CAA de VERSAILLES, 1ère chambre, 11/04/2023, 21VE01638, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision11 avril 2023
Num21VE01638
JuridictionVersailles
Formation1ère chambre
PresidentM. BEAUJARD
RapporteurMme Odile DORION
CommissaireMme BOBKO
AvocatsHERVET

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet de son recours adressé à la commission de recours des militaires le 12 juillet 2018, d'autre part, d'annuler la décision n° 8020 du 13 décembre 2018 de la ministre des armées rejetant son recours contre la décision du 16 mars 2018 de refus d'agrément en vue de son détachement sur un emploi de la fonction publique au titre de l'article L. 4139-2 du code de la défense.

Par un jugement nos 1900275 et 1900483 du 15 avril 2021, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2021, Mme B..., représentée par Me Hervet, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué ;

2°) d'annuler la décision du 13 décembre 2028 de la ministre des armées ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- la ministre a entaché sa décision d'une erreur de droit, d'une erreur manifeste d'appréciation et d'un détournement de procédure ; elle a pris à son encontre une sanction déguisée.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 octobre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 14 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 16 janvier 2023 à 12 heures en application de l'article R.613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de la défense ;
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique.


Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., militaire de l'armée de l'air sous contrat, affectée en dernier lieu à la base aérienne 705 de Tours au grade de caporale-cheffe, a demandé le 16 mars 2018 son agrément en vue de son détachement sur un emploi de la fonction publique au titre de l'article L. 4139-2 du code de la défense. La ministre des armées a, par une décision du 27 juin 2018, rejeté sa demande d'agrément du 1er janvier au 31 décembre 2019 et, par la décision contestée du 13 décembre 2018, rejeté le recours formé par Mme B... devant la commission de recours des militaires contre cette décision. Mme B... relève du jugement du 15 avril 2021 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de cette dernière décision.

Sur la régularité du jugement :

2. Mme B... soutient qu'en relevant que la décision contestée était justifiée par le non-renouvellement de son contrat et sa future radiation des cadres, alors que la ministre avait seulement invoqué son pouvoir discrétionnaire, les premiers juges ont procédé d'office à une substitution de motifs qui n'était demandée par aucune des parties et doit être regardée comme faisant valoir qu'ils ont, ainsi, entaché d'irrégularité leur jugement. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la décision contestée indique notamment la circonstance que l'administration a décidé de ne pas renouveler le contrat d'engagement de Mme B... et que la date de sa radiation des contrôles de l'armée de l'air a été fixée au 26 janvier 2019, et conclut qu'en refusant d'agréer sa candidature pour un recrutement au titre de l'article R. 139-2 du code de la défense, l'administration n'a pas commis d'illégalité dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. Ainsi, le motif tiré de la situation de l'intéressée, notamment sa radiation des contrôles, figurait dans la décision contestée et ne peut être regardé comme ayant été substitué d'office par le tribunal.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, aux termes du I de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. / (...) ". Aux termes de l'article R. 4125-10 du même code : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent (...). La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale. (...) "

4. La décision par laquelle le ministre de la défense refuse de délivrer l'agrément nécessaire à l'intégration d'un militaire sur un emploi civil n'a pas à être motivée dès lors qu'elle ne refuse pas un avantage qui constitue un droit. Toutefois, la décision par laquelle le ministre chargé de la défense rejette le recours administratif préalable formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle doit être motivée en vertu des dispositions rappelées au point précédent. En l'espèce, la décision du 13 décembre 2018 de rejet du recours préalable formé par Mme B... devant la commission de recours des militaires rappelle les textes applicables et les éléments pertinents de la carrière de l'intéressée et rejette sa demande, ainsi qu'il a été dit au point 2, au motif que le contrat d'engagement de Mme B... n'étant pas renouvelé et la date de sa radiation des contrôles étant fixée, l'administration n'a pas commis d'illégalité dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. Elle est ainsi suffisamment motivée. Il ressort de ces motifs qu'il a été procédé à un examen particulier de la situation de Mme B....

5. En second lieu, aux termes de L. 4139-2 du code de la défense : " I.- Le militaire, remplissant les conditions de grade et d'ancienneté peut, sur demande agréée, après un stage probatoire, être détaché, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, pour occuper des emplois vacants et correspondant à ses qualifications au sein des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, de la fonction publique hospitalière et des établissements publics à caractère administratif, nonobstant les règles de recrutement pour ces emplois. / Les contingents annuels de ces emplois sont fixés par voie réglementaire pour chaque administration de l'Etat et pour chaque catégorie de collectivité territoriale ou établissement public administratif, compte tenu des possibilités d'accueil. (...) " Aux termes de l'article D. 4139-12 du même code : " A la date de son détachement, le militaire doit se trouver à plus de trois ans : / 1° Pour les officiers sous contrat et les militaires engagés, de la date de fin de durée de service ; (...) ". L'article 12 de l'instruction n° 230428/DEF/SGA/DRH-MD/FM/1 du 28 juin 2007 relative à certaines positions statutaires des militaires prévoit que le militaire doit, au moment du détachement, être en position d'activité. En vertu de l'article L. 4138-11 du code de la défense, le congé pour convenances personnelles est une position de non activité.

6. Mme B..., en congé pour convenances personnelles depuis le 19 juin 2015 et à quelques semaines de sa radiation des contrôles de l'armée de l'air au 26 janvier 2019, ne remplissait pas les conditions de lien avec le service et de position statutaire d'activité pour bénéficier d'un détachement, ainsi que le fait valoir en défense le ministre. Le refus d'agrément en vue d'un détachement opposé à la requérante est dès lors fondé, alors même que la manière de servir de Mme B... a toujours donné satisfaction et qu'elle n'a pas fait l'objet de sanction. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que la décision contestée constitue une sanction déguisée. Il s'ensuit que les moyens d'erreur de droit, d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir ou de procédure, doivent être écartés.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Beaujard, président de chambre,
Mme Dorion, présidente-assesseure,
M. Tar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2023.

La rapporteure,
O. A... Le président,




P. BEAUJARD
La greffière,




S. LOUISERE
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour exécution conforme,
La greffière,
N° 21VE01638
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