CAA de MARSEILLE, 8ème chambre, 15/10/2020, 19MA05291, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une requête enregistrée le 31 octobre 2017, Mme E... C... épouse F... a demandé au tribunal des pensions militaires de Marseille qui a transmis cette demande au tribunal des pensions militaires de Nîmes, d'annuler la décision du 26 janvier 2015 par laquelle la caisse nationale militaire de sécurité sociale a refusé la prise en charge de frais de transport et d'hébergement pour une cure thermale à Lons-le-Saunier du 24 juillet au 12 août 2017.
Par un jugement n° 18/00013 du 8 mars 2019, le tribunal des pensions militaires de Nîmes a reconnu un droit à prise en charge des frais d'hébergement mais non de l'intégralité de ses frais de transport et a infirmé la décision attaquée dans cette mesure, en condamnant l'Etat (ministère des armées) au versement des frais d'hébergement.
Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 13 mai 2019, sous le n° 19/00008, par la Cour régionale des pensions militaires de Nîmes, la ministre des armées relève appel du jugement du tribunal des pensions militaires de Marseille du 8 mars 2019 et demande à la Cour de réformer le jugement en ce qu'il reconnaît à Mme E... C... épouse F... un droit à prise en charge des frais d'hébergement.
Elle soutient que c'est à tort que les premiers juges ont reconnu à Mme E... C... épouse F... le droit à remboursement des frais d'hébergement dès lors que se trouve dans la ville où elle réside un établissement de cure thermale correspondant aux soins qui doivent lui être prodigués.
Par un mémoire, enregistré par le greffe de la Cour régionale des pensions militaires de Nîmes, le 26 septembre 2019, Mme E... C... épouse F..., représentée par Me D..., conclut à la confirmation du jugement du 8 mars 2019, et donc au rejet de la requête, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le tribunal a correctement interprété l'article D. 212-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, lequel renvoie à l'article D. 211-13 qui prévoit une limitation des seuls frais de transport dans le cas où le curiste ne choisit pas l'établissement le plus proche.
Par acte de transmission du dossier, enregistré le 1er novembre 2019, et en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Marseille est saisie de la présente affaire.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 31 juillet 2019, Mme E... C... épouse F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant Mme F....
Considérant ce qui suit :
1. La ministre des armées relève appel du jugement du tribunal des pensions militaires de Nîmes du 8 mars 2019 par lequel celui-ci a reconnu à Mme F..., à l'occasion d'une cure thermale à Lons-le-Saunier effectuée après accord de la caisse nationale militaire de sécurité sociale, du 24 juillet au 12 août 2017, le droit à la prise en charge de ses frais d'hébergement.
2. Aux termes de l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Les invalides pensionnés au titre du présent code ont droit aux prestations médicales, paramédicales, chirurgicales et pharmaceutiques nécessitées par les infirmités qui donnent lieu à pension, en ce qui concerne exclusivement l'ensemble des séquelles résultant de la blessure ou de la maladie pensionnée. ". Aux termes de l'article D. 212-8 du même code: " Outre la prise en charge des frais de surveillance médicale et de traitement dans les établissements thermaux, les pensionnés effectuant une cure thermale au titre de l'article L. 212-1 ont droit, dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre, au versement d'une indemnité forfaitaire d'hébergement sur justification de tels frais et au remboursement de leurs frais de transport dans les conditions fixées à l'article D. 211-13, sauf s'ils résident dans la commune où se trouve l'établissement de cure. Le montant de l'indemnité forfaitaire d'hébergement est fixé par arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre. Les pensionnés résidant dans l'immédiate proximité de la station thermale peuvent demander, soit la prise en charge de leurs frais de transport quotidien, sur la base du tarif le plus économique, s'ils se déplacent tous les jours pour se rendre sur leur lieu de cure, soit, s'ils ont choisi un hébergement dans la station pour la durée de la cure, le versement de l'indemnité forfaitaire d'hébergement, sur justification des frais, et le remboursement des frais de transport entre leur domicile et le lieu d'hébergement. " . Et aux termes de l'article D. 211-13 du même code : " Les frais de transport en matière de cure thermale sont pris en charge, quel que soit le moyen de transport utilisé, sur la base du tarif le plus économique, compte tenu des réductions dont les intéressés peuvent bénéficier à titre personnel. Lorsque selon l'avis du médecin chargé du contrôle des soins, le pensionné n'a pas choisi l'établissement thermal agréé, approprié à sa pathologie, le plus proche de son domicile ou de sa résidence provisoire, le remboursement des frais de transport est calculé par rapport au trajet qui aurait été effectué si l'établissement le plus proche avait été choisi. ".
3. Mme F... a choisi de réaliser sa cure à Lons-le-Saunier et non dans l'établissement de Camoins-les-Bains à Marseille où elle réside. Elle n'établit pas, par le seul certificat médical du 23 août 2018 qu'elle produit et qui fait état d'intolérances à l'eau soufrée, que ce choix serait motivé par des raisons médicales. Il est constant que ces deux stations thermales sont toutes les deux agréées pour les orientations thérapeutiques spécialisées en " rhumatologie ". Dans ces conditions, l'intéressée aurait pu effectuer sa cure dans un établissement situé dans la commune de son domicile. Par suite, en application des dispositions combinées des articles D. 212-8 et D.2 11-13 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et conformément à l'avis daté du 12 juin 2017 du médecin chargé du contrôle des soins, le remboursement des frais de transport ne pouvait être calculé que par rapport au trajet qui aurait été effectué si l'établissement thermal de Camoins-les-Bains avait été choisi par Mme F....
4. Par ailleurs, il résulte clairement des dispositions précitées de l'article D. 212-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que les pensionnés effectuant une cure thermale, sauf s'ils résident dans la commune où se trouve un établissement de cure dans lequel ils peuvent bénéficier de soins, ont droit au versement d'une indemnité forfaitaire d'hébergement sur justification des frais de surveillance médicale et de traitement.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme F... ne pouvait prétendre au versement de l'indemnité forfaitaire d'hébergement prévue par l'article D. 212-8 dès lors qu'elle réside à Marseille, dans la même commune où se trouve l'établissement thermal de Camoins-les-Bains et où elle aurait pu effectuer sa cure si elle n'avait fait un autre choix. Ainsi, la ministre des armées est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur les frais liés au litige :
6. Mme C... épouse F... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Etant partie perdante à l'instance, ses conclusions tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 18/00013 du 8 mars 2019 du tribunal des pensions militaires de Nîmes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 2 : Les conclusions de Mme F... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées, à Me D... et à Mme E... C..., épouse F....
Délibéré après l'audience du 30 septembre 2020, où siégeaient :
- M. A..., président,
- M. Ury, premier conseiller,
- Mme B..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 15 octobre 2020.
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