CAA de PARIS, 6ème Chambre, 10/05/2016, 14PA04221, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 23 septembre 2013 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant.
Par une ordonnance n° 1401628 du 25 août 2014 le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n° 14PA04221 le 13 octobre 2014 et un mémoire enregistré le 19 juin 2015, M. A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 25 août 2014 du vice-président du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 23 septembre 2013 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant ;
3°) d'enjoindre à la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre de lui reconnaitre la qualité d'ancien combattant ou à défaut de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il a servi dans les rangs de l'armée française du 7 novembre 1944 au 8 avril 1946 ;
- le rejet par ordonnance de sa demande de première instance, en application de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative est contraire à l'article 1er du protocole additionnel n° 1 et à l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision attaquée est insuffisamment motivée au regard de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le tribunal a, à tort, jugé qu'il ne remplissait pas les conditions prévues pour se voir délivrer la carte de combattant alors qu'il ressort de son extrait de services qu'il a servi en Algérie du 12 novembre 1944 au 8 avril 1946, dont plus de 90 jours dans un service actif de l'armée française en Algérie.
Par un mémoire enregistré le 9 février 2016 l'office national des anciens combattants conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée est irrecevable dès lors qu'aucun moyen de légalité externe n'avait été soulevé en première instance ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 mars 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 avril 2016 ;
II. Par une requête enregistrée le 19 juin 2015 sous le n° 15PA02426 M. A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 25 août 2014 du vice-président du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 23 septembre 2013 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant ;
3°) d'enjoindre à la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre de lui reconnaitre la qualité d'ancien combattant ou à défaut de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soulève les mêmes moyens analysés ci-dessus.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 27 février 2015.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Labetoulle,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
1. Considérant que les requêtes enregistrées sous les n°s 14PA04221 et 15PA02426 présentent à juger une même question et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu d'y statuer par un seul arrêt ;
2. Considérant que M. A...a déposé auprès de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre une demande tendant à se voir reconnaitre la qualité d'ancien combattant ; que par décision du 23 septembre 2013 la directrice de cet office a rejeté sa demande ; qu'il a dès lors formé devant le Tribunal administratif de Pairs une requête tendant à l'annulation de cette décision ; que cette requête a été rejetée par ordonnance du 25 août 2014 en application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, dont M. A...interjette appel ;
Sur la régularité du jugement :
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...), le vice-président du tribunal administratif de Paris (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont pas manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé " ; que, devant le Tribunal administratif de Paris, M. A...a fait valoir qu'il avait servi dans les rangs de l'armée française pendant la deuxième guerre mondiale et a produit un extrait de services ; qu'ainsi, cette demande était assortie de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ; que seule une formation collégiale pouvait, dès lors, régulièrement statuer sur la demande de première instance ; que, par suite, l'ordonnance du 25 août 2014 doit être annulée ;
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M.A... ;
Sur les conclusions à fins d'annulation :
5. Considérant que pour rejeter la demande de M.A..., la décision attaquée après avoir visé notamment les dispositions applicables du code des pensions militaires d'invalidité, retient que l'intéressé ne justifie d'aucun jour de présence en unité combattante sur les 90 exigés et n'établit pas se trouver dans aucune des autres situations, ensuite énumérées, de nature à lui ouvrir droit à la délivrance de la carte de combattant ; que le requérant, qui au demeurant soulève pour la première fois devant le juge d'appel un moyen tendant à mettre en cause la légalité externe de la décision contestée, n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que cette décision serait insuffisamment motivée ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 " ; qu'aux termes de l'article R. 223 de ce code : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229 " ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code : " Sont considérés comme combattants : / (...) C- Pour les opérations effectuées après le 2 septembre 1939 : / (...) I.