CAA de PARIS, 7ème chambre, 25/02/2020, 17PA03742, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 26 août 2015 de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) portant attribution d'une allocation temporaire d'invalidité sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 2 % en indemnisation des séquelles de la maladie reconnue d'origine professionnelle dont elle est atteinte, d'ordonner une expertise médicale en vue de la réévaluation du taux de 2 % accordé par la décision du 26 août 2015 attaquée, de condamner la CDC à lui verser la somme de 2 500 euros à titre provisionnel et de mettre à la charge de la CDC une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Après un jugement avant-dire droit du 16 décembre 2016 prescrivant une expertise, Mme B... a demandé, d'une part, s'agissant du taux d'incapacité permanente partielle, d'entériner les conclusions du rapport d'expertise fixant le taux d'incapacité permanente partielle (IPP) à 20 % dont 15% imputable à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), d'enjoindre au directeur de la CDC de lui attribuer une allocation temporaire d'invalidité à un taux d'IPP de 20 % à compter du 5 mars 2013, de condamner la CDC à régler les frais d'expertise d'un montant de 1 780 euros et de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'autre part, s'agissant des préjudices, à titre principal, de fixer au maximum la majoration de rente perçue, majoration devant suivre l'augmentation du taux d'IPP résultant de l'aggravation éventuelle des séquelles, d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer les préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux ou, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer les seuls préjudices extrapatrimoniaux, et de condamner, à titre provisionnel, l'AP-HP à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de dommages-intérêts. A la suite d'une demande de régularisation de sa demande de première instance, Mme B... a, devant le tribunal administratif, fixé globalement le montant de ses prétentions indemnitaires à 80 000 euros.
Par une requête distincte Mme B... a également demandé au tribunal d'annuler la décision implicite du directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle et d'enjoindre au directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle.
Par un jugement nos 1517335/2-2-1612015/2-2 du 9 octobre 2017, le Tribunal administratif de Paris, statuant sur la requête n° 1517335, a annulé la décision du 26 août 2015 de la CDC portant attribution d'une allocation temporaire d'invalidité sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 2 %, enjoint au directeur général de la CDC d'allouer une allocation temporaire d'invalidité à Mme B... calculée sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 15 %, liquidé et taxé les frais d'expertise à la somme de 1 780 euros mise à la charge de la CDC, condamné l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à verser à Mme B... la somme de 10 000 euros ainsi que la somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, condamné la CDC à verser à l'intéressée la somme de 750 euros au même titre et rejeté le surplus de la requête. Statuant par le même jugement sur la requête n° 1612015, le tribunal administratif en a rejeté les conclusions tendant au bénéfice de la protection fonctionnelle.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 décembre 2017 et 20 février 2019, Me B..., représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1517335/2-2, 1612015/2-2 du 9 octobre 2017 en tant qu'il a rejeté l'indemnisation de ses préjudices à caractère patrimonial, limité à 10 000 euros l'indemnité que l'AP-HP a été condamnée à lui verser en réparation des préjudices à caractère extra-patrimonial subis en raison de sa maladie professionnelle et rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du refus du directeur général de l'AP-HP de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle ;
2°) à titre principal :
- de fixer au maximum la majoration de rente perçue, majoration devant suivre l'augmentation du taux d'IPP résultant de l'aggravation éventuelle des séquelles ;
- de condamner l'AP-HP à une indemnité de 80 000 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux et 30 000 euros au titre de ses préjudices extrapatrimoniaux ;
- d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer les préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux et de condamner, à titre provisionnel, l'AP-HP à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de dommages et intérêts ;
3°) ou à titre subsidiaire :
- de condamner l'AP-HP à une indemnité de 30 000 euros au titre de ses préjudices extrapatrimoniaux ;
- d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer des seuls préjudices extrapatrimoniaux ;
4°) d'annuler le refus du directeur général de l'AP-HP de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et d'enjoindre à ce dernier de lui en accorder le bénéfice ;
5°) de mettre à la charge de l'AP-HP la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le retard mis par le centre hospitalier à l'affecter sur un autre poste lui évitant tout contact avec des produits allergisants entre août 2002 et février 2005 constitue une faute de l'AP-HP de nature à engager sa responsabilité et à entraîner l'indemnisation de son préjudice intégral ;
