CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 19/10/2021, 20MA01175, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision19 octobre 2021
Num20MA01175
JuridictionMarseille
Formation4ème chambre
PresidentMme HELMLINGER
RapporteurM. Michaël REVERT
CommissaireM. ANGENIOL
AvocatsJAFFEUX-LHERITIER

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la lettre du 12 novembre 2019 par laquelle le chef de la division de l'organisation des concours et des dispositifs promotionnels l'a informé qu'à l'issue de la session du 17 septembre 2019 du concours interne pour le recrutement des gardiens de la paix de la police nationale au titre des emplois réservés, la commission nationale de sélection n'avait pas retenu sa candidature, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Par une ordonnance n° 1910726 du 22 janvier 2020, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mars 2020, M. B..., représenté par la SCP Jaffeux Lhéritier, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du tribunal administratif de Marseille du 22 janvier 2020 ;

2°) d'annuler la lettre du 12 novembre 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Il soutient que :
- il n'a été destinataire que de la lettre du 12 novembre 2019 qui lui fait grief ;
- ladite décision est dépourvue de toute motivation, en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- une rupture d'égalité résulte de ce défaut de motivation ;
- la décision litigieuse méconnaît les dispositions des articles L. 241-1 et L. 241-2 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dont il remplit toutes les conditions, compte tenu de sa bonne notation par sa hiérarchie ;
- la décision en litige, dont les visas ne montrent aucun examen à ce titre, a été prise sans respecter la priorité légale qui lui était réservée.


Par ordonnance du 8 juillet 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 23 juillet 2021, à 12 heures.


Un mémoire présenté par le ministre de l'intérieur a été enregistré le 20 août 2021, postérieurement à la clôture d'instruction.


M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 septembre 2020.


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2008-492 du 26 mai 2008 ;
- le décret n° 2009-629 du 5 juin 2009 ;
- l'arrêté du 18 mars 2010 fixant les modalités du recrutement au titre des emplois réservés des gardiens de la paix de la police nationale ;
- l'arrêté du 24 avril 2019 autorisant au titre de l'année 2019 l'ouverture de concours pour le recrutement de gardien de la paix de la police nationale ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Revert,
- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.







Considérant ce qui suit :

1. M. B... s'est inscrit, pour l'année 2019, à la procédure de recrutement au titre des emplois réservés des gardiens de la paix de la police nationale. Après avoir passé les tests psychotechniques, l'épreuve d'exercice physique et un entretien devant une commission locale de sélection, il a été destinataire de la lettre datée du 12 novembre 2019 par laquelle le chef de la division de l'organisation des concours et des dispositifs promotionnels l'a informé que la commission nationale de sélection n'avait pas retenu sa candidature. M. B... relève appel de l'ordonnance du 22 janvier 2020 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette lettre.

2. Pour rejeter comme irrecevable la demande de M. B..., sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président de la
4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a, d'une part, estimé que l'intéressé devait être regardé comme sollicitant l'annulation de la délibération du jury de concours interne de gardien de la paix au titre des emplois réservés, seulement en tant qu'elle avait écarté sa candidature et, d'autre part, considéré que ce faisant, il réclamait l'annulation partielle d'un acte indivisible, lequel portait sur l'ensemble des candidatures.