- Militaires / Les militaires des armées de terre, de mer et de l'air : / 1º) Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, aux unités énumérées aux listes établies par le ministre de la défense nationale et, s'il y a lieu, par le ministre chargé de la France d'outre-mer ; pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre des opérations comprises entre le 2 août 1914 et le 2 septembre 1939 se cumulent entre eux et avec ceux effectués au titre des opérations postérieures au 2 septembre 1939. D'autre part, sont accordées des bonifications afférentes soit à des opérations de combat limitativement désignées ou effectuées dans des conditions exceptionnellement dangereuses, soit à des situations personnelles, résultant du contrat d'engagement ou d'une action d'éclat homologuée par citation collective au titre d'une unité ou d'une fraction d'unité constituée. Ces bonifications ne devront pas excéder le coefficient six pour celles afférentes aux combats, ou la durée de dix jours pour celles afférentes aux situations personnelles. Leurs modalités d'application sont fixées par arrêtés des ministres intéressés ; 2º) Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient aux unités énumérées aux listes susvisées, mais sans condition de durée de séjour dans ces unités ; 3º) Qui ont reçu une blessure de guerre, quelle que soit l'unité à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ; 3º bis) Qui ont pris part pendant la campagne de 1940 à des opérations ayant permis de contenir ou de repousser l'ennemi, caractérisées autant par l'intensité des combats que par l'importance des forces engagées, sous réserve que les intéressés aient servi, à ce titre, quelle qu'en soit la durée, dans une unité combattante. Les lieux et les dates de ces opérations sont déterminés par arrêté du ministre chargé de la défense ; 4º) Qui ont été, soit détenus comme prisonniers de guerre pendant six mois en territoire occupé par l'ennemi, soit immatriculés dans un camp en territoire ennemi, sous réserve d'avoir appartenu, au moment de leur capture, sans condition de durée de séjour, à une unité combattante pendant la période où celle-ci avait cette qualité ; 5º) Qui ont été, soit détenus comme prisonniers de guerre pendant six mois en territoire occupé par l'ennemi, soit immatriculés dans un camp en territoire ennemi où ils ont été détenus pendant quatre-vingt-dix jours au moins, sous réserve d'avoir appartenu antérieurement à leur capture, ou postérieurement à leur détention, sans condition de durée de séjour, à une unité combattante, pendant la période où celle-ci avait cette qualité. Les durées de détention prévues aux alinéas 4º et 5º sont réduites, en ce qui concerne les combattants d'Indochine, par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre, du ministre d'Etat chargé de la défense nationale et du ministre chargé de la France d'outre-mer, dont les dispositions font l'objet de l'article A. 121 bis ; 6º) Qui, faits prisonniers, ont obtenu la médaille des évadés, conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi du 30 octobre 1946 ; 7º) Qui, faits prisonniers, peuvent se prévaloir des dispositions du chapitre Ier du titre II relatives aux membres de la Résistance ayant servi dans les pays d'outre-mer ou ayant résisté dans les camps de prisonniers ou en territoires étrangers occupés par l'ennemi, ou ont fait l'objet de la part de l'ennemi, pour actes qualifiés de résistance, de mesures de représailles et notamment de conditions exceptionnelles de détention ; 8º) Qui, Alsaciens et Mosellans, sans avoir servi dans l'armée française, satisfont aux conditions qui sont déterminées par arrêté interministériel dont les dispositions font l'objet des articles A. 123-2 à A. 123-5 (...) " ;
7. Considérant que M. A...soutient avoir appartenu à l'armée française de novembre 1944 à avril 1946, dont plus de trois mois dans " l'armée active " ; qu'il ressort de l'extrait de services produit par l'intéressé qu'il a servi dans l'armée française du 12 novembre 1944 au 8 avril 1946 et a été affecté pendant toute cette période en Algérie ; qu'aucune unité n'a été reconnue comme combattante en application des dispositions précitées de l'article R. 224 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et notamment du 1° du C de cet article en Algérie durant cette période ; qu'il n'établit ni n'allègue satisfaire à aucune autre des conditions posées par les dispositions précitées pour se voir reconnaitre la qualité de combattant ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 23 septembre 2013 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant ; que ses conclusions à fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1401628 du vice-président du Tribunal administratif de Paris du 25 août 2014 est annulée.
Article 2 : La requête de première instance de M. A...est rejetée.
Article 3 : Les conclusions à fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative devant la cour administrative d'appel sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié M. B...A...et au ministre de la défense.
Copie en sera adressée à l'office national des anciens combattants et victimes de guerre.
Délibéré après l'audience du 15 avril 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet président assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 10 mai 2016.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLE
Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLO
La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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