- elle a subi, en raison des fautes commises par l'AP-HP, des préjudices patrimoniaux temporaires avant consolidation et permanents, évalués à 80 000 euros, liés à une perte de chance de promotion professionnelle, à des pertes de gains professionnels en raison de changement de poste, puis de mise en disponibilité contrainte, à l'impossibilité de suivre une formation, à des dépenses de santé correspondant à l'achat de divers produits d'hygiène ainsi que de cosmétiques et à des frais divers ;
- elle a subi, également en raison des fautes commises par l'AP-HP, des préjudices extrapatrimoniaux temporaires et permanents, évalués à 30 000 euros, liés aux souffrances endurées, aux préjudices moral, esthétique, fonctionnel, d'agrément et sexuel ;
- dans l'hypothèse où la faute de l'AP-HP ne serait pas retenue, la responsabilité sans faute de cette dernière sera reconnue sur le fondement du risque compte tenu de l'activité et l'indemnisation fixée à 30 000 euros ;
- si l'AP-HP soutient qu'elle présentait un terrain atopique la prédisposant à l'affection dont elle souffre et qui ne permet pas d'exclure que la maladie ne serait pas apparue en dehors de tout contexte professionnel, l'expertise ne prouve aucunement ce terrain atopique, ni que ce serait l'aggravation de ce terrain atopique qui serait d'origine professionnelle ;
- elle établit l'existence des différents préjudices ;
- sa situation relève des dispositions relatives à la protection fonctionnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2018, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, représentée par la Selarl Minier, Maugendre et associées, conclut au rejet de la requête ainsi qu'à la réformation du jugement attaqué par la voie de l'appel incident et demande la condamnation de Mme B... au versement d'une somme de 1 440 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le tribunal administratif a statué ultra-petita dès lors que Mme B... n'avait formulé qu'une demande de condamnation à titre provisionnel limitée à 5 000 euros ;
- les conclusions indemnitaires sont irrecevables dès lors qu'elles sont nouvelles en appel et au surplus non dirigées contre une décision préalable ;
- les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., représentant Mme B..., et de Me A..., représentant l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... auxiliaire de puériculture à l'Hôpital Robert Debré depuis octobre 2000, a contracté un eczéma déclaré le 30 juin 2003 qui a été reconnu d'origine professionnelle par la commission de réforme le 5 avril 2005. A la suite de cette reconnaissance, par décision du 29 août 2005 du directeur de l'Hôpital Robert Debré prise sur avis conforme du directeur de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), elle a bénéficié d'une allocation temporaire d'invalidité sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 2 %, pour cinq ans, en indemnisation des séquelles de la maladie en cause, à compter de sa consolidation le 5 mars 2013. Mme B... a demandé la révision de ce taux. La commission de réforme ayant confirmé, en séance du 7 octobre 2014, le taux d'incapacité permanente partielle de 2 %, la CDC a attribué à Mme B..., le 26 août 2015, une allocation temporaire d'invalidité dans les conditions susmentionnées. Par un jugement du 9 octobre 2017, le Tribunal administratif de Paris, statuant sur la requête n° 1517335 après avoir décidé par un jugement du 16 décembre 2016 de procéder contradictoirement à une expertise, a annulé la décision du 26 août 2015 de la CDC portant attribution d'une allocation temporaire d'invalidité sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 2 %, enjoint au directeur général de la CDC d'allouer une allocation temporaire d'invalidité à Mme B... calculée sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 15 %, liquidé et taxé les frais d'expertise à la somme de 1 780 euros mise à la charge de la CDC, condamné l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à verser à Mme B... la somme de 10 000 euros ainsi que la somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, condamné la CDC à verser à l'intéressée la somme de 750 euros au même titre et rejeté le surplus de la requête. Le tribunal administratif a, par le même jugement du 9 octobre 2017, rejeté les conclusions de la requête n° 1612015 tendant au bénéfice de la protection fonctionnelle. Mme B... relève appel de ce jugement en ce que le Tribunal administratif de Paris a rejeté, après avoir condamné l'AP-HP au paiement d'une somme de 10 000 euros en indemnisation de ses préjudices à caractère extra-patrimonial, le surplus de ses demandes tendant, d'une part, à l'indemnisation des préjudices à caractère patrimonial et extra-patrimonial, d'autre part, à l'annulation de la décision implicite du directeur général de l'AP-HP lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. L'AP-HP soutient que le tribunal administratif a statué ultra-petita en accordant une indemnisation de 10 000 euros en réparation des préjudices à caractère extra-patrimonial subis par Mme B... alors que celle-ci n'avait formulé qu'une demande de condamnation à titre provisionnel limitée à 5 000 euros. Toutefois, il ressort du jugement attaqué qu'à la suite d'une demande de régularisation de sa demande de première instance, Mme B... a, devant le tribunal administratif, fixé globalement le montant de ses prétentions indemnitaires à 80 000 euros sans que ce montant puisse par ailleurs être regardé comme se rattachant à une demande de condamnation à titre provisionnel. Dans ces conditions, en fixant à 10 000 euros l'indemnisation des préjudices extra-patrimoniaux, les premiers juges n'ont pas statué ultra petita.
