CAA de PARIS, 8ème chambre, 31/01/2022, 19PA03702, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision31 janvier 2022
Num19PA03702
JuridictionParis
Formation8ème chambre
PresidentM. LE GOFF
RapporteurMme Aude COLLET
CommissaireMme BERNARD
AvocatsBOUNDAOUI

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris d'annuler la décision du 22 novembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de révision de pension militaire d'invalidité du fait de l'aggravation de son infirmité " névrose traumatique sévère post-émotionnelle, troubles du sommeil, cauchemars, phobies, troubles mnésiques, hyperémotivité, ruminations mentale obsédantes ".

Par un jugement n° 17/00015 du 21 juin 2019, le Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris a dit n'y avoir pas lieu d'écarter des débats le document du docteur E... déposé au greffe du tribunal le 18 avril 2019, que ce document ne constitue pas un complément d'expertise, a annulé la décision du ministre de la défense du 22 novembre 2016 et fixé le taux de la pension militaire d'invalidité de M. C... à 80 %.


Procédure devant la Cour :

La Cour régionale des pensions de Paris a transmis à la Cour, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif pris pour l'application de l'article 51 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, la requête présentée par la ministre des armées enregistrée à son greffe le 9 septembre 2019.
Par cette requête enregistrée au greffe de la Cour sous le n° 19PA03702 le 1er novembre 2019 et deux mémoires enregistrés les 19 octobre 2020 et 19 août 2021, la ministre des armées demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 17/00015 du 21 juin 2019 du Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris ;

2°) de maintenir le taux de la pension militaire d'invalidité de M. C... à 60 % pour son infirmité " névrose traumatique sévère post-émotionnelle, troubles du sommeil, cauchemars, phobies, troubles mnésiques, hyperémotivité, ruminations mentale obsédantes " ;

3°) de confirmer la décision du ministre de la défense du 22 novembre 2016 refusant la révision de la pension militaire d'invalidité de M. C....

Elle soutient que :

- le jugement du Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris est irrégulier dès lors que contrairement aux règles générales de procédure que doivent respecter les juridictions des pensions, au nombre desquelles figure celle selon laquelle leurs décisions doivent mentionner les textes dont elles font application, il ne fait mention de ces textes ni dans ses visas ni dans ses motifs ;
- le tribunal a, en méconnaissance des articles R. 731-15 et R. 731-7 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, accepté une expertise complémentaire modifiant de manière substantielle la précédente réalisée onze mois auparavant, sans que le ministère des armées n'ait été informé d'une demande d'expertise complémentaire de la part du requérant ni d'une ordonnance de complément d'expertise initiée par le juge ;
- le tribunal a dénaturé le second rapport d'expertise en considérant que celui-ci apporte une précision alors qu'il répare une erreur d'appréciation médicale fondamentale et en considérant à tort qu'il n'engendre pas de modification sur le droit potentiel du requérant ;
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'en se bornant à relever que le ministère des armées ne produisait aucun document médical probant de nature à contredire la conclusion de l'expert proposant un taux de 80 % alors que l'administration avait mis en avant dans ses conclusions du 24 juillet 2018, l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 14 avril 2008, il a insuffisamment motivé sa décision en méconnaissance des dispositions de l'article L. 711-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le jugement attaqué a méconnu les règles régissant le décompte d'une pension d'invalidité et notamment celles de l'article L. 125-8 (ancien article L.14) du même code en retenant à tort et en accordant un droit à pension militaire d'invalidité au taux de 80 % ;
- en fixant le taux de la pension d'invalidité au taux global de 80 % sans nommer les infirmités et leur taux respectif et en considérant que les conditions de l'article L. 154-1 (ancien article L. 29) du même code étaient satisfaites, le tribunal a commis une erreur d'appréciation doublée d'une erreur de droit.

Par des mémoires en défense enregistrés les 1er septembre 2020, 9 avril 2021 et 6 janvier 2022, M. C..., représenté par Me Boundaoui, conclut, dans le dernier état de ses écritures :

1°) au rejet de la requête de la ministre des armées ;

2°) à la confirmation du jugement n° 17/00015 du 21 juin 2019 du Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris ;

3°) à titre subsidiaire, à ce que soit ordonnée une expertise médicale ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la ministre des armées ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Collet,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique,
- et les observations de M. C....

