CAA de DOUAI, 3ème chambre, 26/12/2019, 18DA00292, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision26 décembre 2019
Num18DA00292
JuridictionDouai
Formation3ème chambre
PresidentM. Albertini
RapporteurM. Denis Perrin
CommissaireM. Cassara
AvocatsDETREZ-CAMBRAI

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 septembre 2015 par lequel le maire du Havre l'a placée en disponibilité d'office, du 3 novembre 2003 au 31 mai 2014, et du 19 septembre 2014 au 5 octobre 2014, de désigner le docteur Belhache pour effectuer une expertise médicale et de condamner la commune du Havre à lui verser une provision dans l'attente des résultats de l'expertise.

Par un jugement n° 1503472 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 février 2018, Mme A..., représentée par Me Hélène Detrez-Cambrai avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;



2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 septembre 2015 du maire du Havre la plaçant en disponibilité d'office ;

3°) de désigner le docteur Belhache à fins d'expertise pour fixer la date de consolidation de son état de santé et le taux d'incapacité permanente partielle résultant de son accident de service ;

4°) de condamner la commune du Havre à lui verser une provision de 20 000 euros dans l'attente de cette expertise ;

5°) de mettre à la charge de la commune du Havre la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., substituant Me D..., représentant la commune du Havre.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... était adjoint technique de la ville du Havre. Par arrêté du 6 octobre 2014, elle a été radiée des cadres par atteinte de la limite d'âge. Cette décision a été confirmée par le tribunal administratif de Rouen puis par un arrêt de la cour administrative d'appel de Douai n°16DA01158 en date du 8 février 2018. Par un arrêté du 4 septembre 2015, le maire du Havre l'a placée en disponibilité d'office du 3 novembre 2003 au 31 mai 2014 et du 19 septembre 2014 au 5 octobre 2014. Mme A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Rouen qui a rejeté ses demandes d'annulation de cet arrêté, de désignation d'un expert et de versement d'une provision de 20 000 euros.

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) /2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. ". Le deuxième alinéa de l'article 72 de la même loi, dans sa version applicable, dispose que : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 57. Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, emploi ou corps en vue de la réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, qui est tenue de placer tout fonctionnaire qu'elle emploie dans une position statutaire régulière, de mettre d'office l'agent en position de disponibilité à l'expiration des droits à congés prévus notamment au 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984.

4. Il n'est pas contesté que Mme A... avait épuisé ses droits à congé de maladie depuis le 3 novembre 2003. Le maire du Havre était donc tenu, en application des dispositions précitées, même de manière rétroactive, de la placer en position de disponibilité d'office, afin de régulariser sa situation statutaire, dans l'attente de sa mise à la retraite par atteinte de la limite d'âge. Si le tribunal administratif avait annulé par un jugement n° 0402168 du 21 décembre 2005, un précédent arrêté la plaçant en disponibilité d'office à compter du 1er août 2004, au motif de l'irrégularité de la procédure devant le comité médical, le maire du Havre devait reprendre, au terme d'une procédure régulière, une décision plaçant en position disponibilité d'office Mme A... sur cette période. En outre, le placement en disponibilité d'office de Mme A... ayant pour seul but de régulariser sa position statutaire, devait couvrir la totalité de la période pendant laquelle l'intéressée avait épuisé ses droits à congé. En conséquence, le nouvel arrêté du 4 septembre 2015 porte nécessairement sur une période différente de celle concernée par l'arrêté annulé par le jugement du 21 décembre 2005, les circonstances de fait et de droit ayant changé par rapport à la situation existante en 2004. D'ailleurs, le maire avait déjà pris au moins un autre arrêté devenu définitif, en date du 28 juillet 2014, plaçant l'intéressée en position de disponibilité d'office à compter du 1er juin 2014 jusqu'au 1er septembre 2014. Par suite, et contrairement à ce que soutient l'appelante, l'autorité de la chose jugée ne s'opposait pas à ce que le maire du Havre prenne une nouvelle décision, le 4 septembre 2015, plaçant Mme A... en disponibilité d'office du 3 novembre 2003 au 31 mai 2014 et du 19 septembre 2014 au 5 octobre 2014.

5. L'arrêté du 6 octobre 2014 par lequel le maire du Havre a radié des cadres Mme A... pour mise à la retraite par atteinte de la limite d'âge, au motif qu'il se trouvait en situation de compétence liée à cet effet, a été confirmé par jugement du tribunal administratif de Rouen puis par arrêt de la cour administrative d'appel de Douai n° 16DA01158 du 8 février 2018. Cette décision est donc devenue définitive. Par suite, le maire du Havre était également tenu, ainsi qu'il a été dit au point 3, de placer l'intéressée en position de disponibilité d'office, de la date d'épuisement de ses congés de maladie jusqu'à la date de sa mise à la retraite, afin que celle-ci soit placée dans une position statutaire régulière. Mme A... semble également remettre en cause la date de consolidation au 14 octobre 2002 de l'accident de service du 30 mai 2000 et soutenir que ses congés auraient dû être pris en charge au titre de cet accident de service. Toutefois, la date de consolidation de cet accident est devenue définitive. La décision du maire du Havre du 29 juin 2009 sur ce point et prenant en charge les arrêts de travail postérieurs au titre de la maladie ordinaire a en effet été confirmée par le tribunal administratif de Rouen puis par un arrêt n°11DA01875 du 26 mars 2013 de la cour administrative d'appel de Douai. De même, si l'appelante semble contester les propositions de reclassement qui lui ont été faites, cette contestation est sans influence sur cet arrêté de mise en disponibilité d'office, le maire n'étant en l'espèce pas tenu de faire des propositions de reclassement, s'agissant d'une décision ayant pour seul objet de régulariser une situation passée. De même, si Mme A... doit être considérée comme soutenant qu'elle aurait dû être mise à la retraite pour invalidité, il ressort des pièces du dossier, qu'elle a été déclarée apte à la reprise de ses fonctions, sous réserve du respect de certaines prescriptions, dès le 15 octobre 2002. Par suite les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur de droit qui entacheraient l'arrête attaqué doivent être écartés, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges.

6. Il résulte aussi ce qui précède que l'expertise médicale sollicitée par Mme A... serait sans utilité pour la solution du litige et revêtirait, par suite, un caractère frustratoire, la date de consolidation de l'accident de service du 30 mai 2000 ayant déjà été fixée, ainsi qu'il a été dit, de manière définitive, Les conclusions tendant à ce que soit ordonnée une expertise médicale ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

7. Enfin, compte tenu de l'ensemble de ce qui a été dit, les conclusions de Mme A... tendant au versement d'une provision, fondées sur l'illégalité de l'arrêté attaqué, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.

8 Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la requête opposée en défense, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 septembre 2015. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune du Havre qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par la commune du Havre au même titre.


DÉCIDE :



Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune du Havre tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune du Havre.




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N° 18DA00292