Sur les fins de non-recevoir opposées par l'AP-HP :
3. En premier lieu, il ressort de ce qui est dit au point précédent que l'AP-HP n'est pas fondée à soutenir que les conclusions indemnitaires présentées devant la Cour par Mme B... à hauteur de 80 000 euros à titre principal et 30 000 euros à titre subsidiaire sont nouvelles en appel.
4. En second lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa rédaction issue du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 applicable aux requêtes enregistrées à compter du 1er janvier 2017 : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ". Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence d'une décision de l'administration rejetant une demande formée devant elle par le requérant ou pour son compte, une requête tendant au versement d'une somme d'argent est irrecevable et peut être rejetée pour ce motif même si, dans son mémoire en défense, l'administration n'a pas soutenu que cette requête était irrecevable, mais seulement que les conclusions du requérant n'étaient pas fondées. En revanche, les termes du second alinéa de l'article R. 421-1 précité n'impliquent pas que la condition de recevabilité de la requête tenant à l'existence d'une décision de l'administration s'apprécie à la date de son introduction. Cette condition doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l'administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle. Par suite, l'intervention d'une telle décision en cours d'instance régularise la requête, sans qu'il soit nécessaire que le requérant confirme ses conclusions et alors même que l'administration aurait auparavant opposé une fin de non-recevoir fondée sur l'absence de décision.
5. Il résulte de l'instruction que Mme B... a adressé le 6 février 2017 une demande préalable dont le directeur général de l'AP-HP a régulièrement accusé réception. L'intervention en cours d'instance d'une décision implicite de rejet a régularisé la requête, sans qu'il soit nécessaire que la requérante confirme ses conclusions et alors même que l'AP-HP avait auparavant opposé une fin de non-recevoir fondée sur l'absence de décision.
Sur les conclusions indemnitaires :
6. Les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité, déterminent forfaitairement la réparation des pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par l'accident de service ou la maladie professionnelle, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait.
7. Il résulte de l'instruction que la CDC a décidé le 26 août 2015 l'attribution d'une allocation temporaire d'invalidité au taux de 2 % en indemnisation des séquelles de la maladie reconnue d'origine professionnelle dont souffre Mme B.... Par le jugement attaqué, cette décision a été annulée et le taux d'incapacité permanente partielle (IPP) porté à 15%. Il résulte de ce qui a été rappelé ci-dessus au point 6 que Mme B... est fondée à demander à l'AP-HP la réparation de ses préjudices patrimoniaux ou personnels non réparés forfaitairement par allocation temporaire d'invalidité qu'elle perçoit, même en l'absence de faute de celle-ci.
S'agissant de la réparation des préjudices patrimoniaux non couverts par le forfait de pension :
8. Mme B... présente, ainsi que l'ont révélé les premiers tests effectués le 13 septembre 2002, une affection dermatologique professionnelle provoquée par une allergie au kathon Cg, présent à l'époque notamment dans le savon doux, et au formaldéhyde.
9. D'une part, Mme B... ne justifie ni de la réalité, ni de l'évaluation de préjudices patrimoniaux d'une autre nature que ceux couverts en l'espèce par l'allocation temporaire d'invalidité. Dès lors, la requérante n'est pas fondée à demander une indemnisation de préjudices patrimoniaux sur le fondement de la responsabilité sans faute.
10. D'autre part, Mme B... soutient que l'AP-HP a commis une faute en raison du retard apporté par le centre hospitalier à un changement d'affectation afin de lui éviter tout contact avec des produits allergisants entre août 2002 et février 2005, retard qui a ainsi contribué à l'aggravation de sa maladie. Elle fait valoir qu'à compter du 9 août 2002, date du certificat rédigé par le médecin du travail, l'AP-HP doit être regardée comme ayant été pleinement informée des risques encourus dans l'exercice de ses fonctions alors qu'elle n'a obtenu un changement d'affectation qu'au mois de février 2005 en dépit de la demande de changement de service formulée par le médecin du travail dès le 9 août 2002 et renouvelée le 9 juillet 2004. Toutefois, comme l'ont relevé les premiers juges, le certificat du 9 août 2002, établi avant les premiers tests du 13 septembre 2002, ne fait état que d'une " contre-indication temporaire " à un poste de travail impliquant des soins et la maladie n'a été déclarée comme maladie professionnelle que le 30 juin 2003, comme l'a confirmé une expertise dermatologique du 7 mai 2004. En outre, la demande de changement de fonctions dont fait état la requérante n'a été présentée que le 29 décembre 2003. Cette demande mentionne comme motif des " raisons personnelles " et non médicales et a été assortie d'un avis favorable de la hiérarchie de Mme B.... Si le reclassement de l'intéressée en consultation spécialisée n'est intervenu qu'en février 2005, il ressort des propres écritures de Mme B... qu'elle a été absente une partie de l'année 2004 en raison d'un congé de maternité et en tout état de cause jusqu'en septembre 2004, date de la fin de son congé parental. Dans ces conditions, l'absence de changement de poste avant le mois de février 2005 ne révèle pas l'existence d'une faute de l'employeur de Mme B.... Il suit de là que Mme B... n'est pas fondée à demander, sur le terrain de la faute, une réparation de la part des préjudices patrimoniaux excédant la réparation forfaitaire.