Une note en délibéré a été présentée le 12 janvier 2022 par M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., victime civile de la guerre d'Algérie, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 70 % depuis le 12 octobre 2010 accordée par décision du ministre de la défense du 7 mars 2012 pour les infirmités suivantes : 1 - " névrose traumatique sévère post-émotionnelle, troubles du sommeil, cauchemars, phobies, troubles mnésiques, hyperémotivité, ruminations mentale obsédantes " au taux de 60 % ; 2 - " séquelles de plaie par balle de la racine de la cuisse gauche, douleur erratique, extraction chirurgicale du projectile un peu au-dessus et en dedans de la rotule " au taux de 15 %. Par courrier enregistré le 9 avril 2014, il a souhaité connaître les démarches à effectuer pour obtenir la révision de sa pension, informations qui lui ont été communiquées par la sous-direction des pensions le 28 avril 2014, à la suite desquelles M. C... a transmis des certificats médicaux en sollicitant la révision de sa pension pour aggravation de son infirmité " névrose traumatique sévère post-émotionnelle (...) ". Après expertise médicale du docteur B... et avis des organismes consultatifs, le ministre de la défense a rejeté sa demande par décision du 22 novembre 2016, au motif qu'aucune aggravation n'a été constatée. M. C... a formé un recours contre cette décision devant le Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris, lequel, par jugement avant-dire droit du 23 mars 2018, a ordonné une expertise confiée au professeur E.... Le 12 juin 2018, celui-ci a rendu son rapport aux termes duquel il a retenu une infirmité nouvelle " syndrome subjectif des traumatisés crâniens " avec un taux de 20 % et l'existence d'une névrose traumatique sévère avec un taux estimé à 60 %, soit un taux global de la pathologie de 80 %. Le professeur E... a déposé au tribunal le 18 avril 2019 un complément à son rapport dans lequel il indique que " c'est bien le syndrome subjectif post-traumatique et non le syndrome subjectif des traumatisés crâniens qui est en aggravation et que la majoration du taux de 20 % retenu conduit à 80 % d'invalidité en raison de l'aggravation du symptôme lié à cette pathologie ". Par jugement n° 17/00015 du 21 juin 2019, le Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris a dit qu'il n'y avait pas lieu d'écarter des débats le document du docteur E... déposé au greffe du tribunal le 18 avril 2019, que ce document ne constitue pas un complément d'expertise, a annulé la décision du ministre de la défense du 22 novembre 2016 et fixé à 80 % le taux de la pension militaire d'invalidité de M. C.... La ministre des armées relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Au nombre des règles générales de procédure que les juridictions des pensions sont tenues de respecter figure celle selon laquelle leurs décisions doivent mentionner les textes dont elles font application.

3. Or, dans le jugement n° 17/00015 du 21 juin 2019, le Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris a annulé la décision du ministre de la défense du 22 novembre 2016 et a fixé le taux de la pension militaire d'invalidité de M. C... à 80 %, sans faire mention, ni dans ses visas ni dans ses motifs, des textes sur lesquels il se fonde. Il suit de là que, comme le soutient la ministre des armées, le jugement est entaché d'irrégularité.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête relatifs à la régularité du jugement, que le jugement du 21 juin 2019 du Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris est annulé. Il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C....

Sur la demande de révision du taux de la pension militaire d'invalidité de M. C... :

5. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en vigueur à la date de la demande de révision de la pension de M. C... : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...) 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % (...) / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples ". Aux termes de l'article L. 9 du même code alors en vigueur : " (...) Le taux de la pension définitive ou temporaire est fixé, dans chaque grade, par référence au degré d'invalidité apprécié de 5 en 5 jusqu'à 100 %. / Quand l'invalidité est intermédiaire entre deux échelons, l'intéressé bénéficie du taux afférent à l'échelon supérieur (...) ". Aux termes de l'article L. 14 du même code alors en vigueur : " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 29 du même code, alors en vigueur : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ".

6. Il résulte de ces dispositions, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que, pour l'exercice de son office, le juge du contentieux des pensions militaires d'invalidité statue en plein contentieux, que lorsque le titulaire d'une pension militaire d'invalidité pour infirmité sollicite sa révision du fait de l'aggravation de ses infirmités, l'évolution du degré d'invalidité s'apprécie à la date du dépôt de la demande de révision de la pension, laquelle lie le contentieux ultérieur.

7. Dans sa demande de révision de pension du 9 avril 2014, M. C... se prévaut de l'aggravation de son infirmité " névrose traumatique sévère post-émotionnelle, troubles du sommeil, cauchemars, phobies, troubles mnésiques, hyperémotivité, ruminations mentale obsédantes " qui est, selon lui, de nature à lui ouvrir droit à la révision de sa pension militaire d'invalidité.

