CAA de MARSEILLE, 8ème chambre, 28/05/2021, 19MA05302, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision28 mai 2021
Num19MA05302
JuridictionMarseille
Formation8ème chambre
PresidentM. BADIE
RapporteurMme Thérèse RENAULT
CommissaireM. ANGENIOL
AvocatsMORDACQ

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., veuve B..., a saisi le tribunal des pensions de Nîmes d'une demande qu'il a regardée comme tendant au bénéfice de la réversion de la retraite de combattant de son époux décédé.

Par un jugement n° 18/00007 du 14 juin 2019, le tribunal des pensions de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 juillet et 12 septembre 2019, sous le n°19/00012 par la Cour régionale des pensions de Nîmes, Mme C... doit être regardée comme demandant l'annulation du jugement du tribunal des pensions de Nîmes du 14 juin 2019.

Elle doit être regardée comme soutenant qu'elle avait droit à une pension de réversion dès lors que son époux décédé avait lui-même droit au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité et percevait la retraite du combattant.
Par acte de transmission du dossier, enregistré le 1er novembre 2019, et en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Marseille est saisie de la présente affaire.



Par des mémoires en défense, enregistrés par le greffe de la Cour le 16 octobre 2020 et le 4 janvier 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de Mme C....

Elle soutient :
- à titre principal, que la requête de Mme C... est irrecevable dès lors qu'elle ne formule pas de conclusions et de moyens à l'appui de sa demande, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 732-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, dans le délai de recours contre le jugement attaqué ;
- subsidiairement, que le tribunal des pensions de Nîmes était incompétent pour traiter sa demande,
- en tout état de cause, elle n'aurait pu bénéficier d'une pension de réversion sur le fondement de l'article L. 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dès lors que son époux ne bénéficiait pas d'une pension militaire d'invalidité.


Par un mémoire, enregistré le 24 novembre 2020 par la Cour, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal des pensions de Nîmes du 14 juin 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 13 novembre 2017 par laquelle la ministre des armées a refusé de faire droit à la demande de pension militaire d'invalidité présentée par M. B..., son époux décédé ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées de réexaminer la demande de pension militaire d'invalidité introduite par M. B... et, le cas échéant, la réversion de celle-ci à son bénéfice.

Elle soutient que :
- sa requête d'appel était suffisamment motivée ;
- c'est à tort que le tribunal des pensions de Nîmes s'est déclaré incompétent pour connaître de sa demande en première instance.


Par décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 23 octobre 2019, Mme A... C..., veuve B..., a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.


Vu les autres pièces du dossier.


Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
-la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.




Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C..., veuve B..., de nationalité algérienne, doit être regardée comme relevant appel du jugement du 14 juin 2019 par lequel le tribunal des pensions de Nîmes a rejeté sa demande d'attribution d'une pension au titre d'ayant-droit de son époux décédé.
Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le tribunal des pensions de Nîmes a rejeté la requête de Mme C... au motif qu'il n'était pas compétent pour connaître de la demande de réversion de la retraite de combattant de l'époux défunt de la requérante, M. B.... Il résulte, toutefois, des écritures de Mme C... devant le tribunal des pensions, auxquelles était jointe la décision du 13 novembre 2017 par laquelle la ministre des armées avait rejeté la demande de pension militaire d'invalidité formée par M. B..., qu'elle a entendu en outre, en qualité d'ayant-droit de son défunt époux, contester la décision de rejet de la demande de pension militaire d'invalidité engagée par ce dernier de son vivant et en demander la réversion à son bénéfice.
3. Le tribunal des pensions de Nîmes s'est déclaré à raison incompétent pour connaître de la demande de Mme C... tendant au bénéfice de la réversion de la retraite de combattant de son époux décédé, et n'était pas tenu de transmettre cette demande au tribunal administratif, une telle demande étant manifestement irrecevable dès lors que Mme C... n'avait pas fait une demande préalable de réversion, et alors, en outre, que la retraite du combattant ne peut faire l'objet d'une réversion. Toutefois, la demande de Mme C... tendant à l'annulation de la décision de rejet de la demande de pension militaire d'invalidité engagée par ce dernier de son vivant et en demandant la réversion à son bénéfice, relevait bien des compétences du tribunal des pensions. L'intéressée est par suite fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal des pensions de Nîmes s'est déclaré incompétent pour statuer sur son recours et à demander, pour ce motif et en cette part, l'annulation de son jugement du 14 juin 2019.
4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la seconde demande présentée par Mme C... devant le tribunal des pensions de Nîmes.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre des armées aux requêtes d'appel et de première instance de Mme C... :
5. Si, dans les mémoires produits par Mme C... devant les premiers juges comme dans son mémoire produit en appel dans le délai de recours, auxquels elle a joint des pièces relatives à une demande d'attribution d'une pension militaire d'invalidité formée avant son décès par son époux, Mme C... doit être regardée comme contestant la décision refusant d'accorder à son époux le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité, elle n'y formule aucun moyen à l'appui de ces conclusions, s'en remettant à la " volonté judicieuse " de la Cour. Le mémoire produit en appel, postérieurement au délai de recours, par Me D..., ne développe au demeurant pas davantage de moyens au soutien de ces conclusions. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir soulevée par la ministre, qui fait valoir que la requête de Mme C... devant les premiers juges est dépourvue de l'exposé de moyens, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, doit être accueillie.
6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de Mme C... tendant à l'annulation de la décision du 13 novembre 2017 par laquelle la ministre des armées avait rejeté la demande de pension militaire d'invalidité formée par M. B... ne peut qu'être rejetée. Doivent être rejetées, par suite, ses conclusions à fin d'injonction en vue de lui accorder le bénéfice de réversion de cette pension.

D É C I D E :


Article 1er : Le jugement du tribunal des pensions de Nîmes du 14 juin 2019 est annulé en tant qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande de Mme C... tendant à l'annulation de la décision de rejet de la demande de pension militaire d'invalidité engagée par M. B....
Article 2 : La demande présentée par Mme C... devant le tribunal des pensions de Nîmes et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., veuve B..., à Me D... et à la ministre des armées.


Délibéré après l'audience du 11 mai 2021, où siégeaient :

- M. Badie, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 28 mai 2021.
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N° 19MA05302