administrative d'Appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 10/12/2008, 07NC01235, Inédit au recueil Lebon
Date de décision | 10 décembre 2008 |
Num | 07NC01235 |
Juridiction | Nancy |
Formation | 2ème chambre - formation à 3 |
President | M. COMMENVILLE |
Rapporteur | M. Gérard LION |
Commissaire | Mme ROUSSELLE |
Avocats | CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE |
Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrée les 3 septembre 2007 et 28 avril 2008, présentés pour Mme Virginie X, demeurant ... par Me Frédéric Richert, avocat ; Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0404427 en date du 18 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2000, 2001 et 2002 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 , au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Mme X soutient :
- que sa pension de veuve de militaire portugais est assimilable à celles qui sont exonérées en vertu de l'article 81, 4° du code général des impôts ;
- qu'elle est victime d'une discrimination injustifiée entre des contribuables placés dans la même situation ;
- que l'article 25 de la convention fiscale franco-portugaise prohibe les discriminations fondées sur la nationalité ;
- que la législation française constitue une entrave à la libre circulation des capitaux contraire aux stipulations de l'article 56 du traité des C.E ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires, enregistrés les 18 mars et 15 mai 2008, présentés par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; le ministre conclut au rejet de la requête en faisant valoir qu'aucun de ses moyens n'est fondé ;
Vu l'ordonnance portant clôture de l'instruction au 19 septembre 2008 à 16 heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention conclue entre la France et le Portugal tendant à éviter les doubles impositions ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2008 :
- le rapport de M. Lion, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 195 du code général des impôts : « 1. Par dérogation aux dispositions qui précèdent, le revenu imposable des contribuables célibataires, divorcés ou veufs n'ayant pas d'enfant à leur charge est divisé par 1,5 lorsque ces contribuables : (...) c. Sont titulaires (...) d'une pension prévue par les dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre reproduisant celles des lois des 31 mars et 24 juin 1919 (...) » ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 1er du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : « La République française (...) proclame et détermine, conformément aux dispositions du présent code, le droit à réparation due : 1° Aux militaires (...) ; 2° Aux veuves, aux orphelins et aux ascendants de ceux qui sont morts pour la France » ; qu'aux termes de l'article L. 43 du même code : « Ont droit à pension : 1° Les veuves des militaires et marins dont la mort a été causée par des blessures ou suites de blessures reçues au cours d'évènements de guerre ou par des accidents ou suites d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service » ;
Considérant, en premier lieu, que si Mme X, qui bénéficie d'une pension militaire versée par l'Etat portugais à la suite du décès de son époux lors de son service militaire au Portugal, s'est vu notifier des suppléments d'impôt sur le revenu au titre des années 2000, 2001 et 2002, il est constant que ladite pension n'entre pas dans le champ d'application de l'article 195 1. c. du code susmentionné qui, contrairement à ce qui est soutenu, ne réserve pas aux seuls titulaires de la nationalité française l'octroi de l'avantage fiscal litigieux ; que l'intéressée ne peut en outre utilement invoquer les dispositions du 4° de l'article 81 du code général des impôts qui affranchissent de l'impôt les pensions servies en vertu des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre dès lors que le présent litige est sans lien avec le caractère imposable des pensions mises en cause ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions précitées de l'article 195 1. c. du code général des impôts ont notamment pour objectif de conférer, en témoignage de la reconnaissance de la nation française, un avantage fiscal supplémentaire aux contribuables bénéficiant, du versement de pensions inhérentes à une participation à la défense de la France ou à des combats effectués dans l'armée française dont les auteurs ont, à la suite de cet engagement, été atteints d'infirmités ou sont décédés ; qu'elles n'instaurent pas de différence de traitement entre les bénéficiaires de cet avantage fiscal selon leur nationalité et reposent sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; que, dès lors que la pension perçue par Mme X ne répare pas la participation de feu son époux à la défense de la France ou à des combats effectués dans l'armée française, elle n'est pas fondée à soutenir que le refus de la demi-part supplémentaire de quotient familial que lui a opposé l'administration instituerait une discrimination injustifiée entre des contribuables placés dans une même situation ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations des articles 1er et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'ainsi qu'il a été déjà été dit ci-dessus, l'avantage fiscal prévu par l'article 195 1. c. du code général des impôts n'est pas lié à la possession de la nationalité française ; que, par suite, l'administration a pu, sans méconnaître les stipulations de l'article 25 de la convention franco-portugaise qui proscrivent les différences de traitement fondées sur la seule nationalité, en refuser le bénéfice à Mme X ;
Considérant, en dernier lieu, que pour contester le refus de lui accorder le bénéfice de la demi-part de quotient familial en litige, Mme X se borne à reprendre son argumentation de première instance sans apporter de nouvel élément de nature à établir la méconnaissance du principe communautaire de libre circulation des capitaux qu'elle invoque sur le fondement de l'article 73 B du traité de Rome, devenu article 56 du traité sur l'Union Européenne ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'adopter les motifs retenus par les premiers juges ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Virginie X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
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