8. Il résulte de l'instruction que s'agissant de son état antérieur à sa demande du 9 avril 2014 ayant conduit à la décision du ministre de la défense du 7 mars 2012 reconnaissant une aggravation de son infirmité " névrose traumatique sévère post-émotionnelle (...) " portant le taux d'invalidité de 50 à 60 %, M. C... a produit les certificats médicaux établis par le docteur F..., médecin généraliste, les 8 juin 2011 et 13 août 2011 mentionnant une aggravation de l'état de santé de son patient caractérisée par une poussée de psoriasis de la paume des mains et du cuir chevelu " connu pour être symptomatique lors de perturbations psychologiques " et une aggravation avec désormais " une absence de nuit sereine ". Le docteur B..., qui a réalisé l'expertise médicale du 6 octobre 2011 préalable à la décision précitée du ministre de la défense du 7 mars 2012, a indiqué retrouver le tableau clinique antérieurement décrit et constaté une aggravation du sentiment de culpabilité et des conséquences sur le couple, ce qui l'a conduit à proposer un taux d'invalidité de 60 %.

9. Suite à sa demande de révision du 9 avril 2014, M. C... a produit deux nouveaux certificats médicaux établis par le docteur F... le 12 septembre 2016, qui souligne une aggravation des céphalées dans leur fréquence et l'existence d'un syndrome anxio-dépressif, et par le docteur D..., neurologue, le 6 septembre 2016, qui indique " bien suivre M. C... pour céphalées dites de tension chronique à l'origine d'un handicap important qui a nécessité l'instauration d'un traitement antidépresseur par Laroxyl ". Dans son rapport d'expertise administrative établi le 14 septembre 2016, après avoir fait référence à la procédure antérieure et aux deux nouveaux certificats médicaux précités, le professeur Bazot indique avoir retrouvé " les symptômes de la névrose traumatique objet de sa pension d'invalidité ", à savoir " les cauchemars, dont la fréquence a augmenté, le syndrome d'évitement, avec le refus de regarder à la télévision des séries violentes, avec la phobie des objets tranchants " et a considéré qu'en matière d'aggravation, la demande du sujet relève du symbolique, à savoir " faire reconnaître le préjudice subi par la population civile lors de la guerre d'Algérie " et qu'il lui est " surtout insupportable d'avoir vu reconnaître la date du 19 mars [1962] comme celle de la fin des hostilités ", reconnaissance à la suite de laquelle " il a vu augmenter la fréquence de ses cauchemars et de ses maux de tête ". Le professeur Bazot mentionne ensuite que M. C... " fait également état de céphalées survenant trois à quatre fois par mois au milieu de la nuit, l'accès invalidant durant deux jours " et " souligne l'importance du handicap subi car bien qu'ayant fait valoir ses droits à la retraite, il continue à travailler, le montant acquis en tant que travailleur indépendant étant insuffisant " et qu'au " plan thérapeutique, il s'est toujours limité aux prises médicamenteuses prescrites sans jamais avoir le désir de rechercher un soutien psychothérapique ". Il relève que le jour de l'examen les plaintes concernant " les symptômes d'une névrose traumatique diagnostiquée dès 2004 sont exprimées de façon secondaire par rapport à l'expression d'un sentiment douloureux de préjudice " et considère que " les céphalées dites de tension (docteur D...) peuvent en fait procéder d'une conjoncture étiopathogénique complexe : - Séquelles du traumatisme frontal survenu lors de l'attentat, et dont l'imputabilité a été rejetée faute de preuve (...) ; - Manifestation somatique d'une angoisse refoulée (comme peut l'être le psoriasis (...) ". Le professeur Bazot conclut à l'absence d'aggravation de l'infirmité dont souffre M. C... après avoir relevé que " la demande d'aggravation actuelle relève de la recherche incessante et obstinée d'une reconnaissance officielle du préjudice subi, l'obtention d'une pension d'invalidité n'ayant pas, dans ce cas particulier, joué ce rôle symbolique ". Dans son avis du 12 octobre 2016, le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité de la sous-direction des pensions précise que " le médecin conseil expert, en accord avec le médecin-expert, constate que les troubles de fonctionnement sont toujours présents, de quasi-même intensité par rapport à l'expertise du 6 octobre 2011 ", que " la demande d'aggravation relève de la recherche (...) d'une reconnaissance officielle du préjudice subi ... " et maintient le taux à 60 % s'agissant de l'infirmité " névrose traumatique sévère post-émotionnelle (...) ".