3. Si l'article 19 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat prévoit que les fonctionnaires sont recrutés par voie de concours, son article 22 dispose que : " Par dérogation à l'article 19 ci-dessus, les fonctionnaires peuvent être recrutés sans concours dans les cas suivants : / a) En application de la législation sur les
emplois réservés (...) ". Aux termes de l'article L. 241-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Le recrutement par la voie des emplois dits réservés des personnes mentionnées au présent chapitre constitue une obligation nationale à laquelle concourent l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics qui leur sont rattachés et les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. ". En vertu des articles L. 242-2 et R. 242-3 du même code, les postes mis au recrutement par la voie des emplois réservés dans les corps de la fonction publique de l'Etat sont déterminés par l'application d'un pourcentage, au plus égal à 10 %, au nombre de postes déclarés vacants pour chaque recrutement ouvert par les autorités administratives compétentes. L'arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, de la ministre des armées et du ministre de l'action et des comptes publics, en date du
19 décembre 2017, pris pour l'application de l'alinéa 2 de l'article R. 242-3, fixe à 5 % le pourcentage d'emplois réservés appliqué au recrutement dans le corps des gardiens de la paix de la police nationale ouverts au titre des années 2018 et 2019. Par ailleurs, l'article R. 242-10 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre précise, en son alinéa 2, que : " Les modalités de qualification des candidats pour l'accès à chaque corps et cadre d'emploi sont définies après concertation avec les autorités administratives chargées du recrutement, dans le respect des dispositions statutaires. Ces modalités sont établies, en tant que de besoin, par spécialités, branches d'activité professionnelle ou emplois types. ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 18 mars 2010 fixant les modalités du recrutement au titre des emplois réservés des gardiens de la paix de la police nationale : " Afin de vérifier leur aptitude à l'emploi postulé, les candidats inscrits sur la liste d'aptitude passent les épreuves de présélection obligatoires suivantes : / - des tests psychotechniques destinés à évaluer leur profil psychologique (durée : 2 h 30). Les résultats de ces tests sont utilisés lors de l'épreuve d'entretien ; / - des épreuves d'exercices physiques dont la nature et le barème sont identiques à ceux fixés pour le concours de gardien de la paix ; / - un entretien permettant d'apprécier les qualités du candidat à exercer l'emploi postulé et de prendre connaissance de son parcours professionnel. Le candidat fournira à l'appui son passeport professionnel établi au titre de la reconnaissance de ses qualifications et acquis de l'expérience professionnelle (durée :
25 minutes). / Les examinateurs disposent, pour aide à la décision, des résultats des tests psychotechniques passés par le candidat et interprétés par le psychologue. / En outre, les candidats devront fournir une lettre de motivation et un curriculum vitae. (...) ". Enfin l'article 5 du même arrêté indique que : " La commission nationale de sélection centralise et harmonise les travaux de présélection établis par les commissions locales d'entretien et dresse la liste nationale des candidats retenus ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'établissement, par la commission nationale de sélection, d'une liste nationale des candidatures retenues aux emplois réservés de gardiens de la paix de la police nationale, destinée à leur recrutement sur un nombre limité de postes résultant d'un pourcentage du nombre de postes vacants au sein du ministère de l'intérieur, procède, à partir des travaux de présélection menés par les commissions locales d'entretien, d'une appréciation comparative portée sur les qualités et mérites respectifs des candidats et présente ainsi un caractère indivisible. Un candidat non retenu ne peut donc, de manière recevable, en demander l'annulation en tant uniquement que sa candidature n'a pas été retenue.

4. En se bornant à affirmer, pour toute critique des motifs de l'ordonnance qu'il attaque, que la lettre du 12 novembre 2019 l'informant que sa candidature à un emploi réservé de gardien de la paix n'était pas retenue, est le seul acte qui lui a été notifié et que celui-ci lui fait grief, M. B... ne conteste ni l'analyse faite de sa demande par le premier juge, ni le caractère indivisible de la délibération de la commission nationale de sélection, dont l'existence est révélée par ladite lettre. En tout état de cause, à supposer que la lettre du 12 novembre 2019 soit le seul acte à lui avoir été notifié, bien qu'il ait sollicité par courriel du 13 novembre 2019 la communication des délibérations du jury de concours le concernant, la demande de M. B..., eu égard à ses conclusions et à son argumentation, devait être regardée comme ayant pour objet de solliciter l'annulation, non pas de ladite lettre, non décisoire et insusceptible de recours, mais de la délibération de la commission nationale de sélection en tant que sa candidature n'avait pas été retenue. C'est ainsi à bon droit que le premier juge a rejeté comme irrecevable sa demande d'annulation partielle d'un acte indivisible.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. B... doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.





DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2021, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2021.
N° 20MA011754