S'agissant des préjudices personnels :
11. Comme l'ont considéré à juste titre les premiers juges, Mme B... n'établit pas par les pièces produites la réalité du préjudice moral invoqué tiré en particulier de ce qu'elle aurait été conduite à mettre un terme à ses fonctions et à prendre des congés en disponibilité en raison des remarques désobligeantes de sa hiérarchie ou de ses collègues ou encore de ce que l'AP-HP aurait tardé à traiter sa situation alors que la circonstance alléguée que la consolidation de sa maladie n'a été fixée qu'en 2013 est indépendante du comportement de l'administration. Si la requérante fait également état d'un préjudice d'agrément, elle n'apporte pas la preuve de l'abandon définitif d'une activité sportive ou de loisir antérieurement pratiquée. En revanche, Mme B... justifie avoir subi, du fait de sa maladie professionnelle, des troubles dans les conditions d'existence qui doivent être regardés en l'espèce comme incluant le préjudice d'affection et le déficit fonctionnel allégués, des souffrances physiques et un préjudice sexuel, en raison d'une réduction de ses capacités physiques. C'est par suite à juste titre que les premiers juges ont évalué l'indemnisation de ces préjudices à 10 000 euros. Il convient néanmoins, sans qu'il soit besoin de diligenter une nouvelle expertise, de prendre en considération le préjudice esthétique subi résultant de l'altération de l'apparence physique, notamment compte tenu de l'âge de l'intéressée à la date de l'apparition de la maladie, et de porter l'indemnisation globale des préjudices personnels de 10 000 à 15 000 euros. Par ailleurs, il résulte de ce qui est dit au point précédent qu'en l'absence de faute de son employeur Mme B... n'est pas fondée à demander sur ce terrain l'indemnisation de ses préjudices personnels.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du refus du bénéfice de la protection fonctionnelle :
12. Aux termes du IV de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction applicable à la date du refus attaqué : " La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. ".
13. Mme B... a demandé la protection fonctionnelle afin que l'AP-HP prenne en charge ses frais de procédure engagés dans le cadre de son recours contentieux formé pour obtenir une majoration du taux d'incapacité permanente partielle de 2 % qui lui a été alloué sur avis de la CDC du 25 août 2015 en indemnisation des séquelles de sa maladie. Ce faisant, Mme B... n'établit pas qu'elle aurait fait l'objet d'atteintes volontaires à l'intégrité de sa personne, de violences, d'agissements constitutifs de harcèlement, de menaces, d'injures, de diffamations ou d'outrages au sens des dispositions du IV de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le directeur général de l'AP-HP devait lui accorder la protection fonctionnelle. Il suit de là que les conclusions à fin d'annulation du refus du bénéfice de la protection fonctionnelle ne peuvent qu'être rejetées.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est seulement fondée à demander que l'indemnité de 10 000 euros que le Tribunal administratif de Paris a condamné l'AP-HP à lui verser soit portée à la somme de 15 000 euros. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens. En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme B..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à l'AP-HP la somme que celle-ci réclame au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La somme de 10 000 euros que le Tribunal administratif de Paris, par le jugement nos 1517335/2-2, 1612015/2-2 du 9 octobre 2017, a condamné l'AP-HP à verser à Mme B... au titre de ses préjudices personnels est portée à la somme de 15 000 euros.
Article 2 : Le jugement nos 1517335/2-2, 1612015/2-2 du 9 octobre 2017 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'AP-HP versera à Mme B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.
Article 5 : L'appel incident et les conclusions de l'AP-HP présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Délibéré après l'audience du 11 février 2020, à laquelle siégeaient :
M. Jardin, président de chambre,
Mme Hamon, président assesseur,
Mme D..., premier conseiller,
Lu en audience publique le 25 février 2020.
Le rapporteur,
A. D...
Le président,
C. JARDIN Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de la solidarité et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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