10. Postérieurement à la décision du ministre de la défense du 22 novembre 2016 refusant la reconnaissance d'une aggravation de son infirmité, M. C... a produit auprès du professeur E..., désigné comme expert par jugement du 23 mars 2018 du Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris, un nouveau certificat médical établi le 16 avril 2018 par le docteur D..., neurologue, qui précise que l'intéressé souffre " depuis trois mois de céphalées chroniques quotidiennes avec abus médicamenteux (Zomig) malgré un traitement de fond par Laroxyl. Devant ce handicap ancien lié aux céphalées post-traumatiques et le risque de complication liée à la surconsommation médicamenteuse, je propose une modification du traitement de fond avec relais par Anafranil et sevrage complet des antalgiques ". Le professeur E... a considéré dans son rapport rendu le 12 juin 2018 que " l'évolution médicale de l'affection dont souffre M. C... révèle des symptômes qui s'aggravent avec augmentation des migraines malgré un traitement par Zomig et Ketoprofène " et " une aggravation de l'infirmité malgré le traitement par Laroxyl prescrit par le docteur D... " avant de conclure en retenant le syndrome subjectif des traumatisés crâniens avec un taux évalué à 20 % selon le barème et la névrose traumatique sévère avec un taux estimé à 60 %, soit un taux total de 80 % d'invalidité " en raison de l'augmentation des symptômes liés à l'évolution de cette pathologie ". Il a toutefois modifié ensuite ses conclusions en adressant le 18 avril 2019 au tribunal un courrier intitulé " document complémentaire du rapport d'expertise " indiquant que " c'est bien le syndrome subjectif post-traumatique et non le syndrome subjectif des traumatisés crâniens qui est en aggravation et que la majoration du taux de 20 % retenu conduit à 80 % d'invalidité en raison de l'aggravation du symptôme lié à cette pathologie ". Cette précision apportée spontanément à ses conclusions par le professeur E..., qui ne constitue pas un rapport déposé à la suite d'une demande de complément d'expertise et qui a été communiquée aux deux parties, peut être prise en compte pour apprécier l'existence d'une aggravation de l'infirmité de M. C... et le taux qui en découle.

11. Il résulte des éléments médicaux précités que produit M. C..., et dont, ainsi qu'il a été dit au point 6 ci-dessus, seuls ceux établissant l'état de santé de l'intéressé à la date de sa demande de révision de pension peuvent utilement être pris en compte, que s'il est établi qu'il souffrait, à la date de sa demande de révision de pension, soit le 9 avril 2014, de céphalées dites de tension chronique avec une aggravation dans leur fréquence, il ne résulte toutefois pas de l'instruction et de l'ensemble des documents médicaux précités que le lien entre ces céphalées dites de tension puisse être établi de manière certaine avec son infirmité " névrose traumatique sévère post-émotionnelle, troubles du sommeil, cauchemars, phobies, troubles mnésiques, hyperémotivité, ruminations mentales obsédantes ". En effet, d'une part, le professeur Bazot, dans l'expertise précitée, mentionne que ces céphalées peuvent procéder d'une conjoncture étiopathogénique complexe, à savoir les séquelles du traumatisme frontal dont M. C... a été victime et la manifestation somatique d'une angoisse refoulée et, d'autre part, le professeur E... a, dans le rapport qu'il a déposé, rattaché l'augmentation des migraines au syndrome subjectif des traumatisés crâniens pour lequel il a retenu un taux de 20 %, même si, ensuite, il a indiqué dans son courrier rectificatif que le syndrome subjectif post-traumatique est en aggravation. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que l'aggravation de l'infirmité " névrose traumatique sévère post-émotionnelle, troubles du sommeil, cauchemars, phobies, troubles mnésiques, hyperémotivité, ruminations mentales obsédantes " dont est atteint M. C... est de nature à lui ouvrir droit à la révision de sa pension militaire d'invalidité.

12. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, qu'il y a lieu de rejeter la demande de première instance et les conclusions d'appel de M. C..., y compris, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.












DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 17/00015 du 21 juin 2019 du Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à M. A... C....
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2022.

La rapporteure,



A. COLLET Le président,




R. LE GOFF
La greffière,




E. VERGNOL
La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA03702