CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 21/12/2021, 19MA05738, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision21 décembre 2021
Num19MA05738
JuridictionMarseille
Formation4ème chambre
PresidentM. BADIE
RapporteurM. Michaël REVERT
CommissaireM. URY
AvocatsSEP ARMANDET - LE TARGAT

Vu la procédure suivante :


Procédure contentieuse antérieure :


M. A... a demandé au tribunal régional des pensions militaires de Montpellier d'annuler la décision du 24 mai 2018 par laquelle la ministre des armées a refusé de réviser sa pension militaire d'invalidité.

Par un jugement n° 18/00033 du 30 octobre 2019, le tribunal régional des pensions militaires de Montpellier a rejeté sa demande.


Procédure devant la Cour :


Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 décembre 2019 et le 2 septembre 2020, M. B... A..., représenté par la SPA Armandet et le Targat, demande à la Cour :


1°) d'annuler ce jugement du tribunal régional des pensions militaires de Montpellier du 30 octobre 2019 ;


2°) d'ordonner avant dire droit une nouvelle expertise, suivant la mission ordonnée par les premiers juges le 12 juin 2019, mais en précisant que l'expert prendra en considération les événements médicaux survenus jusqu'à la date de la décision en litige.


Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont refusé de tenir compte des éléments et faits postérieurs à la date de sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité, alors qu'à la date de la décision de refus de la ministre, et du jugement avant dire droit du tribunal, il avait été opéré chirurgicalement pour la pose d'une prothèse totale du genou gauche et que cette prothèse avait nécessairement une incidence sur l'évaluation de son taux d'invalidité ;
- pour déterminer son taux d'invalidité, la cour ne peut se borner à prendre en compte le rapport de l'expert rendu avant dire droit, lequel n'est pas suffisamment motivé, retient un taux de 8 % de manière arbitraire et fait néanmoins mention de l'évolution de sa situation par la pose d'une prothèse de genou.

Par des mémoires en défense enregistrés les 29 septembre 2020 et 21 octobre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête, en soutenant que les moyens d'appel ne sont pas fondés et que la date de la demande de révision à retenir n'est pas le 24 octobre 2017, mais le 26 octobre 2016.


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n°2015-1781 du 28 décembre 2015 ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Revert,
- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :

1.M. A..., caporal-chef de l'armée de terre, a demandé le 26 octobre 2016 la révision de la pension d'invalidité dont il est titulaire suivant un taux d'invalidité de 20%, pour aggravation de l'infirmité de type " Séquelles douloureuses de rupture de ligament croisé antérieur du genou gauche. Arthrose évoluée ". Par décision du 24 mai 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. A... relève appel du jugement du 30 octobre 2019 par lequel le tribunal régional des pensions militaires de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre cette décision de rejet.


Sur le droit applicable


2. En vertu de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, la pension militaire d'invalidité est attribuée sur demande de l'intéressé et son entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. L'article L. 29 du même code dispose pour sa part que : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. (...). / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée ".


3. Il résulte de l'instruction, et plus particulièrement d'une copie de la demande de révision produite au dossier d'instance, ainsi que des écritures de la ministre des armées devant la Cour, que cette demande de révision a été reçue par les services du ministère, non pas le 24 octobre 2017, comme le mentionnent par erreur la décision en litige et le jugement attaqué, mais le 26 octobre 2016. Il s'ensuit que, les droits à pension, et notamment le taux des infirmités à raison desquelles la pension ou sa révision est demandée, s'appréciant en fonction des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date de la demande, seules étaient applicables pour déterminer les droits de M. A... les dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans leur rédaction antérieure au 1er janvier 2017, date d'entrée en vigueur de leur refonte par l'ordonnance du 28 décembre 2015, en vertu de l'article 8 de cette ordonnance.


Sur les droits à pension de M. A... :


4. D'une part, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que M. A..., dont la demande de révision de pension a été déposée le 26 octobre 2016, ne peut pas valablement prétendre que, pour déterminer le taux d'invalidité au titre de l'aggravation de son infirmité, la ministre des armées puis les premiers juges se seraient à tort abstenus de tenir compte de l'évolution de son état de santé ayant conduit à son opération chirurgicale du genou gauche, avec pose d'une prothèse totale, le 29 novembre 2017, soit postérieurement à sa demande. Pour les mêmes raisons, M. A... ne peut pas utilement se prévaloir, devant le juge des pensions saisi de sa demande de révision, du rapport d'expertise médicale réalisé sur pièces le 16 décembre 2019, à partir de son état de santé constaté et évalué à cette même date, ni du rapport d'expertise médicale du 10 mars 2020, établi après examen de l'intéressé, en fonction de son état à cette dernière date, pour les besoins de l'instruction de sa nouvelle demande de révision de pension déposée le 4 mai 2018.







5. D'autre part, il résulte de l'instruction que, même en se plaçant à tort à la date du 24 octobre 2017, l'expert mandaté par les services du ministère des armées a néanmoins considéré, dans son rapport du 5 janvier 2018, qu'il existait une majoration de la limitation de la flexion à 120°, caractérisant une aggravation des séquelles douloureuses autour du ligament croisé antérieur du genou gauche et que, suivant le guide-barème, un supplément d'invalidité d'un taux de 5 % pouvait être retenu à ce titre. En tenant compte de la même date d'appréciation, au prix de la même erreur de date, l'expert désigné par jugement avant dire droit rendu par les premiers juges le 11 juin 2019, a considéré que l'état de santé de M. A... s'était aggravé, par la réduction d'amplitude de flexion du genou gauche à 110°, qu'un taux d'invalidité de 8 % supplémentaire pouvait être accordé, eu égard à l'instabilité résiduelle, et qu'une dégradation de l'implant articulaire serait dans l'avenir fort probable. Pour contester le taux d'invalidité supplémentaire retenu par les premiers juges, égal à 8 %, sur le fondement du rapport d'expertise, M. A... se borne à critiquer la motivation de ce rapport, qu'il qualifie d'arbitraire, sans livrer d'éléments médicaux de nature à en remettre en cause sérieusement les conclusions suffisamment détaillées, à la date du dépôt de sa demande de révision. Ainsi, le taux supplémentaire d'invalidité étant inférieur aux 10 % exigés par l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, l'aggravation de l'infirmité dont se prévaut M. A... ne peut justifier une révision de sa pension.
6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de décider d'une expertise, que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal régional des pensions militaires de Montpellier a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée.

D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 7 décembre 2021, où siégeaient :

- M. Badie, président,
- M. Revert, président assesseur,
- Mme Renault, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2021.
N° 19MA057385